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JURITEXT000048104620 | JURI | texte/juri/judi/JURI/TEXT/00/00/48/10/46/JURITEXT000048104620.xml | ARRET | Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 20 septembre 2023, 22-13.485 22-13.486 22-13.487 22-13.488 22-13.489 22-13.490 22-13.491 22-13.492 22-13.493 22-13.497 22-13.498 22-13.499 22-13.502 22-13.503 22-13.504 22-13.505 22-13.506 22-13.507 22-13.508 22- | 2023-09-20 00:00:00 | Cour de cassation | 52300901 | Cassation partielle | 22-13485 | oui | CHAMBRE_SOCIALE | 2022-01-20 00:00:00 | Cour d'appel de Versailles | M. Sommer | SARL Cabinet Rousseau et Tapie, SARL Thouvenin, Coudray et Grévy | ECLI:FR:CCASS:2023:SO00901 | LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant : SOC. ZB1 COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 20 septembre 2023 Cassation partielle M. SOMMER, président Arrêt n° 901 FS-B Pourvois n° N 22-13.485 P 22-13.486 Q 22-13.487 R 22-13.488 S 22-13.489 T 22-13.490 U 22-13.491 V 22-13.492 W 22-13.493 A 22-13.497 B 22-13.498 C 22-13.499 F 22-13.502 H 22-13.503 G 22-13.504 J 22-13.505 K 22-13.506 M 22-13.507 N 22-13.508 P 22-13.509 Q 22-13.510 R 22-13.511 S 22-13.512 JONCTION R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 20 SEPTEMBRE 2023 La société TW, venant aux droits de la société TA, anciennement dénommée société Aptalis Pharma, dont le siège est [Adresse 24], a formé les pourvois n° N 22-13.485, P 22-13.486, Q 22-13.487, R 22-13.488, S 22-13.489, T 22-13.490, U 22-13.491, V 22-13.492, W 22-13.493, A 22-13.497, B 22-13.498, C 22-13.499, F 22-13.502, H 22-13.503, G 22-13.504, J 22-13.505, K 22-13.506, M 22-13.507, N 22-13.508, P 22-13.509, Q 22-13.510, R 22-13.511 et S 22-13.512 contre vingt-trois arrêts rendus le 20 janvier 2022 par la cour d'appel de Versailles (6e chambre) dans les litiges l'opposant respectivement à : 1°/ Mme [A] [ZT], épouse [U], domiciliée [Adresse 17], 2°/ Mme [C] [JB], épouse [I], domiciliée [Adresse 1], 3°/ Mme [R] [W], domiciliée [Adresse 21], 4°/ M. [K] [T], domicilié [Adresse 8], 5°/ Mme [SE] [P], domiciliée [Adresse 23], 6°/ Mme [BZ] [G], domiciliée [Adresse 13], 7°/ M. [LG] [J], domicilié [Adresse 12], 8°/ M. [NT] [F], domicilié [Adresse 18], 9°/ Mme [LN] [N], domiciliée [Adresse 16], 10°/ M. [BT] [S], domicilié [Adresse 7], 11°/ Mme [A] [L], domiciliée [Adresse 11], 12°/ M. [X] [D], domicilié [Adresse 9], 13°/ Mme [Y] [B], épouse [FX], domiciliée [Adresse 3], 14°/ M. [E] [PY], domicilié [Adresse 22], 15°/ Mme [LN] [WH], épouse [TD], domiciliée [Adresse 19], 16°/ M. [YM] [MM], domicilié [Adresse 14], 17°/ M. [H] [DS], domicilié [Adresse 5], 18°/ Mme [M] [ER], domiciliée [Adresse 15], 19°/ Mme [V] [O], veuve [KH], domiciliée [Adresse 20], 20°/ M. [XN] [VI], domicilié [Adresse 10], 21°/ Mme [RX] [NL], domiciliée [Adresse 2], 22°/ [IC] [ZL], domicilié [Adresse 6], 23°/ Mme [Z] [EY], domiciliée [Adresse 4], La demanderesse invoque, à l'appui de ses pourvois, un moyen de cassation commun. Les dossiers ont été communiqués au procureur général. Sur le rapport de Mme Prieur, conseiller référendaire, les observations de la Sarl Cabinet Rousseau et Tapie, avocat de la société TW, de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de Mme [ZT] et des vingt-deux autres salariés, ainsi que l'avis de Mme Grivel, avocat général, après débats en l'audience publique du 27 juin 2023 où étaient présents M. Sommer, président, Mme Prieur, conseiller rapporteur référendaire, Mme Mariette, conseiller doyen, MM. Pietton, Barincou, Seguy, Mmes Grandemange, Douxami, conseillers, MM. Le Corre, Carillon, Mme Maitral, conseillers référendaires, Mme Grivel, avocat général et Mme Pontonnier, greffier de chambre, la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Jonction 1. En raison de leur connexité, les pourvois n° 22-13.485 à 22-13.493, 22-13.497 à 22-13.499 et 22-13.502 à 22-13.512 sont joints. Faits et procédure 2. Selon les arrêts attaqués (Versailles, 20 janvier 2022), Mme [ZT] et vingt-deux autres salariés ont été engagés par la société Aptalis Pharma (la société), exerçant une activité de commercialisation de produits pharmaceutiques, devenue la société TA, aux droits de laquelle vient la société TW. 3. La société, alors filiale du groupe Allergan et dont l'associé unique était la société Axcan Invest, a été rachetée par le groupe Teva, le 2 août 2016, avec cession d'une partie majoritaire de ses produits à celui-ci et rétrocession préalable de produits au groupe Allergan, dans le cadre d'un contrat de distribution transitoire prévoyant la poursuite par la société de ses activités sur les produits exclus du périmètre de l'acquisition jusqu'au 31 décembre 2016. Ce projet de cession entraînant un déséquilibre immédiat de fonctionnement de la société, la cessation d'activité avec transfert au groupe Teva des cinq produits génériques demeurant dans son portefeuille était prévue au cours du premier trimestre 2017. 4. Un accord collectif majoritaire portant sur le projet de licenciement collectif incluant un plan de sauvegarde de l'emploi (PSE) a été signé, le 14 novembre 2016, entre la société et les organisations syndicales représentatives. Cet accord prévoyait le licenciement résultant de la suppression des cinquante-et-un postes existants. 5. Cet accord a été validé, le 30 novembre 2016, par la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE). 6. Les salariés ont été licenciés pour motif économique, par lettres notifiées du 16 janvier 2017 au 12 mai 2017, en raison de la cessation complète et définitive de l'activité de la société. 7. Contestant leur licenciement, les salariés ont saisi la juridiction prud'homale. Examen du moyen Sur le moyen, pris en ses deux premières branches Enoncé du moyen 8. La société fait grief aux arrêts de dire les licenciements sans cause réelle et sérieuse et de la condamner à payer à chaque salarié une certaine somme à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'ordonner le remboursement par la société à Pôle emploi des indemnités de chômage versées dans la limite de trois mois et de la condamner à leur payer une somme sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, alors : « 1°/ que la cessation d'activité complète et définitive de l'entreprise constitue en soi un motif économique de licenciement, qu'elle soit déjà effective au moment du licenciement ou qu'elle soit irrémédiablement engagée et intervienne dans un délai proche du licenciement ; qu'en l'espèce, l'arrêt constate que la cession d'une partie du portefeuille de produits de la société Aptalis Pharma au groupe Allergan a été opérée en juin 2016 et qu'un contrat de distribution transitoire le 2 août 2016 a organisé les modalités d'exploitation des produits ayant vocation à rejoindre le groupe Allergan pour une période du 2 août au 31 décembre 2016 ; que le "projet de cessation des activités de la société Aptalis Pharma remis aux membres du comité d'entreprise le 1er septembre 2016" indique que "pendant toute la durée du contrat, les salariés de la société Aptalis Pharma poursuivent leurs activités opérationnelles, les équipes commerciales continuant à promouvoir/commercialiser l'ensemble du portefeuille de produits et les équipes support continuant à fournir des services habituels au soutien de ses activités" ; que s'agissant des activités de la société Aptalis Pharma portant sur les produits non cédés, selon document d'information remis au comité d'entreprise le 1er septembre 2016, "la cessation de facto des activités de la société liées aux produits transférés au groupe Allergan entraîne un certain nombre de conséquences opérationnelles et organisationnelles qui aboutissent à la nécessité pour la société Aptalis Pharma de cesser l'exploitation des produits (non cédés) au cours du premier trimestre 2017" ; que les activités de la société Aptalis Pharma portant sur les produits non cédés "n'ont vu cesser leur exploitation au sein de cette société que dans le courant du premier trimestre 2017, l'activité pharmaceutique de la société cessant le 31 mars 2017" ; qu'en décidant que le licenciement du 16 janvier 2017 était sans cause réelle et sérieuse, sans tirer les conséquences légales de ses propres constatations dont il ressortait que si la cessation complète et définitive d'activité de la société Aptalis Pharma n'était pas encore effective au moment du licenciement, le processus devant conduire à cette cessation d'activité était toutefois irrémédiablement engagé avant celui-ci et que la cessation complète et définitive d'activité était intervenue moins de trois mois plus tard, de sorte que le licenciement reposait bien sur cette cessation d'activité complète et définitive, la cour d'appel a violé l'article L. 1233-3 du code du travail ; 2°/ que la cessation d'activité complète et définitive de l'entreprise constituant en soi un motif économique de licenciement, la seule circonstance que d'autres entreprises du groupe aient poursuivi une activité de même nature ne fait pas, par elle-même, obstacle à ce que la cessation d'activité de l'employeur soit regardée comme totale et définitive, la cessation d'activité complète et définitive de l'entreprise s'appréciant au seul niveau de l'entreprise et non au sein du groupe auquel elle appartient ; qu'en retenant que la société Aptalis Pharma avait cédé deux produits à la société Teva Santé, filiale du groupe Teva qui devait en poursuivre une exploitation dépassant la simple gestion d'une fin de cycle de vie pour au moins deux d'entre eux (Colobreathe et Flutter) et que la cession au sein du groupe de ses produits Delursam, Transulose, Transitol, Colobreathe et Flutter s'était accompagnée d'une "continuation active de leur exploitation" pour au moins deux d'entre eux avec transfert de plusieurs salariés, pour en déduire l'existence d'un "maintien pour le moins partiel de son activité au sein du groupe en contravention avec les termes de l'article L. 1233-3 du code du travail", cependant que la société Aptalis Pharma ayant cessé toute activité en mars 2017, il importait peu que certains de ses produits aient continué à être exploités par une autre société du groupe auquel elle appartenait, la cour d'appel a violé l'article L. 1233-3 du code du travail. » Réponse de la Cour Vu l'article L. 1233-3, 4°, du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 : 9. Il résulte de ce texte que la cessation d'activité complète et définitive de l'entreprise constitue en soi un motif économique de licenciement. 10. Pour juger les licenciements dépourvus de cause réelle et sérieuse, les arrêts relèvent, d'abord, que la cession de 100 % des titres de la société Axcan Invest au profit du groupe Teva a été opérée le 2 août 2016 pour 56,8 millions d'euros et que la cession d'une partie du portefeuille de produits de la société Aptalis Pharma au groupe Allergan (produits princeps) a été opérée en juin 2016 tandis que le contrat de distribution transitoire conclu entre la société Aptalis Pharma et la société APIL (Allergan Pharmaceuticals Ireland Limited) le 2 août 2016 a organisé les modalités d'exploitation des produits ayant vocation à rejoindre le groupe Allergan durant une période s'étendant entre le 2 août 2016 et le 31 décembre 2016. Ils ajoutent que, s'agissant des activités de la société Aptalis Pharma portant sur les produits non cédés, soit les produits Delursam, Transulose, Transitol, Colobreathe et Flutter, il ressort du document d'information remis aux membres du comité d'entreprise le 1er septembre 2016 que « la cessation de facto des activités de la société liées aux produits transférés au groupe Allergan entraîne un certain nombre de conséquences opérationnelles et organisationnelles qui aboutissent à la nécessité pour la société Aptalis Pharma de cesser l'exploitation des produits Delursam, Transulose, Transitol, Colobreathe et Flutter au cours du premier trimestre 2017. » 11. Ils retiennent, ensuite, qu'il découle de ces éléments que les activités de la société Aptalis Pharma portant sur les produits demeurés non cédés n'ont vu cesser leur exploitation au sein de cette société que dans le courant du premier trimestre 2017, l'activité pharmaceutique de la société cessant le 31 mars 2017 dans les termes du procès verbal des décisions de l'associé unique du 17 mai 2017 ce, alors même que le licenciement des salariés a été notifié le 16 janvier 2017. 12. Ils ajoutent, encore, que ces produits ont été cédés à la société Teva santé, société filiale du groupe Teva laquelle devait, dans les termes susvisés, en poursuivre une exploitation dépassant la simple gestion d'une fin de cycle de vie pour au moins deux d'entre eux (Colobreathe et Flutter). 13. Ils concluent, enfin, que sachant que la société Aptalis Pharma faisait partie intégrante du groupe Teva depuis le 2 août 2016 et que la cession au sein du groupe de ses produits Delursam, Transulose, Transitol, Colobreathe et Flutter s'est accompagnée d'une continuation active de leur exploitation pour au moins deux d'entre eux avec un transfert de plusieurs salariés, il doit être retenu le maintien pour le moins partiel de son activité au sein du groupe en contravention avec les termes de l'article L. 1233-3 du code du travail. 14. En statuant ainsi, alors, d'une part, que la seule circonstance qu'une autre entreprise du groupe ait poursuivi une activité de même nature ne faisait pas par elle-même obstacle à ce que la cessation d'activité de la société soit regardée comme totale et définitive et, d'autre part, qu'il résultait de ses constatations que la cessation d'activité de l'entreprise était irrémédiablement engagée lors du licenciement, le maintien d'une activité résiduelle jusqu'au 31 mars 2017, nécessaire à l'achèvement de l'exploitation de certains produits avant leur cession à la société Teva santé, ne caractérisant pas une poursuite d'activité, la cour d'appel a violé le texte susvisé. Et sur le moyen, pris en ses troisième à cinquième branches Enoncé du moyen 15. La société fait le même grief aux arrêts, alors : « 3°/ que la cessation totale et définitive d'activité constituant un motif économique autonome de licenciement, il n'est pas nécessaire de rechercher la cause de cette cessation d'activité ni de la justifier par l'existence de mutations technologiques, de difficultés économiques ou de menaces pesant sur la compétitivité de l'entreprise ; que la légèreté blâmable à l'origine de la cessation d'activité de la société ne saurait donc être déduite de l'absence de difficultés économiques ou menaces pesant sur sa compétitivité ; qu'en l'espèce, en retenant que l'acquisition de la société, la rétrocession de différents actifs au groupe Allergan, le transfert partiel de ses activités au profit d'une filiale "puis sa fermeture", visaient à améliorer la rentabilité du groupe Teva au détriment de la situation économique et de la stabilité de l'emploi de l'entreprise "sans justification de difficultés économiques de cette dernière ni d'une menace sur sa compétitivité au sein du groupe", cependant que la cessation d'activité complète et définitive et la fermeture de la société Aptalis Pharma constituaient une cause autonome de licenciement, la cour d'appel a violé l'article L. 1233-3 du code du travail ; 4°/ que la cessation complète de l'activité de l'employeur constitue une cause de licenciement, quand elle n'est pas due à une faute ou à une légèreté blâmable de ce dernier ; que ne commet aucune faute ou légèreté blâmable la société contrainte économiquement de cesser ses activités ; qu'en ne tirant pas les conséquences légales de ses propres constatations, selon lesquelles les cessions d'activités en 2015 et 2016 devaient conduire à "une baisse du chiffre d'affaires de 66 % en 2017 par rapport à 2015 et logiquement à une structure de coûts déséquilibrés impliquant des pertes d'exploitation évaluées à 2 M euros en 2017 pour un chiffre d'affaires de 16,1 M euros ce qui ne permet[tait] pas de pérenniser son organisation sous sa forme actuelle" et que le démantèlement du portefeuille de produits de la société Aptalis Pharma créait un déséquilibre immédiat de fonctionnement de celle-ci, qui "n'est plus en mesure de s'appuyer sur un portefeuille de produits interdépendants permettant des interactions et des synergies et par conséquent, l'emploi d'un personnel mixte et multi produits", ce dont il résultait que la société Aptalis Pharma n'avait d'autre choix que de cesser son activité et qu'aucune faute ou légèreté blâmable de l'employeur n'était à l'origine de cette cessation, la cour d'appel a violé l'article L. 1233-3 du code du travail ; 5°/ que la faute ou légèreté blâmable de l'employeur doit résulter d'un comportement qui lui soit personnellement imputable ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que l'acquisition de la société Aptalis Pharma, la rétrocession de ses actifs au groupe Allergan, le transfert partiel de ses activités dans une filiale puis sa fermeture visaient à améliorer la rentabilité du groupe Teva au détriment de la situation économique et de la stabilité de l'emploi de l'entreprise sans justifier de difficultés économiques de cette dernière ou d'une menace sur sa compétitivité au sein du groupe ; qu'il ressort des procès-verbaux des réunions de la délégation unique du personnel et de la direction d'Aptalis Pharma que ses dirigeants se sont limités, le 13 octobre 2016, à observer que la cessation de l'activité ne relevait pas de leur choix sans répondre aux arguments du comité visant que la société a signé les contrats de cession de ses produits et de son usine, le procès-verbal des décisions du président du 24 juin 2016 permettant de relever que la société Axcan France, associée unique de la société Aptalis Pharma, a bénéficié du produit de la cession de la vente des médicaments au groupe Allergan (soit 41,4 M euros) au détriment de l'entreprise ; que la société Aptalis Pharma, notamment par le biais de son associé unique, a participé à la stratégie du groupe visant son démantèlement au détriment de ses intérêts ; qu'en statuant par des motifs impropres à caractériser une faute imputable personnellement à la société Aptalis Pharma, qui n'était responsable ni des décisions de son associé ni des choix stratégiques arrêtés au niveau du groupe mondial auquel elle appartenait, sur lesquels elle n'avait aucune prise, la faute de la société Aptalis Pharma étant d'autant plus exclue qu'elle s'était attachée à obtenir du nouvel actionnaire, le groupe Teva, les conditions d'un PSE amélioré et particulièrement avantageux pour ses salariés, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1233-3 du code du travail. » Réponse de la Cour Vu l'article L. 1233-3, 4°, du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 : 16. La cessation d'activité complète et définitive de l'entreprise constitue en soi un motif économique de licenciement, sans qu'il soit nécessaire de rechercher la cause de cette cessation d'activité quand elle n'est pas due à une faute de l'employeur. 17. Pour juger les licenciements dépourvus de cause réelle et sérieuse, les arrêts relèvent également, d'une part, que la société Aptalis Pharma présente depuis 2015 des résultats fortement bénéficiaires et une marge opérationnelle de 3,8 M euros sur les huit premiers mois de l'année 2016 et, d'autre part, que le démantèlement du portefeuille de ses produits crée un déséquilibre immédiat de fonctionnement puisqu'elle n'est plus en mesure de s'appuyer sur un portefeuille de produits interdépendants permettant des intéractions et des synergies et, par conséquent, l'emploi d'un personnel mixte et multi-produits. 18. Ils constatent ensuite que l'acquisition de la société Aptalis Pharma apportera 6 Mds d'euros de ventes supplémentaires à la société Teva et une hausse mécanique de 30 % de son chiffre d'affaires entre 2015 et 2017, sa marge opérationnelle devant bondir de près de 50 % pour atteindre 9 Mds de dollars en 2018. 19. Ils retiennent que par l'acquisition de la société, la rétrocession de différents de ses actifs au groupe Allergan, le transfert partiel de ses activités au profit d'une de ses filiales puis sa fermeture, il a été uniquement recherché à améliorer la propre rentabilité du groupe Teva au détriment de la situation économique et de la stabilité de l'emploi de l'entreprise sans justification ni de difficultés économiques de cette dernière ni d'une menace sur sa compétitivité au sein du groupe. 20. Ils ajoutent qu'il ressort des procès-verbaux des réunions entre les membres de la délégation unique du personnel et la direction de la société Aptalis Pharma, que les dirigeants de cette dernière se sont limités, le 13 octobre 2016, à observer que la cessation de l'activité ne relevait pas de leur choix sans répondre aux arguments du comité visant que la société a néanmoins signé les contrats de cession de ses produits et de son usine, le procès-verbal des décisions du président en date du 24 juin 2016 permettant aussi de relever que la société Axcan France, associée unique de la société Aptalis Pharma, a été rendue en outre bénéficiaire du produit de la cession de la vente des médicaments au groupe Allergan (soit 41,4 M euros) au détriment même de l'entreprise. 21. Ils en déduisent que la société Aptalis Pharma, notamment par le biais de son associé unique, a participé à la stratégie du groupe visant son démantèlement au détriment de ses intérêts, ce qui traduit une légèreté blâmable et conduit également à retenir le défaut de cause réelle et sérieuse de la rupture. 22. En statuant ainsi, par des motifs impropres à caractériser une faute de la société à l'origine de la cessation d'activité, la cour d'appel a violé le texte susvisé. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'ils mettent hors de cause la société Téva santé, les arrêts rendus le 20 janvier 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; Remet, sauf sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ces arrêts et les renvoie devant la cour d'appel de Versailles autrement composée ; Condamne Mmes [ZT], [JB], [W], [P], [G], [L], [B], [ER], [EY], [N], [NL], [WH], [O] et MM. [T], [F], [PY], [MM], [DS], [VI], [J], [ZL], [S] et [D] aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt septembre deux mille vingt-trois. | CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Licenciement économique - Définition - Suppression d'emploi - Domaine d'application - Cessation d'activité de l'entreprise - Cessation d'activité totale et définitive - Modalités - Détermination | CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Licenciement économique - Cause - Cause réelle et sérieuse - Motif économique - Appréciation - Cessation d'activité de l'entreprise - Cessation irrémédiablement engagée - Caractérisation - Maintien d'une activité résiduelle - Possibilité - Portée | Il résulte de l'article L. 1233-3, 4°, du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, que la cessation d'activité complète et définitive de l'entreprise constitue en soi un motif économique de licenciement. Doit en conséquence être censuré l'arrêt qui, pour dire les licenciements dépourvus de motif économique, retient que la cessation d'activité n'était pas effective au moment du licenciement et qu'elle n'était pas complète au sein du groupe, alors, d'une part, que la seule circonstance qu'une autre entreprise du groupe ait poursuivi une activité de même nature ne faisait pas par elle-même obstacle à ce que la cessation d'activité de la société soit regardée comme totale et définitive et, d'autre part, qu'il résultait de ses constatations que la cessation d'activité de l'entreprise était irrémédiablement engagée lors du licenciement, le maintien d'une activité résiduelle jusqu'au 31 mars 2017, nécessaire à l'achèvement de l'exploitation de certains produits avant leur cession à cette autre entreprise du groupe, ne caractérisant pas une poursuite d'activité |
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JURITEXT000048104622 | JURI | texte/juri/judi/JURI/TEXT/00/00/48/10/46/JURITEXT000048104622.xml | ARRET | Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 20 septembre 2023, 22-13.494 22-13.495 22-13.496 22-13.500 22-13.501, Publié au bulletin | 2023-09-20 00:00:00 | Cour de cassation | 52300902 | Cassation partielle | 22-13494 | oui | CHAMBRE_SOCIALE | 2022-01-20 00:00:00 | Cour d'appel de Versailles | M. Sommer | SARL Cabinet Rousseau et Tapie, SARL Thouvenin, Coudray et Grévy | ECLI:FR:CCASS:2023:SO00902 | LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant : SOC. ZB1 COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 20 septembre 2023 Cassation partielle M. SOMMER, président Arrêt n° 902 FS-B Pourvois n° X 22-13.494 Y 22-13.495 Z 22-13.496 D 22-13.500 E 22-13.501 JONCTION R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 20 SEPTEMBRE 2023 La société TW, venant aux droits de la société TA, anciennement dénommée société Aptalis Pharma, dont le siège est [Adresse 6], a formé les pourvois n° X 22-13.494, Y 22-13.495, Z 22-13.496, D 22-13.500, et E 22-13.501 contre cinq arrêts rendus le 20 janvier 2022 par la cour d'appel de Versailles (6e chambre) dans les litiges l'opposant respectivement à : 1°/ M. [S] [M], domicilié [Adresse 1], 2°/ Mme [E] [T], épouse [F], domiciliée [Adresse 4], 3°/ Mme [D] [B], épouse [N], domiciliée [Adresse 2], 4°/ M. [S] [P], domicilié [Adresse 5], 5°/ M. [O] [R], domicilié [Adresse 3] La demanderesse invoque, à l'appui de ses pourvois, un moyen de cassation commun. Les dossiers ont été communiqués au procureur général. Sur le rapport de Mme Prieur, conseiller référendaire, les observations de la Sarl Cabinet Rousseau et Tapie, avocat de la société TW, de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de M. [M] et des quatre autres salariés, ainsi que l'avis de Mme Grivel, avocat général, après débats en l'audience publique du 27 juin 2023 où étaient présents M. Sommer, président, Mme Prieur, conseiller rapporteur référendaire, Mme Mariette, conseiller doyen, MM. Pietton, Barincou, Seguy, Mmes Grandemange, Douxami, conseillers, MM. Le Corre, Carillon, Mme Maitral, conseillers référendaires, Mme Grivel, avocat général et Mme Pontonnier, greffier de chambre, la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Jonction 1. En raison de leur connexité, les pourvois n° 22-13.494, 22-13.495, 22-13.496, 22-13.500 et 22-13.501 sont joints. Faits et procédure 2. Selon les arrêts attaqués (Versailles, 20 janvier 2022) et les productions, M. [M] et quatre autres salariés protégés ont été engagés par la société Aptalis Pharma (la société), exerçant une activité de commercialisation de produits pharmaceutiques, devenue la société TA, aux droits de laquelle vient la société TW. 3. La société, alors filiale du groupe Allergan et dont l'associé unique était la société Axcan Invest, a été rachetée par le groupe Teva, le 2 août 2016, avec cession d'une partie majoritaire de ses produits à celui-ci et rétrocession préalable de produits au groupe Allergan, dans le cadre d'un contrat de distribution transitoire prévoyant la poursuite par la société de ses activités sur les produits exclus du périmètre de l'acquisition jusqu'au 31 décembre 2016. Ce projet de cession entraînant un déséquilibre immédiat de fonctionnement de la société, la cessation d'activité avec transfert au groupe Teva des cinq produits génériques demeurant dans son portefeuille était prévue au cours du premier trimestre 2017. 4. Un accord collectif majoritaire portant sur le projet de licenciement collectif incluant un plan de sauvegarde de l'emploi (PSE) a été signé, le 14 novembre 2016, entre la société et les organisations syndicales représentatives. Cet accord prévoyait le licenciement résultant de la suppression des cinquante-et-un postes existants. 5. Cet accord a été validé, le 30 novembre 2016, par la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE). 6. Les salariés ont été licenciés pour motif économique en raison de la cessation complète et définitive de l'activité de la société par lettres notifiées les 6, 10, 11 et 13 avril 2017, après autorisation de l'inspection du travail par décisions des 30 mars, 6 et 11 avril 2017. Ces autorisations ont été contestées devant un tribunal administratif, lequel a rejeté les recours par jugements définitifs du 14 janvier 2020. 7. Contestant leur licenciement, les salariés ont saisi la juridiction prud'homale. Sur le moyen relevé d'office 8. Après avis donné aux parties conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application de l'article 620, alinéa 2, du même code. Vu le principe de séparation des pouvoirs, la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III : 9. Le juge judiciaire ne peut, sans violer le principe de séparation des pouvoirs, en l'état d'une autorisation administrative de licenciement devenue définitive, apprécier le caractère réel et sérieux du motif de licenciement au regard de la cause économique. Il peut seulement se prononcer, lorsqu'il en est saisi, sur la responsabilité de l'employeur et la demande du salarié en réparation des préjudices que lui aurait causés une faute de l'employeur à l'origine de la cessation d'activité, y compris le préjudice résultant de la perte de son emploi. 10. Les arrêts, après avoir retenu que la cessation d'activité de la société Aptalis Pharma n'était pas effective et définitive lors des licenciements et que celle-ci, notamment par le biais de son associé unique, avait participé à la stratégie du groupe visant son démantèlement au détriment de ses intérêts ce qui traduisait une légèreté blâmable, en déduisent que les licenciements ne sont pas fondés et allouent à chacun des salariés une somme à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. 11. En statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que par décisions des 30 mars, 6 et 11 avril 2017, l'inspection du travail avait autorisé les licenciements pour motif économique des salariés, la cour d'appel a violé le principe et les textes susvisés. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le moyen du pourvoi, la Cour : CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'ils mettent hors de cause la société Téva santé, les arrêts rendus le 20 janvier 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; Remet, sauf sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ces arrêts et les renvoie devant la cour d'appel de Versailles autrement composée ; Condamne MM. [M], [P] et [R] et Mmes [T] et [B] aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt septembre deux mille vingt-trois. | CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Licenciement économique - Cause - Cause réelle et sérieuse - Motif économique - Appréciation - Exclusion - Cas - Salarié protégé - Licenciement pour motif économique - Autorisation administrative | CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Licenciement - Salarié protégé - Mesures spéciales - Autorisation administrative - Faute de l'employeur à l'origine de la cessation d'activité - Demande de dommages-intérêts du salarié - Préjudice découlant de la perte de l'emploi - Appréciation - Compétence - Détermination | Le juge judiciaire ne peut, sans violer le principe de séparation des pouvoirs, en l'état d'une autorisation administrative de licenciement devenue définitive, apprécier le caractère réel et sérieux du motif de licenciement au regard de la cause économique. Il peut seulement se prononcer, lorsqu'il en est saisi, sur la responsabilité de l'employeur et la demande du salarié en réparation des préjudices que lui aurait causés une faute de l'employeur à l'origine de la cessation d'activité, y compris le préjudice résultant de la perte de son emploi. Doit en conséquence être censuré l'arrêt qui déclare le licenciement d'un salarié protégé sans cause réelle et sérieuse et lui alloue des dommages-intérêts à ce titre, alors que par une décision devenue définitive ce licenciement avait été autorisé par l'inspection du travail |
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JURITEXT000048104624 | JURI | texte/juri/judi/JURI/TEXT/00/00/48/10/46/JURITEXT000048104624.xml | ARRET | Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 20 septembre 2023, 22-21.249, Publié au bulletin | 2023-09-20 00:00:00 | Cour de cassation | 52300909 | Rejet | 22-21249 | oui | CHAMBRE_SOCIALE | 2022-08-30 00:00:00 | Tribunal judiciaire de Béziers | M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président) | SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet | ECLI:FR:CCASS:2023:SO00909 | LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant : SOC. / ELECT BD4 COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 20 septembre 2023 Rejet M. HUGLO, conseiller doyen faisant fonction de président Arrêt n° 909 F-B Pourvoi n° B 22-21.249 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 20 SEPTEMBRE 2023 1°/ Mme [V] [TX], domiciliée [Adresse 2], 2°/ l'union départementale CGT 34, dont le siège est [Adresse 4], ont formé le pourvoi n° B 22-21.249 contre le jugement rendu le 30 août 2022 par le tribunal judiciaire de Béziers (contentieux des élections professionnelles), dans le litige les opposant : 1°/ à la société Nephrocare [Localité 3], société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 1], 2°/ au syndicat départemental CFDT santé sociaux 34, dont le siège est [Adresse 4], 3°/ à Mme [B] [SS], 4°/ à Mme [O] [F], 5°/ à Mme [VU] [AY], 6°/ à Mme [YW] [DR], 7°/ à Mme [S] [EW], 8°/ à Mme [D] [AE], 9°/ à M. [E] [OP], 10°/ à Mme [P] [R], 11°/ à Mme [CL] [T], 12°/ à Mme [JD] [RM], 13°/ à Mme [Y] [NK], 14°/ à M. [EG] [GT], 15°/ à Mme [L] [C], 16°/ à Mme [W] [VC], 17°/ à Mme [B] [K], 18°/ à M. [PH] [A], 19°/ à Mme [D] [G], 20°/ à M. [M] [I], 21°/ à Mme [U] [MF], 22°/ à M. [WZ] [Z], 23°/ à Mme [J] [LA], 24°/ à Mme [X] [H], tous vingt-deux domiciliés au siège de la société Nephrocare [Localité 3], [Adresse 1], défendeurs à la cassation. Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, un moyen de cassation. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Bérard, conseiller, les observations de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de Mme [TX] et du syndicat Union départementale CGT 34, de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de la société Nephrocare [Localité 3], après débats en l'audience publique du 28 juin 2023 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Bérard, conseiller rapporteur, Mme Ott, conseiller, et Mme Aubac, greffier de chambre, la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon le jugement attaqué (tribunal judiciaire de Béziers, 30 août 2022), les opérations en vue de l'élection des membres du comité social et économique de la société Nephrocare [Localité 3] se sont déroulées entre le 3 et le 6 mai 2022, par voie électronique. 2. Par requête du 20 mai 2022, Mme [TX] et l'union départementale CGT 34 ont saisi le tribunal judiciaire d'une demande d'annulation des élections en invoquant une irrégularité résultant de la transmission par l'employeur à Mme [TX], à sa demande, de la liste d'émargement. Examen du moyen Sur le moyen, pris en ses deuxième, troisième et cinquième branches 3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs, irrecevable s'agissant de la troisième branche, et qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation s'agissant des deuxième et cinquième branches. Sur le moyen, pris en ses première et quatrième branches Enoncé du moyen 4. Mme [TX] et l'union départementale CGT 34 font grief à l'arrêt de déclarer irrecevable la pièce n° 8 qu'elles ont versée aux débats, de les débouter de leurs demandes d'annulation des élections des représentants du personnel au comité social et économique de la société et de les condamner à verser une certaine somme à la société pour procédure abusive, ainsi qu'au titre de l'article 700 du code de procédure civile, alors : « 1°/ que ne constitue pas un stratagème le simple fait, pour un représentant syndical, de solliciter de l'employeur la liste d'émargement de l'élection professionnelle tenue par voie électronique dans l'entreprise, qui ne s'accompagne d'aucune manoeuvre, mensonge ou autre procédé trompeur, peu important qu'il ait, ou non, voulu se constituer la preuve d'une irrégularité dans le déroulement des opérations électorales ; qu'en l'espèce, il ressort du jugement attaqué que "suivant mail du 9 mai 2022, à 9h59, Mme [TX], élue CGT, envoie un mail en indiquant : Mesdames, pouvez-vous m'adresser la liste d'émargement de l'élection qui a eu lieu entre le 3 et le 6 mai 2022. Cordialement. [V] [TX], membre du CSE DS CGT NC [Localité 3]. Le 10 mai 2022 à 15h36, Mme [N] [HY], responsable des ressources humaines, la lui transmet. Mme [TX] et son syndicat intenteront quelques jours plus tard une action en justice aux motifs que cette transmission était irrégulière" ; qu'en déclarant irrecevable la pièce n° 8 des demanderesses, représentant cet échange de courriels, aux motifs que "Mme [TX] reproche à la société de lui avoir transmis une pièce qu'elle n'aurait pas eu le droit de lui transmettre, suite à sa propre demande en ce sens...que c'est elle qui a placé l'employeur en situation de faute...qu'il est permis de penser que c'est précisément à cette fin que le mail du 9 mai 2022 a été envoyé" de sorte "qu'il peut donc être considéré que cette demande constituait bien un stratagème" le tribunal judiciaire, qui n'a pas déduit les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 9 du code de procédure civile et le principe de loyauté dans l'administration de la preuve ; 4°/ que toute partie a droit à la preuve ; qu'il n'est pas déloyal, pour une partie, de se préconstituer une preuve afin d'intenter une action en justice ; qu'en retenant, pour déclarer irrecevable la preuve déduite de l'échange de courriels des 8 et 9 mai 2022 dont résultait la violation, par l'employeur, de son obligation de conservation sous scellés de la liste d'émargement, condition de la confidentialité du scrutin, "que la seule conséquence qui a été tirée de cette transmission n'apparaît être qu'une action en justice", le tribunal a violé derechef les textes susvisés. » Réponse de la Cour 5. Il résulte de la jurisprudence établie de la Cour de cassation (Soc., 23 mars 2022, pourvoi n° 20-20.047, Bull.) que, selon le premier alinéa de l'article R. 2314-16 du code du travail, la liste d'émargement n'est accessible qu'aux membres du bureau de vote et à des fins de contrôle de déroulement du scrutin, qu'aux termes de l'article R. 2314-17 de ce code, l'employeur ou le prestataire qu'il a retenu conserve sous scellés, jusqu'à l'expiration du délai de recours et, lorsqu'une action contentieuse a été engagée, jusqu'à la décision juridictionnelle devenue définitive, les fichiers supports comprenant la copie des programmes sources et des programmes exécutables, les matériels de vote, les fichiers d'émargement, de résultats et de sauvegarde, après la clôture du scrutin, et qu'il appartient aux parties intéressées de demander au juge, en cas de contestation des élections, que les listes d'émargement soient tenues à sa disposition. 6. L'irrégularité résultant de la transmission directe par l'employeur, après la clôture du scrutin, de la liste d'émargement à la demande d'une partie intéressée n'est pas susceptible d'entraîner en elle-même l'annulation des élections. 7. Ayant constaté que les élections s'étaient déroulées par vote électronique du 3 au 6 mai 2022 et que, le 10 mai suivant, l'employeur avait transmis directement la liste d'émargement à la déléguée syndicale CGT à la demande de celle-ci, le tribunal a débouté à bon droit l'intéressée et le syndicat de leur demande d'annulation des élections fondée sur cette transmission irrégulière intervenue postérieurement à la clôture du scrutin. 8. Par ce motif de pur droit, substitué à ceux critiqués, dans les conditions prévues par les articles 620, alinéa 1, et 1015 du code de procédure civile, le jugement se trouve légalement justifié. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt septembre deux mille vingt-trois. | ELECTIONS PROFESSIONNELLES - Comité social et économique - Opérations électorales - Modalités d'organisation et de déroulement - Régularité - Recours au vote électronique - Accès aux listes d'émargement - Accès après la clôture du scrutin - Conditions - Respect - Défaut - Cas - Portée | S'il résulte des articles R. 2314-16 et R. 2314-17 du code du travail relatifs aux modalités du vote électronique, que la liste d'émargement n'est accessible qu'aux membres du bureau de vote et à des fins de contrôle du déroulement du scrutin, et qu'après la clôture du scrutin il appartient aux parties intéressées de demander au juge, en cas de contestation des élections, que les listes d'émargement soient tenues à sa disposition, l'irrégularité résultant de la transmission directe par l'employeur, après la clôture du scrutin, de la liste d'émargement à la demande d'une partie intéressée, n'est pas susceptible d'entraîner en elle-même l'annulation des élections |
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JURITEXT000048104634 | JURI | texte/juri/judi/JURI/TEXT/00/00/48/10/46/JURITEXT000048104634.xml | ARRET | Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 20 septembre 2023, 22-12.293, Publié au bulletin | 2023-09-20 00:00:00 | Cour de cassation | 52300916 | Rejet | 22-12293 | oui | CHAMBRE_SOCIALE | 2021-12-16 00:00:00 | Conseil de prud'hommes de Paris | M. Sommer | SCP Foussard et Froger, SARL Thouvenin, Coudray et Grévy | ECLI:FR:CCASS:2023:SO00916 | LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant : SOC. CH9 COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 20 septembre 2023 Rejet M. SOMMER, président Arrêt n° 916 FS-B Pourvoi n° S 22-12.293 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 20 SEPTEMBRE 2023 La société Newrest wagons-lits France, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 3], a formé le pourvoi n° S 22-12.293 contre le jugement rendu le 16 décembre 2021 par le conseil de prud'hommes de Paris (section commerce, chambre 6), dans le litige l'opposant : 1°/ à Mme [Z] [Y], domiciliée [Adresse 1], 2°/ au syndicat CFDT Restauration ferroviaire trains de nuit, dont le siège est [Adresse 2], défendeurs à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, trois moyens de cassation. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Ott, conseiller, les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat de la société Newrest wagons-lits France, de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de Mme [Y] et du syndicat CFDT Restauration ferroviaire trains de nuit, et l'avis de Mme Roques, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 28 juin 2023 où étaient présents M. Sommer, président, Mme Ott, conseiller rapporteur, M. Huglo, conseiller doyen, M. Rinuy, Mmes Sommé, Bouvier, Bérard, conseillers, Mmes Chamley-Coulet, Lanoue, M. Le Masne de Chermont, Mme Ollivier, conseillers référendaires, Mme Roques, avocat général référendaire, et Mme Jouanneau, greffier de chambre, la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon le jugement attaqué (conseil de prud'hommes de Paris, 16 décembre 2021), Mme [Y], engagée le 2 mai 2001 par la société Rail restauration province par un contrat de travail qui a été transféré en dernier lieu à la société Newrest wagons-lits France (la société), exerce les fonctions de commerciale de bord. 2. Victime le 4 mai 2015 d'un accident du travail, elle a été placée en arrêt de travail du 4 mai au 6 décembre 2015. Elle a repris le travail en mi-temps thérapeutique du 6 décembre 2015 au 8 août 2016. 3. Le 5 juin 2019, la salariée a saisi la juridiction prud'homale en demandant le paiement d'un rappel de prime de participation au titre de sa période de travail à mi-temps thérapeutique en exécution de l'accord de participation de la société du 2 février 2015. 4. Le syndicat CFDT Restauration ferroviaire trains de nuit (le syndicat) est intervenu volontairement à l'instance. Examen des moyens Sur les deuxième et troisième moyens 5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Sur le premier moyen Enoncé du moyen 6. La société fait grief au jugement de la condamner à payer à la salariée des sommes à titre de rappel sur prime « d'intéressement » 2015-2106 et de dommages-intérêts et de la condamner à payer au syndicat une somme à titre de dommages-intérêts, alors « qu'aux termes de l'article 5.2 de l'accord de participation du 2 février 2015, "seules les heures de travail effectif et/ou assimilées du salarié" sont prises en compte pour le calcul du droit individuel de chaque salarié ; que cet article ne mentionne pas, parmi les heures devant être assimilées, au sens de l'accord de participation, à des heures de travail effectif, les heures non travaillées dans le cadre d'un mi-temps thérapeutique ; qu'en décidant pourtant qu'il y avait lieu de tenir compte de ces heures pour le calcul de la prime de participation, les juges du fond ont violé l'article L. 3322-2 du code du travail, ensemble l'article 5 de l'accord de participation du 2 février 2015. » Réponse de la Cour 7. En application de l'article L. 1132-1 du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi n° 2014-173 du 21 février 2014, aucune personne ne peut faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie à l'article 1 de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, notamment en matière de rémunération, au sens de l'article L. 3221-3, de mesures d'intéressement ou de distribution d'actions en raison notamment de son état de santé. 8. Selon l'article 1 de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008, constitue une discrimination directe la situation dans laquelle, sur le fondement notamment de son état de santé, une personne est traitée de manière moins favorable qu'une autre ne l'est, ne l'a été ou ne l'aura été dans une situation comparable et constitue une discrimination indirecte une disposition, un critère ou une pratique neutre en apparence, mais susceptible d'entraîner, pour l'un de ces motifs, un désavantage particulier pour des personnes par rapport à d'autres personnes, à moins que cette disposition, ce critère ou cette pratique ne soit objectivement justifié par un but légitime et que les moyens pour réaliser ce but ne soient nécessaires et appropriés. 9. Selon l'article L. 3322-1 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019, la participation a pour objet de garantir collectivement aux salariés le droit de participer aux résultats de l'entreprise. 10. Aux termes de l'article L. 3324-5 du code du travail, dans sa version antérieure à la même loi, la répartition de la réserve spéciale de participation entre les bénéficiaires est calculée proportionnellement au salaire perçu dans la limite de plafonds déterminés par décret. Pour les bénéficiaires visés au deuxième alinéa de l'article L. 3323-6 et au troisième alinéa de l'article L. 3324-2, la répartition est calculée proportionnellement à la rémunération annuelle ou au revenu professionnel imposé à l'impôt sur le revenu au titre de l'année précédente, plafonnés au niveau du salaire le plus élevé versé dans l'entreprise, et dans les limites de plafonds de répartition individuelle déterminés par le même décret. Toutefois, l'accord de participation peut décider que cette répartition entre les bénéficiaires est uniforme, proportionnelle à la durée de présence dans l'entreprise au cours de l'exercice, ou retenir conjointement plusieurs de ces critères. L'accord peut fixer un salaire plancher servant de base de calcul à la part individuelle. Le plafond de répartition individuelle déterminé par le décret prévu au premier alinéa ne peut faire l'objet d'aucun aménagement, à la hausse ou à la baisse, y compris par un accord mentionné à l'article L. 3323-1. 11. Il résulte de la combinaison de ces textes que la période pendant laquelle un salarié, en raison de son état de santé, travaille selon un mi-temps thérapeutique doit être assimilée à une période de présence dans l'entreprise, de sorte que le salaire à prendre en compte pour le calcul de l'assiette de la participation due à ce salarié est le salaire perçu avant le mi-temps thérapeutique et l'arrêt de travail pour maladie l'ayant, le cas échéant, précédé. 12. Le conseil de prud'hommes a constaté que la salariée, victime le 4 mai 2015 d'un accident du travail, après un arrêt de travail du 4 mai au 6 décembre 2015, a travaillé du 6 décembre 2015 au 8 août 2016 en mi-temps thérapeutique. 13. Par ce motif de pur droit, substitué à ceux critiqués, dans les conditions prévues par les articles 620, alinéa 1, et 1015 du code de procédure civile, la décision, qui a condamné l'employeur à payer à la salariée un rappel de prime de participation 2015-2016 au titre de la période de travail en mi-temps thérapeutique, se trouve légalement justifiée. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne la société Newrest wagons-lits France aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Newrest wagons-lits France et la condamne à payer à Mme [Y] et au syndicat CFDT Restauration ferroviaire la somme globale de 3 000 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt septembre deux mille vingt-trois. | TRAVAIL REGLEMENTATION, REMUNERATION - Salaire - Participation aux résultats de l'entreprise - Réserve spéciale de participation - Accord de participation - Répartition de l'intéressement - Montant - Calcul - Assiette - Cas - Période pendant laquelle un salarié a travaillé selon un mi-temps thérapeutique - Portée | CONTRAT DE TRAVAIL, EXECUTION - Employeur - Discrimination fondée sur l'état de santé ou le handicap - Prohibition - Effets - Réserve spéciale de participation - Répartition de l'intéressement - Montant - Calcul - Assiette - Cas - Période pendant laquelle un salarié a travaillé selon un mi-temps thérapeutique - Portée | Il résulte de la combinaison de l'article L. 1132-1 du code du travail et des articles L. 3322-1 et L. 3324-5 du même code, dans leur rédaction antérieure à la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019, que la période pendant laquelle un salarié, en raison de son état de santé, travaille selon un mi-temps thérapeutique doit être assimilée à une période de présence dans l'entreprise, de sorte que le salaire à prendre en compte pour le calcul de l'assiette de la participation due à ce salarié est le salaire perçu avant le mi-temps thérapeutique et l'arrêt de travail pour maladie l'ayant, le cas échéant, précédé |
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JURITEXT000048104653 | JURI | texte/juri/judi/JURI/TEXT/00/00/48/10/46/JURITEXT000048104653.xml | ARRET | Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 20 septembre 2023, 21-25.233, Publié au bulletin | 2023-09-20 00:00:00 | Cour de cassation | 52300917 | Cassation sans renvoi | 21-25233 | oui | CHAMBRE_SOCIALE | 2021-11-26 00:00:00 | Tribunal judiciaire d'Orléans | M. Sommer | SCP Célice, Texidor, Périer, SCP Zribi et Texier | ECLI:FR:CCASS:2023:SO00917 | LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant : SOC. ZB1 COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 20 septembre 2023 Cassation sans renvoi M. SOMMER, président Arrêt n° 917 FS-B Pourvoi n° M 21-25.233 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 20 SEPTEMBRE 2023 L'Association interdépartementale pour le développement des actions en faveur des personnes handicapées et inadaptées (Aidaphi), dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° M 21-25.233 contre le jugement rendu le 26 novembre 2021 par le tribunal judiciaire d'Orléans (jugement selon la procédure accélérée au fond), dans le litige l'opposant : 1°/ au comité social et économique d'établissement du secteur d'activité cohésion sociale de l'Aidaphi, dont le siège est [Adresse 1], 2°/ au comité social et économique d'établissement du secteur d'activité cohésion sociale de l'Aidaphi, dont le siège est [Adresse 1], pris en la personne de M. [B] [N], en qualité de secrétaire du CSE, élu titulaire, 3°/ au comité social et économique d'établissement du secteur d'activité cohésion sociale de l'Aidaphi, dont le siège est [Adresse 1], pris en la personne de M. [G] [P], en qualité de trésorier du CSE, élu titulaire, 4°/ au comité social et économique d'établissement du secteur d'activité cohésion sociale de l'Aidaphi, dont le siège est [Adresse 1], pris en la personne de Mme [H] [V], en qualité d'élue titulaire, 5°/ au comité social et économique d'établissement du secteur d'activité cohésion sociale de l'Aidaphi, dont le siège est [Adresse 1], pris en la personne de Mme [D] [Y], en qualité de trésorière adjointe, élue titulaire, défendeurs à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Bouvier, conseiller, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de l'Association interdépartementale pour le développement des actions en faveur des personnes handicapées et inadaptées, de la SCP Zribi et Texier, avocat du comité social et économique d'établissement du secteur d'activité cohésion sociale de l'Aidaphi, et l'avis de Mme Roques, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 28 juin 2023 où étaient présents M. Sommer, président, Mme Bouvier, conseiller rapporteur, M. Huglo, conseiller doyen, M. Rinuy, Mmes Ott, Sommé, Bérard, conseillers, Mmes Chamley-Coulet, Lanoue, M. Le Masne de Chermont, Mme Ollivier, conseillers référendaires, Mme Roques, avocat général référendaire, et Mme Jouanneau, greffier de chambre, la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon le jugement attaqué (président du tribunal judiciaire d'Orléans, 26 novembre 2021), rendu suivant la procédure accélérée au fond, le comité social et économique d'établissement du secteur d'activité de cohésion sociale de l'Association interdépartementale pour le développement des actions en faveur des personnes handicapées et inadaptées (le comité) a, par délibération du 17 juin 2021, décidé du recours à une expertise en vue de la consultation sur la situation économique et financière de l'entreprise et a désigné à cette fin le cabinet Ekiteo expertise. 2. L'employeur, contestant le droit à consultation et à expertise du comité, a saisi le président du tribunal judiciaire aux fins d'annulation de cette délibération. Examen du moyen Sur le moyen, pris en sa deuxième branche Enoncé du moyen 3. L'employeur fait grief au jugement de le débouter de sa demande d'annulation de la délibération du comité et de la désignation du cabinet Ekiteo expertise, de dire que la désignation de l'expert est valide pour procéder à une expertise comptable portant sur la situation économique et financière au niveau de l'établissement et que la rémunération de l'expert sera prise en charge par le comité à hauteur de 20 % et par l'employeur à hauteur de 80 %, alors « que selon l'article L. 2315-88, le comité social et économique peut décider de recourir à un expert-comptable en vue de la consultation sur la situation économique et financière de l'entreprise prévue au 2° de l'article L. 2312-17 du code du travail ; que selon l'article L. 2312-22 du code du travail, en l'absence d'accord d'entreprise ou de décision unilatérale de l'employeur en disposant autrement, la consultation sur la situation économique et financière de l'entreprise est conduite au niveau de l'entreprise ; qu'il en résulte qu'en l'absence d'accord collectif ou de décision de l'employeur prévoyant une double consultation du comité social et économique central d'entreprise et des comités sociaux et économiques d'établissement respectivement sur la situation économique et financière de l'entreprise et sur celle de chacun des établissements, un comité social et économique d'établissement ne peut faire appel à un expert en vue de la consultation sur la situation économique et financière de l'établissement ; qu'en l'espèce, il ressort des constatations du jugement attaqué qu'"il ne paraît pas pouvoir être considéré que l'AIDAPHI ait expressément souhaité consulter le CSE secteur d'activité de cohésion sociale sur la situation économique et financière de l'entreprise" ; qu'en jugeant néanmoins que "la possibilité du comité central d'entreprise d'être assisté par un expert-comptable pour l'examen annuel de la situation économique et financière de l'entreprise ne prive pas le comité social et économique d'établissement, qui dispose d'une autonomie suffisante et dans les limites de pouvoirs confiés au chef d'établissement, d'être assisté par un expert comptable pour l'examen des comptes annuels, et donc plus largement de la situation économique et financière de l'établissement pour pouvoir notamment se comparer avec les autres établissements", pour en déduire que le CSE de l'établissement "secteur d'activité de la cohésion sociale" pouvait faire appel à un expert-comptable en vue de sa consultation sur la situation économique et financière de l'établissement, le tribunal a violé les articles L. 2315-88 et L. 2312-22 du code du travail. » Réponse de la Cour Vu l'article L. 2312-22, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2017-1386 du 22 septembre 2017, et l'article L. 2315-88 du code du travail. 4. Selon l'article L. 2312-22 du code du travail, en l'absence d'accord prévu à l'article L. 2312-19, le comité social et économique est consulté chaque année sur la situation économique et financière de l'entreprise dans les conditions définies au sous-paragraphe 2. Cette consultation est conduite au niveau de l'entreprise, sauf si l'employeur en décide autrement et sous réserve de l'accord de groupe prévu à l'article L. 2312-20 du code du travail. 5. Aux termes de l'article L. 2315-88 du même code, le comité social et économique peut décider de recourir à un expert-comptable en vue de la consultation sur la situation économique et financière de l'entreprise prévue au 2° de l'article L. 2312-17. 6. Pour rejeter la demande d'annulation de la délibération du comité et de la désignation de l'expert, le jugement énonce que la possibilité pour le comité central d'entreprise d'être assisté par un expert-comptable ne prive pas le comité économique de l'établissement qui dispose d'une autonomie suffisante, et dans les limites des pouvoirs confiés au chef d'établissement, d'être assisté par un expert-comptable pour l'examen de la situation économique et financière de l'établissement pour pouvoir notamment se comparer avec les autres établissements. 7. En statuant ainsi, alors qu'il avait constaté qu'aucun accord collectif d'entreprise ne prévoyait la consultation du comité social et économique de l'établissement et que l'employeur n'avait pas décidé de le consulter, de sorte que la consultation récurrente sur la situation économique et financière de l'entreprise relevait du seul comité social et économique central et que le comité social et économique de l'établissement ne pouvait recourir à une expertise à ce titre, le président du tribunal a violé les textes susvisés. Portée et conséquences de la cassation 8. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile. 9. L'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 26 novembre 2021, entre les parties, par le président du tribunal judiciaire d'Orléans ; DIT n'y avoir lieu à renvoi ; ANNULE la délibération du comité social et économique de l'établissement du secteur d'activité de cohésion sociale de l'Association interdépartementale pour le développement des actions en faveur des personnes handicapées et inadaptées du 17 juin 2021 décidant du recours à une mesure d'expertise sur la situation économique et financière et désignant à cette fin le cabinet Ekiteo expertise ; Condamne le comité social et économique de l'établissement du secteur d'activité de cohésion sociale de l'Association interdépartementale pour le développement des actions en faveur des personnes handicapées et inadaptées aux dépens, en ce compris ceux exposés devant le président du tribunal judiciaire ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt septembre deux mille vingt-trois. | REPRESENTATION DES SALARIES - Comité social et économique - Attributions - Attributions consultatives - Organisation, gestion et marche générale de l'entreprise - Consultation récurrente - Situation économique et financière de l'entreprise - Expertise - Niveau - Recours par le comité social et économique d'établissement - Conditions - Détermination - Portée | Selon l'article L. 2312-22 du code du travail, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2017-1386 du 22 septembre 2017, en l'absence d'accord prévu à l'article L. 2312-19, le comité social et économique (CSE) est consulté chaque année sur la situation économique et financière de l'entreprise dans les conditions définies au sous-paragraphe 2. Cette consultation est conduite au niveau de l'entreprise, sauf si l'employeur en décide autrement et sous réserve de l'accord de groupe prévu à l'article L. 2312-20 du code du travail. Aux termes de l'article L. 2315-88 du même code, le comité social et économique peut décider de recourir à un expert-comptable en vue de la consultation sur la situation économique et financière de l'entreprise prévue au 2° de l'article L. 2312-17. Viole ces textes le jugement qui rejette la demande d'annulation de la délibération du comité social et économique d'établissement et de la désignation d'un expert, alors qu'il résulte de ses constatations qu'aucun accord collectif d'entreprise ne prévoyait la consultation de ce comité et que l'employeur n'avait pas décidé de le consulter, de sorte que la consultation récurrente sur la situation économique et financière de l'entreprise relevait du seul comité social et économique central et que le comité social et économique de l'établissement ne pouvait recourir à une expertise à ce titre |
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JURITEXT000048139556 | JURI | texte/juri/judi/JURI/TEXT/00/00/48/13/95/JURITEXT000048139556.xml | ARRET | Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 27 septembre 2023, 21-25.973, Publié au bulletin | 2023-09-27 00:00:00 | Cour de cassation | 52300923 | Cassation | 21-25973 | oui | CHAMBRE_SOCIALE | 2021-04-07 00:00:00 | Cour d'appel de Paris | M. Sommer | SARL Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, SCP Thomas-Raquin, Le Guerer, Bouniol-Brochier | ECLI:FR:CCASS:2023:SO00923 | LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant : SOC. ZB1 COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 27 septembre 2023 Cassation M. SOMMER, président Arrêt n° 923 FS-B Pourvoi n° R 21-25.973 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 27 SEPTEMBRE 2023 Mme [M] [H], épouse [E], domiciliée [Adresse 2], a formé le pourvoi n° R 21-25.973 contre l'arrêt rendu le 7 avril 2021 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 6), dans le litige l'opposant à la société Le Crédit lyonnais, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Salomon, conseiller, les observations de la SCP Thomas-Raquin, Le Guerer, Bouniol-Brochier, avocat de Mme [H], de la SARL Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat de la société Le Crédit lyonnais, et l'avis de M. Juan, avocat général, après débats en l'audience publique du 4 juillet 2023 où étaient présents M. Sommer, président, Mme Salomon, conseiller rapporteur, Mme Capitaine, conseiller doyen, Mmes Lacquemant, Nirdé-Dorail, conseillers, Mmes Valéry, Pecqueur, Laplume, MM. Chiron, Leperchey, conseillers référendaires, M. Juan, avocat général, et Mme Piquot, greffier de chambre, la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 7 avril 2021), Mme [E] a été engagée en qualité de conseiller clientèle le 20 août 1990 par la société Le Crédit lyonnais. 2. A compter du 23 juin 2000, le contrat de travail de la salariée a été suspendu. Le 2 février 2009, la salariée a été placée en invalidité deuxième catégorie, puis en invalidité première catégorie à compter du 1er mai 2011, mais par jugement du 5 janvier 2012, le tribunal du contentieux de l'incapacité a reconnu son incapacité à exercer une profession et son classement en invalidité deuxième catégorie rétroactivement à compter du 1er mai 2011. 3. Le 26 mars 2015, la salariée a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'employeur. Examen du moyen Sur le moyen, pris en sa première branche Enoncé du moyen 4. La salariée fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevable comme étant prescrite la demande en résiliation judiciaire du contrat de travail conclu entre les parties et de la débouter de l'intégralité de ses demandes, alors « que l'action en résiliation judiciaire du contrat de travail peut être introduite pendant toute la durée d'exécution du contrat de travail, quelle que soit la date des faits invoqués à l'appui de la demande ; qu'aussi, en déclarant irrecevable l'action introduite par l'exposante le 26 mars 2015 au prétexte que le point de départ de l'action en résiliation judiciaire du contrat de travail fondée sur l'absence d'organisation, par son employeur, d'une visite de reprise devant le médecin du travail après avoir été informé de son classement en invalidité de deuxième catégorie était constitué par le courrier adressé à la salarié le 23 février 2009 par lequel l'employeur indiquait avoir connaissance de son classement en invalidité, quand le contrat de travail de l'exposante n'ayant jamais été rompu l'action en résiliation judiciaire du contrat pouvait être introduite, peu important la date des faits invoqués à l'appui de la demande, la cour d'appel a violé l'article L. 1231-1 du code du travail. » Réponse de la Cour Vu l'article L. 1231-1 du code du travail : 5. Selon ce texte, le contrat de travail à durée indéterminée peut être rompu à l'initiative de l'employeur ou du salarié, ou d'un commun accord. 6. Le salarié peut demander la résiliation judiciaire de son contrat de travail en raison des manquements de son employeur à ses obligations, suffisamment graves pour rendre impossible la poursuite du contrat de travail. 7. La Cour de cassation juge que, saisi d'une telle demande, le juge doit examiner l'ensemble des griefs invoqués au soutien de celle-ci, quelle que soit leur ancienneté (Soc., 30 juin 2021, pourvoi n° 19-18.533, Bull.). 8. Il en résulte que l'action en résiliation judiciaire du contrat de travail peut être introduite tant que ce contrat n'a pas été rompu, quelle que soit la date des faits invoqués au soutien de la demande. 9. Pour déclarer irrecevable comme étant prescrite l'action en résiliation judiciaire du contrat de travail formée par la salariée, l'arrêt retient que l'employeur est tenu d'organiser la visite de reprise devant le médecin du travail dès lors que le salarié l'informe de son classement en invalidité de deuxième catégorie, sans manifester l'intention de ne pas reprendre le travail. Il ajoute qu'il résulte du courrier adressé à la salariée le 23 février 2009 que l'employeur avait connaissance du classement en invalidité de deuxième catégorie, de sorte qu'à compter de cette date il était tenu à l'obligation d'organiser la visite de reprise, qui constitue le point de départ du délai de prescription. Il en déduit que, par application des dispositions transitoires de la loi du 14 juin 2013, la durée totale de la prescription ne peut pas excéder le délai de cinq années en vigueur au moment du point de départ du délai, de sorte que le délai a effectivement expiré le 23 février 2014 et que la prescription était acquise lors de l'introduction de l'instance le 26 mars 2015. 10. En statuant ainsi, alors qu'elle devait examiner le bien-fondé de la demande de résiliation judiciaire, peu important la date des griefs invoqués au soutien de cette demande, la cour d'appel a violé le texte susvisé. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 7 avril 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ; Condamne la société Le Crédit lyonnais aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Le Crédit lyonnais et la condamne à payer à Mme [E] la somme de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept septembre deux mille vingt-trois. | CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Résiliation judiciaire - Action intentée par le salarié - Manquements reprochés à l'employeur - Appréciation - Griefs invoqués - Ancienneté - Absence d'influence - Portée | CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Résiliation judiciaire - Action intentée par le salarié - Fondement - Griefs invoqués - Date des faits - Prescription - Absence d'opposabilité - Portée | L'action en résiliation judiciaire du contrat de travail peut être introduite tant que ce contrat n'a pas été rompu, quelle que soit la date des faits invoqués au soutien de la demande |
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JURITEXT000048139558 | JURI | texte/juri/judi/JURI/TEXT/00/00/48/13/95/JURITEXT000048139558.xml | ARRET | Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 27 septembre 2023, 22-12.435 22-12.436 22-12.437 22-12.441 22-12.442, Publié au bulletin | 2023-09-27 00:00:00 | Cour de cassation | 52300924 | Rejet | 22-12435 | oui | CHAMBRE_SOCIALE | 2021-12-10 00:00:00 | Cour d'appel d'Aix-en-Provence | M. Sommer | SARL Thouvenin, Coudray et Grévy, SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol | ECLI:FR:CCASS:2023:SO00924 | LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant : SOC. CH9 COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 27 septembre 2023 Rejet M. SOMMER, président Arrêt n° 924 FS-B Pourvois n° W 22-12.435 X 22-12.436 Y 22-12.437 C 22-12.441 D 22-12.442 JONCTION R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 27 SEPTEMBRE 2023 1°/ Mme [H] [T], domiciliée [Adresse 5], 2°/ Mme [Y] [V], domiciliée [Adresse 6], 3°/ Mme [L] [F], domiciliée [Adresse 3], 4°/ Mme [P] [S], domiciliée [Adresse 1], 5°/ Mme [D] [M], domiciliée [Adresse 4], ont formé respectivement les pourvois n° W 22-12.435 à Y 22-12.437, C 22-12.441 et D 22-12.442 contre cinq arrêts rendus le 10 décembre 2021 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 4-7), dans les litiges les opposant à l'association SHM, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation. Les demanderesses aux pourvois W 22-12.435 à Y 22-12.437 invoquent, à l'appui de leur recours, trois moyens de cassation. Les demanderesses aux pourvois C 22-12.441 et D 22-12.442 invoquent, à l'appui de leur recours, quatre moyens de cassation. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Laplume, conseiller référendaire, les observations de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de Mmes [T], [V], [M], [S] et [F], de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de l'association SHM, et l'avis de M. Juan, avocat général, après débats en l'audience publique du 4 juillet 2023 où étaient présents M. Sommer, président, Mme Laplume, conseiller référendaire rapporteur, Mme Capitaine, conseiller doyen, Mme Lacquemant, Mme Nirdé-Dorail, Mme Salomon, conseillers, Mme Valéry, Mme Pecqueur, M. Chiron, M. Leperchey, conseillers référendaires, M. Juan, avocat général, et Mme Piquot, greffier de chambre, la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Jonction 1. En raison de leur connexité, les pourvois n° 22-12.435 à 22-12.437, 22-12.441 et 22-12.442 sont joints. Faits et procédure 2. Selon les arrêts attaqués (Aix-en-Provence, 10 décembre 2021), Mmes [T], [V], [F], [S] et [M] ont été engagées par l'association pour le soutien au handicap mental et psychique et occupaient en dernier lieu le poste de mandataire judiciaire délégué à la protection des majeurs. 3. La relation de travail est régie par la convention collective nationale des établissements privés d'hospitalisation, de soins, de cure et de garde à but non lucratif du 31 octobre 1951. 4. En novembre 2017, l'employeur a dénoncé l'avantage dont les salariées bénéficiaient, portant sur l'octroi de jours de congés supplémentaires et d'une prime décentralisée de 3 %. 5. Les salariées ont saisi la juridiction prud'homale aux fins de se voir octroyer les congés payés supplémentaires ou des sommes équivalentes. Examen des moyens Sur les premier et troisième moyens de l'ensemble des pourvois et sur le quatrième moyen des pourvois n° 22-12.441 et 22-12.442 6. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Sur le deuxième moyen commun à l'ensemble des pourvois Enoncé du moyen 7. Les salariées font grief aux arrêts de les débouter de leurs demandes de rappels de congés trimestriels, de dommages-intérêts pour exécution fautive du contrat de travail et de rappels de salaire pour la journée de grève du 20 mars 2018, alors « qu'en vertu des dispositions de l'article 09.05.1 de la convention collective nationale des établissements privés d'hospitalisation, de soins, de cure et de garde à but non lucratif du 31 octobre 1951, "en sus des congés payés auxquels ils peuvent prétendre par application de l'article 09.02.1 de la convention, les personnels des établissements pour enfants ou adultes handicapés ou inadaptés, dans lesquels la prime décentralisée est égale à 3 %, bénéficient en outre - au cours de chacun des trois trimestres qui ne comprennent pas le congé annuel - de congés payés supplémentaires à prendre au mieux des intérêts du service" ; qu'après avoir énoncé que "cet article délimite précisément son application à un personnel travaillant en établissement pour enfants ou adultes handicapés ou inadaptés, ne vise pas les autres personnels concernés par la convention collective (maisons de santé, crèches, soins à domicile...)", la cour d'appel a retenu, pour dire qu'il ne s'applique pas aux services de tutelles ni partant aux exposantes, que "les salariées de l'association ne peuvent être assimilés à des personnels d'établissements pour enfants ou adultes handicapés ou inadaptés, comme ne travaillant pas dans une structure d'hébergement et ayant des activités de nature différente liées essentiellement à la gestion des ressources et du patrimoine des personnes placées sous protection judiciaire (tutelle ou curatelle)" ; qu'en retenant que ce texte ne pouvait s'appliquer dans les entreprises ne gérant pas une structure d'hébergement, la cour d'appel a, en y ajoutant une condition qu'il ne prévoit pas, violé l'article 09.05.1 de la convention collective nationale des établissements privés d'hospitalisation, de soins, de cure et de garde à but non lucratif du 31 octobre 1951. » Réponse de la Cour 8. Une convention collective, si elle manque de clarté, doit être interprétée comme la loi, c'est à dire d'abord en respectant la lettre du texte, ensuite en tenant compte d'un éventuel texte législatif ayant le même objet et, en dernier recours, en utilisant la méthode téléologique consistant à rechercher l'objectif social du texte. 9. Aux termes de l'article 09.05.1 de la convention collective nationale des établissements privés d'hospitalisation, de soins, de cure et de garde à but non lucratif du 31 octobre 1951, en sus des congés payés auxquels ils peuvent prétendre par application de l'article 09.02.1 de la convention, les personnels des établissements pour enfants ou adultes handicapés ou inadaptés, dans lesquels la prime décentralisée est égale à 3 %, bénéficient en outre - au cours de chacun des trois trimestres qui ne comprennent pas le congé annuel - de congés payés supplémentaires à prendre au mieux des intérêts du service. 10. La cour d'appel, qui a retenu que cet article, qui délimite précisément son application à un personnel travaillant en établissement pour enfants ou adultes handicapés ou inadaptés, ne vise pas les autres personnels concernés par la convention collective (maisons de santé, crèches, soins à domicile...), et ne s'applique pas, entre autres, aux services de tutelles, ayant des activités de nature différente liées essentiellement à la gestion des ressources et du patrimoine des personnes placées sous protection judiciaire, a fait l'exacte application des dispositions conventionnelles. 11. Le moyen n'est donc pas fondé. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE les pourvois ; Condamne Mmes [T], [V], [F], [S] et [M] aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept septembre deux mille vingt-trois. | STATUTS PROFESSIONNELS PARTICULIERS - Conventions et accords collectifs - Conventions diverses - Etablissements privés d'hospitalisation, de soins, de cure et de garde à but non lucratif - Convention collective nationale du 31 octobre 1951 - Article 09.02.1 de la convention - Champ d'application - Détermination - Portée | Aux termes de l'article 09.05.1 de la convention collective nationale des établissements privés d'hospitalisation, de soins, de cure et de garde à but non lucratif du 31 octobre 1951, en sus des congés payés auxquels ils peuvent prétendre par application de l'article 09.02.1 de la convention, les personnels des établissements pour enfants ou adultes handicapés ou inadaptés, dans lesquels la prime décentralisée est égale à 3 %, bénéficient en outre - au cours de chacun des trois trimestres qui ne comprennent pas le congé annuel - de congés payés supplémentaires à prendre au mieux des intérêts du service. Fait une exacte application des dispositions conventionnelles la cour d'appel, qui retient que cet article, qui délimite précisément son application à un personnel travaillant en établissement pour enfants ou adultes handicapés ou inadaptés, ne vise pas les autres personnels concernés par la convention collective et ne s'applique pas aux services de tutelles, ayant des activités de nature différente liées essentiellement à la gestion des ressources et du patrimoine des personnes placées sous protection judiciaire |
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JURITEXT000048139567 | JURI | texte/juri/judi/JURI/TEXT/00/00/48/13/95/JURITEXT000048139567.xml | ARRET | Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 27 septembre 2023, 21-22.937, Publié au bulletin | 2023-09-27 00:00:00 | Cour de cassation | 52300926 | Cassation partielle | 21-22937 | oui | CHAMBRE_SOCIALE | 2021-06-11 00:00:00 | Cour d'appel d'Aix-en-Provence | M. Sommer | SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, SCP Célice, Texidor, Périer | ECLI:FR:CCASS:2023:SO00926 | LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant : SOC. AF1 COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 27 septembre 2023 Cassation partielle M. SOMMER, président Arrêt n° 926 FS-B Pourvoi n° R 21-22.937 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 27 SEPTEMBRE 2023 M. [F] [X], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° R 21-22.937 contre l'arrêt rendu le 11 juin 2021 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 4-2), dans le litige l'opposant à la société Delta route, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation. La société Delta route a formé un pourvoi incident contre le même arrêt. Le demandeur au pourvoi principal invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation. La demanderesse au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, un moyen de cassation. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Chiron, conseiller référendaire, les observations de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat de M. [X], de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Delta route, et l'avis de M. Juan, avocat général, après débats en l'audience publique du 4 juillet 2023 où étaient présents M. Sommer, président, M. Chiron, conseiller référendaire rapporteur, Mme Capitaine, conseiller doyen, Mmes Lacquemant, Nirdé-Dorail, Salomon, conseillers, Mmes Valéry, Pecqueur, Laplume, M. Leperchey, conseillers référendaires, M. Juan, avocat général, et Mme Piquot, greffier de chambre, la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 11 juin 2021), la société Delta route a engagé M. [X] en qualité de responsable commercial le 4 juillet 2016. 2. Le salarié a été licencié le 24 janvier 2018 pour cause réelle et sérieuse. 3. Estimant que son licenciement était intervenu pendant la période de protection prévue à l'article L. 1225-4-1 du code du travail, faisant suite à la naissance de son enfant le 10 janvier 2018, le salarié a saisi la juridiction prud'homale. Examen des moyens Sur le pourvoi incident, qui est préalable Enoncé du moyen 4. L'employeur fait grief l'arrêt de dire que le licenciement du salarié est nul, et de le condamner à lui payer diverses sommes à titre de complément d'indemnité compensatrice de préavis, de congés payés afférents, de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail, de rappel d'indemnité de licenciement et de dommages-intérêts pour licenciement nul, alors : « 1°/ que l'employeur peut rompre le contrat de travail d'un salarié pendant les dix semaines suivant la naissance de son enfant, s'il justifie de son impossibilité de maintenir ce contrat pour un motif étranger à l'arrivée de l'enfant ; qu'en l'espèce, dans ses écritures, la société Delta route offrait de démontrer en quoi elle se trouvait dans l'impossibilité de maintenir le contrat de M. [X] pour des motifs liés à des manquements professionnels objectifs, sans aucun lien avec la naissance de son enfant ; qu'elle expliquait notamment que les manquements reprochés à M. [X] n'étaient pas compatibles avec ses fonctions de responsable commercial, statut cadre, et qu'ils étaient de nature à causer un préjudice commercial à l'entreprise, raison pour laquelle celui-ci avait été dispensé de l'exécution de son préavis, quand bien même son licenciement n'était pas motivé par une faute grave ; qu'en se bornant à affirmer que la société Delta route "ne pouvait valablement licencier le salarié sans attendre l'écoulement du délai de 10 semaines en l'absence de faute grave ou d'impossibilité de maintenir le contrat de travail" sans examiner même sommairement cette offre de preuve, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article L.1225-4-1 du code du travail ; 2°/ qu'en se bornant à affirmer l'absence d'une impossibilité de maintenir le contrat de travail de M. [X] sans examiner les moyens et explications de la société Delta route dans ses écritures d'appel, la cour d'appel a privé sa décision de motifs en violation de l'article 455 du code de procédure civile. » Réponse de la Cour 5. Aux termes de l'article L. 1225-4-1 du code du travail, aucun employeur ne peut rompre le contrat de travail d'un salarié pendant les dix semaines suivant la naissance de son enfant. Toutefois, l'employeur peut rompre le contrat s'il justifie d'une faute grave de l'intéressé ou de son impossibilité de maintenir ce contrat pour un motif étranger à l'arrivée de l'enfant. 6. La cour d'appel, qui a relevé, par motifs propres et adoptés, que les griefs énoncés dans la lettre de licenciement ne caractérisaient pas l'impossibilité de maintenir le contrat de travail, a, par une décision motivée, sans avoir à procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, légalement justifié sa décision. Mais sur le premier moyen du pourvoi principal, pris en sa première branche, et sur le second moyen du pourvoi principal, réunis Enoncé des moyens 7. Le salarié fait grief à l'arrêt de le déclarer irrecevable en ses demandes de complément de sommes dans le solde de tous comptes déduites à tort, de réintégration et d'indemnité d'éviction, alors « qu'aux termes de l'article 566 du code de procédure civile, les parties peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire ; qu'est ainsi recevable en appel toute demande qui présente un lien suffisant avec la demande originaire ; que la demande de réintégration, conséquence normale de la nullité d'un licenciement réputé n'avoir jamais existé, présente par nature un lien suffisant avec la demande d'annulation du licenciement prononcée en méconnaissance des dispositions d'ordre public relatives à la parentalité ; qu'en déclarant irrecevable, car présentée pour la première fois en cause d'appel, la demande de réintégration de M. [X] formulée en conséquence d'un licenciement dont il avait invoqué en première instance la nullité, la cour d'appel a violé les articles 564 et 566 du code de procédure civile. » 8. Il fait également grief à l'arrêt de le déclarer irrecevable en sa demande de dommages-intérêts pour violation de la protection de l'article L. 1225-4-1 du code du travail, alors « qu'aux termes de l'article 566 du code de procédure civile, les parties peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire ; que sont ainsi recevables en appel les demandes qui présentent un lien suffisant avec la demande originaire ; que la demande de dommages-intérêts pour violation de la protection de l'article L. 1225-4-1 du code du travail est la conséquence ou le complément nécessaire de la demande d'annulation du licenciement prononcé en méconnaissance de ce texte ; qu'en déclarant irrecevable, car présentée pour la première fois en cause d'appel, la demande de dommages-intérêts de M. [X] alors qu'elle complétait la demande d'annulation de son licenciement formulée en première instance, la cour d'appel a violé les articles 564 et 566 du code de procédure civile. » Réponse de la Cour Vu les articles 564 et 566 du code de procédure civile : 9. Aux termes du premier de ces textes, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait. 10. Selon le second, les parties ne peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge que les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire. 11. Pour déclarer irrecevables les demandes de réintégration et d'indemnité d'éviction et de dommages-intérêts pour violation de la protection de l'article L. 1225-4-1 du code du travail, l'arrêt retient qu'une demande de réintégration ne constitue nullement l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire de la nullité du licenciement, dès lors que le salarié dispose d'une faculté de choix lui permettant de solliciter, soit la réparation de la rupture abusive du contrat de travail, soit sa poursuite accompagnée d'une indemnité d'éviction, les deux actions ne poursuivant pas la même fin de réparation du préjudice, même si elles partagent un fondement commun dans la nullité du licenciement, et qu'en l'espèce, le salarié a choisi de ne solliciter que la réparation des conséquences de la rupture du contrat de travail en première instance. 12. En statuant ainsi, alors que le salarié dont le licenciement est nul est en droit de demander sa réintégration, ce dont il résulte que cette demande et la demande de dommages-intérêts pour violation de la protection de l'article L. 1225-4-1 du code du travail sont la conséquence de la demande de nullité du licenciement, la cour d'appel a violé les textes susvisés. Portée et conséquences de la cassation 13. Le premier moyen ne formulant aucune critique contre les motifs de l'arrêt au soutien de la décision déclarant le salarié irrecevable en sa demande de complément de sommes dans le solde de tous comptes déduites à tort, la cassation ne peut s'étendre à cette disposition de l'arrêt qui n'est pas dans un lien de dépendance nécessaire avec les dispositions de l'arrêt critiquées par ce moyen. 14. En application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation sur les moyens du pourvoi principal entraîne la cassation par voie de conséquence des chefs de dispositif condamnant l'employeur à payer au salarié un complément d'indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents, un rappel d'indemnité de licenciement, des dommages-intérêts pour licenciement nul, qui s'y rattachent par un lien de dépendance nécessaire. 15. La cassation des chefs de dispositif déclarant le salarié irrecevable en ses demandes de réintégration, d'indemnité d'éviction et de dommages-intérêts pour violation de la protection de l'article L. 1225-4-1 du code du travail n'emporte pas la cassation des chefs de dispositif de l'arrêt condamnant l'employeur aux dépens ainsi qu'au paiement d'une somme en application de l'article 700 du code de procédure civile, justifiés par d'autres condamnations prononcées à l'encontre de celui-ci. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief, la Cour : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déclare M. [X] irrecevable en ses demandes de réintégration, d'indemnité d'éviction et de dommages-intérêts pour violation de la protection de l'article L. 1225-4-1 du code du travail, et condamne la société Delta route à payer à M. [X] les sommes de 7 344,83 euros à titre de complément d'indemnité compensatrice de préavis et 734,48 euros au titre des congés payés afférents, 368,53 euros à titre de rappel d'indemnité de licenciement et 24 492,48 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement nul, l'arrêt rendu le 11 juin 2021, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence autrement composée ; Condamne la société Delta route aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Delta route et la condamne à payer à M. [X] la somme de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept septembre deux mille vingt-trois. | TRAVAIL REGLEMENTATION, SANTE ET SECURITE - Paternité - Rupture du contrat de travail - Période de protection - Période de dix semaines suivant la naissance de l'enfant - Validité - Motif étranger à l'arrivée de l'enfant - Impossibilité de maintenir le salarié dans l'entreprise - Contrôle du juge - Etendue - Portée | Aux termes de l'article L. 1225-4-1 du code du travail, aucun employeur ne peut rompre le contrat de travail d'un salarié pendant les dix semaines suivant la naissance de son enfant. Toutefois, l'employeur peut rompre le contrat s'il justifie d'une faute grave de l'intéressé ou de son impossibilité de maintenir ce contrat pour un motif étranger à l'arrivée de l'enfant. Justifie légalement sa décision la cour d'appel qui, après avoir relevé que les griefs énoncés dans la lettre de licenciement ne caractérisaient pas l'impossibilité de maintenir le contrat de travail, déclare nul le licenciement du salarié intervenu pendant cette période |
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JURITEXT000048139589 | JURI | texte/juri/judi/JURI/TEXT/00/00/48/13/95/JURITEXT000048139589.xml | ARRET | Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 27 septembre 2023, 20-22.465, Publié au bulletin | 2023-09-27 00:00:00 | Cour de cassation | 52300927 | Cassation partielle | 20-22465 | oui | CHAMBRE_SOCIALE | 2020-10-08 00:00:00 | Cour d'appel de Paris | M. Sommer | SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés, SCP Spinosi | ECLI:FR:CCASS:2023:SO00927 | LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant : SOC. BD4 COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 27 septembre 2023 Cassation partielle M. SOMMER, président Arrêt n° 927 FS-B Pourvoi n° H 20-22.465 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 27 SEPTEMBRE 2023 M. [Y] [W], domicilié [Adresse 4], a formé le pourvoi n° H 20-22.465 contre l'arrêt rendu le 8 octobre 2020 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 7), dans le litige l'opposant : 1°/ à la société TTT, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 5], 2°/ à la société [O]-Pecou, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, prise en la personne de M. [P] [O], en qualité de mandataire ad litem de la société TTT, dont le siège est [Adresse 1], défenderesses à la cassation. Intervenants volontaires : 1°/ La Fédération Sud commerces et services, dont le siège est [Adresse 2], 2°/ La Confédération nationale des travailleurs - Solidarité ouvrière (CNT-SO), dont le siège est [Adresse 3]. Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Valéry, conseiller référendaire, les observations de la SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés, avocat de M. [W], de la Fédération Sud commerces et services et de la Confédération nationale des travailleurs - Solidarité ouvrière, de la SCP Spinosi, avocat de la société TTT, l'avis écrit de Mme Berriat, premier avocat général, et les observations orales de M. Juan, avocat général, après débats en l'audience publique du 4 juillet 2023 où étaient présents M. Sommer, président, Mme Valéry, conseiller référendaire rapporteur, Mme Capitaine, conseiller doyen, Mmes Lacquemant, Nirdé-Dorail, Salomon, conseillers, Mmes Pecqueur, Laplume, MM. Chiron, Leperchey, conseillers référendaires, M. Juan, avocat général, et Mme Piquot, greffier de chambre, la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 8 octobre 2020), M. [W] a signé le 23 avril 2014 avec la société TTT (la société) un contrat de réalisation de prestations de livraison. 2. La société a rompu le contrat le 25 novembre 2014. 3. M. [W] a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de requalification de cette relation contractuelle en contrat de travail. Examen de la recevabilité de l'intervention volontaire de la Fédération Sud commerces et services et de la Confédération nationale des travailleurs-Solidarité ouvrière 4. Selon les articles 327 et 330 du code de procédure civile, les interventions volontaires ne sont admises devant la Cour de cassation que si elles sont formées à titre accessoire, à l'appui des prétentions d'une partie et ne sont recevables que si leur auteur a intérêt, pour la conservation de ses droits, à soutenir cette partie. 5. La Fédération Sud commerces et services et la Confédération nationale des travailleurs-Solidarité ouvrière ne justifiant pas d'un tel intérêt dans ce litige, leur intervention volontaire n'est pas recevable. Examen du moyen Sur le moyen, pris en ses deuxième, troisième, quatrième, cinquième, sixième et septième branches Enoncé du moyen 6. M. [W] fait grief à l'arrêt de le débouter de l'intégralité de ses demandes tendant à voir reconnaître l'existence d'un contrat de travail avec la société et partant de voir condamner celle-ci à lui verser diverses sommes au titre de l'exécution et de la rupture du contrat de travail, alors : « 2°/ que selon l'article L. 8221-6 du code du travail, les personnes physiques, dans l'exécution de l'activité donnant lieu à immatriculation sur les registres ou répertoires que ce texte énumère, sont présumées ne pas être liées avec le donneur d'ordre par un contrat de travail ; que l'existence d'un contrat de travail peut toutefois être établie lorsque ces personnes fournissent des prestations dans des conditions qui les placent dans un lien de subordination juridique permanente à l'égard du donneur d'ordre ; que le lien de subordination est caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné ; que peut constituer un indice de subordination le travail au sein d'un service organisé lorsque l'employeur en détermine unilatéralement les conditions d'exécution ; qu'il suit de là qu'en retenant, pour débouter M. [W] de l'intégralité de ses demandes, que ce dernier ne rapporte pas la preuve qu'il exerçait ses fonctions dans le cadre d'un service organisé, sans rechercher si, en se connectant à la plateforme TokTokTok, dont le fonctionnement était parfaitement décrit par les parties et le contrat conclu, le coursier n'intégrait pas un service organisé par la société, service qui n'existait que grâce à cette plate-forme, à travers l'utilisation duquel il ne constituait aucune clientèle propre, la cour d'appel a entaché sa décision sa décision d'un défaut de base légale au regard de l'article L. 1221-1 du code du travail ; 3°/ que les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner et analyser tous les éléments de preuve qui leur sont fournis par les parties au soutien de leurs prétention ; qu'en retenant, pour débouter M. [W] de l'intégralité de ses demandes, qu'il n'est pas démontré que la société exerçait un contrôle assorti d'un pouvoir de sanction sur le port de la tenue TTT, les photographies de la tenue "TokTokTok" et les règles d'or du Runner ou l'attestation - 3 - de témoin fournie n'étant pas probantes sur ce point, sans examiner les différentes clauses du contrat de réalisation de prestations ainsi que la charte de qualité de service Tok Tok, démontrant bien l'obligation de porter la tenue au logo de la société sous peine de sanction, à savoir la résiliation du contrat, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ; 4°/ que l'existence d'une relation de travail salariée ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties, ni de la dénomination qu'elles ont donnée à la convention, mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l'activité professionnelle ; qu'en refusant de prendre en compte les stipulations contractuelles liant effectivement les parties, pour retenir l'existence d'un pouvoir de contrôle et de sanction de l'employeur, alors pourtant que les juges du fond peuvent parfaitement se fonder sur les conditions d'exercice de la prestation de travail telles que définies par le contrat, sans pour autant être tenus par les qualifications juridiques qui y sont mentionnées, la cour d'appel a violé l'article L. 1221-1 du code du travail ; 5°/ que selon l'article L. 8221-6 du code du travail, les personnes physiques, dans l'exécution de l'activité donnant lieu à immatriculation sur les registres ou répertoires que ce texte énumère, sont présumées ne pas être liées avec le donneur d'ordre par un contrat de travail ; que l'existence d'un contrat de travail peut toutefois être établie lorsque ces personnes fournissent des prestations dans des conditions qui les placent dans un lien de subordination juridique permanente à l'égard du donneur d'ordre ; que le lien de subordination est caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné ; que peut constituer un indice de subordination le travail au sein d'un service organisé lorsque l'employeur en détermine unilatéralement les conditions d'exécution ; qu'il suit de là qu'en déboutant M. [W] de l'intégralité ses demandes, sans rechercher, comme elle y était pourtant invitée, si l'utilisation d'une carte bancaire fournie par l'employeur, pour effectuer les achats qui étaient ensuite livrés, ne démontrait pas l'intégration du coursier à un service organisé par la société, la cour d'appel a entaché derechef sa décision d'un défaut de base légale au regard de l'article L. 1221-1 du code du travail ; 6°/ que l'existence d'une relation de travail salarié ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties, ni de la dénomination qu'elles ont donnée à la convention, mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l'activité professionnelle ; qu'en s'abstenant de rechercher, comme elle y était pourtant invitée, selon quelles modalités était rémunéré le coursier, alors pourtant que la rémunération du prestataire en fonction d'un taux horaire constitue un indice permettant de retenir l'existence d'une relation de travail salarié, la cour d'appel a entaché derechef sa décision d'un défaut de base légale au regard de l'article L. 1221-1 du code du travail ; 7°/ qu'en s'abstenant encore de s'expliquer sur l'obligation pesant sur le coursier d'accepter la mission qui lui est confiée, quelle que soit ses modalités d'exécution, la cour d'appel a une nouvelle fois entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard de l'article L. 1221-1 du code du travail. » Réponse de la Cour Vu les articles L. 1221-1 et L. 8221-6 du code du travail : 7. Selon le premier de ces textes, le contrat de travail est soumis aux règles du droit commun. 8. Il résulte du second que les personnes physiques, dans l'exécution de l'activité donnant lieu à immatriculation aux registres que ce texte énumère, sont présumées ne pas être liées avec le donneur d'ordre par un contrat de travail. L'existence d'un contrat de travail peut toutefois être établie lorsque ces personnes fournissent des prestations dans des conditions qui les placent dans un lien de subordination juridique permanente à l'égard du donneur d'ordre. 9. Le lien de subordination est caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné. Peut constituer un indice de subordination le travail au sein d'un service organisé lorsque l'employeur en détermine unilatéralement les conditions d'exécution. 10. Pour débouter M. [W] de sa demande, l'arrêt retient que l'intéressé ne rapporte pas la preuve qu'il exerçait ses fonctions dans le cadre d'un service organisé, qu'il se contente d'affirmer, sans produire aucun élément, qu'il n'avait aucune liberté quant à la manière de réaliser son travail dans le choix des lieux d'achat et des biens commandés, qu'il ne justifie pas plus d'un pouvoir de contrôle par la société de son activité et de la faculté pour cette dernière de sanctionner ses agissements, qu'il n'est pas démontré que la société exerçait un contrôle assorti d'un pouvoir de sanction sur le port de la tenue TTT, qu'il ne ressort pas plus des éléments de la cause qu'il aurait été tenu de rendre compte de son activité à la société, que la réalité d'un pouvoir de notation de la société n'est pas plus démontrée, que la seule référence au contrat de prestation de service qui prévoit un droit d'audit et de contrôle de la société n'est pas suffisante, l'existence d'une relation de travail dépendant des conditions de fait dans lesquelles est exercée l'activité du travailleur. 11. L'arrêt retient encore qu'il ne peut être tiré aucune conséquence du contenu de l'article 6-2-17 du contrat, que M. [W] qualifie de clause d'exclusivité ou de non concurrence, l'existence d'une relation de travail dépendant des conditions de fait dans lesquelles est exercée l'activité du travailleur, et que la lettre de résiliation du contrat de prestations de service en date du 25 novembre 2015 envoyée par la société dans le cadre de l'article 16-2 du contrat de prestation de service, qui prévoit que tout manquement du prestataire à l'un de ses engagements contractuels peut entraîner la résiliation du contrat après mise en demeure comportant l'indication des manquements auxquels il doit être mis fin, n'établit pas plus la réalité d'un lien de subordination juridique. 12. En se déterminant ainsi, sans analyser concrètement les conditions effectives dans lesquelles le livreur exerçait son activité, telles que fixées par les stipulations contractuelles, l'intéressé faisant valoir qu'il devait livrer des biens pour le compte de la société TTT sans pouvoir se constituer une clientèle propre ou travailler pour une société concurrente, devait utiliser une carte bancaire fournie par la société TTT pour effectuer les achats qui étaient ensuite livrés, ce dont il déduisait être intégré dans un service organisé, qu'il était rémunéré en fonction d'un taux horaire fixe et avait l'obligation de porter une tenue au logo de la société sous peine de sanction consistant en la résiliation du contrat et d'accepter la commande dès lors qu'il était connecté sans pouvoir la refuser, la cour d'appel a privé sa décision de base légale. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour : DIT irrecevable l'intervention volontaire de la Fédération Sud commerces et services et de la Confédération nationale des travailleurs - Solidarité ouvrière ; CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il rejette l'exception d'incompétence, l'arrêt rendu le 8 octobre 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; Remet, sauf sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ; Condamne la société [O]-Pecou, en qualité de mandataire ad litem de la société TTT, aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société TTT et condamne la société [O]-Pecou, ès qualités, à payer à M. [W] la somme de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept septembre deux mille vingt-trois. | CONTRAT DE TRAVAIL, FORMATION - Définition - Qualification donnée au contrat - Requalification d'un contrat de prestation de services - Conditions effectives d'exercice - Caractérisation - Nécessité - Portée | CONTRAT DE TRAVAIL, FORMATION - Définition - Lien de subordination - Eléments constitutifs - Appréciation - Critères | Le lien de subordination est caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné. Peut constituer un indice de subordination le travail au sein d'un service organisé lorsque l'employeur en détermine unilatéralement les conditions d'exécution. Ne donne pas de base légale à sa décision, l'arrêt qui écarte la demande de requalification d'un contrat de prestations de livraison en contrat de travail, sans analyser concrètement les conditions effectives dans lesquelles le livreur exerçait son activité, telles que fixées par les stipulations contractuelles |
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JURITEXT000048139591 | JURI | texte/juri/judi/JURI/TEXT/00/00/48/13/95/JURITEXT000048139591.xml | ARRET | Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 27 septembre 2023, 21-24.782, Publié au bulletin | 2023-09-27 00:00:00 | Cour de cassation | 52300934 | Cassation partielle | 21-24782 | oui | CHAMBRE_SOCIALE | 2021-09-30 00:00:00 | Cour d'appel de Paris | Mme Monge (conseiller doyen faisant fonction de président) | Me Balat | ECLI:FR:CCASS:2023:SO00934 | LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant : SOC. BD4 COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 27 septembre 2023 Cassation partielle Mme MONGE, conseiller doyen faisant fonction de président Arrêt n° 934 F-B Pourvoi n° W 21-24.782 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 27 SEPTEMBRE 2023 M. [P] [Z], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° W 21-24.782 contre l'arrêt rendu le 30 septembre 2021 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 5), dans le litige l'opposant à la société Transports J.H. Mesguen, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation. Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, sept moyens de cassation. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Lecaplain-Morel, conseiller, les observations de Me Balat, avocat de M. [Z], après débats en l'audience publique du 5 juillet 2023 où étaient présentes Mme Monge, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Lecaplain-Morel, conseiller rapporteur, Mme Cavrois, conseiller, et Mme Jouanneau, greffier de chambre, la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 30 septembre 2021), M. [Z] a été engagé par la société Transports J.H. Mesguen en qualité de conducteur suivant un contrat de travail à durée déterminée du 22 juin au 22 septembre 2015. La relation de travail s'est poursuivie en contrat de travail à durée indéterminée. 2. Le salarié a été licencié le 28 décembre 2017 et dispensé d'exécuter son préavis. 3. Le 25 septembre 2018, il a saisi la juridiction prud'homale de demandes relatives à l'exécution et à la rupture de son contrat de travail. Examen des moyens Sur les cinq premiers moyens 4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Mais sur le sixième moyen Enoncé du moyen 5. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande en paiement d'une indemnité pour non-respect des durées maximales quotidiennes, hebdomadaires et mensuelles de travail, alors « que le seul constat de dépassement de la durée maximale du travail ouvre droit à réparation; qu'en le déboutant de sa demande en paiement d'une indemnité pour non-respect des durées maximales, quotidiennes, hebdomadaires et mensuelles de travail au motif qu'il ne justifiait pas "d'un préjudice distinct de celui réparé au titre du repos compensateur", cependant que le non-respect des durées maximales de travail ouvre à lui seul droit à réparation au profit du salarié, la cour d'appel a violé les articles L. 3121-18, L. 3121-20 et L. 3121-27 du code du travail. » Réponse de la Cour Vu l'article L. 3122-35 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, les articles L. 3122-7 et L. 3122-18 du même code, dans leur rédaction issue de ladite loi, l'article 2.2 de l'accord du 14 novembre 2001 relatif au travail de nuit, attaché à la convention collective nationale des transports routiers et activités auxiliaires du transport du 21 décembre 1950 et l'article 1315, devenu 1353, du code civil : 6. Selon les trois premiers de ces textes, la durée hebdomadaire de travail des travailleurs de nuit, calculée sur une période quelconque de douze semaines consécutives, ne peut dépasser quarante heures mais cette limite peut être portée à quarante-quatre heures par accord collectif lorsque les caractéristiques propres à l'activité d'un secteur le justifient. 7. Selon le quatrième de ces textes, s'agissant des personnels roulants, autres que les personnels roulants grands routiers ou longue distance, des entreprises de transport routier de marchandises, des activités auxiliaires du transport et des entreprises de transport de déménagement dont l'activité s'exerce sur tout ou partie de la période nocturne, telle que définie à l'article 1 de l'accord du 14 novembre 2001, la durée du travail effectif hebdomadaire calculée sur une période quelconque de douze semaines consécutives ne peut excéder 46 heures en application des règles prévues au paragraphe 3, alinéa 1, de l'article 5 du décret n° 83-40 du 26 janvier 1983 modifié. 8. Ces dispositions participent de l'objectif de garantir la sécurité et la santé des travailleurs par la prise d'un repos suffisant et le respect effectif des limitations de durées maximales de travail concrétisé par la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003, concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail et par la directive 2002/15/CE du Parlement européen et du Conseil du 11 mars 2002 relative à l'aménagement du temps de travail des personnes exécutant des activités mobiles de transport routier. 9. Selon le dernier de ces textes, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation. Il en résulte que la preuve du respect des seuils et plafonds prévus par le droit de l'Union européenne et des durées maximales de travail fixées par le droit interne incombe à l'employeur. 10. Pour rejeter la demande du salarié en paiement de dommages-intérêts pour non-respect des durées maximales de travail, l'arrêt, après avoir relevé que ce dernier soutenait avoir régulièrement dépassé la durée maximale hebdomadaire de 46 heures, retient, d'une part, qu'il ressort de la synthèse conducteur que l'amplitude horaire avancée par l'intéressé dans ses écritures ne correspond pas au travail effectif et que ce dernier disposait de temps de repos et de mise à disposition, d'autre part, qu'il ne justifie pas d'un préjudice distinct de celui réparé au titre du repos compensateur. 11. En statuant ainsi, alors que le dépassement de la durée maximale de travail ouvre, à lui seul, droit à la réparation, la cour d'appel, qui n'a pas constaté que l'employeur justifiait avoir respecté la durée hebdomadaire maximale de travail du travailleur de nuit calculée sur une période quelconque de douze semaines consécutives, a violé les textes susvisés. Et sur le septième moyen Enoncé du moyen 12. Le salarié fait grief à l'arrêt de limiter le montant de l'indemnité compensatrice de préavis à une certaine somme, outre les congés payés afférents, alors « que l'indemnité compensatrice de préavis due au salarié est égale au montant des salaires qu'il aurait perçus s'il avait travaillé pendant la durée du préavis ; que, pour limiter la somme allouée à titre d'indemnité de préavis, l'arrêt retient que le salaire mensuel moyen étant en dernier lieu de 2 143,47 euros, il y a lieu d'allouer au salarié une indemnité compensatrice de préavis égale à deux mois de salaire soit la somme de 4 286,94 euros ; qu'en se basant ainsi sur un salaire moyen perçu pour les seules périodes contractuelles antérieures à la rupture, sans prendre en compte le salaire que le salarié aurait dû percevoir s'il avait pu exécuter le préavis, et en excluant en l'occurrence les heures supplémentaires, la prime d'ancienneté et de région parisienne, la cour d'appel a violé les articles L. 1234-1 et L. 1234-5 du code du travail, outre l'article 5 de l'accord du 16 juin 1961. » Réponse de la Cour Vu les articles L. 1234-1 et L. 1234-5 du code du travail : 13. Selon ces textes, l'indemnité compensatrice de préavis due au salarié est égale au montant des salaires qu'il aurait perçus s'il avait travaillé pendant la durée du préavis. 14. Pour limiter la somme allouée à titre d'indemnité compensatrice de préavis, l'arrêt retient que le salaire de base mensuel brut du salarié, hors heures supplémentaires et primes d'ancienneté et de région parisienne incluses, s'élève à 2 143,47 euros, de sorte que l'indemnité compensatrice de préavis est fixée à 4 286,94 euros et l'indemnité de congés payés afférente à la somme de 428,69 euros. 15. En statuant ainsi, en considération du seul salaire de base mensuel brut du salarié, sans prendre en compte le salaire que ce dernier aurait perçu s'il avait exécuté le préavis, la cour d'appel a violé les textes susvisés. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. [Z] de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour non-respect des durées maximales de travail et limite à la somme de 4 286,94 euros, outre 428,69 euros de congés payés afférents, le montant de l'indemnité compensatrice de préavis, l'arrêt rendu le 30 septembre 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ; Condamne la société Transports J.H. Mesguen aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Transports J.H. Mesguen à payer à M. [Z] la somme de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept septembre deux mille vingt-trois. | TRAVAIL REGLEMENTATION, DUREE DU TRAVAIL - Travail de nuit - Durée maximale - Dépassement - Effets - Droit à réparation - Preuve d'un préjudice - Exclusion - Portée | TRAVAIL REGLEMENTATION, DUREE DU TRAVAIL - Durée maximale - Dépassement - Effets - Droit à réparation - Conditions - Preuve d'un préjudice - Exclusion - Cas - Dépassement de la durée hebdomadaire maximale de travail du travailleur de nuit - Portée TRAVAIL REGLEMENTATION, DUREE DU TRAVAIL - Durée maximale - Dépassement - Effets - Droit à réparation - Office du juge - Détermination - Cas - Dépassement de la durée hebdomadaire maximale de travail du travailleur de nuit - Portée | Le dépassement de la durée hebdomadaire maximale de travail du travailleur de nuit calculée sur une période quelconque de douze semaines consécutives ouvre, à lui seul, droit à la réparation. Viole l'article 1315, devenu 1353, du code civil, la cour d'appel qui déboute le salarié de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour non-respect de cette durée maximale de travail, sans constater que l'employeur justifiait l'avoir respectée |
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JURITEXT000048139615 | JURI | texte/juri/judi/JURI/TEXT/00/00/48/13/96/JURITEXT000048139615.xml | ARRET | Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 27 septembre 2023, 21-21.154, Publié au bulletin | 2023-09-27 00:00:00 | Cour de cassation | 52300941 | Rejet | 21-21154 | oui | CHAMBRE_SOCIALE | 2020-10-23 00:00:00 | Cour d'appel de Toulouse | M. Sommer | Me Balat, SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet | ECLI:FR:CCASS:2023:SO00941 | LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant : SOC. AF1 COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 27 septembre 2023 Rejet M. SOMMER, président Arrêt n° 941 FS-B Pourvoi n° C 21-21.154 Aide juridictionnelle totale en demande au profit de M. [X]. Admission du bureau d'aide juridictionnelle près la Cour de cassation en date du 17/06/2021. R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 27 SEPTEMBRE 2023 M. [M] [X], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° C 21-21.154 contre l'arrêt rendu le 23 octobre 2020 par la cour d'appel de Toulouse (4e chambre section 1, chambre sociale), dans le litige l'opposant à la société Ferrières thermelec, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation. Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Sornay, conseiller, les observations de Me Balat, avocat de M. [X], de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de la société Ferrières thermelec, et l'avis de M. Halem, avocat général, après débats en l'audience publique du 5 juillet 2023 où étaient présents M. Sommer, président, M. Sornay, conseiller rapporteur, Mme Monge, conseiller doyen, Mme Cavrois, MM. Rouchayrole, Flores, Mmes Lecaplain-Morel, Deltort, conseillers, Mmes Ala, Thomas-Davost, Techer, conseillers référendaires, M. Halem, avocat général référendaire, et Mme Dumont, greffier de chambre, la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 23 octobre 2020), M. [X] a été mis à la disposition de la société Ferrières thermelec (la société) en qualité de plombier, du 7 septembre 2015 au 6 novembre 2015, suivant plusieurs contrats de mission temporaire pour accroissement d'activité. 2. Il a été engagé en qualité de plombier-chauffagiste le 6 novembre 2015 par cette même société selon un contrat de travail à durée déterminée, pour la période du 9 novembre 2015 au 12 février 2016. 3. Il a saisi le 9 juin 2016 la juridiction prud'homale aux fins notamment de requalification de son contrat de travail à durée déterminée en un contrat à durée indéterminée et en paiement de diverses sommes au titre de l'exécution et de la rupture de ce contrat. Examen du moyen Enoncé du moyen 4. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de ses demandes, alors « que le recours à des contrats de missions successifs pour faire face à un accroissement temporaire d'activité sans que soit respecté le délai de carence justifie la requalification du premier de ces contrats en contrat à durée indéterminée à l'égard de l'entreprise utilisatrice ; qu'en constatant "qu'à l'issue du terme des contrats de mission, la sarl intimée a conclu un contrat de travail à durée déterminée avec le même salarié et ce en ne respectant pas le délai de carence", puis en déboutant toutefois l'intéressé de sa demande tendant à la requalification de son contrat de travail, au motif qu'"aucune disposition ne prévoit, dans le cas de la succession d'un contrat de travail temporaire et d'un contrat de travail à durée déterminée au bénéfice de l'ancienne entreprise utilisatrice, la sanction de la requalification en contrat de travail à durée indéterminée en cas de non-respect du délai de carence", la cour d'appel a violé les articles L. 1251-36 et L. 1251-40 du code du travail dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017. » Réponse de la Cour 5. Selon le premier alinéa de l'article L. 1251-36 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, à l'expiration d'un contrat de mission, il ne peut être recouru, pour pourvoir le poste du salarié dont le contrat a pris fin, ni à un contrat à durée déterminée ni à un contrat de mission, avant l'expiration d'un délai de carence calculé en fonction de la durée du contrat de mission incluant, le cas échéant, son ou ses deux renouvellements. 6. Aux termes de l'article L. 1251-40 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, lorsqu'une entreprise utilisatrice a recours à un salarié d'une entreprise de travail temporaire en méconnaissance des dispositions des articles L. 1251- 5 à L. 1251-7, L. 1251-10 à L. 1251-12, L. 1251-30 et L. 1251-35, ce salarié peut faire valoir auprès de l'entreprise utilisatrice les droits correspondant à un contrat de travail à durée indéterminée prenant effet au premier jour de sa mission. 7. Selon l'article L. 1245-1 du même code, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, est réputé à durée indéterminée tout contrat de travail conclu en méconnaissance des dispositions des articles L. 1242-1 à L. 1242-4, L. 1242-6, L. 1242-7, L. 1242-8-1, L. 1242-12, alinéa 1, L. 1243-11, alinéa 1, L. 1243-13-1, L. 1244-3-1 et L. 1244-4-1, et des stipulations des conventions ou accords de branche conclus en application des articles L. 1242-8, L. 1243-13, L. 1244-3 et L. 1244-4. 8. Il en résulte qu'aucune disposition ne prévoit, dans le cas de la succession d'un contrat de travail temporaire et d'un contrat de travail à durée déterminée au bénéfice de l'ancienne entreprise utilisatrice, la sanction de la requalification en contrat de travail à durée indéterminée en cas de non-respect du délai de carence. 9. L'arrêt relève qu'à l'issue du terme des contrats de mission de l'intéressé, la société a conclu un contrat de travail à durée déterminée avec le même salarié sans respecter le délai de carence. 10. La cour d'appel en a déduit à bon droit que le salarié devait être débouté de sa demande en requalification, pour non-respect du délai de carence, du contrat de travail à durée déterminée conclu le 6 novembre 2015. 11. Le moyen est donc mal fondé. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne M. [X] aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept septembre deux mille vingt-trois. | TRAVAIL TEMPORAIRE - Contrat de mission - Contrat à durée déterminée succédant au contrat de mission - Délai de carence - Respect - Défaut - Sanction - Requalification en contrat à durée indéterminée (non) - Conditions - Détermination | CONTRAT DE TRAVAIL, DUREE DETERMINEE - Qualification donnée au contrat - Demande de requalification - Requalification par le juge - Refus - Cas - Contrat à durée déterminée succédant à un contrat de mission - Non-respect du délai de carence - Absence de sanction - Fondement - Détermination - Portée | Selon le premier alinéa de l'article L.1251-36 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, à l'expiration d'un contrat de mission, il ne peut être recouru, pour pourvoir le poste du salarié dont le contrat a pris fin, ni à un contrat à durée déterminée ni à un contrat de mission, avant l'expiration d'un délai de carence calculé en fonction de la durée du contrat de mission incluant, le cas échéant, son ou ses deux renouvellements. Il résulte des articles L. 1251-40 et L. 1245-1 du même code, dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, qu'aucune disposition ne prévoit, dans le cas de la succession d'un contrat de travail temporaire et d'un contrat de travail à durée déterminée au bénéfice de l'ancienne entreprise utilisatrice, la sanction de la requalification en contrat de travail à durée indéterminée en cas de non-respect du délai de carence prévu par l'article L. 1251-36 précité |
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JURITEXT000048139617 | JURI | texte/juri/judi/JURI/TEXT/00/00/48/13/96/JURITEXT000048139617.xml | ARRET | Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 27 septembre 2023, 21-19.383, Publié au bulletin | 2023-09-27 00:00:00 | Cour de cassation | 52300942 | Cassation partielle | 21-19383 | oui | CHAMBRE_SOCIALE | 2021-05-12 00:00:00 | Cour d'appel de Versailles | M. Sommer | Me Haas, SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet | ECLI:FR:CCASS:2023:SO00942 | LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant : SOC. OR COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 27 septembre 2023 Cassation partielle M. SOMMER, président Arrêt n° 942 FS-B Pourvoi n° C 21-19.383 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 27 SEPTEMBRE 2023 M. [O] [G], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° C 21-19.383 contre l'arrêt rendu le 12 mai 2021 par la cour d'appel de Versailles (15e chambre), dans le litige l'opposant à la société Transports du Val d'Oise, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation. La société Transports du Val d'Oise a formé un pourvoi incident éventuel contre le même arrêt. Le demandeur au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, un moyen de cassation. La demanderesse au pourvoi incident éventuel invoque, à l'appui de son recours, un moyen de cassation. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Lecaplain-Morel, conseiller, les observations de Me Haas, avocat de M. [G], de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de la société Transports du Val d'Oise, et l'avis de M. Halem, avocat général, après débats en l'audience publique du 5 juillet 2023 où étaient présents M. Sommer, président, Mme Lecaplain-Morel, conseiller rapporteur, Mme Monge conseiller doyen, Mme Cavrois, MM. Sornay, Rouchayrole, Flores, Mme Deltort, conseillers, Mmes Ala, Thomas-Davost, Techer, conseillers référendaires, M. Halem, avocat général référendaire, et Mme Dumont, greffier de chambre, la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué ( Versailles, 12 mai 2021), M. [G] a été engagé en qualité de conducteur receveur par la société Transports du Val-d'Oise (la société), par un contrat de travail du 22 octobre 1990. La relation de travail est soumise à la convention collective nationale des réseaux de transports publics urbains de voyageurs du 11 avril 1986. 2. Le 14 décembre 2015, le salarié a saisi la juridiction prud'homale afin de contester la déduction forfaitaire spécifique pour frais professionnels appliquée par l'employeur pour déterminer l'assiette de calcul de ses cotisations de sécurité sociale et d'obtenir le paiement de dommages-intérêts en réparation des préjudices en découlant pour lui. Examen des moyens Sur le moyen du pourvoi incident de l'employeur Enoncé du moyen 3. L'employeur fait grief à l'arrêt de dire que le salarié ne peut valablement se voir opposer le principe de l'unicité de l'instance, alors « qu'il résulte de ce principe, applicable aux instances prud'homales engagées avant le 1er août 2016, qu'une instance ne peut être engagée postérieurement à une première procédure prud'homale que lorsque le fondement des nouvelles prétentions est né ou s'est révélé après la clôture des débats de l'instance antérieure ; qu'en l'espèce, pour retenir que les demandes du salarié liées à l'abattement forfaitaire de 20 % appliqué sur les salaires étaient nées postérieurement à la date de la dernière audience qui s'était tenue le 17 octobre 2013 devant la cour d'appel de Versailles, la cour d'appel s'est bornée à relever qu'"il apparaît des bulletins de paie versés aux débats par le salarié que l'application de l'abattement n'a pas été porté à la connaissance des salariés par l'employeur dès lors que cet abattement ne figurait pas distinctement sur ceux-ci" ; qu'en statuant ainsi quand, dès lors que l'assiette mentionnée sur les bulletins de paie du salarié pour le calcul des cotisations de sécurité sociale avait toujours correspondu au salaire brut déduit de 20 %, cela suffisait à ce que le fondement des demandes qui critiquaient cet abattement soit né et ait été révélé antérieurement au 17 octobre 2013, peu important qu'il n'ait pas été mentionné distinctement sur les bulletins de paie que cet abattement de 20 % était appliqué au titre des frais professionnels, la cour d'appel a violé l'article R. 1452-6 du code du travail dans sa version antérieure au décret n° 2016-660 du 20 mai 2016. » Réponse de la Cour 4. En application de l'article R. 1452-6 du code du travail, dans sa rédaction antérieure au décret n° 2016-660 du 20 mai 2016, une instance peut être engagée postérieurement à une première procédure prud'homale lorsque le fondement des nouvelles prétentions est né ou s'est révélé après l'extinction de l'instance primitive. Il en résulte que sont recevables des demandes formées dans une nouvelle procédure dès lors que leur fondement est né ou s'est révélé après la clôture des débats de l'instance antérieure. 5. Appréciant souverainement les éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, la cour d'appel qui, constatant que la déduction forfaitaire spécifique pour frais professionnels ne figurait pas distinctement sur les bulletins de paie établis jusqu'au 17 octobre 2013, date de clôture des débats devant la cour d'appel saisie des précédentes demandes, a retenu que l'application de cet abattement n'avait pas été portée à la connaissance du salarié à cette date, en a exactement déduit que l'employeur ne pouvait pas lui opposer la règle de l'unicité de l'instance au titre d'une nouvelle instance portant sur des prétentions dont le fondement avait été révélé au salarié après l'achèvement de la précédente instance. 6. Le moyen n'est donc pas fondé. Mais sur le moyen du pourvoi principal du salarié, pris en sa première branche Enoncé du moyen 7. Le salarié fait grief à l'arrêt de dire que les conditions de mise en place de l'abattement pour frais professionnels au sein de la société ont été respectées et de le débouter de ses demandes en réparation, alors « que la possibilité de bénéficier de la déduction forfaitaire spécifique pour frais professionnels n'est ouverte qu'à l'égard des professions énumérées à l'article 5 de l'annexe IV du code général des impôts ; que figurent au nombre de ces professions celles de "chauffeurs et receveurs convoyeurs de cars services réguliers ou occasionnels" ; qu'en considérant que l'employeur avait pu appliquer au salarié un abattement pour frais professionnels dès lors que celui-ci exerçait un emploi de "chauffeurs de lignes régulières", sans rechercher, comme elle y était invitée, si l'emploi de conducteur d'autobus - et non de car - exercé par ce salarié figurait au nombre des professions énumérées à l'article 5 de l'annexe IV du code général des impôts, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 9 de l'arrêté du 20 décembre 2002, relatif aux frais professionnels déductibles pour le calcul des cotisations de sécurité sociale, dans sa rédaction issue de l'article 6 de l'arrêté du 25 juillet 2005. » Réponse de la Cour Vu l'article 9 de l'arrêté du 20 décembre 2002, relatif aux frais professionnels déductibles pour le calcul des cotisations de sécurité sociale, dans sa rédaction issue de l'article 6 de l'arrêté du 25 juillet 2005, et l'article 5 de l'annexe IV du code général des impôts, dans sa rédaction en vigueur au 31 décembre 2000 : 8. Il résulte de ces textes que la possibilité de bénéficier de la déduction forfaitaire spécifique pour frais professionnels n'est ouverte qu'aux professions énumérées à l'article 5 de l'annexe IV du code général des impôts, dont le tableau prévoit celle des chauffeurs et receveurs convoyeurs de cars à services réguliers ou occasionnels. 9. Le bénéfice de la déduction forfaitaire spécifique pour frais professionnels est lié à l'activité professionnelle du salarié, non à l'activité générale de l'entreprise qui l'emploie. 10. Pour dire que les conditions de mise en place de l'abattement pour frais professionnels au sein de la société ont été respectées et débouter le salarié de ses prétentions, l'arrêt relève que la société assure l'exploitation d'une ligne de transport de voyageurs qui figure au plan de transports du département sur la liste des "services réguliers". Il retient que, par suite, les receveurs convoyeurs affectés à cette ligne entrent dans la catégorie prévue par la disposition de l'article 5 de l'annexe IV du code général des impôts. Il ajoute que le salarié appartient à l'une des professions visées puisqu'il est chauffeur de lignes régulières. 11. En se déterminant ainsi, par des motifs qui ne suffisent pas à caractériser que le salarié exerce la profession de chauffeur et receveur convoyeur de cars à services réguliers ou occasionnels mentionnée à l'article 5 de l'annexe IV du code général des impôts, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour : REJETTE le pourvoi incident ; CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il dit que M. [G] ne peut se voir opposer le principe de l'unicité de l'instance et en ce qu'il le déclare irrecevable en ses demandes d'indemnisation pour la période antérieure au mois de décembre 2008, l'arrêt rendu le 12 mai 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; Remet, sauf sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Versailles autrement composée ; Condamne la société Transports du Val d'Oise aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Transports du Val d'Oise et la condamne à payer à M. [G] la somme de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept septembre deux mille vingt-trois. | SECURITE SOCIALE - Cotisations - Assiette - Abattement pour frais professionnels - Déduction forfaitaire spécifique - Champ d'application - Etendue - Cas - Chauffeurs et receveurs convoyeurs de cars à services réguliers ou occasionnels - Portée | TRANSPORTS ROUTIERS - Transport public urbain de voyageurs - Profession - Sécurité sociale - Cotisations - Assiette - Abattement pour frais professionnels - Déduction forfaitaire spécifique - Champ d'application - Etendue - Cas - Chauffeurs et receveurs convoyeurs de cars à services réguliers ou occasionnels - Portée | Il résulte de l'article 9 de l'arrêté du 20 décembre 2002, relatif aux frais professionnels déductibles pour le calcul des cotisations de sécurité sociale, dans sa rédaction issue de l'article 6 de l'arrêté du 25 juillet 2005, et de l'article 5 de l'annexe IV du code général des impôts, dans sa rédaction en vigueur au 31 décembre 2000, que seules relèvent du champ d'application de la déduction forfaitaire spécifique les professions énumérées au second de ces textes, dont le tableau prévoit celle des chauffeurs et receveurs convoyeurs de cars à services réguliers ou occasionnels. Ne donne pas de base légale à sa décision, la cour d'appel qui, pour rejeter la demande indemnitaire du salarié soutenant que la déduction forfaitaire spécifique ne devait pas lui être appliquée, ne caractérise pas que celui-ci exerce cette profession |
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JURITEXT000048139619 | JURI | texte/juri/judi/JURI/TEXT/00/00/48/13/96/JURITEXT000048139619.xml | ARRET | Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 27 septembre 2023, 21-23.558, Publié au bulletin | 2023-09-27 00:00:00 | Cour de cassation | 52300944 | Rejet | 21-23558 | oui | CHAMBRE_SOCIALE | 2021-08-26 00:00:00 | Conseil de prud'hommes de Vichy | M. Sommer | SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol | ECLI:FR:CCASS:2023:SO00944 | LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant : SOC. BD4 COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 27 septembre 2023 Rejet M. SOMMER, président Arrêt n° 944 FS-B Pourvoi n° R 21-23.558 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 27 SEPTEMBRE 2023 Mme [G] [Y], domiciliée [Adresse 1], a formé le pourvoi n° R 21-23.558 contre le jugement rendu le 26 août 2021 par le conseil de prud'hommes de Vichy (départage, section activités diverses), dans le litige l'opposant à la société Framont-Boufferet, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation. La société Framont-Boufferet a formé un pourvoi incident contre le même arrêt. La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, un moyen de cassation. La demanderesse au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, un moyen de cassation. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Lecaplain-Morel, conseiller, les observations de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de Mme [Y], de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société Framont-Boufferet, et l'avis de M. Halem, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 5 juillet 2023 où étaient présents M. Sommer, président, Mme Lecaplain-Morel, conseiller rapporteur, Mme Monge, conseiller doyen, Mme Cavrois, MM. Sornay, Rouchayrole, Flores, Mme Deltort, conseillers, Mmes Ala, Thomas-Davost, Techer, conseillers référendaires, M. Halem, avocat général référendaire, et Mme Dumont, greffier de chambre, la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon le jugement attaqué (conseil de prud'hommes de Vichy, 26 août 2021), rendu en dernier ressort, Mme [Y] a été engagée en qualité de chauffeur ambulancier par la société Framont-Boufferet à compter du 2 janvier 2012. 2. La convention collective applicable est la convention collective nationale des transports routiers et activités auxiliaires du transport du 21 décembre 1950. 3. Le 30 septembre 2019, la salariée a saisi la juridiction prud'homale, notamment, d'une demande en paiement d'un rappel d'indemnités au titre des repas. Examen des moyens Sur le moyen du pourvoi principal de la salariée Enoncé du moyen 4. La salariée fait grief au jugement de limiter à une certaine somme le montant du rappel sur indemnités de repas pour la période du 1er octobre 2016 au 31 août 2019, alors : « 1°/ que le salarié dont l'amplitude de la journée de travail couvre entièrement la période comprise entre 11 heures et 14 heures 30, qui dispose à son lieu de travail d'une coupure d'une durée ininterrompue supérieure à une heure, dont une fraction, au moins égale à trente minutes, est comprise entre 11 heures et 14 heures 30, perçoit une indemnité de repas spéciale ; qu'en retenant, pour refuser de faire droit à la demande de la salariée au titre des indemnités de repas spéciales, qu'il résulte de l'article 2 du protocole du 30 avril 1974 que les dispositions de l'article 8 de ce même protocole relatives aux conditions d'attribution de l'indemnité de repas unique ne sont applicables qu'aux salariés contraints, du fait d'un déplacement, de prendre un repas hors de leur domicile ou de leur lieu de travail, le conseil de prud'hommes a violé l'article 8 du protocole du 30 avril 1974 conclu en application de l'article 10 de la convention collective des transports routiers du 16 juin 1961, annexe 1, ensemble l'article 2 dudit protocole ; 2°/ que le salarié dont l'amplitude de la journée de travail couvre entièrement la période comprise entre 11 heures et 14 heures 30, qui dispose à son lieu de travail d'une coupure ou d'une fraction de coupure d'une durée ininterrompue inférieure à une heure perçoit l'indemnité de repas unique ; qu'en retenant, pour refuser de faire droit à la demande de la salariée au titre des indemnités de repas unique, qu'il résulte de l'article 2 du protocole du 30 avril 1974 que les dispositions de l'article 8 de ce même protocole relatives aux conditions d'attribution de l'indemnité de repas unique ne sont applicables qu'aux salariés contraints, du fait d'un déplacement, de prendre un repas hors de leur domicile ou de leur lieu de travail et que le salarié ne pouvait prétendre au paiement d'indemnité de repas unique pour les jours de travail sans déplacement, avec une pause de repas susceptible d'être effectuée sur le lieu de travail, quelle que soit la durée de cette pause, le conseil de prud'hommes a violé l'article 8 du protocole du 30 avril 1974 conclu en application de l'article 10 de la convention collective des transports routiers du 16 juin 1961, annexe 1, ensemble l'article 2 dudit protocole. » Réponse de la Cour 5. Selon l'article 2 du protocole du 30 avril 1974 relatif aux frais de déplacement des ouvriers annexé à la convention collective nationale des transports routiers et des activités auxiliaires du transport du 21 décembre 1950, les indemnités de repas et les indemnités de repas unique sont une somme forfaitaire allouée par l'employeur au salarié en déplacement, en complément de ce que celui-ci aurait dépensé s'il avait pris son repas à son domicile ou à son lieu de travail, le déplacement étant défini comme l'obligation impliquée par le service de quitter le lieu de travail et le domicile. 6. L'article 8 de ce protocole dispose : 1° Le personnel qui se trouve, en raison d'un déplacement impliqué par le service, obligé de prendre un repas hors de son lieu de travail perçoit une indemnité de repas unique, dont le taux est fixé par le tableau joint au présent protocole, sauf taux plus élevé résultant des usages. [...] 2° Ne peut prétendre à l'indemnité de repas unique : a) Le personnel dont l'amplitude de la journée de travail ne couvre pas entièrement la période comprise soit entre 11 heures et 14 heures 30, soit entre 18 heures 30 et 22 heures ; b) Le personnel qui dispose à son lieu de travail d'une coupure ou d'une fraction de coupure, d'une durée ininterrompue d'au moins 1 heure, soit entre 11 heures et 14 heures 30, soit entre 18 heures 30 et 22 heures. Toutefois, si le personnel dispose à son lieu de travail d'une coupure d'une durée ininterrompue d'au moins 1 heure et dont une fraction au moins égale à 30 minutes est comprise soit entre 11 heures et 14 heures 30, soit entre 18 heures 30 et 22 heures, une indemnité spéciale, dont le taux est fixé par le tableau joint au présent protocole, lui est attribuée. 7. Il en résulte que les dispositions du second de ces textes relatives aux conditions d'attribution de l'indemnité de repas unique ne sont applicables qu'aux salariés contraints, du fait d'un déplacement, de prendre un repas hors de leur domicile ou de leur lieu de travail. 8. Il en résulte encore que celles de ce même texte relatives aux conditions d'attribution de l'indemnité spéciale ne sont applicables qu'aux salariés en situation de déplacement, au sens de l'article 2 du protocole, dont l'amplitude de la journée de travail couvre entièrement la période comprise soit entre 11 heures et 14 heures 30, soit entre 18 heures 30 et 22 heures et qui disposent, à leur lieu de travail, d'une coupure d'une durée ininterrompue d'au moins une heure et dont une fraction, au moins égale à trente minutes, est comprise soit entre 11 heures et 14 heures 30, soit entre 18 heures 30 et 22 heures. 9. Le conseil de prud'hommes, qui a relevé que les réclamations formées au titre des indemnités de repas unique et des indemnités spéciales se rapportaient à des journées de travail sans déplacement, en a exactement déduit que la salariée ne pouvait y prétendre. 10. Le moyen n'est donc pas fondé. Sur le moyen du pourvoi incident de l'employeur Enoncé du moyen 11. L'employeur fait grief au jugement de le condamner à payer à la salariée une certaine somme à titre de rappel sur indemnité de repas pour la période du 1er octobre 2016 au 31 août 2019, alors « que l'octroi à un salarié de la majoration de l'indemnité de repas unique prévue à l'article 8, 1°, alinéa 2, du protocole du 30 avril 1974 suppose notamment "un déplacement effectué en dehors de ses conditions habituelles de travail" ; que l'identification des "conditions habituelles de travail" nécessite d'examiner les habitudes de travail et de prendre en compte ce qui est constant ou fréquent dans les conditions de travail, et particulièrement de déplacement; qu'en l'espèce, le conseil de prud'hommes a retenu que "ni la convention collective ni le protocole du 30 avril 1974 ne stipulent qu'un trajet inférieur à une certaine distance doit être considéré comme ressortant des conditions habituelles de travail pour un ambulancier, et ce peu importe la fréquence des déplacements réalisés en certains lieux. Mme [Y] ayant été embauchée par la société Framont-Boufferet dont le siège social est situé à [Localité 6], il y a lieu de considérer que les déplacements à [Localité 3], [Localité 4] et [Localité 5] ne relèvent pas des conditions habituelles de travail du salarié" ; qu'en statuant ainsi au regard de la localisation du siège social de l'entreprise, sans prendre en compte, pour déterminer ce qui relevait des conditions habituelles de travail de la salariée, la fréquence des déplacements réalisés en certains lieux dont justifiait l'employeur en soulignant avoir acté avec les délégués du personnel que ces trajets de faible distance ne pouvaient ouvrir droit à l'indemnité de repas unique, le conseil de prud'hommes a violé l'article 8 du protocole du 30 avril 1974 conclu en application de l'article 10 de la convention collective des transports routiers du 16 juin 1961, annexe 1. » Réponse de la Cour 12. Selon l'article 8, 1°, du protocole du 30 avril 1974 relatif aux frais de déplacement des ouvriers annexé à la convention collective nationale des transports routiers et des activités auxiliaires du transport du 21 décembre 1950, le personnel qui se trouve, en raison d'un déplacement impliqué par le service, obligé de prendre un repas hors de son lieu de travail perçoit une indemnité de repas unique, dont le taux est fixé par le tableau joint au protocole, sauf taux plus élevé résultant des usages. Toutefois, lorsque le personnel n'a pas été averti au moins la veille et au plus tard à midi d'un déplacement effectué en dehors de ses conditions habituelles de travail, l'indemnité de repas unique qui lui est allouée est égale au montant de l'indemnité de repas, dont le taux est également fixé par le tableau joint au présent protocole. 13. Le jugement constate, d'abord, que l'employeur ne conteste pas les déplacements impliqués par le service ayant imposé à la salariée de prendre un repas hors de son lieu de travail et qu'il ne démontre pas l'en avoir informée au moins la veille à midi. Il retient que le compte-rendu de réunion du 25 octobre 2004, signé par l'employeur et trois représentants du personnel, qui définit les déplacements effectués en dehors des conditions habituelles de travail, n'a pas valeur d'accord d'entreprise et que, restreignant les droits de la salariée, s'agissant des conditions habituelles de travail, il ne lui est pas opposable. Il relève encore que, ni la convention collective, ni le protocole d'accord du 30 avril 1974 ne stipulent qu'un trajet inférieur à une certaine distance devait être considéré comme ressortant des conditions habituelles de travail pour un ambulancier et ce, peu important la fréquence des déplacements réalisés en certains lieux. Il retient enfin que, le siège social de l'entreprise étant situé à [Localité 6], il y a lieu de considérer que les déplacements à [Localité 3], [Localité 4] et [Localité 5] ne relèvent pas des conditions habituelles de travail de la salariée. 14. En l'état de ses constatations, le conseil de prud'hommes, qui n'était pas tenu de s'expliquer sur une circonstance inopérante, en a exactement déduit que, s'agissant des déplacements en cause, il y avait lieu d'accorder à la salariée les indemnités de repas sollicitées. 15. Le moyen n'est donc pas fondé. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE les pourvois ; Laisse à chacune des parties la charge des dépens par elle exposés ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept septembre deux mille vingt-trois. | STATUT COLLECTIF DU TRAVAIL - Conventions et accords collectifs - Conventions diverses - Convention collective nationale des transports routiers et activités auxiliaires du transport du 21 décembre 1950 - Protocole du 30 avril 1974 annexé - Article 8 - Indemnité de repas unique - Attribution - Conditions - Moment de la prise du repas - Obligation du repas hors du domicile ou du lieu de travail - Portée | Les dispositions de l'article 8 du protocole du 30 avril 1974 annexé à la convention collective nationale des transports routiers et activités auxiliaires du transport du 21 décembre 1950 relatives aux conditions d'attribution de l'indemnité de repas unique ne sont applicables qu'aux salariés contraints, du fait d'un déplacement, de prendre un repas hors de leur domicile ou de leur lieu de travail |
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JURITEXT000048139621 | JURI | texte/juri/judi/JURI/TEXT/00/00/48/13/96/JURITEXT000048139621.xml | ARRET | Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 27 septembre 2023, 21-14.773, Publié au bulletin | 2023-09-27 00:00:00 | Cour de cassation | 52300946 | Rejet | 21-14773 | oui | CHAMBRE_SOCIALE | 2021-01-22 00:00:00 | Cour d'appel d'Aix-en-Provence | M. Sommer | SARL Cabinet Munier-Apaire, SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol | ECLI:FR:CCASS:2023:SO00946 | LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant : SOC. OR COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 27 septembre 2023 Rejet M. SOMMER, président Arrêt n° 946 FS-B Pourvoi n° S 21-14.773 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 27 SEPTEMBRE 2023 M. [R] [X], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° S 21-14.773 contre l'arrêt rendu le 22 janvier 2021 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 4-2), dans le litige l'opposant à la société Ortec industrie, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation. Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Lecaplain-Morel, conseiller, les observations de la SARL Cabinet Munier-Apaire, avocat de M. [X], de la SCP Gatineau,Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société Ortec industrie, et l'avis de M. Halem, avocat général, après débats en l'audience publique du 5 juillet 2023 où étaient présents M. Sommer, président, Mme Lecaplain-Morel, conseiller rapporteur, Mme Monge conseiller doyen, Mme Cavrois, MM. Sornay, Rouchayrole, Flores, Mme Deltort, conseillers, Mmes Ala, Thomas-Davost, Techer, conseillers référendaires, M. Halem, avocat général référendaire, et Mme Dumont, greffier de chambre, la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 22 janvier 2021), M. [X] a été mis à la disposition de la société Ortec industrie, en qualité de nettoyeur industriel - conducteur d'engins, par plusieurs contrats de mission, le terme du dernier contrat étant fixé au 6 mars 2015. 2. Par lettre du 5 mars 2015, le salarié a informé l'entreprise utilisatrice de ce que, admis à faire valoir ses droits à la retraite à compter du 23 mars 2015, il « quittait son travail » et retournait dans son pays natal. 3. Le 13 avril 2015, il a saisi la juridiction prud'homale d'une demande en requalification de ses contrats de mission en contrat de travail à durée indéterminée et de demandes relatives à l'exécution et à la rupture de la relation de travail. Examen du moyen Enoncé du moyen 4. Le salarié fait grief à l'arrêt de dire que la rupture de la relation contractuelle procède du départ à la retraite et non d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et de le débouter de ses demandes concernant la rupture du contrat de travail, alors : « 1°/ qu'à défaut de respecter la procédure de licenciement, la rupture de la relation contractuelle par la survenance du terme du dernier contrat de mission temporaire requalifié en contrat de travail à durée indéterminée, constitue un licenciement sans cause réelle et sérieuse ; que la cour d'appel, qui a elle-même constaté que le terme du dernier contrat de mission était fixé au 6 mars 2015 et que le salarié ne serait admis à faire valoir ses droits à la retraite qu'à compter du 23 mars 2015, ce que l'employeur reconnaissait lui-même, ne pouvait retenir que "la relation de travail, même requalifiée en un contrat de travail à durée indéterminée, a pris fin par le départ à la retraite du salarié et non à raison d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse" quand il ressortait de ses propres constatations que le départ à la retraite du salarié était survenu postérieurement au terme de sa dernière mission qui, en l'absence de lettre de licenciement, constituait un licenciement sans cause réelle et sérieuse ; qu'en déboutant le salarié de ses demandes de dommages-intérêts au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations et de la requalification des contrats de missions temporaires en contrat à durée indéterminée, a violé les articles L. 1232-1, L. 1245-1 et L. 1245-5 du code du travail ; 2°/ que le juge ne peut dénaturer les pièces soumises à son examen ; qu'en l'espèce, pour juger que "la relation de travail, même requalifiée en un contrat de travail à durée indéterminée, a pris fin par le départ à la retraite du salarié et non à raison d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse", la cour d'appel a retenu qu'"aux termes de sa lettre du 5 mars 2015 par laquelle, à la veille du terme du dernier contrat de mission, [le salarié] informait [l'employeur] qu'il prenait sa retraite" en occultant que le salarié y avait précisé : "admis à faire valoir mes droits à la retraite à compter du 23 mars 2015 prochain", soit à une date postérieure au terme, fixé au 6 mars 2015, du dernier contrat de mission temporaire requalifié en contrat à durée indéterminée ; en statuant ainsi, la cour d'appel a dénaturé par omission les termes de la lettre du 5 mars 2015 soumise à son examen, en violation du principe susvisé ; 3°/ le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motif ; qu'en l'espèce, le salarié avait pertinemment fait valoir que, dès le 3 mars 2015, l'employeur lui avait demandé de ne plus venir travailler, ce que ce dernier avait lui-même reconnu, de sorte que la lettre du 5 mars 2015 devait être replacée dans ce contexte d'un contrat à durée déterminée expirant le 6 mars 2015 mais qui avait - de fait - déjà pris fin, ce qui excluait que la lettre du 5 mars, qui précisait que le départ à la retraite s'effectuerait "à compter du 23 mars 2015 prochain" puisse constituer une lettre de rupture à l'initiative du salarié ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. » Réponse de la Cour 5. Il résulte de l'article L. 1237-9 du code du travail que le départ à la retraite du salarié est un acte unilatéral par lequel le salarié manifeste de façon claire et non équivoque sa volonté de mettre fin au contrat de travail. 6. Ayant, par une appréciation souveraine des éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, retenu, hors dénaturation, que, par sa lettre du 5 mars 2015, le salarié avait, à la veille du terme du dernier contrat de mission, notifié à l'employeur sa décision de prendre sa retraite et ce, sans jamais imputer son départ à la retraite à un manquement de l'employeur, y compris dans ses dernières écritures, la cour d'appel, qui n'avait pas à répondre à une allégation dépourvue d'offre de preuve, en a exactement déduit que la relation de travail requalifiée en contrat de travail à durée indéterminée avait pris fin au jour de la notification du départ à la retraite du salarié et non à raison d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse. 7. Le moyen n'est donc pas fondé. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne M. [X] aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept septembre deux mille vingt-trois. | CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Retraite - Départ à la retraite - Acte unilatéral du salarié - Manifestation de volonté claire et non équivoque - Cas - Notification à l'entreprise utilisatrice - Date - Départ antérieur au terme du contrat de mission - Détermination - Portée | Le départ à la retraite d'un salarié est un acte unilatéral par lequel celui-ci manifeste de façon claire et non équivoque sa volonté de mettre fin au contrat de travail. Il en résulte que, lorsque le salarié notifie à l'entreprise utilisatrice, de façon claire et non équivoque, sa décision de prendre sa retraite avant le terme du contrat de mission, la relation de travail requalifiée en contrat de travail à durée indéterminée prend fin au jour de la notification du départ volontaire à la retraite du salarié et non à raison d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse |
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JURITEXT000048139632 | JURI | texte/juri/judi/JURI/TEXT/00/00/48/13/96/JURITEXT000048139632.xml | ARRET | Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 27 septembre 2023, 21-19.483, Publié au bulletin | 2023-09-27 00:00:00 | Cour de cassation | 52300947 | Rejet | 21-19483 | oui | CHAMBRE_SOCIALE | 2021-05-20 00:00:00 | Cour d'appel de Versailles | M. Sommer | Me Galy, SCP Waquet, Farge et Hazan | ECLI:FR:CCASS:2023:SO00947 | LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant : SOC. AF1 COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 27 septembre 2023 Rejet M. SOMMER, président Arrêt n° 947 FS-B Pourvoi n° M 21-19.483 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 27 SEPTEMBRE 2023 Mme [J] [M], domiciliée [Adresse 1], a formé le pourvoi n° M 21-19.483 contre l'arrêt rendu le 20 mai 2021 par la cour d'appel de Versailles (11e chambre), dans le litige l'opposant à la société Devoteam, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Lecaplain-Morel, conseiller, les observations de Me Isabelle Galy, avocat de Mme [M], de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de la société Devoteam, et l'avis de M. Halem, avocat général, après débats en l'audience publique du 5 juillet 2023 où étaient présents M. Sommer, président, Mme Lecaplain-Morel, conseiller rapporteur, Mme Monge, conseiller doyen, Mme Cavrois, MM. Sornay, Rouchayrole, Flores, Mme Deltort, conseillers, Mmes Ala, Thomas-Davost, Techer, conseillers référendaires, M. Halem, avocat général référendaire, et Mme Dumont, greffier de chambre, la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 20 mai 2021), Mme [M] a été engagée en qualité de consultante, par la société Devoteam, à compter du 10 avril 2012. 2. La relation de travail était régie par la convention collective nationale des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils, dite SYNTEC, du 15 décembre 1987, alors en vigueur. 3. La salariée a été licenciée le 7 mars 2016. 4. Le 8 avril 2016, elle a saisi la juridiction prud'homale, notamment, pour contester cette mesure. Examen du moyen Enoncé du moyen 5. La salariée fait grief à l'arrêt de la débouter de ses demandes tendant à juger son licenciement sans cause réelle et sérieuse et condamner l'employeur à lui payer une certaine somme à titre d'indemnité de ce chef, alors : « 1° / que selon l'article L. 3141-13 du code du travail en sa rédaction antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 applicable en l'espèce, la période de prise des congés payés est fixée par les conventions et accords collectifs de travail ; que l'article 25 de la convention collective des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils (SYNTEC) dispose que "l'employeur peut soit procéder à la fermeture totale de l'entreprise dans une période située entre le 1er mai et le 31 octobre, soit établir les congés par roulement après consultation du comité d'entreprise (ou à défaut des délégués du personnel) sur le principe de cette alternative" ; qu'il résulte de ces dispositions que l'employeur ne peut valablement imposer à un salarié soumis à cette convention collective des dates de congé sans avoir préalablement consulté les représentants du personnel sur la période de prise des congés dans l'entreprise ; qu'en décidant que le licenciement de Mme [M] pour avoir refusé de prendre les congés imposés par l'employeur du 28 au 30 décembre 2015 était fondé sur une cause réelle et sérieuse, au motif que la consultation imposée par l'article 25 ne concernait pas la situation individuelle des salariés, sans rechercher si les représentants du personnel avaient été consultés sur la période de prise de congés dans l'entreprise, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions susvisées ; 2°/ que, en décidant que le licenciement pour insubordination de Mme [M] était fondé sur une cause réelle et sérieuse au motif qu'elle n'avait pas répondu à la lettre de l'employeur du 27 novembre 2015 expliquant que la période des fêtes de fin d'année était propice aux fermetures des sites clients et que la prise de congés à cette période était justifiée par les nécessités du service, quand la salariée avait répondu par une lettre recommandée du 9 décembre 2015 par laquelle elle contestait avoir été consultée sur les dates de congés imposées par l'employeur, et indiquait qu'elle n'était pas en mission chez un client mais travaillait sur un projet de recherches en interne au sein d'un établissement de la société Devoteam qui n'était pas fermé, la cour d'appel a dénaturé par omission la lettre de réponse de la salariée, et violé l'article 1134 du code civil, en sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ; 3°/ que, en omettant de répondre aux conclusions d'appel de Mme [M] faisant valoir qu'elle n'était pas concernée par la faible activité de l'entreprise pendant les fêtes de fin d'année puisqu'elle travaillait en interne sur un projet de recherches en interne au sein de la société Devoteam, qui ne fermait pas pendant cette période, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. » Réponse de la Cour 6. L'article 25 de la convention collective nationale dite SYNTEC, du 15 décembre 1987, alors en vigueur, relatif à la période de congés, n'impose à l'employeur de consulter le comité d'entreprise ou, à défaut, les délégués du personnel, qu'au sujet de l'alternative ouverte à l'employeur entre la fermeture totale de l'entreprise dans une période située entre le 1er mai et le 31 octobre et l'établissement des congés par roulement. 7. L'absence de consultation du comité d'entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel sur cette alternative étant sans incidence sur la fixation des dates individuelles de congés des salariés, ceux-ci ne peuvent s'en prévaloir. 8. Après avoir relevé que l'employeur avait satisfait à son obligation de consultation de la salariée au sujet de ses dates individuelles de congés en respectant le délai de prévenance, la cour d'appel, qui n'avait pas à procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, a exactement décidé qu'il pouvait, conformément à l'article 26 de la convention collective, fixer la date des congés de l'intéressée. 9. Ayant constaté que la salariée, qui avait déjà fait l'objet d'un avertissement, avait refusé de se conformer à ces directives, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, a, hors toute dénaturation, estimé que cet acte d'insubordination constituait une cause réelle et sérieuse de licenciement. 10. Le moyen n'est donc pas fondé. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne Mme [M] aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept septembre deux mille vingt-trois. | STATUT COLLECTIF DU TRAVAIL - Conventions et accords collectifs - Conventions diverses - Bureaux d'études techniques, cabinets d'ingénieurs-conseils et sociétés de conseils (SYNTEC) - Convention collective nationale du 15 décembre 1987 - Article 25 - Période de congés - Alternative entre fermeture totale de l'entreprise et fixation des congés par roulement - Consultation des institutions représentatives du personnel par l'employeur - Défaut - Effets - Détermination - Portée | L'article 25 de la convention collective nationale des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils, dite SYNTEC, du 15 décembre 1987, dans sa rédaction antérieure à l'avenant n° 46 du 16 juillet 2021, relatif à la période de congés, n'impose à l'employeur de consulter le comité d'entreprise ou, à défaut, les délégués du personnel, qu'au sujet de l'alternative ouverte à l'employeur entre la fermeture totale de l'entreprise dans une période située entre le 1er mai et le 31 octobre et l'établissement des congés par roulement. L'absence de consultation du comité d'entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel, sur cette alternative étant sans incidence sur la fixation des dates individuelles de congés des salariés, ceux-ci ne peuvent s'en prévaloir |
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JURITEXT000048176073 | JURI | texte/juri/judi/JURI/TEXT/00/00/48/17/60/JURITEXT000048176073.xml | ARRET | Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 4 octobre 2023, 22-12.339, Publié au bulletin | 2023-10-04 00:00:00 | Cour de cassation | 52300952 | Rejet | 22-12339 | oui | CHAMBRE_SOCIALE | 2021-11-03 00:00:00 | Cour d'appel de Reims | Mme Mariette (conseiller doyen faisant fonction de président) | SCP Thouin-Palat et Boucard, SARL Thouvenin, Coudray et Grévy | ECLI:FR:CCASS:2023:SO00952 | LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant : SOC. ZB1 COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 4 octobre 2023 Rejet Mme MARIETTE, conseiller doyen faisant fonction de président Arrêt n° 952 F-B Pourvoi n° S 22-12.339 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 4 OCTOBRE 2023 M. [L] [N], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° S 22-12.339 contre l'arrêt rendu le 3 novembre 2021 par la cour d'appel de Reims (chambre sociale), dans le litige l'opposant à l'association Action jeunesse de l'Aube, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation. Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Barincou, conseiller, les observations de la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat de M. [N], de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de l'association Action jeunesse de l'Aube, après débats en l'audience publique du 5 septembre 2023 où étaient présents Mme Mariette, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Barincou, conseiller rapporteur, M. Seguy, conseiller, et Mme Pontonnier, greffier de chambre, la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Reims, 3 novembre 2021), M. [N] a été engagé, en qualité de directeur, à compter du 13 septembre 2013, par l'association Action jeunesse de l'Aube. 2. Contestant son licenciement, prononcé pour faute grave le 13 mars 2018, le salarié a saisi la juridiction prud'homale. Examen des moyens Sur le premier moyen, pris en sa seconde branche, et le second moyen 3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs, le premier étant irrecevable et le second n'étant manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Sur le premier moyen, pris en sa première branche Enoncé du moyen 4. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de ses demandes fondées, à titre principal, sur la nullité de son licenciement et, subsidiairement, sur l'absence de cause réelle et sérieuse de son licenciement, alors « qu'il soulignait que la décision de placement du mineur, qu'il avait dénoncée, méconnaissait ses droits et libertés et lui causait une souffrance ; qu'il en résultait que l'exécution de cette décision par l'association Action jeunesse de l'Aube causait, au sein de celle-ci, des mauvais traitements et privations au mineur concerné, relevant du droit de dénonciation posé par l'article L. 313-24 du code de l'action sociale et des familles ; qu'en écartant ce texte et partant la nullité du licenciement au motif que l'exposant ne relevait aucun dysfonctionnement véritable au sein de son établissement mais stigmatisait un dysfonctionnement judiciaire et s'érigeait en défenseur parallèle du mineur parce qu'il n'était pas d'accord avec les décisions de placement et d'investigations, la cour d'appel a violé l'article L. 313-24 du code de l'action sociale et des familles. » Réponse de la Cour 5. Aux termes de l'article L. 313-24 du code de l'action sociale et des familles, dans sa rédaction issue de la loi n° 2002-2 du 2 janvier 2002, applicable au litige, dans les établissements et services mentionnés à l'article L. 312-1, le fait qu'un salarié ou un agent a témoigné de mauvais traitements ou privations infligés à une personne accueillie ou relaté de tels agissements ne peut être pris en considération pour décider de mesures défavorables le concernant en matière d'embauche, de rémunération, de formation, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement du contrat de travail, ou pour décider la résiliation du contrat de travail ou une sanction disciplinaire. 6. La cour d'appel a relevé que le salarié, considérant que la situation d'un mineur, confié à l'un des établissements de l'association qu'il dirigeait, était mal appréhendée par les juges des enfants, s'était érigé en défenseur de ce mineur et avait saisi de nombreux acteurs institutionnels pour stigmatiser ce qu'il avait interprété comme une forme de dysfonctionnement institutionnel, en dépit du positionnement contraire de l'avocat de ce mineur, mais sans toutefois relater un dysfonctionnement véritable au sein de son établissement. 7. De ces constatations et énonciations, dont il ressortait que le salarié n'avait pas témoigné de mauvais traitements ou de privations infligés à un mineur pris en charge dans l'établissement où il travaillait mais avait dénoncé les décisions de placement et d'investigation prises par le juge des enfants et les modalités du droit de visite qui y étaient prévues, intervenues dans un contexte familial particulièrement difficile, la cour d'appel a exactement déduit qu'il ne pouvait valablement se prévaloir des dispositions de l'article L. 313-24 du code de l'action sociale et des familles. 8. Le moyen n'est donc pas fondé. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne M. [N] aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatre octobre deux mille vingt-trois. | CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE | Il résulte de l'article L. 313-24 du code de l'action sociale et des familles, dans sa rédaction issue de la loi n° 2002-2 du 2 janvier 2002, que, dans les établissements et services sociaux ou médico-sociaux mentionnés à l'article L. 312-1 du même code, le fait qu'un salarié ou un agent a témoigné de mauvais traitements ou privations infligés à une personne accueillie ou relaté de tels agissements ne peut être pris en considération pour décider de mesures défavorables le concernant en matière d'embauche, de rémunération, de formation, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement du contrat de travail, ou pour décider la résiliation du contrat de travail ou une sanction disciplinaire. Doit être approuvé l'arrêt qui, après avoir constaté qu'un salarié n'avait pas témoigné de mauvais traitements ou de privations infligés à un mineur pris en charge dans l'établissement où il travaillait mais avait dénoncé les décisions de placement et d'investigation prises par le juge des enfants et les modalités du droit de visite qui y étaient prévues, en déduit qu'il ne pouvait pas valablement se prévaloir des dispositions de ce texte |
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JURITEXT000048176075 | JURI | texte/juri/judi/JURI/TEXT/00/00/48/17/60/JURITEXT000048176075.xml | ARRET | Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 4 octobre 2023, 21-25.421, Publié au bulletin | 2023-10-04 00:00:00 | Cour de cassation | 52300956 | Rejet | 21-25421 | oui | CHAMBRE_SOCIALE | 2021-10-14 00:00:00 | Cour d'appel de Versailles | Mme Mariette (conseiller doyen faisant fonction de président) | SCP Richard, SARL Thouvenin, Coudray et Grévy | ECLI:FR:CCASS:2023:SO00956 | LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant : SOC. CH9 COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 4 octobre 2023 Rejet Mme MARIETTE, conseiller doyen faisant fonction de président Arrêt n° 956 F-B Pourvoi n° R 21-25.421 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 4 OCTOBRE 2023 La société Colas Rail, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° R 21-25.421 contre l'arrêt rendu le 14 octobre 2021 par la cour d'appel de Versailles (6e chambre), dans le litige l'opposant à M. [I] [W], domicilié [Adresse 2], défendeur à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Seguy, conseiller, les observations de la SCP Richard, avocat de la société Colas Rail, de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de M. [W], après débats en l'audience publique du 5 septembre 2023 où étaient présents Mme Mariette, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Seguy, conseiller rapporteur, M. Barincou, conseiller, et Mme Pontonnier, greffier de chambre, la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 14 octobre 2021), M. [W] a été engagé en qualité de mécanicien par la société Colas Rail (la société), le 1er mars 2007, avec reprise de son ancienneté depuis le 3 janvier 2006. Dans le dernier état de la relation contractuelle, il était mécanicien autonome sur chantier. 2. Licencié le 13 décembre 2016, il a saisi la juridiction prud'homale d'une contestation de la rupture de son contrat de travail. Examen du moyen Enoncé du moyen 3. La société fait grief à l'arrêt de juger le licenciement du salarié dépourvu de cause réelle et sérieuse et de la condamner à lui payer une somme à titre de dommages-intérêts, alors « qu'un motif tiré de la vie personnelle du salarié peut justifier un licenciement disciplinaire, s'il se rattache à la vie professionnelle du salarié ou s'il constitue un manquement de l'intéressé à une obligation découlant de son contrat de travail ; que la commission d'infractions au code de la route, commise par un salarié tandis qu'il conduit un véhicule de fonction sur le trajet de son lieu de travail, se rattache à sa vie professionnelle, même si son temps de travail effectif n'a pas encore débuté ; qu'en décidant néanmoins que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse, comme étant fondé sur des faits relevant de la vie personnelle du salarié, après avoir constaté que le salarié avait commis les quatre infractions au code de la route visées par la lettre de licenciement, tandis qu'il se trouvait sur le trajet le conduisant à son lieu de travail, ce dont il se déduisait que les faits reprochés se rattachaient à sa vie professionnelle, peu important que le temps de travail effectif n'ait pas débuté, la cour d'appel a violé les articles L. 1232-1 et L. 1235-1 du code du travail. » Réponse de la Cour 4. Un motif tiré de la vie personnelle du salarié ne peut, en principe, justifier un licenciement disciplinaire, sauf s'il constitue un manquement de l'intéressé à une obligation découlant de son contrat de travail. 5. La cour d'appel a constaté, d'abord, que les infractions au code de la route avaient été commises durant les temps de trajet durant lesquels le salarié n'était pas à la disposition de l'employeur et, ensuite, que l'outil de travail mis à sa disposition n'avait subi aucun dommage et que le comportement de l'intéressé n'avait pas eu d'incidence sur les obligations découlant de son contrat de travail en tant que mécanicien. 6. De ces constatations et énonciations, dont il ressortait que les infractions au code de la route ne pouvaient être regardées comme une méconnaissance par l'intéressé de ses obligations découlant de son contrat, ni comme se rattachant à sa vie professionnelle, la cour d'appel a exactement déduit que ces faits de la vie personnelle ne pouvaient justifier un licenciement disciplinaire. 7. Le moyen n'est donc pas fondé. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne la société Colas Rail aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Colas Rail et la condamne à payer à M. [W] la somme de 3 000 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatre octobre deux mille vingt-trois. | CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Licenciement - Licenciement disciplinaire - Faute du salarié - Faute grave - Caractérisation - Cas - Agissements du salarié dans sa vie personnelle - Conditions - Manquement du salarié à une obligation découlant de son contrat de travail - Applications diverses - Portée | Un motif tiré de la vie personnelle du salarié ne peut, en principe, justifier un licenciement disciplinaire, sauf s'il constitue un manquement de l'intéressé à une obligation découlant de son contrat de travail. Doit en conséquence être approuvé, l'arrêt qui, après avoir constaté que les infractions au code de la route qui étaient reprochées au salarié avaient été commises durant ses temps de trajet avec le véhicule de l'entreprise mis à sa disposition, lequel n'avait subi aucun dommage, et que son comportement n'avait pas eu d'incidence sur les obligations découlant de son contrat de travail, en sorte que ces infractions ne pouvaient être regardées comme une méconnaissance par l'intéressé de ses obligations découlant de son contrat ni comme se rattachant à sa vie professionnelle, en déduit que ces faits de la vie personnelle ne pouvaient justifier un licenciement disciplinaire |
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JURITEXT000048176082 | JURI | texte/juri/judi/JURI/TEXT/00/00/48/17/60/JURITEXT000048176082.xml | ARRET | Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 4 octobre 2023, 21-21.059, Publié au bulletin | 2023-10-04 00:00:00 | Cour de cassation | 52300965 | Rejet | 21-21059 | oui | CHAMBRE_SOCIALE | 2021-06-11 00:00:00 | Cour d'appel de Lyon | Mme Mariette (conseiller doyen faisant fonction de président) | SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, SARL Cabinet Munier-Apaire | ECLI:FR:CCASS:2023:SO00965 | LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant : SOC. HP COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 4 octobre 2023 Rejet Mme MARIETTE, conseiller doyen faisant fonction de président Arrêt n° 965 F-B Pourvoi n° Z 21-21.059 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 4 OCTOBRE 2023 L'association Les Nouvelles Subsistances, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° Z 21-21.059 contre l'arrêt rendu le 11 juin 2021 par la cour d'appel de Lyon (chambre sociale B), dans le litige l'opposant à Mme [Y] [N], domiciliée [Adresse 1], défenderesse à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Douxami, conseiller, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de l'association Les Nouvelles Subsistances, de la SARL Cabinet Munier-Apaire, avocat de Mme [N], après débats en l'audience publique du 5 septembre 2023 où étaient présents Mme Mariette, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Douxami, conseiller rapporteur, M. Barincou, conseiller, et Mme Pontonnier, greffier de chambre, la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Lyon, 11 juin 2021), Mme [N] a été engagée en qualité de coordinatrice de projet, à compter du 13 octobre 2009, par l'association Les Nouvelles Subsistances. Elle occupait en dernier lieu les fonctions de chargée du mécénat et du partenariat. 2. Son contrat de travail a été rompu, le 27 septembre 2016, à l'issue du délai de réflexion dont elle disposait après son adhésion au contrat de sécurisation professionnelle qui lui a été proposé, le motif économique de la rupture lui ayant été notifié par lettre du 22 septembre 2016. 3. Invoquant la nullité de son licenciement au regard de son état de grossesse, elle a saisi la juridiction prud'homale. Examen des moyens Sur le second moyen 4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Sur le premier moyen Enoncé du moyen 5. L'employeur fait grief à l'arrêt de dire que le licenciement est nul, de le condamner à payer à la salariée diverses sommes au titre des salaires dus pendant la période de protection et des congés payés afférents, assortis d'intérêts au taux légal à compter du 6 avril 2017, d'indemnité compensatrice de préavis et des congés payés afférents, avec intérêts au taux légal à compter du 6 avril 2017, de dommages-intérêts pour licenciement nul, assortis d'intérêts légaux à compter de l'arrêt et de le condamner à remettre à la salariée dans les six semaines du prononcé de l'arrêt les documents de fin de contrat et un dernier bulletin de salaire dûment rectifiés, alors « que l'acceptation d'un contrat de sécurisation professionnelle par une salariée, même au cours d'une période de suspension de son contrat de travail à laquelle elle a droit au titre de son congé de maternité, emporte rupture d'un commun accord du contrat de travail, de sorte que l'employeur n'est pas tenu de justifier de l'existence d'une faute grave commise par la salariée ou de son impossibilité de maintenir le contrat de travail ; que dès lors, en relevant, pour prononcer la nullité de la rupture du contrat de travail de la salariée, que le contrat de sécurisation professionnelle était une modalité du licenciement pour motif économique et que la salariée étant en situation de suspension de son contrat de travail pour cause de maternité, il appartenait à l'employeur de justifier, au moment de la rupture, s'être trouvé dans l'impossibilité de maintenir son contrat de travail, ce qu'il ne faisait pas, la cour d'appel a violé l'article L. 1233-67 du code du travail, ensemble l'article 5 de la convention du 26 janvier 2015 relative au contrat de sécurisation professionnelle. » Réponse de la Cour 6. Il résulte des dispositions combinées des articles L. 1232-6 et L. 1225-4 du code du travail que l'employeur, tenu d'énoncer le ou les motifs du licenciement, doit préciser, dans la lettre de licenciement d'une salariée en état de grossesse, le ou les motifs visés par l'article L. 1225-4 du code du travail. A défaut, le licenciement est nul. 7. Bénéficie de la protection prévue par l'article L. 1225-4 du code du travail la salariée en état de grossesse médicalement constaté à la date d'expiration du délai dont elle dispose pour prendre parti sur la proposition d'un contrat de sécurisation professionnelle. L'adhésion à ce contrat, qui constitue une modalité de licenciement pour motif économique, ne caractérise pas l'impossibilité pour l'employeur de maintenir le contrat de travail pour un motif étranger à la grossesse. 8. Ayant retenu à bon droit que le contrat de sécurisation professionnelle ne constituait pas une rupture conventionnelle mais une modalité du licenciement pour motif économique et constaté qu'à la date d'expiration du délai dont elle disposait pour prendre parti sur la proposition d'un contrat de sécurisation professionnelle, la salariée était en état de grossesse, la cour d'appel en a exactement déduit que l'article L. 1225-4 du code du travail était applicable de sorte que l'employeur était tenu de justifier de l'impossibilité de maintenir le contrat pour un motif étranger à la grossesse. 9. Le moyen n'est donc pas fondé. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne l'association Les nouvelles Subsistances aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par l'association Les Nouvelles Subsistances et la condamne à payer à Mme [N] la somme de 3 000 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatre octobre deux mille vingt-trois. | CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Licenciement économique - Mesures d'accompagnement - Contrat de sécurisation professionnelle - Expiration du délai d'option - Effets - Impossibilité de maintenir le contrat de travail pour un motif étranger à la grossesse - Justification - Employeur - Obligation | CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Licenciement économique - Mesures d'accompagnement - Contrat de sécurisation professionnelle - Adhésion du salarié - Effets - Impossibilité de maintenir le contrat de travail pour un motif étranger à la grossesse - Caractérisation - Défaut - Portée | Bénéficie de la protection prévue par l'article L. 1225-4 du code du travail la salariée en état de grossesse médicalement constaté à la date d'expiration du délai dont elle dispose pour prendre parti sur la proposition d'un contrat de sécurisation professionnelle. L'adhésion à ce contrat, qui constitue une modalité du licenciement pour motif économique, ne caractérise pas l'impossibilité pour l'employeur de maintenir le contrat de travail pour un motif étranger à la grossesse. Est en conséquence approuvé l'arrêt qui, ayant retenu que le contrat de sécurisation professionnelle ne constituait pas une rupture conventionnelle mais une modalité du licenciement économique et constaté qu'à la date d'expiration du délai dont elle disposait pour prendre parti sur la proposition d'un contrat de sécurisation professionnelle, la salariée était en état de grossesse, en déduit que l'article L. 1225-4 du code du travail était applicable en sorte que l'employeur était tenu de justifier de l'impossibilité de maintenir le contrat pour un motif étranger à la grossesse |
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JURITEXT000048176084 | JURI | texte/juri/judi/JURI/TEXT/00/00/48/17/60/JURITEXT000048176084.xml | ARRET | Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 4 octobre 2023, 22-13.718, Publié au bulletin | 2023-10-04 00:00:00 | Cour de cassation | 52300977 | Rejet | 22-13718 | oui | CHAMBRE_SOCIALE | 2022-01-19 00:00:00 | Cour d'appel de Paris | M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président) | SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol | ECLI:FR:CCASS:2023:SO00977 | LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant : SOC. ZB1 COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 4 octobre 2023 Rejet M. HUGLO, conseiller doyen faisant fonction de président Arrêt n° 977 F-B Pourvoi n° R 22-13.718 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 4 OCTOBRE 2023 1°/ Mme [J] [U], domiciliée [Adresse 2], 2°/ le Syndicat national des journalistes, dont le siège est [Adresse 1], ont formé le pourvoi n° R 22-13.718 contre l'arrêt rendu le 19 janvier 2022 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 4), dans le litige les opposant à la société France télévisions, société anonyme, dont le siège est [Adresse 3], défenderesse à la cassation. Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, 6 moyens de cassation. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Ott, conseiller, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de Mme [U] et du Syndicat national des journalistes, de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société France télévisions, après débats en l'audience publique du 6 septembre 2023 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Ott, conseiller rapporteur, Mme Bouvier, conseiller, et Mme Dumont, greffier de chambre, la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 19 janvier 2022), Mme [U] a été engagée en qualité de journaliste à compter du 1er janvier 1974 par l'Office de radiodiffusion-télévision française (ORTF) avec reprise d'ancienneté. La société France Télévisions (la société) vient aux droits de l'ORTF et de l'ensemble des sociétés ayant composé le service public de l'audiovisuel, en application de la loi n° 2009-258 du 5 mars 2009 relative à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision, et notamment de la société Antenne 2 devenue France 2, finalement absorbée par la société devenue entreprise unique, dans laquelle la salariée a été affectée à compter du 1er janvier 1975. En dernier lieu, la salariée occupait les fonctions de rédacteur en chef d'une rédaction nationale, palier 2, la relation de travail étant régie par l'accord d'entreprise France télévisions du 28 mai 2013 depuis l'entrée en vigueur de celui-ci. 2. La salariée a par ailleurs exercé plusieurs mandats représentatifs et était notamment en dernier lieu déléguée syndicale centrale et déléguée syndicale d'établissement. 3. Le 9 mai 2016, invoquant notamment une discrimination syndicale et un harcèlement moral, elle a saisi la juridiction prud'homale aux fins de résiliation judiciaire de son contrat de travail. Le Syndicat national des journalistes (le syndicat) est intervenu volontairement à l'instance. 4. Le 16 juin 2016, elle a été convoquée à un entretien préalable à une éventuelle mise à la retraite, cet entretien s'étant tenu le 24 juin suivant. Le 6 juillet 2016, le comité d'établissement a émis un avis défavorable à ce projet de mise à la retraite. 5. Le 19 juillet 2016, l'employeur a sollicité l'autorisation de mettre la salariée à la retraite, laquelle lui a été délivrée par l'inspecteur du travail par une décision du 21 septembre 2016 désormais définitive en l'absence de tout recours. 6. Par lettre du 12 octobre 2016, la société a notifié sa mise à la retraite, au visa de l'article L. 1237-5 du code du travail, à la salariée qui avait atteint l'âge de 70 ans le 5 juin 2016. La salariée est sortie définitivement des effectifs le 31 janvier 2017 au terme du préavis de trois mois. Examen des moyens Sur les premier, deuxième, quatrième, cinquième et sixième moyens 7. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Sur le troisième moyen Enoncé du moyen 8. La salariée et le syndicat font grief à l'arrêt de débouter la salariée de sa demande tendant à condamner la société à lui verser des dommages-intérêts pour perte d'emploi, alors « que si, lorsque la mise à la retraite d'un salarié protégé a été autorisée par l'inspecteur du travail, le juge judiciaire ne peut, sans violer le principe de la séparation des pouvoirs, remettre en cause l'appréciation par l'autorité administrative des conditions légales de la mise à la retraite et du rapport de cette mesure avec les fonctions représentatives exercées ou l'appartenance syndicale du salarié, il demeure en revanche compétent pour vérifier si la décision de l'employeur est la résultante du harcèlement moral exercé par lui, cette vérification échappant au contrôle de l'inspecteur du travail ; qu'en se bornant, pour rejeter la demande de Mme [U] en paiement de dommages-intérêts pour perte d'emploi fondée sur la circonstance qu'elle avait été mise à retraite par l'employeur en représailles de son action en résiliation judiciaire pour harcèlement moral, à énoncer que l'inspection du travail avait autorisé la mise à la retraite de Mme [U] par une décision désormais définitive du 21 septembre 2016 et qu'il n'appartenait pas au juge judiciaire d'apprécier la validité ou la nullité de la décision de l'inspecteur du travail d'autoriser l'employeur à procéder à la mise à la retraite, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si, au regard des contestations de l'exposante invoquant la situation de harcèlement moral qu'elle avait subie et dont l'acte ultime était sa mise à la retraite en représailles de son action en résiliation judiciaire, il ne lui appartenait pas de vérifier si cette ultime décision de l'employeur n'était pas la résultante du harcèlement moral exercé sur la salariée, ce qui justifiait qu'elle retienne sa compétence pour statuer sur ce chef de demande, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de la loi des 16-24 août 1790 et du décret du 16 fructidor an III, ensemble le principe de séparation des pouvoirs. » Réponse de la Cour 9. Lorsque la mise à la retraite a été notifiée à un salarié protégé à la suite d'une autorisation administrative accordée à l'employeur, le juge judiciaire ne peut, sans violer le principe de la séparation des pouvoirs, se prononcer sur une demande de résiliation judiciaire formée par le salarié même si sa saisine était antérieure à la rupture. Toutefois l'autorisation administrative de mise à la retraite ne prive pas le salarié du droit de demander réparation du préjudice qui serait résulté d'un harcèlement. 10. Dans le cas où l'employeur sollicite l'autorisation de mettre à la retraite un salarié protégé, il appartient à l'administration de vérifier si les conditions légales de mise à la retraite sont remplies et si la mesure envisagée n'est pas en rapport avec les fonctions représentatives exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé. 11. Il s'ensuit que l'autorisation donnée par l'inspecteur du travail de mettre d'office à la retraite un salarié protégé qui a atteint l'âge légal de mise à la retraite d'office, soit 70 ans, fait obstacle à ce que ce salarié demande devant la juridiction prud'homale l'indemnisation de la perte d'emploi consécutive à la rupture du contrat de travail fondée sur une cause objective, quand bien même le salarié invoquerait la décision de l'employeur de mise à la retraite au titre d'un harcèlement moral. 12. La cour d'appel qui a constaté, d'une part que la salariée avait été convoquée à un entretien préalable à sa mise à la retraite le 16 juin 2016 après son soixante-dixième anniversaire intervenu le 5 juin 2016, d'autre part que l'inspecteur du travail avait, par décision du 21 septembre 2016 devenue définitive, autorisé la mise à la retraite de la salariée, a à bon droit débouté la salariée de sa demande de dommages-intérêts pour perte d'emploi. 13. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne Mme [U] et le Syndicat national des journalistes aux dépens; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatre octobre deux mille vingt-trois. | CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Retraite - Mise à la retraite - Salarié protégé - Mesures spéciales - Autorisation administrative - Demande de l'employeur - Salarié ayant atteint l'âge légal - Indemnisation de la perte de l'emploi - Possibilité (non) - Portée | REPRESENTATION DES SALARIES - Règles communes - Contrat de travail - Retraite - Mise à la retraite - Mesures spéciales - Autorisation administrative - Demande de l'employeur - Motif invoqué - Atteinte de l'âge légal - Mise à la retraite d'office - Cause objective - Détermination - Portée CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Retraite - Mise à la retraite - Conditions - Age - Atteinte de l'âge légal - Cause objective - Portée | Lorsque la mise à la retraite a été notifiée à un salarié protégé à la suite d'une autorisation administrative accordée à l'employeur, le juge judiciaire ne peut, sans violer le principe de la séparation des pouvoirs, se prononcer sur une demande de résiliation judiciaire formée par le salarié même si sa saisine était antérieure à la rupture. Toutefois l'autorisation administrative de mise à la retraite ne prive pas le salarié du droit de demander réparation du préjudice qui serait résulté d'un harcèlement. Dans le cas où l'employeur sollicite l'autorisation de mettre à la retraite un salarié protégé, il appartient à l'administration de vérifier si les conditions légales de mise à la retraite sont remplies et si la mesure envisagée n'est pas en rapport avec les fonctions représentatives exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé. Il s'ensuit que l'autorisation donnée par l'inspecteur du travail de mettre d'office à la retraite un salarié protégé qui a atteint l'âge légal de mise à la retraite d'office, soit 70 ans, fait obstacle à ce que ce salarié demande devant la juridiction prud'homale l'indemnisation de la perte d'emploi consécutive à la rupture du contrat de travail fondée sur une cause objective, quand bien même le salarié invoquerait la décision de l'employeur de mise à la retraite au titre d'un harcèlement moral |
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JURITEXT000048176090 | JURI | texte/juri/judi/JURI/TEXT/00/00/48/17/60/JURITEXT000048176090.xml | ARRET | Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 4 octobre 2023, 22-14.126, Publié au bulletin | 2023-10-04 00:00:00 | Cour de cassation | 52300978 | Rejet | 22-14126 | oui | CHAMBRE_SOCIALE | 2022-01-27 00:00:00 | Cour d'appel de Nancy | M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président) | SARL Cabinet Rousseau et Tapie, SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel | ECLI:FR:CCASS:2023:SO00978 | LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant : SOC. CH9 COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 4 octobre 2023 Rejet M. HUGLO, conseiller doyen faisant fonction de président Arrêt n° 978 F-B Pourvoi n° J 22-14.126 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 4 OCTOBRE 2023 La société Crédit foncier de France, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° J 22-14.126 contre l'arrêt rendu le 27 janvier 2022 par la cour d'appel de Nancy (chambre sociale, section 2), dans le litige l'opposant : 1°/ à [J] [G], ayant été domicilié [Adresse 3], décédé, 2°/ à Mme [C] [M], veuve [G], domiciliée [Adresse 3], 3°/ à Mme [L] [G], épouse [B], domiciliée [Adresse 4], 4°/ à M. [P] [G], domicilié [Adresse 5], pris tous les trois en leur qualité d'ayants droit de [J] [G], défendeurs à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Ott, conseiller, les observations de la SARL Cabinet Rousseau et Tapie, avocat de la société Crédit foncier de France, de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat, de Mme [C] veuve [G], de Mme [L] [G] et de M. [P] [G], tous les trois pris en leur qualité d'ayants droit de [J] [G], après débats en l'audience publique du 6 septembre 2023 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Ott, conseiller rapporteur, Mme Bouvier, conseiller, et Mme Dumont, greffier de chambre, la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Reprise d'instance 1. Il est donné acte à Mme [C] veuve [G], Mme [L] [G] et M. [P] [G], en leur qualité d'ayants droit de [J] [G], décédé le [Date décès 2] 2022, de leur reprise d'instance. Faits et procédure 2. Selon l'arrêt attaqué (Nancy, 27 janvier 2022), la société Crédit foncier de France (la société) a conclu avec les organisations syndicales représentatives le 20 février 2017 un accord de gestion prévisionnelle des départs en retraite, dit GPDR2, permettant aux salariés concernés de bénéficier d'une aide financière au rachat de trimestres et d'une majoration des indemnités de départ à la retraite. 3. [J] [G], engagé par la société à compter du 19 mars 1979, occupant en dernier lieu le poste de directeur régional d'expertise, a adhéré à cet accord GPDR2 par lettre du 30 juin 2017. 4. Le 26 octobre 2018, la société a conclu un accord de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC) et un plan de sauvegarde de l'emploi (PSE). 5. Par lettre du 21 décembre 2018, le salarié a révoqué son adhésion à l'accord GPDR2. Cette rétractation ayant été refusée par l'employeur, il a quitté l'entreprise le 1er février 2019. 6. Le 26 juin 2019, il a saisi la juridiction prud'homale afin de dire la rupture de son contrat de travail sans cause réelle et sérieuse et d'obtenir le paiement de diverses indemnités. Examen du moyen Sur le moyen, pris en ses deuxième à sixième branches 7. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Sur le moyen, pris en sa première branche Enoncé du moyen 8. La société fait grief à l'arrêt de dire sans cause réelle et sérieuse la rupture du contrat de travail du salarié du 31 janvier 2019, de la condamner au paiement de sommes à titre d'indemnité compensatrice de préavis et des congés payés afférents, à titre d'indemnité de licenciement, à titre de dommages-intérêts pour rupture sans cause réelle ni sérieuse, de dire qu'il y avait lieu de déduire la somme versée en février 2019 au titre des indemnités prévues par les articles 11 et 12 de l'accord de GPDR du 20 février 2017 et d'ordonner la rectification du dernier bulletin de paie, alors « que toute action portant sur la rupture du contrat de travail se prescrit par douze mois à compter de la notification de la rupture ; que le délai de prescription de l'action en justice afin de contester une manifestation claire et non équivoque de volonté de partir en retraite court à compter du moment où cette volonté se manifeste, nonobstant l'éventuelle manifestation ultérieure contraire d'y renoncer ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que, par lettre du 30 juin 2017, M. [G] avait "adhéré de façon irrévocable au dispositif G.P.D.R.2 prévu par l'accord précité et demande le bénéfice des mesures prévues par ce même accord" et avait précisé "être informé que (sa) présente adhésion à G.P.D.R.2 emporte admission à la retraite à (son) initiative" et avoir "sollicité dans ces conditions, sous réserve des nécessités de service, la rupture de (son) contrat de travail en 2018, au plus tard le 31.12.2018" ; que l'action en justice destinée à remettre en cause cette volonté, engagée en 21 juin 2019, était tardive ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles 2219 du code civil et L. 1471-1 du code du travail. » Réponse de la Cour 9. Aux termes de l'article L. 1471-1, alinéa 2, du code du travail dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, toute action portant sur la rupture du contrat de travail se prescrit par douze mois à compter de la notification de la rupture. 10. Il résulte de ce texte qu'en cas de départ à la retraite d'un salarié, la prescription de l'action en contestation de la rupture court à compter de la date à laquelle il a notifié à l'employeur sa volonté de partir à la retraite. Toutefois, lorsque le départ à la retraite s'inscrit dans un dispositif, auquel a adhéré le salarié, mis en place par un accord collectif réservant expressément une faculté de rétractation de la part du salarié, la prescription de l'action en contestation de la rupture ne court qu'à compter de la rupture effective de la relation de travail. 11. L'arrêt retient que l'accord GPDR2 du 20 février 2017 prévoit en son article 15 « Expression des collaborateurs », à l'alinéa 3, que « l'engagement pris par le collaborateur sera alors irrévocable, ferme et définitif sauf dans les cas limitatifs suivants sur présentation d'un justificatif : [...] - exercice de la clause de revoyure telle que prévue à l'article 6.1. » 12. L'arrêt retient également que l'article 6.1 dudit accord prévoit, en son alinéa 2, que « dans l'hypothèse, ce qui n'est ni souhaité par la Direction ni d'actualité, où le Crédit Foncier se verrait contraint d'envisager un Plan de Sauvegarde de l'Emploi (PSE) sur la période couverte par le présent accord, une réunion de négociation avec les Organisations Syndicales Représentatives serait fixée ». 13. Ayant constaté, d'une part que le salarié avait adhéré, par lettre du 30 juin 2017, au dispositif GPDR2 emportant admission à la retraite à son initiative en 2018, au plus tard au 31 décembre 2018, puis que, par lettre du 21 décembre 2018, il avait renoncé au bénéfice des dispositions de l'accord GPDR2 en se prévalant de l'article 15 dudit accord prévoyant la possibilité de révoquer son consentement dans l'hypothèse de l'exercice de la clause de revoyure prévue à l'article 6.1, d'autre part que la rupture effective de la relation de travail était intervenue le 31 janvier 2019 lors de l'établissement par l'employeur du certificat de travail, la cour d'appel en a exactement déduit que le délai de prescription d'un an courait à compter de cette date, de sorte que l'action engagée le 26 juin 2019 n'était pas prescrite. 14. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne la société Crédit foncier de France aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Crédit foncier de France et la condamne à payer à Mme [C] veuve [G], Mme [L] [G] et M. [P] [G], en leur qualité d'ayants droit de [J] [G], la somme globale de 3 000 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatre octobre deux mille vingt-trois. | CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE | Aux termes de l'article L. 1471-1, alinéa 2, du code du travail, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, toute action portant sur la rupture du contrat de travail se prescrit par douze mois à compter de la notification de la rupture. Il résulte de ce texte qu'en cas de départ à la retraite d'un salarié, la prescription de l'action en contestation de la rupture court à compter de la date à laquelle il a notifié à l'employeur sa volonté de partir à la retraite. Toutefois, lorsque le départ à la retraite s'inscrit dans un dispositif, auquel a adhéré le salarié, mis en place par un accord collectif réservant expressément une faculté de rétractation de la part du salarié, la prescription de l'action en contestation de la rupture ne court qu'à compter de la rupture effective de la relation de travail |
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JURITEXT000048176092 | JURI | texte/juri/judi/JURI/TEXT/00/00/48/17/60/JURITEXT000048176092.xml | ARRET | Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 4 octobre 2023, 21-25.748, Publié au bulletin | 2023-10-04 00:00:00 | Cour de cassation | 52300983 | Rejet | 21-25748 | oui | CHAMBRE_SOCIALE | 2021-09-23 00:00:00 | Cour d'appel de Versailles | M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président) | SARL Thouvenin, Coudray et Grévy, SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol | ECLI:FR:CCASS:2023:SO00983 | LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant : SOC. ZB1 COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 4 octobre 2023 Rejet M. HUGLO, conseiller doyen faisant fonction de président Arrêt n° 983 F-B Pourvoi n° W 21-25.748 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 4 OCTOBRE 2023 1°/ Le syndicat CGT Fiducial private security Ile-de-France, dont le siège est [Adresse 3], 2°/ M. [R] [U], domicilié [Adresse 1], pris en qualité de membre titulaire du CSE FPS et délégué central CGT, 3°/ M. [F] [N], domicilié [Adresse 4], pris en qualité de membre titulaire du CSE FPS ont formé le pourvoi n° W 21-25.748 contre l'arrêt rendu le 23 septembre 2021 par la cour d'appel de Versailles (14e chambre), dans le litige les opposant : 1°/ à la société Fiducial private security, société par actions simplifiée, 2°/ à la société Fiducial security services, société par actions simplifiée unipersonnelle, toutes deux ayant leur siège au [Adresse 2], défenderesses à la cassation. Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, six moyens de cassation. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Rinuy, conseiller, les observations de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat du syndicat CGT Fiducial private security Ile-de-France, de MM. [U] et [N], ès qualités, de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société Fiducial private security et de la société Fiducial security services, après débats en l'audience publique du 6 septembre 2023 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Rinuy, conseiller rapporteur, Mme Bérard, conseiller, et Mme Jouanneau, greffier de chambre, la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 23 septembre 2021), statuant en matière de référé, le groupe Fiducial, dont le métier historique est l'expertise comptable, a développé plusieurs autres branches d'activité. Les opérations d'acquisition sont opérées par la holding Fiducial security services. Celle-ci a fait l'acquisition au 1er octobre 2020 de 100 % des actions de la société Prosegur security holding France, ainsi que 100 % des actions de la société Prosegur services France, ces dernières devenant des filiales autonomes de la holding. La société Fiducial private security est une autre filiale de la holding. 2. Une information a été notamment faite auprès du comité social et économique de la société Fiducial private security (le CSE) le 10 juin 2020, portant sur le projet de cession des titres des sociétés françaises de la division sécurité du groupe Prosegur à la société Fiducial security services. 3. Le 23 septembre 2020, M. [U], Mme [S] et M. [N], membres élus du CSE, et le syndicat CGT Fiducial private security Ile-de-France (le syndicat) ont fait assigner la société Fiducial private security (la société) aux fins notamment d'obtenir la suspension des opérations de cession des titres des sociétés françaises de la division sécurité du groupe Prosegur au profit de la holding Fiducial security service en l'absence de consultation du CSE ou à tout le moins la suspension du projet de réorganisation interne nécessairement engendré par l'achat du groupe Prosegur, la communication par la société au CSE des informations complètes sur la division sécurité du groupe Prosegur, la consultation sous astreinte du CSE relative à l'achat du groupe Prosegur et la condamnation de la société à leur verser certaines sommes à titre de provisions. Examen des moyens Sur les premier, deuxième, cinquième et sixième moyens 4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Sur le troisième moyen Enoncé du moyen 5. Le syndicat et MM. [U] et [N], membres élus du CSE, font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes tendant à ce que soit suspendue la mise en place actuelle d'une base de données économiques et sociales dépourvue de toute négociation préalable avec les organisations syndicales représentatives et que soit ordonnée la mise en place d'une négociation loyale avec les organisations syndicales représentatives sur l'organisation, l'architecture, le contenu et les modalités de fonctionnement d'une base de données économiques et sociales, sous astreinte, alors : « 1°/ que l'organisation, l'architecture, le contenu et les modalités de la base de données économiques sociales sont définies par un accord d'entreprise ; que la conclusion d'un tel accord revêt donc un caractère obligatoire ; qu'en retenant que l'employeur n'avait commis aucun manquement en s'abstenant d'engager des négociations avec les organisations syndicales représentatives en vue de la conclusion d'un accord sur l'organisation, l'architecture, le contenu et les modalités de la base de données économiques et sociales au motif erroné qu'un tel accord n'est pas obligatoire, la cour d'appel a violé l'article L. 2312-21 du code du travail, ensemble l'article 835 du code de procédure civile ; 2°/ que l'organisation, l'architecture, le contenu et les modalités de la base de données économiques sociales sont définies par un accord d'entreprise ; que l'employeur est tenu d'engager des négociations avec les organisations syndicales représentatives en vue de la conclusion d'un tel accord ; qu'en rejetant les demandes tendant à la suspension de la base de données mise en place sans négociation et à l'engagement de négociations en vue de la conclusion d'un accord sur la base de données économiques et sociales sans rechercher si, comme l'y invitaient les conclusions des parties, l'employeur avait ou non engagé des négociations loyales avec les organisations syndicales représentatives en vue de la conclusion d'un tel accord, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 2312-21 du code du travail et 835 du code de procédure civile. » Réponse de la Cour 6. Aux termes de l'article L. 2312-18 du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 : « Une base de données économiques et sociales rassemble l'ensemble des informations nécessaires aux consultations et informations récurrentes que l'employeur met à disposition du comité social et économique. Ces informations comportent en particulier des indicateurs relatifs à l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, notamment sur les écarts de rémunération et les informations sur la méthodologie et le contenu des indicateurs prévus à l'article L. 1142-8. Les éléments d'information transmis de manière récurrente au comité sont mis à la disposition de leurs membres dans la base de données et cette mise à disposition actualisée vaut communication des rapports et informations au comité, dans les conditions et limites fixées par un décret en Conseil d'Etat. Lorsque les dispositions du présent code prévoient également la transmission à l'autorité administrative des rapports et informations mentionnés au deuxième alinéa, les éléments d'information qu'ils contiennent sont mis à la disposition de l'autorité administrative à partir de la base de données et la mise à disposition actualisée vaut transmission à cette autorité. » 7. Aux termes de l'article L. 2312-21 du même code : « Un accord d'entreprise conclu dans les conditions prévues au premier alinéa de l'article L. 2232-12 ou, en l'absence de délégué syndical, un accord entre l'employeur et le comité social et économique, adopté à la majorité des membres titulaires de la délégation du personnel du comité, définit : 1° L'organisation, l'architecture et le contenu de la base de données économiques et sociales ; 2° Les modalités de fonctionnement de la base de données économiques et sociales, notamment les droits d'accès et le niveau de mise en place de la base dans les entreprises comportant des établissements distincts, son support, ses modalités de consultation et d'utilisation. La base de données comporte au moins les thèmes suivants : l'investissement social, l'investissement matériel et immatériel, l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes au sein de l'entreprise, les fonds propres, l'endettement, l'ensemble des éléments de la rémunération des salariés et dirigeants, les activités sociales et culturelles, la rémunération des financeurs, les flux financiers à destination de l'entreprise. L'accord peut également intégrer dans la base de données les informations nécessaires aux négociations obligatoires prévues à l'article L. 2242-1, au 1° de l'article L. 2242-11 ou à l'article L. 2242-13 et aux consultations ponctuelles du comité social et économique prévues à l'article L. 2312-8 et à la sous-section 4. L'organisation, l'architecture, le contenu et les modalités de fonctionnement de la base de données sont tels qu'ils permettent au comité social et économique et, le cas échéant, aux délégués syndicaux d'exercer utilement leurs compétences. A défaut d'accord prévu à l'alinéa premier, un accord de branche peut définir l'organisation, l'architecture, le contenu et les modalités de fonctionnement de la base de données économiques et sociales dans les entreprises de moins de trois cents salariés. » 8. Aux termes de l'article L. 2312-36 du même code, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2017-1718 du 20 décembre 2017 : « En l'absence d'accord prévu à l'article L. 2312-21, une base de données économiques et sociales, mise régulièrement à jour, rassemble un ensemble d'informations que l'employeur met à disposition du comité social et économique. La base de données est accessible en permanence aux membres de la délégation du personnel du comité social et économique ainsi qu'aux membres de la délégation du personnel du comité social et économique central d'entreprise, et aux délégués syndicaux. Les informations contenues dans la base de données portent sur les thèmes suivants : 1° Investissements : investissement social (emploi, évolution et répartition des contrats précaires, des stages et des emplois à temps partiel, formation professionnelle et conditions de travail), investissement matériel et immatériel et, pour les sociétés mentionnées aux I et II de l'article L. 225-102-1 du code du commerce, les informations en matière environnementale présentées en application du III du même article ; 2° Egalité professionnelle entre les femmes et les hommes au sein de l'entreprise : diagnostic et analyse de la situation comparée des femmes et des hommes pour chacune des catégories professionnelles de l'entreprise en matière d'embauche, de formation, de promotion professionnelle, de qualification, de classification, de conditions de travail, de sécurité et de santé au travail, de rémunération effective et d'articulation entre l'activité professionnelle et la vie personnelle et familiale, analyse des écarts de salaires et de déroulement de carrière en fonction de l'âge, de la qualification et de l'ancienneté, évolution des taux de promotion respectifs des femmes et des hommes par métiers dans l'entreprise, part des femmes et des hommes dans le conseil d'administration ; 3° Fonds propres et endettement ; 4° Ensemble des éléments de la rémunération des salariés et dirigeants ; 5° Activités sociales et culturelles ; 6° Rémunération des financeurs ; 7° Flux financiers à destination de l'entreprise, notamment aides publiques et crédits d'impôts ; 8° Sous-traitance ; 9° Le cas échéant, transferts commerciaux et financiers entre les entités du groupe. Ces informations portent sur les deux années précédentes et l'année en cours et intègrent des perspectives sur les trois années suivantes. Le contenu de ces informations ainsi que les modalités de fonctionnement de la base sont déterminés par un décret en Conseil d'Etat, le contenu pouvant varier selon que l'effectif de l'entreprise est inférieur ou au moins égal à trois cents salariés. Les membres de la délégation du personnel du comité social et économique, du comité social et économique central d'entreprise et les délégués syndicaux sont tenus à une obligation de discrétion à l'égard des informations contenues dans la base de données revêtant un caractère confidentiel et présentées comme telles par l'employeur. » 9. Aux termes de l'article R. 2312-10 du même code : « En l'absence d'accord prévu à l'article L. 2312-21, les informations figurant dans la base de données portent sur l'année en cours, sur les deux années précédentes et, telles qu'elles peuvent être envisagées, sur les trois années suivantes. Ces informations sont présentées sous forme de données chiffrées ou, à défaut, pour les années suivantes, sous forme de grandes tendances. L'employeur indique, pour ces années, les informations qui, eu égard à leur nature ou aux circonstances, ne peuvent pas faire l'objet de données chiffrées ou de grandes tendances, pour les raisons qu'il précise. » 10. Il ressort de ces textes que, le contenu de la base de données économiques et sociales étant, en l'absence d'accord, déterminé par les dispositions légales et réglementaires précitées, la négociation préalable d'un accord prévu à l'article L. 2312-21 du code du travail ne présente pas de caractère obligatoire. 11. La cour d'appel qui a retenu que l'employeur n'avait commis aucun manquement en s'abstenant d'engager des négociations avec les organisations syndicales en vue de la conclusion d'un accord sur l'organisation, l'architecture, le contenu et les modalités de la base de données économiques et sociales, de sorte qu'il n'y avait lieu à référé sur la demande de suspension de la mise en place de cette base de données, n'encourt pas les griefs du moyen. Sur le quatrième moyen Enoncé du moyen 12. Le syndicat et les deux élus du CSE font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes tendant à ce qu'il soit jugé que la société a manqué à son obligation de mettre un local aménagé à la disposition du CSE et que soit ordonnée la mise à disposition d'un local aménagé conformément aux dispositions légales pour le CSE, sous astreinte, alors « que l'employeur est tenu de mettre un local aménagé à la disposition du comité social et économique ; que la mise à disposition d'un local constitue une obligation de résultat dont l'employeur ne peut s'exonérer que s'il justifie d'un cas de force majeure ; qu'en retenant que l'absence de mise à disposition du CSE de la société d'un local aménagé ne caractérisait pas un manquement de l'employeur sans constater qu'un cas de force majeure avait empêché ce dernier de satisfaire à son obligation de mise à disposition d'un local, la cour d'appel a violé l'article L. 2312-25 du code du travail. » Réponse de la Cour 13. L'arrêt retient, par motifs propres et adoptés, d'une part que le CSE dispose des locaux qui étaient affectés aux anciens comités d'entreprise, d'autre part que la question du choix d'un nouveau local a été inscrite à l'ordre du jour mais sans cesse reportée par les élus eux-mêmes. 14. Le moyen est, dès lors, inopérant. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne M. [U], ès qualités, M. [N], ès qualités, et le syndicat CGT Fiducial private security Ile-de-France aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatre octobre deux mille vingt-trois. | REPRESENTATION DES SALARIES - Comité social et économique - Attributions - Attributions consultatives - Consultations et informations récurrentes - Base de données économiques et sociales - Contenu - Définition - Dispositions légales et réglementaires - Détermination - Portée | STATUT COLLECTIF DU TRAVAIL - Conventions et accords collectifs - Accords collectifs - Accord d'entreprise - Accord sur les modalités de consultation - Consultations récurrentes des institutions représentatives du personnel - Base de données économiques et sociales - Contenu - Négociation préalable - Caractère obligatoire (non) - Fondement - Détermination | Il ressort des articles L. 2312-18, dans sa rédaction issue de la loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018, L. 2312-21, L. 2312-36, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2017-1718 du 20 décembre 2017, et R. 2312-10 du code du travail que, le contenu de la base de données économiques et sociales étant, en l'absence d'accord, déterminé par les dispositions légales et réglementaires précitées, la négociation préalable d'un accord prévu à l'article L. 2312-21 du code du travail ne présente pas de caractère obligatoire |
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JURITEXT000048176094 | JURI | texte/juri/judi/JURI/TEXT/00/00/48/17/60/JURITEXT000048176094.xml | ARRET | Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 4 octobre 2023, 22-12.387, Publié au bulletin | 2023-10-04 00:00:00 | Cour de cassation | 52300985 | Rejet | 22-12387 | oui | CHAMBRE_SOCIALE | 2021-11-17 00:00:00 | Cour d'appel de Versailles | M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président) | SARL Cabinet Munier-Apaire, SCP Célice, Texidor, Périer | ECLI:FR:CCASS:2023:SO00985 | LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant : SOC. ZB1 COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 4 octobre 2023 Rejet M. HUGLO, conseiller doyen faisant fonction de président Arrêt n° 985 F-B Pourvoi n° U 22-12.387 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 4 OCTOBRE 2023 M. [H] [W], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° U 22-12.387 contre l'arrêt rendu le 17 novembre 2021 par la cour d'appel de Versailles (17e Chambre), dans le litige l'opposant à la société L'Oréal, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation. Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Rinuy, conseiller, les observations de la SARL Cabinet Munier-Apaire, avocat de M. [W], de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société L'Oréal, après débats en l'audience publique du 6 septembre 2023 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Rinuy, conseiller rapporteur, Mme Bérard, conseiller, et Mme Jouanneau, greffier de chambre, la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 17 novembre 2021), M. [W] a été engagé en qualité de juriste fiscaliste, coefficient 550, par la société L'Oréal (la société) le 1er janvier 1996, avec reprise d'ancienneté à compter du 14 novembre 1988, date du début de sa collaboration avec le cabinet [F]. 2. Le salarié a sollicité, en 2009, la mise en place d'une médiation en vertu de l'article L. 1152-6 du code du travail et un accord de médiation a été signé le 5 mai 2010, aux termes duquel son coefficient est passé à 660. 3. Le 20 août 2010, le salarié a saisi la juridiction prud'homale aux fins de constater qu'il faisait l'objet, dans l'exécution de son contrat de travail, de harcèlement moral et de « discrimination salariale » et d'obtenir la condamnation de la société à lui verser diverses sommes. 4. Convoqué le 18 février 2011 à un entretien préalable en vue d'un éventuel licenciement, le salarié a été licencié le 11 mars 2011 pour cause réelle et sérieuse. Examen des moyens Sur le premier moyen Enoncé du moyen 5. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de ses demandes tendant à l'annulation de son licenciement, à sa réintégration dans l'entreprise, à des dommages-intérêts à ce titre, à un rappel de salaire pour la période courant du 15 septembre 2011 à sa réintégration, à un rappel de participation et d'intéressement, à des dommages-intérêts pour surcoût fiscal et à l'attribution d'actions gratuites, alors : « 1°/ que le salarié qui relate des faits de harcèlement moral ne peut être licencié pour ce motif, sauf mauvaise foi, laquelle ne peut résulter de la seule circonstance que les faits dénoncés ne sont pas établis ; que la seule référence, dans la lettre de licenciement, à la dénonciation par le salarié de faits de harcèlement moral justifie l'annulation du licenciement ; qu'en l'espèce, après avoir constaté expressément "la mention dans la lettre de licenciement du fait que M. [W] envisageait de porter plainte pour harcèlement moral", la cour d'appel ne pouvait débouter M. [W] de ses demandes au titre de la nullité de son licenciement, ce au motif impropre que ladite mention "ne constitue pas un grief allégué par l'employeur mais un élément factuel" ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé les articles L. 1152-2 et L. 1152-3 du code du travail ; 2°/ qu'est nul comme portant atteinte à une liberté fondamentale constitutionnellement garantie, le licenciement intervenu en raison d'une action en justice introduite ou susceptible d'être introduite par le salarié à l'encontre de son employeur ; que la seule référence dans la lettre de rupture à une procédure contentieuse engagée ou susceptible d'être engagée est constitutive d'une atteinte à la liberté fondamentale d'ester en justice et entraîne l'annulation du licenciement ; qu'en l'espèce, ayant elle-même constaté "la mention dans la lettre de licenciement du fait que M. [W] envisageait de porter plainte pour harcèlement moral", la cour d'appel ne pouvait débouter M. [W] de ses demandes au titre de la nullité de son licenciement, ce au motif impropre que cette mention "ne constitue pas un grief allégué par l'employeur mais un élément factuel", car en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble l'article L. 1121-1 du code du travail, l'alinéa 1 du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 et l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789. » Réponse de la Cour 6. Après avoir constaté que la lettre de licenciement, à titre liminaire, rappelait que, si le salarié s'était plaint d'un harcèlement moral de la part de son supérieur hiérarchique direct, l'employeur avait pris les mesures propres à cet égard en proposant au salarié, un an avant le licenciement, une mutation dans un autre service, mutation acceptée par le salarié, avec une augmentation salariale, la cour d'appel qui en a déduit qu'ainsi la lettre de licenciement se contentait de rappeler, avant l'énoncé des griefs, des éléments de contexte, n'encourt pas les griefs du moyen. Sur le second moyen Enoncé du moyen 7. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande tendant au bénéfice du régime de retraite « comité de conjoncture » et, à titre subsidiaire, celui « garantie de ressources des retraités anciens cadres dirigeants » à prestations définies instauré par L'Oréal, alors : « 1°/ que l'inégalité de traitement entre salariés de la même entreprise doit nécessairement être justifiée par des raisons objectives dont le juge saisi contrôle concrètement la réalité et la pertinence ; qu'en se bornant à affirmer, pour rejeter les demandes de M. [W] tenant à la reconnaissance d'une rupture d'égalité dans le bénéfice des régimes de retraite complémentaires, que la société L'Oréal "établit suffisamment que les régimes litigieux concernaient des catégories de salariés objectivement désignés dont la situation justifiait des avantages dérogatoires", sans caractériser concrètement les raisons objectives et pertinentes à l'origine de la différence de traitement entre les bénéficiaires de ces régimes et les autres salariés de l'entreprise, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe d'égalité de traitement ; 2°/ que les parties sont tenues d'apporter leur concours aux mesures d'instruction ordonnées par le juge, sauf à ce dernier à tirer les conséquences d'une abstention ou d'un refus en faisant droit à la demande de la partie adverse ; qu'en l'espèce, une ordonnance du conseiller de la mise en état du 18 mai 2020 a fait injonction à la société l'Oréal de produire la liste des membres du comité de conjoncture avec leur fonction et rémunération, la liste des noms des membres bénéficiant de la retraite des cadres dirigeants de la société avec leur fonction et rémunération et les copies des délégations de pouvoir accordées à ces cadres ; qu'en s'abstenant de tirer les conséquences du refus de la société employeur de produire l'ensemble des pièces demandées sur le bien-fondé des demandes de M. [W], la cour d'appel a violé l'article 11 du code de procédure civile ; 3°/ que pour juger que le salarié ne pouvait bénéficier du régime de retraite réservé aux membres du comité de conjoncture de l'Oréal, la cour d'appel a considéré qu'il ne remplissait pas la condition d'ancienneté minimum de 10 ans au 31 décembre 2000, date de fermeture du régime ; qu'en statuant ainsi, quand elle constatait pourtant expressément que M. [W] avait été embauché le 1er janvier 1996 avec reprise d'ancienneté en 1988, ce dont il se déduisait qu'il avait bien une ancienneté de 10 ans minimum à la date du 31 décembre 2000, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations et a violé en conséquence le principe d'égalité de traitement ; 4°/ que sont considérés comme ayant la qualité de cadre dirigeant les cadres auxquels sont confiées des responsabilités dont l'importance implique une grande indépendance dans l'organisation de leur emploi du temps, qui sont habilités à prendre des décisions de façon largement autonome et qui perçoivent une rémunération se situant dans les niveaux les plus élevés des systèmes de rémunération pratiqués dans leur entreprise ou établissement ; que la qualité de cadre dirigeant implique de participer à la direction de l'entreprise et de disposer d'une délégation de pouvoirs en ce sens ; qu'en déboutant en l'espèce M. [W] de ses demandes fondées sur la violation par l'employeur du principe d'égalité, sans rechercher, ni vérifier, ni constater, ainsi qu'elle y était pourtant invitée, si les salariés éligibles au régime de retraite complémentaire réservé aux cadres dirigeants pouvaient être tous considérés comme tels et s'ils disposaient d'une délégation de pouvoirs démontrant qu'ils participaient à la direction de l'entreprise, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe d'égalité de traitement, ensemble l'article L. 3111-2 du code du travail. » Réponse de la Cour 8. Selon la jurisprudence constante de la Cour de cassation (Soc., 13 mars 2013, pourvoi n° 11-20.491, Bull. 2013, V, n° 70 ; Soc., 9 juillet 2014, pourvoi n° 13-12.121, Bull. 2014, V, n° 184), en raison des particularités des régimes de prévoyance couvrant les risques maladie, incapacité, invalidité, décès et retraite, qui reposent sur une évaluation des risques garantis, en fonction des spécificités de chaque catégorie professionnelle, prennent en compte un objectif de solidarité et requièrent dans leur mise en oeuvre la garantie d'un organisme extérieur à l'entreprise, l'égalité de traitement ne s'applique qu'entre les salariés relevant d'une même catégorie professionnelle. 9. La Cour de cassation a déjà jugé, pour l'application du principe d'égalité de traitement, que les cadres dirigeants relèvent d'une catégorie professionnelle distincte (Soc., 24 septembre 2014, pourvoi n° 13-15.074, Bull. 2014, V, n° 204). 10. La cour d'appel a constaté que le premier régime de retraite supplémentaire clos en 2010 était réservé aux 63 membres du comité de conjoncture, et le second clos en 2015 aux 262 cadres dirigeants du groupe L'Oréal et que le salarié n'avait été ni membre du comité de conjoncture ni cadre dirigeant. 11. Par ce motif de pur droit, substitué à ceux critiqués, dans les conditions prévues par les articles 620, alinéa 1, et 1015 du code de procédure civile, dont il résulte que le principe d'égalité de traitement n'était pas applicable, l'arrêt se trouve légalement justifié. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne M. [W] aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatre octobre deux mille vingt-trois. | CONTRAT DE TRAVAIL, EXECUTION - Prévoyance collective - Couverture de prévoyance complémentaire - Prise en charge des frais médicaux - Principe d'égalité de traitement - Domaine d'application - Salariés relevant d'une même catégorie professionnelle - Détermination - Portée | CONTRAT DE TRAVAIL, EXECUTION - Prévoyance collective - Couverture de prévoyance complémentaire - Prise en charge des frais médicaux - Principe d'égalité de traitement - Domaine d'application - Salariés relevant d'une même catégorie professionnelle - Exclusion - Cas - Salarié n'étant ni cadre dirigeant ni membre du comité de conjoncture | Selon la jurisprudence constante de la Cour de cassation (Soc., 13 mars 2013, pourvoi n° 11-20.491, Bull. 2013, V, n° 70 ; Soc., 9 juillet 2014, pourvoi n° 13-12.121, Bull. 2014, V, n° 184), en raison des particularités des régimes de prévoyance couvrant les risques maladie, incapacité, invalidité, décès et retraite, qui reposent sur une évaluation des risques garantis, en fonction des spécificités de chaque catégorie professionnelle, prennent en compte un objectif de solidarité et requièrent dans leur mise en oeuvre la garantie d'un organisme extérieur à l'entreprise, l'égalité de traitement ne s'applique qu'entre les salariés relevant d'une même catégorie professionnelle. Pour l'application du principe d'égalité de traitement, les cadres dirigeants relèvent d'une catégorie professionnelle distincte (Soc., 24 septembre 2014, pourvoi n° 13-15.074, Bull. 2014, V, n° 204). Il en résulte que se trouve légalement justifié l'arrêt d'une cour d'appel qui, constatant que le salarié n'était ni cadre dirigeant, ni membre du comité de conjoncture, rejette sa demande de bénéfice des régimes de retraite supplémentaires prévus pour ces cadres dirigeants |
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JURITEXT000048176096 | JURI | texte/juri/judi/JURI/TEXT/00/00/48/17/60/JURITEXT000048176096.xml | ARRET | Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 4 octobre 2023, 22-12.922, Publié au bulletin | 2023-10-04 00:00:00 | Cour de cassation | 52300986 | Rejet | 22-12922 | oui | CHAMBRE_SOCIALE | 2022-01-05 00:00:00 | Cour d'appel de Versailles | M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président) | SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, SARL Thouvenin, Coudray et Grévy | ECLI:FR:CCASS:2023:SO00986 | LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant : SOC. CH9 COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 4 octobre 2023 Rejet M. HUGLO, conseiller doyen faisant fonction de président Arrêt n° 986 F-B Pourvoi n° A 22-12.922 Aide juridictionnelle totale en défense au profit de Mme [E], épouse [K]. Admission du bureau d'aide juridictionnelle près la Cour de cassation en date du 13 janvier 2023. R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 4 OCTOBRE 2023 La société OMS synergie, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 3], a formé le pourvoi n° A 22-12.922 contre l'arrêt rendu le 5 janvier 2022 par la cour d'appel de Versailles (15e chambre), dans le litige l'opposant : 1°/ à Mme [Y] [E], épouse [K], domiciliée [Adresse 1], 2°/ à Pôle Emploi, dont le siège est [Adresse 2], défendeurs à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Bérard, conseiller, les observations de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat de la société OMS synergie, de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de Mme [E], après débats en l'audience publique du 6 septembre 2023 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Bérard, conseiller rapporteur, M. Rinuy, conseiller, et Mme Jouanneau, greffier de chambre, la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 5 janvier 2022), Mme [E], épouse [K] a été engagée en qualité d'agent de service le 3 juillet 2000. Au dernier état de la relation de travail avec la société OMS synergie (la société), elle était affectée sur le site d'Eurostar à [Localité 4]. 2. Par lettre du 28 novembre 2016, la société a convoqué la salariée à un entretien préalable en vue d'une sanction disciplinaire pouvant aller jusqu'au licenciement. 3. Postérieurement à cet entretien préalable, la salariée s'est portée candidate aux élections des délégués du personnel en qualité de suppléante. 4. Le 28 décembre 2016, la société lui a notifié sa mutation disciplinaire sur le site de la base aérienne Ear situé à [Localité 5] à compter du 9 janvier 2017. La salariée a contesté cette sanction que la société a confirmée. Ultérieurement, la société a informé la salariée qu'à la suite de la perte de ce chantier, elle était contrainte de la réintégrer sur le site Eurostar à [Localité 4] à compter du 12 juin 2017. 5. Après mises en demeure de la salariée de justifier de ses absences, la société l'a sanctionnée à deux reprises d'une mise à pied disciplinaire pour absences injustifiées puis, après une nouvelle affectation et une nouvelle mise en demeure de reprendre son travail, l'a licenciée pour faute grave le 13 juin 2019. 6. La salariée a saisi la juridiction prud'homale le 5 février 2018 afin de prononcer la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts exclusifs de l'employeur et le condamner à lui verser diverses sommes au titre d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse. Examen des moyens Sur le second moyen 7. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Sur le premier moyen Enoncé du moyen 8. La société fait grief à l'arrêt de prononcer à ses torts la résiliation judiciaire du contrat de travail de la salariée, de dire que cette résiliation judiciaire produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, de la condamner à payer à la salariée diverses sommes au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, des congés payés afférents, de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de dire que les créances salariales sont productives d'intérêts au taux légal à compter du jour de la présentation à l'employeur de la lettre le convoquant devant le bureau de conciliation et d'orientation, de dire que la créance indemnitaire est productive d'intérêts au taux légal à compter de l'arrêt, d'ordonner la capitalisation des intérêts, d'ordonner le remboursement par la société à Pôle emploi des indemnités de chômage qu'elle a versées à la salariée à compter du jour de son licenciement, et ce à concurrence de six mois d'indemnité, alors : « que pour l'application des dispositions de l'article L. 2411-7 du code du travail, c'est au moment de l'envoi de la convocation à l'entretien préalable que l'employeur doit avoir connaissance du statut protecteur ; qu'en résiliant le contrat aux torts de l'employeur quand la convocation à l'entretien a eu lieu le 28 novembre 2016 et quand la salariée ne s'est déclarée candidate aux élections des délégués du personnel que le 12 décembre 2016, la cour d'appel a violé l'article L. 2411-7 du code du travail. Réponse de la Cour 9. Il résulte des articles L. 1221-1, L. 1231-1 et L. 2411-1 du code du travail qu'aucune modification de son contrat de travail ou changement de ses conditions de travail ne peut être imposé à un salarié protégé. En cas de refus par celui-ci de cette modification ou de ce changement, l'employeur doit poursuivre le contrat de travail aux conditions antérieures ou engager la procédure de licenciement en saisissant l'autorité administrative d'une demande d'autorisation de licenciement. 10. Ayant constaté qu'au moment où il a imposé une mutation à la salariée l'employeur avait connaissance de sa candidature aux élections professionnelles, c'est à bon droit que la cour d'appel a retenu que l'employeur ne pouvait lui imposer de modification de ses conditions de travail sans son accord, peu important que cette candidature soit postérieure à la convocation de la salariée à l'entretien préalable à la sanction disciplinaire. 11. Le moyen est, dès lors, inopérant. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne la société OMS synergie aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société OMS synergie et la condamne à payer à la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy la somme de 3 000 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatre octobre deux mille vingt-trois. | REPRESENTATION DES SALARIES - Règles communes - Contrat de travail - Conditions de travail - Modification - Refus du salarié - Obligations de l'employeur - Etendue - Domaine d'application - Critères - Connaissance de la candidature par l'employeur - Moment - Détermination - Portée | CONTRAT DE TRAVAIL, EXECUTION - Modification - Modification imposée par l'employeur - Modification du contrat de travail - Refus du salarié protégé - Obligations de l'employeur - Etendue - Domaine d'application - Critères - Connaissance de la candidature par l'employeur - Moment - Détermination - Portée | Il résulte des articles L. 1221-1, L. 1231-1 et L. 2411-1 du code du travail qu'aucune modification de son contrat de travail ou changement de ses conditions de travail ne peut être imposé à un salarié protégé. En cas de refus par celui-ci de cette modification ou de ce changement, l'employeur doit poursuivre le contrat de travail aux conditions antérieures ou engager la procédure de licenciement en saisissant l'autorité administrative d'une demande d'autorisation de licenciement. Ayant constaté qu'au moment où il a imposé une mutation au salarié l'employeur avait connaissance de sa candidature aux élections professionnelles, c'est à bon droit que la cour d'appel a retenu que l'employeur ne pouvait lui imposer de modification de ses conditions de travail sans son accord, peu important que cette candidature soit postérieure à la convocation du salarié à l'entretien préalable à la sanction disciplinaire |
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JURITEXT000048176115 | JURI | texte/juri/judi/JURI/TEXT/00/00/48/17/61/JURITEXT000048176115.xml | ARRET | Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 4 octobre 2023, 22-23.551, Publié au bulletin | 2023-10-04 00:00:00 | Cour de cassation | 52301066 | Cassation sans renvoi | 22-23551 | oui | CHAMBRE_SOCIALE | 2022-11-24 00:00:00 | Cour d'appel de Chambéry | M. Sommer | SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, SCP Lyon-Caen et Thiriez, SARL Thouvenin, Coudray et Grévy | ECLI:FR:CCASS:2023:SO01066 | LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant : SOC. CH9 COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 4 octobre 2023 Cassation sans renvoi M. SOMMER, président Arrêt n° 1066 FS-B+R Pourvoi n° D 22-23.551 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 4 OCTOBRE 2023 Le syndicat Union des industries et métiers de la métallurgie de Savoie, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° D 22-23.551 contre l'arrêt rendu le 24 novembre 2022 par la cour d'appel de Chambéry (chambre sociale), dans le litige l'opposant : 1°/ au syndicat Union syndicale des travailleurs de la métallurgie CGT de la Savoie, dont le siège est maison des Syndicats CGT, [Adresse 8], 2°/ au syndicat Fédération des travailleurs de la métallurgie CGT, dont le siège est [Adresse 1], 3°/ au syndicat CFE-CGC des deux Savoie de la métallurgie, dont le siège est maison des Syndicats, [Adresse 3], 4°/ à l'Union des syndicats de la métallurgie FO de Savoie, dont le siège est [Adresse 5], 5°/ au syndicat Symetal Alpes Loire CFDT, dont le siège est [Adresse 4], 6°/ à la Fédération de la métallurgie CFE-CGC, dont le siège est [Adresse 6], 7°/ à la Fédération confédérée Force ouvrière de la métallurgie-FO métaux, dont le siège est [Adresse 9], 8°/ à la Fédération générale des mines et de la métallurgie, dont le siège est [Adresse 7], défendeurs à la cassation. Partie intervenante : la Confédération générale du travail, dont le siège est [Adresse 1] Le syndicat Symetal Alpes Loire CFDT, le syndicat CFE-CGC des deux Savoie de la métallurgie, l'Union des syndicats de la métallurgie FO de Savoie, la Fédération de la métallurgie CFE-CGC, la Fédération confédérée Force ouvrière de la métallurgie - FO métaux et la Fédération générale des mines et de la métallurgie CFDT ont formé un pourvoi incident provoqué contre le même arrêt. Le demandeur au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, un moyen de cassation. Les demandeurs au pourvoi incident provoqué invoquent, à l'appui de leur recours, un moyen de cassation. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Sommé, conseiller, les observations écrites de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat du syndicat Union des industries et métiers de la métallurgie de Savoie, de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat du syndicat Union syndicale des travailleurs de la métallurgie CGT de la Savoie, du syndicat Fédération des travailleurs de la métallurgie CGT, de la Confédération générale du travail, de la SARL Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat du syndicat CFE-CGC des deux Savoie de la métallurgie, de l'Union des syndicats de la métallurgie FO de Savoie, du syndicat Symetal Alpes Loire CFDT, de la Fédération de la métallurgie CFE-CGC, de la Fédération confédérée Force ouvrière de la métallurgie-FO métaux, de la Fédération générale des mines et de la métallurgie, les plaidoiries de Me Lyon-Caen, Me Grévy, et Me Gatineau, ainsi que l'avis de Mme Berriat, avocat général, après débats en l'audience publique du 20 septembre 2023 où étaient présents M. Sommer, président, Mme Sommé, conseiller rapporteur, M. Huglo, conseiller doyen, M. Rinuy, Mmes Ott, Bouvier, Bérard, conseillers, Mmes Chamley-Coulet, Lanoue, Ollivier, conseillers référendaires, Mme Berriat, avocat général, et Mme Pontonnier, greffier de chambre, la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Intervention volontaire 1. Il est donné acte à la Confédération générale du travail de son intervention volontaire au soutien de l'Union syndicale des travailleurs de la métallurgie CGT de la Savoie (l'USTM-CGT) et de la Fédération des travailleurs de la métallurgie CGT (la FTM-CGT). Faits et procédure 2. Selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 24 novembre 2022), le secteur professionnel de la métallurgie est régi par des accords collectifs, d'une part de niveau national, dont l'accord national du 10 juillet 1970 créant un statut unifié des ouvriers et des employés, techniciens et agents de maîtrise et la convention collective nationale des ingénieurs et cadres de la métallurgie du 13 mars 1972, négociés par l'Union des industries et métiers de la métallurgie et les organisations syndicales de salariés représentatives au niveau national, d'autre part de niveau territorial, négociés par chaque union des industries et métiers de la métallurgie locale et les organisations syndicales de salariés représentatives au niveau de la branche dans le champ géographique considéré. 3. Parmi les soixante-seize conventions territoriales de la métallurgie, a été signée, le 29 décembre 1975, la convention collective applicable aux mensuels de la métallurgie de la Savoie. 4. En 2013, l'Union des industries et métiers de la métallurgie et les organisations syndicales de salariés représentatives ont engagé une réflexion sur l'évolution du dispositif conventionnel de la métallurgie, ayant abouti à la signature, le 27 juin 2016, d'un accord national relatif à la mise en oeuvre opérationnelle de la négociation de l'évolution du dispositif conventionnel, puis, le 29 septembre 2021, d'un accord national portant dispositions en faveur de négociations territoriales et sectorielles en vue de la mise en place d'un nouveau dispositif conventionnel dans la métallurgie, révisé par avenant du 21 décembre 2021. 5. Le 7 février 2022, la convention collective nationale de la métallurgie a été signée entre l'Union des industries et métiers de la métallurgie d'une part, les organisations syndicales CFDT, FO et CFE-CGC, d'autre part. Elle a été étendue par arrêté du 14 décembre 2022. 6. L'entrée en vigueur de cette convention a été fixée au 1er janvier 2024, sauf en ce qui concerne ses dispositions relatives à la protection sociale, dont l'entrée en vigueur a été prévue à compter du premier jour du mois suivant la date de publication de l'arrêté d'extension de la convention et au plus tôt le 1er janvier 2023. 7. Le 9 février 2022, l'Union des industries et métiers de la métallurgie de Savoie (l'UIMM), le syndicat CFE-CGC des deux Savoie de la métallurgie (le syndicat CFE-CGC), l'Union des syndicats de la métallurgie FO de Savoie (l'UD-FO) et le syndicat Symetal Alpes Loire CFDT (le syndicat CFDT) ont signé un avenant portant révision des dispositions conventionnelles territoriales conclues dans le champ de la convention collective du 29 décembre 1975 modifiée applicable aux mensuels de la métallurgie de la Savoie, dont l'article 1er prévoit que cette convention collective territoriale, ainsi que l'ensemble des accords collectifs, leurs avenants et annexes, conclus dans le champ de ladite convention ou dans un champ plus restreint et notamment ceux listés en annexe, sont abrogés et cessent de produire leurs effets à compter de l'entrée en vigueur de la convention collective nationale de la métallurgie. 8. Soutenant qu'il ne pouvait être mis fin à un accord collectif par un avenant de révision, par acte du 5 avril 2022, l'USTM-CGT et la FTM-CGT ont fait assigner l'UIMM, le syndicat CFE-CGC, l'UD-FO et le syndicat CFDT devant le tribunal judiciaire afin d'obtenir l'annulation de l'avenant du 9 février 2022 et la condamnation de l'UIMM au paiement de dommages-intérêts pour le préjudice subi. 9. La Fédération de la métallurgie CFE-CGC (la fédération CFE-CGC), la Fédération confédérée FO de la métallurgie (la fédération FO) et la Fédération générale des mines et de la métallurgie CFDT (la fédération CFDT) sont intervenues volontairement à l'instance. Sur le moyen du pourvoi principal, pris en sa première branche, et sur le moyen du pourvoi incident provoqué, réunis Enoncé du moyen 10. Par son moyen l'UIMM fait grief à l'arrêt d'annuler en toutes ses dispositions l'avenant du 9 février 2022 portant révision des dispositions conventionnelles territoriales conclues dans le champ de la convention collective du 29 décembre 1975 modifiée applicable aux mensuels de la métallurgie de la Savoie et ses avenants et de la condamner à payer à l'USTM-CGT et à la FTM-CGT une certaine somme à titre de dommages-intérêts pour le préjudice subi, alors « que rien n'interdit, pour mettre fin à un accord collectif, de procéder, en dehors de sa dénonciation unilatérale par tout ou partie des organisations signataires prévue par l'article L. 2261-9 du code du travail, par voie de résiliation négociée dans le cadre d'un avenant de révision conclu conformément aux dispositions de l'article L. 2261-7 du code du travail ; qu'en l'espèce, suite à la conclusion d'une nouvelle convention collective nationale au sein de la branche de la métallurgie ayant vocation à unifier le statut collectif au sein de la branche et devant entrer en vigueur le 1er janvier 2024, l'UIMM de Savoie et plusieurs organisations syndicales représentatives ont conclu, le 9 février 2022, un avenant à la convention collective territoriale de Savoie du 29 décembre 1975 emportant extinction de cette convention collective à effet du 1er janvier 2024 ; qu'en affirmant, pour juger que cet avenant était nul, qu'un avenant de révision ne pouvait avoir pour objet que de modifier un accord mais non d'y mettre fin en éludant les règles applicables en matière de dénonciation et les garanties afférentes, la cour d'appel a violé les articles L. 2261-7 et L. 2261-8 du code du travail ensemble les articles 1101, 1102, 1103 et 1193 du code civil. » 11. Par leur moyen le syndicat CFE-CGC, l'UD-FO, le syndicat CFDT, la fédération CFE-CGC, la fédération FO et la fédération CFDT font grief à l'arrêt d'annuler en toutes ses dispositions l'avenant du 9 février 2022 portant révision des dispositions conventionnelles territoriales conclues dans le champ de la convention collective du 29 décembre 1975 modifiée applicable aux mensuels de la métallurgie de la Savoie et ses avenants, alors « qu'il peut être mis fin aux dispositions d'un accord collectif de travail par un avenant de révision dont les dispositions se substituent de plein droit à l'accord révisé ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé les articles L. 2261-7 et L. 2261-8 du code du travail. » Réponse de la Cour Vu les articles L. 2231-1, alinéa 1, L. 2232-6, L. 2261-7 et L. 2261-8 du code du travail et le principe de la liberté contractuelle en matière de négociation collective : 12. En application de l'article L. 2231-1, alinéa 1, du code du travail, ont le pouvoir de conclure une convention ou un accord collectif de travail les organisations syndicales de salariés représentatives dans le champ d'application de la convention ou de l'accord. 13. L'article L. 2232-6 du même code dispose que la validité d'une convention de branche ou d'un accord professionnel est subordonnée à sa signature par une ou plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives ayant recueilli, aux élections prises en compte pour la mesure de l'audience prévue au 3° de l'article L. 2122-5 ou, le cas échéant aux élections visées à l'article L. 2122-6, au moins 30 % des suffrages exprimés en faveur d'organisations reconnues représentatives à ce niveau, quel que soit le nombre de votants, et à l'absence d'opposition d'une ou plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives ayant recueilli la majorité des suffrages exprimés en faveur des mêmes organisations à ces mêmes élections, quel que soit le nombre de votants. L'opposition est exprimée dans un délai de quinze jours à compter de la date de notification de cet accord ou de cette convention, dans les conditions prévues à l'article L. 2231-8. 14. Aux termes de l'article L. 2261-7 du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 : I. - Sont habilitées à engager la procédure de révision d'un accord interprofessionnel, d'une convention ou d'un accord de branche : 1° Jusqu'à la fin du cycle électoral au cours duquel la convention ou l'accord est conclu : a) Une ou plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives dans le champ d'application de la convention ou de l'accord et signataires ou adhérentes de la convention ou de l'accord ; b) Une ou plusieurs organisations professionnelles d'employeurs signataires ou adhérentes. Si la convention ou l'accord est étendu, ces organisations doivent être en outre représentatives dans le champ d'application de la convention ou de l'accord ; 2° A l'issue de ce cycle : a) Une ou plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives dans le champ d'application de la convention ou de l'accord ; b) Une ou plusieurs organisations professionnelles d'employeurs de la branche. Si la convention ou l'accord est étendu, ces organisations doivent être représentatives dans le champ d'application de la convention ou de l'accord. II. - Les avenants de révision obéissent aux conditions de validité des accords prévues, selon le cas, aux sections 1 et 2 du chapitre II du titre III du présent livre II. Lorsque l'avenant de révision a vocation à être étendu, sa validité est subordonnée à sa signature par une ou plusieurs organisations professionnelles d'employeurs représentatives dans son champ d'application, dans les conditions prévues au chapitre Ier du titre V du livre Ier de la présente deuxième partie. 15. Il résulte de ces textes qu'est valide un avenant de révision conclu par les organisations syndicales de salariés représentatives dans le champ d'application de l'accord révisé à la date de conclusion de l'avenant de révision et n'ayant pas fait l'objet d'opposition dans les conditions prévues à l'article L. 2232-6 précité. 16. Aux termes de l'article L. 2261-8 du code du travail, l'avenant portant révision de tout ou partie d'une convention ou d'un accord se substitue de plein droit aux stipulations de la convention ou de l'accord qu'il modifie. Il est opposable, dans des conditions de dépôt prévues à l'article L. 2231-6, à l'ensemble des employeurs et des salariés liés par la convention ou l'accord. 17. Selon la jurisprudence du Conseil constitutionnel (Cons. const., 29 novembre 2019, décision n° 2019-816 QPC), en matière de négociation collective, la liberté contractuelle découle des sixième et huitième alinéas du préambule de la Constitution de 1946. 18. Il en résulte que les partenaires sociaux sont en droit de conclure, dans les conditions fixées par l'article L. 2261-7 du code du travail, un avenant de révision d'un accord collectif de branche à durée indéterminée mettant fin à cet accord, dès lors que cette extinction prend effet à compter de l'entrée en vigueur d'un autre accord collectif dont le champ d'application couvre dans son intégralité le champ professionnel et géographique de l'accord abrogé par l'avenant de révision. 19. En l'espèce, l'avenant du 9 février 2022 portant révision des dispositions conventionnelles territoriales conclues dans le champ de la convention collective du 29 décembre 1975 modifiée applicable aux mensuels de la métallurgie de la Savoie et ses avenants, prévoit, à son article 1er, que les partenaires sociaux conviennent que ladite convention ainsi que ses avenants et annexes conclus dans le champ de cette convention collective territoriale, ou dans un champ d'application plus restreint, sont abrogés et cessent de produire leurs effets à compter de l'entrée en vigueur de la convention collective nationale de la métallurgie, soit à compter du 1er janvier 2024, à l'exception des dispositions de la convention collective territoriale relatives à la protection sociale qui cessent de produire leurs effets au profit des dispositions nationales au plus tôt le 1er janvier 2023, et dispose, à son article 3, que le présent avenant entre en vigueur au lendemain de la date de son dépôt et entraîne la révision-extinction des dispositions territoriales aux dates indiquées aux articles précédents. 20. Il résulte de cet avenant de révision qu'il a pour effet de mettre fin à la convention collective territoriale de la Savoie du 29 décembre 1975, ainsi qu'à ses avenants et annexes conclus dans le champ de cette convention, à compter de l'entrée en vigueur des dispositions de la convention collective nationale de la métallurgie du 7 février 2022. 21. Pour annuler l'avenant du 9 février 2022, l'arrêt retient qu'en l'absence de disposition légale prévoyant que la révision peut porter sur la disparition ou l'abrogation totale d'un accord collectif, la procédure de révision n'est relative qu'aux modifications des conventions et accords collectifs et non à leur extinction, que les règles de la révision ne peuvent avoir pour objet l'extinction d'une convention collective au moyen d'une révision adoptée en vertu de la règle de la majorité, ayant pour effet d'imposer à une organisation syndicale non signataire une extinction sans passer par la procédure de dénonciation et les garanties qui y sont attachées, notamment celles de l'article L. 2261-9 du code du travail prévoyant un délai de préavis précédant la dénonciation et celles de l'article L. 2261-11 du même code relatives au maintien des effets des dispositions de l'accord dénoncé par une partie des signataires, et que l'avenant de révision litigieux ne peut être qualifié d'accord de révocation d'un commun accord dès lors que l'un des signataires s'est opposé à la signature de cet avenant. 22. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes et le principe susvisés. Portée et conséquences de la cassation 23. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile. 24. L'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 24 novembre 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Chambéry ; DIT n'y avoir lieu à renvoi ; Déboute l'Union syndicale des travailleurs de la métallurgie CGT de la Savoie et la Fédération des travailleurs de la métallurgie CGT de leur demande d'annulation de l'avenant du 9 février 2022 portant révision des dispositions conventionnelles territoriales conclues dans le champ de la convention collective du 29 décembre 1975 modifiée applicable aux mensuels de la métallurgie de la Savoie et ses avenants, de leur demande de dommages-intérêts pour le préjudice subi formée à l'encontre de l'Union des industries et métiers de la métallurgie de Savoie et de leur demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile ; Condamne l'Union syndicale des travailleurs de la métallurgie CGT de la Savoie et la Fédération des travailleurs de la métallurgie CGT aux dépens tant devant la Cour de cassation que devant la cour d'appel ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatre octobre deux mille vingt-trois. | STATUT COLLECTIF DU TRAVAIL - Conventions et accords collectifs - Dispositions générales - Révision - Avenant - Extinction d'un accord collectif de branche à durée déterminée - Modalités - Détermination - Portée | STATUT COLLECTIF DU TRAVAIL - Conventions et accords collectifs - Dispositions générales - Révision - Avenant de révision d'un accord collectif de branche à durée déterminée - Validité du nouvel accord - Condition - Accord couvrant l'intégralité du champ professionnel et géographique de l'accord abrogé - Portée STATUT COLLECTIF DU TRAVAIL - Conventions et accords collectifs - Dispositions générales - Révision - Avenant de révision d'un accord collectif de branche à durée déterminée - Validité du nouvel accord - Condition - Moment - Entrée en vigueur concomitante à l'extinction de l'accord abrogé - Portée | Il résulte des articles L. 2231-1, alinéa 1, L. 2232-6, L. 2261-7 et L. 2261-8 du code du travail et du principe de la liberté contractuelle en matière de négociation collective que les partenaires sociaux sont en droit de conclure, dans les conditions fixées par l'article L. 2261-7 du code du travail, un avenant de révision d'un accord collectif de branche à durée indéterminée mettant fin à cet accord, dès lors que cette extinction prend effet à compter de l'entrée en vigueur d'un autre accord collectif dont le champ d'application couvre dans son intégralité le champ professionnel et géographique de l'accord abrogé par l'avenant de révision |
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JURITEXT000048210974 | JURI | texte/juri/judi/JURI/TEXT/00/00/48/21/09/JURITEXT000048210974.xml | ARRET | Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 10 octobre 2023, 23-17.506, Publié au bulletin | 2023-10-10 00:00:00 | Cour de cassation | 52302029 | QPC - Non-lieu à renvoi au Conseil constitutionnel | 23-17506 | oui | CHAMBRE_SOCIALE | 2023-06-09 00:00:00 | Tribunal judiciaire de Paris | M. Sommer | SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, SARL Thouvenin, Coudray et Grévy | ECLI:FR:CCASS:2023:SO02029 | LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant : SOC. COUR DE CASSATION CH9 ______________________ QUESTION PRIORITAIRE de CONSTITUTIONNALITÉ ______________________ Audience publique du 10 octobre 2023 NON-LIEU A RENVOI M. SOMMER, président Arrêt n° 2029 FS-B Pourvoi n° D 23-17.506 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 10 OCTOBRE 2023 Par mémoire spécial présenté le 18 juillet 2023, le groupement d'intérêt économique Alliance gestion, dont le siège est [Adresse 1], a formulé une question prioritaire de constitutionnalité à l'occasion du pourvoi n° D 23-17.506 formé contre le jugement rendu le 9 juin 2023 par le tribunal judiciaire de Paris (contentieux des élections professionnelles), dans une instance l'opposant : 1°/ à la fédération syndicale FIECI CFE-CGC, 2°/ à la Fédération nationale du personnel de l'encadrement des sociétés de service informatique, des études, du conseil et de l'ingénierie (FIECI), 3°/ au Syndicat national de l'encadrement des professionnels des études et des conseils (SNEPEC), ayant tous trois leur siège [Adresse 3], 4°/ à Mme [P] [D], domiciliée [Adresse 2]. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Lanoue, conseiller référendaire, les observations de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat du groupement d'intérêt économique Alliance gestion, de la SARL Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de la fédération syndicale FIECI CFE-CGC, de la Fédération nationale du personnel de l'encadrement des sociétés de service informatique, des études, du conseil et de l'ingénierie, du Syndicat national de l'encadrement des professionnels des études et des conseils et de Mme [D], et l'avis de Mme Berriat, premier avocat général, après débats en l'audience publique du 4 octobre 2023 où étaient présents M. Sommer, président, Mme Lanoue, conseiller référendaire rapporteur, M. Huglo, conseiller doyen, M. Rinuy, Mmes Ott, Sommé, Bouvier, Bérard, conseillers, Mmes Chamley-Coulet, Ollivier, Arsac, conseillers référendaires, Mme Berriat, premier avocat général, et Mme Piquot, greffier de chambre, la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Le 2 février 2023, le GIE Alliance gestion (le GIE) et la fédération syndicale FIECI CFE-CGC ont signé un protocole d'accord préélectoral en vue du renouvellement de la délégation du personnel au comité social et économique, prévoyant notamment que les proportions de femmes et d'hommes étaient respectivement de 70,24% et 29,76% dans le premier collège, trois sièges étant à pourvoir. 2. Par lettre du 22 février 2023, le syndicat FIECI CFE-CGC a adressé au GIE au titre des « candidatures CFE-CGC pour le premier tour des élections du CSE du GIE Alliance gestion » pour le premier collège la candidature unique de Mme [D] en qualité de titulaire et suppléante. 3. Par lettre du 27 février 2023, le GIE a contesté la conformité de cette liste aux dispositions légales sur la représentation équilibrée entre les hommes et les femmes en demandant à l'organisation syndicale de modifier sa liste ou de la retirer. Le syndicat a maintenu sa liste. 4. Par requête du 3 mars 2023, le GIE a saisi le tribunal judiciaire de Paris afin qu'il constate l'irrégularité, au regard des règles relatives à la représentation équilibrée des hommes et des femmes et à l'interdiction de présenter un unique candidat si plusieurs sièges sont à pourvoir, de la liste de candidats présentée par la fédération syndicale FIECI CFE-CGC dans le cadre du premier tour des élections. 5. A l'issue du premier tour du scrutin qui s'est déroulé le 13 mars 2023, le quorum n'a pas été atteint. Mme [D], qui était la seule candidate, a obtenu 100% des suffrages valablement exprimés. Se présentant comme candidate libre, elle a été élue en qualité de titulaire au second tour qui s'est tenu le 28 mars 2023. 6. Le 3 avril 2023, le GIE a de nouveau saisi le tribunal judiciaire aux fins de juger que la liste de candidats présentée par le syndicat FIECI CFE-CGC au premier tour des élections professionnelles organisées au sein du GIE Alliance gestion pour le 1er collège, non-cadres, était irrégulière au regard des règles relatives à la représentation équilibrée des hommes et des femmes et à l'interdiction de présenter un unique candidat si plusieurs sièges sont à pourvoir et demandé en conséquence que ce syndicat soit jugé non représentatif et que les élections professionnelles soient annulées. 7. Statuant sur la première requête déposée le 3 mars 2023 par jugement du 21 avril 2023, le tribunal a débouté le GIE Alliance gestion de l'ensemble de ses demandes, au motif que, statuant après les élections professionnelles qui avaient eu lieu les 13 et 28 mars 2023, la demande d'annulation de la liste de candidats contestée était devenue « sans objet ». Enoncé de la question prioritaire de constitutionnalité 8. A l'occasion du pourvoi qu'il a formé contre le jugement rendu le 9 juin 2023 par le tribunal judiciaire de Paris statuant sur la requête déposée le 3 avril 2023, le GIE a, par mémoire distinct et motivé, demandé de renvoyer au Conseil constitutionnel une question prioritaire de constitutionnalité ainsi rédigée : « Les dispositions de l'alinéa 3 de l'article L. 2314-32 du code du travail, qui ne prévoient comme sanction du non-respect par une liste de candidats des prescriptions prévues à la première phrase du premier alinéa de l'article L. 2314-30 du même code que la simple annulation de l'élection d'un nombre d'élus du sexe surreprésenté égal au nombre de candidats du sexe surreprésenté en surnombre sur la liste de candidats au regard de la part de femmes et d'hommes que celle-ci devait respecter, portent-elles atteinte, en ce qu'elles ne prévoient pas l'annulation des élections même lorsque l'irrégularité dans le déroulement des élections née de la présentation par une organisation syndicale d'une liste de candidat ne répondant pas aux exigences d'ordre public de l'article L. 2314-30 a été déterminante de la qualité représentative des organisations syndicales dans l'entreprise, au principe résultant de l'article 34 de la Constitution selon lequel l'incompétence négative du législateur ne doit pas affecter un droit ou une liberté que la Constitution garantit, en l'occurrence le droit des travailleurs à la détermination collective des conditions de travail et le principe d'égalité tels que garantis par les alinéas 6 et 8 du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 et les articles 1, 5 et 6 de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen de 1789 ? » Examen de la question prioritaire de constitutionnalité 9. La disposition contestée est applicable au litige, qui concerne la sanction du dépôt par une organisation syndicale d'une liste de candidats aux élections des membres de la délégation du personnel au comité social et économique ne comportant pas un nombre de candidats correspondant à la part de femmes et d'hommes inscrits sur la liste électorale. 10. Elle n'a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel. 11. Cependant, d'une part, la question posée, ne portant pas sur l'interprétation d'une disposition constitutionnelle dont le Conseil constitutionnel n'aurait pas encore eu l'occasion de faire application, n'est pas nouvelle. 12. D'autre part, la question posée ne présente pas un caractère sérieux. En effet, en premier lieu, le législateur n'a pas porté atteinte au principe d'égalité devant la loi, la sanction étant appliquée de la même manière à tous les syndicats placés dans la même situation. 13. En second lieu, le législateur, exerçant pleinement la compétence que lui attribue la Constitution, a opéré une conciliation équilibrée entre les exigences de l'alinéa 3 du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 et celles des alinéas 6 et 8 de ce préambule en choisissant, en cas d'irrégularité de la liste de candidats aux élections des membres de la délégation du personnel au comité social et économique, lorsque le tribunal statue après l'élection, la seule sanction de l'annulation de l'élection d'un nombre d'élus du sexe surreprésenté égal au nombre de candidats du sexe surreprésenté en surnombre sur la liste de candidats au regard de la part de femmes et d'hommes que celle-ci devait respecter, sans remettre en cause la qualité représentative des organisations syndicales leur permettant d'accéder à la négociation collective, notamment des conditions de travail des salariés de l'entreprise. 14. D'ailleurs, dans sa décision n° 2018-720/721/722/723/724/725/726 QPC du 13 juillet 2018, le Conseil constitutionnel a déclaré contraires à la Constitution les mots « ou lorsqu'ils sont la conséquence de l'annulation de l'élection de délégués du personnel prononcée par le juge en application des deux derniers alinéas de l'article L. 2314-25 » figurant au second alinéa de l'article L. 2314-7 du code du travail, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2015-994 du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l'emploi, ainsi que les mots « ou s'ils sont la conséquence de l'annulation de l'élection de membres du comité d'entreprise prononcée par le juge en application des deux derniers alinéas de l'article L. 2324-23 » figurant au premier alinéa de l'article L. 2324-10 du même code, dans cette même rédaction. 15. Il résulte des motifs de cette décision que les dispositions contestées pouvaient aboutir à ce que plusieurs sièges demeurent vacants dans ces institutions représentatives du personnel, pour une période pouvant durer plusieurs années, y compris dans les cas où un collège électoral n'y est plus représenté et où le nombre des élus titulaires a été réduit de moitié ou plus et que ces dispositions pouvaient ainsi conduire à ce que le fonctionnement normal de ces institutions soit affecté dans des conditions remettant en cause le principe de participation des travailleurs. Le Conseil constitutionnel en a tiré la conséquence que, même si les dispositions contestées visaient à garantir, parmi les membres élus, une représentation équilibrée des femmes et des hommes, l'atteinte portée par le législateur au principe de participation des travailleurs était manifestement disproportionnée (§§ 12 et 13). 16. En conséquence, il n'y a pas lieu de renvoyer la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil constitutionnel. PAR CES MOTIFS, la Cour : DIT N'Y AVOIR LIEU DE RENVOYER au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix octobre deux mille vingt-trois. | QUESTION PRIORITAIRE DE CONSTITUTIONNALITE - Elections professionnelles - Comité social et économique - Renouvellement de la délégation du personnel - Opérations électorales - Représentation équilibrée des femmes et des hommes - Droit des travailleurs à la détermination collective de leurs conditions de travail - Principe d'égalité - Incompétence négative du législateur - Articles L. 2314-30 et L. 2314-32 du code du travail - Caractères nouveau et sérieux - Défaut - Non-lieu à renvoi au Conseil constitutionnel | ||||||||||
JURITEXT000048210976 | JURI | texte/juri/judi/JURI/TEXT/00/00/48/21/09/JURITEXT000048210976.xml | ARRET | Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 10 octobre 2023, 23-13.261, Publié au bulletin | 2023-10-10 00:00:00 | Cour de cassation | 52302030 | QPC - Non-lieu à renvoi au Conseil constitutionnel | 23-13261 | oui | CHAMBRE_SOCIALE | 2023-01-12 00:00:00 | Cour d'appel de Paris | M. Sommer | SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, SARL Thouvenin, Coudray et Grévy | ECLI:FR:CCASS:2023:SO02030 | LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant : SOC. COUR DE CASSATION ZB1 ______________________ QUESTION PRIORITAIRE de CONSTITUTIONNALITÉ ______________________ Audience publique du 10 octobre 2023 NON-LIEU A RENVOI M. SOMMER, président Arrêt n° 2030 FS-B Pourvoi n° Q 23-13.261 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 10 OCTOBRE 2023 Par mémoire spécial présenté le 12 juillet 2023, la société ING Bank N.v. société de droit étranger, dont le siège est [Adresse 2] (Pays-Bas), ayant un établissement sis [Adresse 3], a formulé une question prioritaire de constitutionnalité à l'occasion du pourvoi n° Q 23-13.261 qu'elle a formé contre l'arrêt rendu le 12 janvier 2023 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 7), dans une instance l'opposant à M. [R] [T], domicilié [Adresse 1]. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Ollivier, conseiller référendaire, les observations de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de la société ING Bank N.v., de la SARL Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de M. [T], et l'avis de Mme Laulom, avocat général, après débats en l'audience publique du 4 octobre 2023 où étaient présents M. Sommer, président, Mme Ollivier, conseiller référendaire rapporteur, M. Huglo, conseiller doyen, M. Rinuy, Mmes Ott, Sommé, Bouvier, Bérard, conseillers, Mmes Chamley-Coulet, Lanoue, Arsac, conseillers référendaires, Mme Laulom, avocat général, et Mme Piquot, greffier de chambre, la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. M. [T] a été engagé par la société ING Bank N.v. le 13 août 2001 en qualité de chargé de clientèle senior. 2. Entre juin 2015 et octobre 2018, le salarié a été titulaire de mandats de délégué du personnel, de membre du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail et de représentant syndical au comité d'établissement. 3. Le 20 avril 2016, le salarié a interrogé l'employeur sur la possibilité de bénéficier de la garantie de rémunération prévue par la loi n° 2015-994 du 17 août 2015. Le 21 avril 2016, l'employeur l'a informé que la mise en oeuvre de la garantie devait s'apprécier au terme de ses mandats. 4. Estimant être victime de discrimination syndicale, le salarié a saisi, le 13 mars 2019, la juridiction prud'homale afin d'obtenir la condamnation de l'employeur au paiement de diverses sommes de nature salariale et indemnitaire. 5. Par jugement du 15 octobre 2019, le conseil de prud'hommes l'a débouté de ses demandes. 6. Par arrêt du 12 janvier 2023, la cour d'appel de Paris a infirmé ce jugement, sauf en ce qu'il déboute l'employeur de sa demande reconventionnelle et lui a, notamment, ordonné de communiquer au salarié le montant correspondant aux augmentations générales et à la moyenne des augmentations individuelles perçues par les techniciens de niveau E dont l'ancienneté est comparable à celle de M. [T] entre le 17 juin 2015 et octobre 2018 et de procéder, au vu de ces éléments, au réexamen de la rémunération du salarié au mois d'octobre 2018 en application des dispositions de l'article L. 2141-5-1 du code du travail. Enoncé de la question prioritaire de constitutionnalité 7. A l'occasion du pourvoi qu'il a formé contre l'arrêt rendu le 12 janvier 2023 par la cour d'appel, l'employeur a, par mémoire distinct et motivé, demandé de renvoyer au Conseil constitutionnel une question prioritaire de constitutionnalité ainsi rédigée : « Les dispositions de l'article L. 2141-5-1 du code du travail issues de la loi n° 2015-994 du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l'emploi, selon lesquelles les salariés investis d'un mandat de représentation du personnel, lorsque le nombre d'heures de délégation dont ils disposent sur l'année dépasse 30 % de leur durée du travail, bénéficient d'une évolution de rémunération au moins égale, sur l'ensemble de la durée de leur mandat, aux augmentations générales et à la moyenne des augmentations individuelles perçues pendant cette période par les salariés relevant de la même catégorie professionnelle et dont l'ancienneté est comparable ou, à défaut de tels salariés, aux augmentations générales et à la moyenne des augmentations individuelles perçues dans l'entreprise, portent-elles atteinte, en ce qu'elles garantissent à ces salariés une évolution de leur rémunération qui n'est aucunement individualisée, au principe d'égalité devant la loi, à la liberté d'entreprendre, à la liberté contractuelle et au droit de propriété, garantis par les articles 2, 4 et 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 ? » Examen de la question prioritaire de constitutionnalité 8. La disposition contestée est applicable au litige, qui concerne une demande au titre de la garantie d'évolution salariale dont bénéficient les représentants syndicaux et les représentants du personnel qui disposent d'un nombre d'heures de délégation dépassant 30 % de leur durée de travail. 9. Elle n'a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel. 10. Cependant, d'une part, la question posée, ne portant pas sur l'interprétation d'une disposition constitutionnelle dont le Conseil constitutionnel n'aurait pas encore eu l'occasion de faire application, n'est pas nouvelle. 11. D'autre part, la question posée ne présente pas un caractère sérieux. 12. D'abord, le salarié, investi d'un mandat représentatif du personnel ou d'un mandat syndical, qui dispose d'un nombre d'heures de délégation dépassant sur l'année 30 % de sa durée du travail n'est pas dans la même situation que le salarié qui n'est titulaire d'aucun mandat ou qui dispose d'un nombre d'heures de délégation ne dépassant pas 30 % de sa durée de travail et les dispositions contestées, qui ne soumettent pas à des règles différentes des personnes placées dans une situation identique, ne méconnaissent pas le principe d'égalité devant la loi. 13. Ensuite, l'article L. 2141-5-1 du code du travail, dont les dispositions ne sont applicables qu'en l'absence d'accord collectif de branche ou d'entreprise plus favorable, tend à favoriser le dialogue social par la présence de représentants syndicaux et de représentants du personnel au sein des entreprises et ainsi à assurer l'effectivité de l'exercice de la liberté syndicale et du droit des travailleurs à participer à la détermination collective des conditions de travail, découlant des alinéas 6 et 8 du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, en garantissant aux salariés protégés qui disposent d'un nombre d'heures de délégation dépassant sur l'année 30 % de leur durée du travail, pendant la durée de leur mandat, une évolution de rémunération au moins égale aux augmentations générales et à la moyenne des augmentations individuelles perçues pendant cette période par les salariés relevant de la même catégorie et dont l'ancienneté est comparable ou, à défaut de tels salariés, aux augmentations générales et à la moyenne des augmentations individuelles perçues dans l'entreprise, sans porter une atteinte disproportionnée à la liberté d'entreprendre, à la liberté contractuelle et au droit de propriété de l'employeur. 14. En conséquence, il n'y a pas lieu de la renvoyer au Conseil constitutionnel. PAR CES MOTIFS, la Cour : DIT N'Y AVOIR LIEU DE RENVOYER au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité ; Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix octobre deux mille vingt-trois. | QUESTION PRIORITAIRE DE CONSTITUTIONNALITE - Contrat de travail, exécution - Employeur - Discrimination entre salariés - Salariés titulaires d'un mandat de représentation du personnel - Principe d'égalité - Liberté d'entreprendre - Liberté contractuelle - Droit de propriété - Article L. 2141-5-1 du code du travail - Caractères nouveau et sérieux - Défaut - Non-lieu à renvoi au Conseil constitutionnel | ||||||||||
JURITEXT000048211007 | JURI | texte/juri/judi/JURI/TEXT/00/00/48/21/10/JURITEXT000048211007.xml | ARRET | Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 11 octobre 2023, 22-13.770, Publié au bulletin | 2023-10-11 00:00:00 | Cour de cassation | 52301020 | Cassation | 22-13770 | oui | CHAMBRE_SOCIALE | 2022-01-20 00:00:00 | Cour d'appel de Versailles | Mme Monge (conseiller doyen faisant fonction de président) | SCP Spinosi, SCP Célice, Texidor, Périer | ECLI:FR:CCASS:2023:SO01020 | LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant : SOC. CZ COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 11 octobre 2023 Cassation Mme MONGE, conseiller doyen faisant fonction de président Arrêt n° 1020 F-B Pourvoi n° X 22-13.770 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 11 OCTOBRE 2023 M. [Z] [D], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° X 22-13.770 contre l'arrêt rendu le 20 janvier 2022 par la cour d'appel de Versailles (11e chambre), dans le litige l'opposant à la société Unisys France, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation. Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Lecaplain-Morel, conseiller, les observations de la SCP Spinosi, avocat de M. [D], de la SCPCélice, Texidor, Périer, avocat de la société Unisys France, après débats en l'audience publique du 13 septembre 2023 où étaient présents Mme Monge, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Lecaplain-Morel, conseiller rapporteur, M. Sornay, conseiller, et Mme Dumont, greffier de chambre, la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 20 janvier 2022), M. [D] a été engagé en qualité de directeur de mission par la société Unisys France à compter du 15 mars 2004. En dernier lieu, il exerçait les fonctions de chef de projet avant-vente ressources. 2. Le 27 décembre 2017, le salarié a saisi la juridiction prud'homale de demandes relatives à l'exécution et à la rupture de son contrat de travail. 3. La relation de travail a pris fin le 31 décembre 2017. Examen des moyens Sur le premier moyen, pris en sa première branche Enoncé du moyen 4. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de ses demandes en paiement de rappels de rémunération variable et d'indemnités conventionnelles et incitatives de départ volontaire à la retraite et de le condamner au paiement d'une certaine somme sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, alors « que les documents fixant les objectifs nécessaires à la détermination de la rémunération variable d'un salarié qui ne sont pas rédigés en français lui sont inopposables ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, qui a constaté que les documents fixant les objectifs nécessaires à la détermination de la rémunération variable du salarié étaient rédigés en langue anglaise, mais a néanmoins décidé que "cette circonstance ne peut suffire à rendre inopposable au salarié les plans de rémunération" et a débouté le salarié de sa demande de rappel de rémunération variable, a ainsi violé l'article L. 1321-6 du code du travail. » Réponse de la Cour Vu l'article L. 1321-6 du code du travail : 5. Selon ce texte, tout document comportant des obligations pour le salarié ou des dispositions dont la connaissance est nécessaire pour l'exécution de son travail doit être rédigé en français. Cette règle n'est pas applicable aux documents reçus de l'étranger ou destinés à des étrangers. 6. Pour débouter le salarié de sa demande en paiement de rappels de salaire sur rémunération variable, l'arrêt relève que les documents de travail, donnant lieu à des traductions dans le cadre du présent litige, étaient rédigés en langue anglaise, utilisée au sein de l'entreprise, par ailleurs filiale d'une société américaine. Il retient que cette circonstance ne peut suffire à rendre inopposables au salarié les plans de rémunérations. 7. En statuant ainsi, alors qu'elle avait relevé que les documents fixant les objectifs nécessaires à la détermination de la rémunération variable contractuelle n'étaient pas rédigés en français, la cour d'appel, qui n'a pas constaté qu'ils avaient été reçus de l'étranger, a violé le texte susvisé. Et sur le second moyen Enoncé du moyen 8. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail et de le condamner au paiement d'une certaine somme sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, alors « que la cassation qui sera prononcée sur le premier moyen, en ce que la cour d'appel a débouté le salarié de sa demande en paiement de rappels de rémunération variable, entraînera l'annulation par voie de conséquence, en application de l'article 625 du code de procédure civile, du chef de l'arrêt le déboutant de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail motivé par la circonstance que "l'argumentaire déjà développé par le salarié critiquant la politique salariale appliquée pour le priver du paiement de l'intégralité de sa rémunération variable a été rejetée". » Réponse de la Cour Vu l'article 624 du code de procédure civile : 9. La cassation prononcée entraîne la cassation, par voie de conséquence, des chefs de dispositif déboutant le salarié de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail et le condamnant au paiement d'une indemnité de procédure, qui s'y rattachent par un lien de dépendance nécessaire. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 20 janvier 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Versailles autrement composée ; Condamne la société Unisys France aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Unisys France et la condamne à payer à M. [D] la somme de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, prononcé et signé par Mme Monge, conseiller doyen faisant fonction de président en ayant délibéré en remplacement du conseiller rapporteur empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 1021 du code de procédure civile en l'audience publique du onze octobre deux mille vingt-trois. | CONTRAT DE TRAVAIL, EXECUTION - Employeur - Obligations - Documents de travail - Rédaction en français - Applications diverses - Documents fixant les objectifs nécessaires à la détermination de la rémunération variable contractuelle d'un salarié - Manquement - Sanction - Détermination - Portée | CONTRAT DE TRAVAIL, EXECUTION - Employeur - Obligations - Documents de travail - Rédaction en français - Applications diverses - Documents fixant les objectifs nécessaires à la détermination de la rémunération variable contractuelle d'un salarié - Contrôle du juge - Etendue - Portée | Tout document comportant des obligations pour le salarié ou des dispositions dont la connaissance est nécessaire pour l'exécution de son travail doit être rédigé en français. Cette règle n'est pas applicable aux documents reçus de l'étranger ou destinés à des étrangers. Encourt la cassation l'arrêt qui pour débouter la demande du salarié en paiement de rappels de salaire sur rémunération variable retient que la circonstance selon laquelle les documents de travail dans l'entreprise sont rédigés en langue anglaise ne peut suffire à rendre inopposables au salarié les plans de rémunération fixant les objectifs nécessaires à la détermination de la rémunération variable contractuelle, alors qu'elle avait relevé que ces plans n'étaient pas rédigés en français, sans constater qu'ils avaient été reçus de l'étranger |
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JURITEXT000048242155 | JURI | texte/juri/judi/JURI/TEXT/00/00/48/24/21/JURITEXT000048242155.xml | ARRET | Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 18 octobre 2023, 22-18.852, Publié au bulletin | 2023-10-18 00:00:00 | Cour de cassation | 52301051 | Cassation partielle | 22-18852 | oui | CHAMBRE_SOCIALE | 2022-04-08 00:00:00 | Cour d'appel de Lyon | Mme Mariette (conseiller doyen faisant fonction de président) | SCP Waquet, Farge et Hazan, SCP Célice, Texidor, Périer | ECLI:FR:CCASS:2023:SO01051 | LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant : SOC. CH9 COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 18 octobre 2023 Cassation partielle Mme MARIETTE, conseiller doyen faisant fonction de président Arrêt n° 1051 F-B Pourvoi n° W 22-18.852 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 18 OCTOBRE 2023 Mme [V] [D], domiciliée [Adresse 2], a formé le pourvoi n° W 22-18.852 contre l'arrêt rendu le 8 avril 2022 par la cour d'appel de Lyon (chambre sociale B), dans le litige l'opposant à la société C-Quadrat asset management France, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Prieur, conseiller référendaire, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de Mme [D], de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société C-Quadrat asset management France, après débats en l'audience publique du 19 septembre 2023 où étaient présents Mme Mariette, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Prieur, conseiller référendaire rapporteur, M. Seguy, conseiller, et Mme Jouanneau, greffier de chambre, la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Lyon, 8 avril 2022), Mme [D] a été engagée en qualité d'assistante administrative, à compter du 1er octobre 2003, par la société Avenir finance immobilier, son contrat de travail ayant fait l'objet d'un transfert en dernier lieu à la société Advenis investment managers (la société) appartenant au groupe Advenis, devenue la société C-Quadrat asset management France. 2. Le 9 décembre 2016, la société a convoqué la salariée a un entretien préalable en vue d'un licenciement économique. Son contrat de travail a été rompu après qu'elle a accepté, le 4 janvier 2017, le contrat de sécurisation professionnelle qui lui avait alors été proposé. 3. La salariée a saisi la juridiction prud'homale notamment en contestation de cette rupture. Examen du moyen Sur le moyen, pris en sa deuxième branche Enoncé du moyen 4. La salariée fait grief à l'arrêt de dire que son licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse et de la débouter en conséquence de ses demandes fondées sur un licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors « que les difficultés économiques sont caractérisées par l'évolution significative d'au moins un indicateur économique ; qu'en l'espèce, l'arrêt attaqué retient que la société "produit également s'agissant du secteur d'activité en cause l'existence, nonobstant un chiffre d'affaires en hausse, des pertes en 2015, 2016 et 2017" et que "ceci atteste des difficultés avérées [...] en ce qui concerne le secteur de référence" ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher si les pertes étaient significatives, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1233-3 du code du travail. » Réponse de la Cour Vu l'article L. 1233-3, 1°, du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 : 5. Aux termes de ce texte, constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment : 1° A des difficultés économiques caractérisées soit par l'évolution significative d'au moins un indicateur économique tel qu'une baisse des commandes ou du chiffre d'affaires, des pertes d'exploitation ou une dégradation de la trésorerie ou de l'excédent brut d'exploitation, soit par tout autre élément de nature à justifier de ces difficultés. 6. Pour dire que le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse, l'arrêt constate d'abord, d'une part, que la lettre de licenciement invoque les difficultés économiques du groupe se traduisant par des résultats d'exploitation déficitaires depuis trois années et compromettant la compétitivité et la capacité de l'entreprise à maintenir et développer ses activités, d'autre part, que le secteur d'activité à prendre en considération pour apprécier le motif économique est celui de la distribution et la gestion des actifs dont relève la société. 7. Il retient ensuite que pour justifier de sa situation économique, la société produit un tableau faisant apparaître, s'agissant du secteur d'activité en cause, l'existence, nonobstant un chiffre d'affaires en hausse, des pertes en 2015, 2016 et 2017 et en déduit que les difficultés sont avérées en ce qui concerne le secteur de référence. 8. En se déterminant ainsi, par des motifs insuffisants à caractériser le caractère sérieux et durable des pertes d'exploitation dans le secteur d'activité considéré, sans rechercher si l'évolution de l'indicateur économique retenu était significative, la cour d'appel a privé sa décision de base légale. Portée et conséquences de la cassation 9. La cassation des chefs de dispositif disant que le licenciement de la salariée repose sur une cause réelle et sérieuse et la déboutant en conséquence de ses demandes fondées sur un licenciement sans cause réelle et sérieuse emporte celle du chef de dispositif condamnant l'employeur à payer une somme à titre de dommages-intérêts pour licenciement irrégulier, qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire. 10. En revanche, elle n'emporte pas celle des chefs de dispositif de l'arrêt condamnant l'employeur aux dépens ainsi qu'au paiement d'une somme en application de l'article 700 du code de procédure civile, justifiés par d'autres condamnations prononcées à l'encontre de celui-ci non remises en cause. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que le licenciement de Mme [D] repose sur une cause réelle et sérieuse et la déboute en conséquence de ses demandes fondées sur un licenciement sans cause réelle et sérieuse et en ce qu'il condamne la société C-Quadrat asset management France à payer à Mme [D] la somme de 3 000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement irrégulier, l'arrêt rendu le 8 avril 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble ; Condamne la société C-Quadrat asset management France aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société C-Quadrat asset management France et la condamne à payer à Mme [D] la somme de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit octobre deux mille vingt-trois. | CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Licenciement économique - Cause - Cause réelle et sérieuse - Motif économique - Appréciation - Existence de difficultés économiques - Caractérisation - Perte d'exploitation - Détermination - Portée | CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Licenciement économique - Cause - Cause réelle et sérieuse - Motif économique - Appréciation - Existence de difficultés économiques - Caractérisation - Office du juge - Contrôle - Modalités - Portée POUVOIRS DES JUGES - Applications diverses - Contrat de travail - Licenciement - Licenciement pour motif économique - Difficultés économiques - Caractérisation - Indicateurs économiques - Evolution significative - Appréciation - Appréciation souveraine - Limites - Portée | Aux termes de l'article L. 1233-3, 1°, du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment : 1° A des difficultés économiques caractérisées soit par l'évolution significative d'au moins un indicateur économique tel qu'une baisse des commandes ou du chiffre d'affaires, des pertes d'exploitation ou une dégradation de la trésorerie ou de l'excédent brut d'exploitation, soit par tout autre élément de nature à justifier de ces difficultés. Doit en conséquence être censuré l'arrêt qui, pour dire fondé sur une cause réelle et sérieuse un licenciement pour motif économique, retient que l'employeur produit un tableau faisant apparaître, s'agissant du secteur d'activité en cause, l'existence, nonobstant un chiffre d'affaires en hausse, des pertes en 2015, 2016 et 2017 et en déduit que les difficultés sont avérées, sans rechercher si l'évolution de l'indicateur économique retenu était significative, les motifs retenus étant insuffisants pour caractériser le caractère sérieux et durable des pertes d'exploitation dans le secteur d'activité considéré |
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JURITEXT000048242162 | JURI | texte/juri/judi/JURI/TEXT/00/00/48/24/21/JURITEXT000048242162.xml | ARRET | Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 18 octobre 2023, 22-10.761, Publié au bulletin | 2023-10-18 00:00:00 | Cour de cassation | 52301057 | Cassation partielle sans renvoi | 22-10761 | oui | CHAMBRE_SOCIALE | 2022-01-05 00:00:00 | Tribunal judiciaire de Pau | M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président) | SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, SARL Thouvenin, Coudray et Grévy | ECLI:FR:CCASS:2023:SO01057 | LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant : SOC. CH9 COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 18 octobre 2023 Cassation partielle sans renvoi M. HUGLO, conseiller doyen faisant fonction de président Arrêt n° 1057 F-B Pourvoi n° B 22-10.761 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 18 OCTOBRE 2023 La société Ormeaudis, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° B 22-10.761 contre le jugement rendu le 5 janvier 2022 par le tribunal judiciaire de Pau, dans le litige l'opposant à la société Secafi, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, trois moyens de cassation. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Bouvier, conseiller, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société Ormeaudis, de la SARL Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de la société Secafi, après débats en l'audience publique du 20 septembre 2023 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Bouvier, conseiller rapporteur, M. Rinuy, conseiller, et Mme Aubac, greffier de chambre, la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon le jugement attaqué (président du tribunal judiciaire de Pau, 5 janvier 2022), statuant sur renvoi après cassation (Soc., 9 juin 2021, pourvoi n° 20-10.886) et suivant la procédure accélérée au fond, le comité social et économique de la société Ormeaudis (le CSE) a décidé, le 28 février 2019, du recours à un expert-comptable pour l'assister en vue de la consultation annuelle obligatoire portant sur la situation économique et financière de l'entreprise, sur le fondement de l'article L. 2315-88 du code du travail. 2. Le 21 mars 2019, le CSE a décidé du recours à un expert-comptable pour l'assister en vue de la consultation annuelle sur la politique sociale, les conditions de travail et l'emploi, sur le fondement de l'article L. 2315-91 du code du travail. 3. Dans les deux cas, la société d'expertise Secafi a été désignée. Son rapport a été commenté lors d'une réunion du CSE du 11 juillet 2019. Sa facture définitive pour un solde d'honoraires a été adressée le 25 juillet 2019 à l'employeur, un acompte ayant déjà été versé par ce dernier. 4. Par acte du 2 août 2019, soutenant qu'au regard des dates de délibérations recourant aux expertises, celles-ci n'entraient pas dans le cadre des articles L. 2315-88 et L. 2315-91 du code du travail mais constituaient des expertises libres dont elle n'avait pas à prendre en charge le coût, la société Ormeaudis (l'employeur) a assigné la société d'expertise afin d'obtenir le remboursement de la somme versée et qu'il soit jugé qu'elle n'avait pas à verser le solde. Examen des moyens Sur le troisième moyen, pris en sa troisième branche 5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Sur le premier moyen Enoncé du moyen 6. L'employeur fait grief au jugement de déclarer irrecevables ses demandes pour cause de forclusion, de le débouter, en conséquence, de ces demandes et de le condamner à payer à la société Secafi la somme de 12 648,60 euros en règlement de la facture du 24 juillet 2019, alors : « 1°/ que l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties ; qu'en l'espèce, dans ses conclusions, l'employeur soutenait que "la contestation ne porte pas à l'évidence sauf à en dénaturer le sens sur les 1°, 2°, 3° de l'article L. 2315-86 mais incontestablement sur le paiement de la facture définitive du 24 juillet 2019 telle que communiquée au terme des opérations d'expertise. Elle ne pouvait naître que de la communication de ladite facture à la société (...) en l'espèce, la question de "la nécessité" de l'expertise ne se pose pas. La contestation est tiré du caractère prématuré des délibérations qui n'ont pas pu générer pour l'employeur l'obligation d'assumer le coût des expertises. Son objet correspond bien au "non-paiement du coût final de l'expertise, visée au 4° de l'article L. 2315-86, dont le délai court à compter de la notification de ce coût à l'employeur (....) L'employeur ne pouvait réagir qu'au moment où il lui a été demandé d'assumer ce coût final, à savoir au moment de la facture définitive", ce dont il résultait que l'employeur contestait le coût de l'expertise au sens du 4° de l'article L. 2315-86 du code du travail et non sa nécessité au sens du 1° de ce texte ; qu'en affirmant, pour juger les demandes de la société Ormeaudis irrecevables comme forcloses, que le cas de contestation relatif à la nature de l'expertise ne figurait pas dans l'article L. 2315-86 du code du travail, que ce n'était pas le coût final de l'expertise que la société contestait mais le principe de son paiement de ce coût, et que cette contestation se rattachait de manière la plus proche au 1° de l'article L. 2315-86 relative à la nécessité de l'expertise de sorte qu'elle était enfermée dans le délai de dix jours suivant la date de délibération du CSE à savoir les 28 février et 21 mars 2019, le président du tribunal a modifié l'objet du litige et violé l'article 4 du code de procédure civile ; 2°/ que l'action de l'employeur tendant à faire juger qu'il n'est pas tenu de prendre en charge le coût d'une expertise décidée de façon prématurée pour relever de l'expertise de l'article L. 2315-88 ou de l'article L. 2315-91 du code du travail ne relève pas d'une contestation de la nécessité de l'expertise au sens de l'article L. 2315-86, 1°, du code du travail, de sorte qu'elle n'a pas à être introduite dans un délai de dix jours à compter de la délibération ayant décidé le recours à cette expertise ; qu'en l'espèce, l'employeur ne contestait pas la régularité des délibérations du CSE des 28 février et 21 mars 2019 au regard de la nécessité des expertises ordonnées, mais soutenait qu'elle n'était pas tenue d'en assumer le coût dès lors qu'elles avaient été décidées, pour la première, avant la transmission des comptes intervenue du 24 au 27 mai 2019, pour la seconde, avant le dépôt dans la base de données économiques et sociales (BDES) des documents d'information relatifs à la politique sociale, les conditions de travail et l'emploi, et que ces expertises relevaient dès lors d'expertises libres dont le CSE devait assumer seul le coût ; qu'en énonçant, pour juger irrecevables pour cause de forclusion les demandes de la société Ormeaudis, qu'elle ne critiquait pas le montant des factures adressées et avait réglé sans élever de contestation l'acompte demandé, qu'elle était informée des délibérations adoptées par le CSE lors de ses séances auxquelles elle assistait et de leurs conséquences notamment le fait qu'elle devrait prendre en charge le montant des expertises demandées, que le cas de contestation relatif à la nature de l'expertise ne figurait pas dans l'article L. 2315-86, 4, du code du travail, que ce n'était pas le coût final de l'expertise que la société contestait mais le principe du paiement de ce coût, et que cette contestation se rattachait de manière la plus proche au 1° de l'article L. 2315-86 relative à la nécessité de l'expertise de sorte qu'elle était enfermée dans le délai de 10 jours suivant la date de délibération du CSE à savoir les 28 février et 21 mars 2019, le président du tribunal a violé les articles L. 2315-86 et R. 2315-49 du code du travail, ensemble les articles L. 2315-80, L. 2315-81, L. 2315-88 et L. 2315-91 du même code. » Réponse de la Cour 7. Il résulte des articles L. 2315-86, 1°, et R. 2315-49 du code du travail, interprété à la lumière de l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, que le délai de dix jours de contestation de la nécessité d'une expertise ne court qu'à compter du jour où l'employeur a été mis en mesure de connaître sa nature et son objet. 8. Le jugement énonce que l'employeur ne critique ni le montant des factures qui lui ont été adressées ni le coût final des expertises mais conteste le principe de son paiement au motif qu'ayant été décidées avant la transmission des comptes et le dépôt des documents d'information utiles à la base des données économiques et sociales, elles étaient des expertises libres. 9. Il retient que l'employeur était informé des délibérations adoptées lors des séances du CSE des 28 février et 21 mars 2019 auxquelles il assistait et de leurs conséquences, notamment du fait qu'il devrait prendre en charge le montant des expertises ordonnées en vue de consultations récurrentes et qu'il a réglé, sans contestation, l'acompte réclamé par l'expert désigné par ces mêmes délibérations, et en déduit que la saisine tardive du 2 août 2019 aux fins de contester la nature des expertises litigieuses est irrecevable pour cause de forclusion. 10. De ces constatations dont il résulte que l'employeur a été mis en mesure de connaître la nature et l'objet des expertises dès les délibérations du CSE, le président du tribunal, sans modifier l'objet du litige, en a exactement déduit que la saisine tardive du 2 août 2019 aux fins de contester la nature des expertises litigieuses était irrecevable pour cause de forclusion. 11. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé. Sur le troisième moyen, pris en ses deux premières branches Enoncé du moyen 12. L'employeur fait grief au jugement de le débouter de ses demandes et de le condamner à payer à la société Secafi la somme de 12 648,60 euros en règlement de la facture du 24 juillet 2019, alors : « 1°/ que le droit pour le comité social et économique, en vue de la consultation sur la situation économique et financière de l'entreprise, de se faire assister d'un expert-comptable dont la rémunération est à la charge de l'employeur s'exerce au moment où les comptes lui sont transmis, de sorte que lorsque la désignation de l'expert-comptable intervient avant la réunion de présentation et de transmission des comptes, la rémunération de l'expert doit rester à la charge du CSE ; que de même, le droit pour le comité social et économique, dans le cadre de la consultation sur la politique sociale de l'entreprise, les conditions de travail et l'emploi, de se faire assister d'un expert-comptable dont la rémunération est à la charge de l'employeur s'exerce une fois que toutes les informations nécessaires à cette consultation ont été déposées dans la base de données économiques et sociales, de sorte que lorsque la désignation de l'expert intervient avant cette date, sa rémunération reste à la charge du CSE ; qu'en l'espèce, en jugeant que le comité social et économique pouvait à tout moment désigner un expert afin de l'assister dans le cadre de sa consultation sur la situation financière et sur la situation sociale de l'entreprise, le président du tribunal a violé les articles L. 2315-80, L. 2315-81, L. 2315-88 et L. 2315-91 du code du travail ; 2°/ que le droit pour le comité social et économique, en vue de la consultation sur la situation économique et financière de l'entreprise, de se faire assister d'un expert-comptable dont la rémunération est à la charge de l'employeur s'exerce au moment où les comptes lui sont transmis, de sorte que lorsque la désignation de l'expert-comptable intervient avant la réunion de présentation et de transmission des comptes, la rémunération de l'expert doit rester à la charge du CSE ; que de même, le droit pour le comité social et économique, dans le cadre de la consultation sur la politique sociale de l'entreprise, les conditions de travail et l'emploi, de se faire assister d'un expert-comptable dont la rémunération est à la charge de l'employeur s'exerce une fois que toutes les informations nécessaires à cette consultation ont été déposées dans la base de données économiques et sociales, de sorte que lorsque la désignation de l'expert intervient avant cette date, sa rémunération reste à la charge du CSE ; qu'en l'espèce, la société Ormeaudis soutenait qu'il résultait du compte-rendu de la réunion du CSE du 28 février 2019, ayant procédé à la désignation de l'expert pour l'assister lors de la consultation sur la situation économique et financière, que la direction avait alors indiqué que "les comptes 2018 ne sont pas connus par les élus" ; qu'elle ajoutait qu'il ressortait de même du compte-rendu de la réunion du 21 mars 2019, lors de laquelle le CSE avait désigné un expert pour l'assister lors de la consultation sur la politique sociale, les conditions de travail et l'emploi, que la direction avait relevé le caractère prématuré de la désignation en mentionnant que "les élus demandent un vote avant d'avoir eu présentation des éléments et d'avoir été consultés sur ce sujet" ce à quoi les élus avaient répondu "cela n'a rien à voir (...) chaque année les élus jugent que les éléments apportés par la direction sont insuffisants" ; qu'en se bornant à affirmer que la société Ormeaudis n'apportait aucune démonstration des dates auxquels les documents financiers et sociaux avaient été communiqués et se contentait de les citer en indiquant que ces dates sont nombreuses, sans rechercher s'il ne résultait pas des comptes-rendus des réunions du CSE des 28 février et 21 mars 2019 qu'à la date de la délibération portant recours à l'expertise concernant la consultation sur la situation économique et financière de l'entreprise, les comptes n'avaient pas été présentés aux élus, et qu'à la date de la délibération décidant de recourir à un expert s'agissant de la consultation sur la politique sociale, les conditions de travail et l'emploi, les éléments d'information nécessaires n'avaient pas été transmis aux élus, le président du tribunal a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 2315-80, L. 2315-81, L. 2315-88 et L. 2315-91 du code du travail. » Réponse de la Cour 13. Le rejet du premier moyen critiquant le chef de décision déclarant irrecevables les demandes de la société Ormeaudis entraîne par voie de conséquence le rejet du troisième moyen, pris en ses deux premières branches, qui est, dès lors, inopérant. Mais sur le deuxième moyen Enoncé du moyen 14. L'employeur fait grief au jugement qui déclare irrecevables ses demandes pour cause de forclusion, de le débouter ensuite et « en conséquence » de ces demandes et de le condamner à payer à la société Secafi une somme en règlement de la facture du 24 juillet 2019, alors « que le juge qui décide que la demande dont il est saisi est irrecevable excède ses pouvoirs en statuant au fond ; qu'en l'espèce, le président du tribunal a déclaré les demandes de la société Ormeaudis irrecevables pour cause de forclusion ; qu'il a pourtant ensuite, dans son dispositif, débouté la société Ormeaudis de ces demandes, et a, dans ses motifs, énoncé que les articles L. 2315-88 et L. 2315-91 du code du travail ne précisaient pas le moment auquel le comité social et économique pouvait décider de recourir à un expert-comptable dans le cadre de la consultation, qu'il n'était pas démontré que l'arrêt rendu par la cour d'appel de Paris le 9 novembre 2015 confirmé par la Cour de cassation le 28 mars 2018 reflétait la jurisprudence dominante de cette juridiction, que le recours à un expert était de nature à permettre au CSE de pouvoir exprimer un avis reposant sur une analyse précise et technique des informations communiquées par l'entreprise afin de permettre aux représentants du personnel d'avoir accès à ces informations parfois obscures et de s'en approprier le sens dans le respect des textes du code du travail et de la directive 2002/14/CE du Parlement européen et du Conseil du 11 mars 2002 relative à l'information des travailleurs, que le comité social et économique pouvait à tout moment désigner un expert afin de l'assister dans le cadre de sa consultation sur la situation financière et sur la situation sociale de l'entreprise, que la société Ormeaudis n'apportait aucune démonstration des dates auxquels les documents financiers et sociaux avaient été communiqués et se contentait de les citer en indiquant que ces dates sont nombreuses ; que ce faisant, le président du tribunal a statué au fond sur des demandes qu'il a déclarées irrecevables et a violé l'article 122 du code de procédure civile. » Réponse de la Cour Vu l'article 122 du code de procédure civile : 15. Il résulte de ce texte qu'une juridiction qui décide que la demande dont elle est saisie est irrecevable excède ses pouvoirs en statuant au fond. 16. En déboutant l'employeur de ses demandes après les avoir déclarées irrecevables, le président du tribunal, qui a excédé ses pouvoirs, a violé le texte susvisé. Portée et conséquences de la cassation 17. Après avis donné aux parties conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile. 18. La cassation prononcée n'implique pas, en effet, qu'il soit à nouveau statué sur le fond. PAR CES MOTIFS la Cour : CASSE ET ANNULE, par voie de retranchement, mais seulement en ce qu'il déboute en conséquence la société Ormeaudis de ses demandes, le jugement rendu le 5 janvier 2022, entre les parties, par le président du tribunal judiciaire de Pau ; DIT n'y avoir lieu à renvoi ; Condamne la société Ormeaudis aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit octobre deux mille vingt-trois. | REPRESENTATION DES SALARIES | Il résulte des articles L. 2315-86, 1°, et R. 2315-49 du code du travail, interprétés à la lumière de l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, que le délai de dix jours de contestation de la nécessité d'une expertise ne court qu'à compter du jour où l'employeur a été mis en mesure de connaître sa nature et son objet |
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JURITEXT000048242164 | JURI | texte/juri/judi/JURI/TEXT/00/00/48/24/21/JURITEXT000048242164.xml | ARRET | Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 18 octobre 2023, 22-11.339, Publié au bulletin | 2023-10-18 00:00:00 | Cour de cassation | 52301058 | Cassation | 22-11339 | oui | CHAMBRE_SOCIALE | 2021-12-02 00:00:00 | Cour d'appel de Nancy | M. Rinuy (conseiller le plus ancien faisant fonction de président) | SCP Thouin-Palat et Boucard, SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol | ECLI:FR:CCASS:2023:SO01058 | LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant : SOC. CZ COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 18 octobre 2023 Cassation M. RINUY, conseiller le plus ancien faisant fonction de président Arrêt n° 1058 F-B Pourvoi n° E 22-11.339 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 18 OCTOBRE 2023 M. [T] [X], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° E 22-11.339 contre l'arrêt rendu le 2 décembre 2021 par la cour d'appel de Nancy (chambre sociale, section 2), dans le litige l'opposant à la société PWA, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation. Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Bouvier, conseiller, les observations de la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat de M. [X], de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société PWA, après débats en l'audience publique du 20 septembre 2023 où étaient présents M. Rinuy, conseiller le plus ancien faisant fonction de président, Mme Bouvier, conseiller rapporteur, Mme Bérard, conseiller, et Mme Aubac, greffier de chambre, la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Nancy, 2 décembre 2021), rendu sur renvoi après cassation (Soc., 27 novembre 2019, pourvoi n° 18-16.975), M. [X] a été engagé en qualité d'assistant de vente automobile par la société PWA à compter du 19 juin 2013. Par lettre reçue le 18 février 2015, le salarié a informé l'employeur de sa candidature aux élections professionnelles. 2. Après avoir été convoqué le 19 février 2015 à un entretien préalable à un éventuel licenciement, il a été licencié pour faute grave le 10 mars 2015. 3. Invoquant le statut protecteur résultant de sa candidature aux élections professionnelles, il a saisi la juridiction prud'homale de demandes tendant à la nullité de son licenciement et au paiement de diverses sommes à caractère salarial et indemnitaire. Examen du moyen Sur le moyen, pris en sa première branche Enoncé du moyen 4. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de ses demandes de dommages-intérêts pour licenciement nul et violation du statut protecteur, alors « que l'employeur, qui n'a pas contesté la régularité de la candidature d'un salarié à des élections professionnelles dans le délai de forclusion prévu par l'article R. 2324-24 du code du travail, est irrecevable à alléguer du caractère frauduleux de la candidature du salarié pour écarter la procédure prévue par l'article L. 2411-7 du même code ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a relevé que le salarié avait informé l'employeur de sa candidature par lettre du 16 février 2015, reçue le 18 février suivant et qu'il a été convoqué à un entretien préalable au licenciement le 19 février 2015, de sorte qu'il bénéficiait de la protection de l'article L. 2411-7 du code du travail, l'employeur n'ayant pas élevé de contestation quant à la régularité de sa candidature ; qu'en jugeant néanmoins que le licenciement n'était pas nul en dépit de l'absence de suivi de la procédure d'autorisation de licenciement, au motif que la candidature aurait été frauduleuse, la cour d'appel a violé les articles L. 2411-7 et R. 2324-24, en sa version applicable au litige, du code du travail. » Réponse de la Cour Vu l'article L. 2411-7 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2017-1386 du 22 septembre 2017, et l'article R. 2324-24 du code du travail, applicable au litige : 5. Il résulte du second alinéa de l'article L. 2411-7 susvisé, que l'autorisation de licenciement est requise lorsque la lettre du syndicat notifiant à l'employeur la candidature aux fonctions de membre élu à la délégation du personnel du comité social et économique a été reçue par l'employeur ou lorsque le salarié a fait la preuve que l'employeur a eu connaissance de l'imminence de sa candidature avant que le candidat ait été convoqué à l'entretien préalable au licenciement. 6. Il résulte du dernier alinéa de l'article R. 2324-24 susvisé que lorsque la contestation devant le tribunal porte sur la régularité de l'élection ou sur la désignation de représentants syndicaux, la déclaration de l'employeur n'est recevable que si elle est faite dans les quinze jours suivant cette élection ou cette désignation. 7. Pour rejeter les demandes d'annulation du licenciement et d'indemnisation du salarié, après avoir relevé qu'il ressortait du courrier du salarié du 16 février 2015, reçu le 18 février, qu'il faisait part à l'employeur de sa candidature aux élections du délégué du personnel prévues le 13 mars 2015 et qu'à compter du 18 février 2015, la protection au titre de l'imminence de la candidature était susceptible d'être revendiquée par le salarié, l'arrêt retient que celui-ci considérait, avant de déclarer son intention d'être candidat aux élections des représentants du personnel, que son employeur avait l'intention de rompre la relation de travail, que le fait, non contesté, qu'il a présenté sa candidature avant la rédaction du protocole d'accord pré-électoral et le fait qu'elle soit adressée par lettre du 16 février 2015 à l'employeur, c'est-à-dire quelques jours seulement après celles des 10, 11 et 12 février 2015, démontre que le salarié s'est déclaré candidat aux élections professionnelles dans le seul but de se protéger d'une intention prêtée à l'employeur de rompre son contrat de travail, dans un but frauduleux et que, dans ces conditions, il ne peut prétendre bénéficier du statut protecteur. 8. En statuant ainsi, alors que l'employeur qui n'a pas contesté la régularité de la candidature du salarié devant le tribunal dans le délai de forclusion légalement prévu n'est pas recevable à alléguer le caractère frauduleux de la candidature du salarié pour écarter la procédure d'autorisation administrative de licenciement, la cour d'appel a violé les textes susvisés. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief, la Cour : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 2 décembre 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Nancy ; Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Metz ; Condamne la société PWA aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société PWA et la condamne à payer à M. [X] la somme de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit octobre deux mille vingt-trois. | CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Licenciement - Salarié protégé - Mesures spéciales - Autorisation administrative - Demande de l'employeur - Nécessité - Cas - Candidat aux fonctions de délégué du personnel - Régularité de la candidature - Contestation dans le délai de forclusion - Défaut - Détermination | L'employeur qui n'a pas contesté la régularité de la candidature d'un salarié aux élections professionnelles devant le tribunal dans le délai de forclusion prévu par l'article R. 2324-24 du code du travail, n'est pas recevable à alléguer le caractère frauduleux de cette candidature pour écarter la procédure d'autorisation administrative de licenciement prévue par l'article L. 2411-7 du même code |
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JURITEXT000048242167 | JURI | texte/juri/judi/JURI/TEXT/00/00/48/24/21/JURITEXT000048242167.xml | ARRET | Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 18 octobre 2023, 22-18.678, Publié au bulletin | 2023-10-18 00:00:00 | Cour de cassation | 52301060 | Cassation | 22-18678 | oui | CHAMBRE_SOCIALE | 2022-05-11 00:00:00 | Cour d'appel d'Amiens | M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président) | Me Balat, Me Occhipinti | ECLI:FR:CCASS:2023:SO01060 | LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant : SOC. ZB1 COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 18 octobre 2023 Cassation M. HUGLO, conseiller doyen faisant fonction de président Arrêt n° 1060 F-B Pourvoi n° H 22-18.678 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 18 OCTOBRE 2023 La société Crocodile restaurants, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 3], a formé le pourvoi n° H 22-18.678 contre l'arrêt rendu le 11 mai 2022 par la cour d'appel d'Amiens (5e chambre prud'homale), dans le litige l'opposant : 1°/ à Mme [D] [M], domiciliée [Adresse 1], 2°/ au Pôle emploi de Paris, dont le siège est [Adresse 2], défendeurs à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Bérard, conseiller, les observations de Me Balat, avocat de la société Crocodile restaurants, de Me Occhipinti, avocat de Mme [M], après débats en l'audience publique du 20 septembre 2023 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Bérard, conseiller rapporteur, M. Rinuy, conseiller, et Mme Aubac, greffier de chambre, la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Amiens, 11 mai 2022), Mme [M] a été engagée en qualité de cuisinière le 14 mars 2019 par la société Crocodile restaurants (la société). 2. La salariée a été licenciée pour faute grave le 18 novembre 2019. 3. Soutenant avoir été licenciée pour avoir dénoncé un harcèlement sexuel, elle a saisi la juridiction prud'homale le 11 février 2020 aux fins de juger son licenciement nul et condamner l'employeur à lui verser diverses sommes à ce titre. Examen du moyen Sur le moyen pris en sa première branche Enoncé du moyen 4. La société fait grief à l'arrêt de dire le licenciement de la salariée nul et de la condamner à lui verser diverses sommes au titre d'un rappel de salaire à la suite de la mise à pied conservatoire, de l'indemnité compensatrice de préavis et des congés payés afférents, de l'indemnité légale de licenciement, et à titre de dommages-intérêts pour licenciement nul, ainsi qu'à rembourser à l'organisme concerné le montant des indemnités chômage versées à la salariée dans la limite de trois mois de prestations, alors « que lorsque la lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige, contient plusieurs griefs distincts à l'encontre du salarié, le juge ne peut dire le licenciement injustifié sans avoir examiné chacun des griefs qui y sont énoncés ; qu'en jugeant le licenciement nul au seul motif que "les faits reprochés à la salariée au sein de la lettre de licenciement sont concomitants à la date à laquelle la salariée a déposé plainte", ce dont il se déduit que "la dénonciation de harcèlement sexuel a pesé sur la décision de licenciement", sans examiner les griefs évoqués dans la lettre de licenciement tenant au refus réitéré de la salariée d'accomplir certaines de ses tâches et à ses abandons de postes et actes d'insubordination, lesquels pouvaient à eux seuls justifier son licenciement pour faute grave, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1232-6 et L. 1153-3 du code du travail, applicable en l'espèce. » Réponse de la Cour Vu les articles L. 1152-2, L. 1152-3 et L. 1154-1 du code du travail : 5. Il résulte de ces textes que lorsque les faits invoqués dans la lettre de licenciement caractérisent une cause réelle et sérieuse de licenciement, il appartient au salarié de démontrer que la rupture de son contrat de travail constitue une mesure de rétorsion à une plainte pour harcèlement moral ou sexuel. Dans le cas contraire, il appartient à l'employeur de démontrer l'absence de lien entre la dénonciation par le salarié d'agissements de harcèlement moral ou sexuel et son licenciement. 6. Pour prononcer la nullité du licenciement, l'arrêt retient que l'engagement de la procédure de licenciement pour faute grave trouve son origine dans la dénonciation par la salariée de faits de harcèlement sexuel, laquelle a manifestement pesé sur la décision de l'employeur, et que ce dernier n'établit pas que cette dénonciation a été faite de mauvaise foi. 7. En se déterminant ainsi, alors qu'elle avait constaté que la lettre de licenciement ne fait pas mention d'une dénonciation de faits de harcèlement sexuel, sans rechercher si les motifs énoncés par la lettre de licenciement pour caractériser la faute grave étaient établis par l'employeur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 11 mai 2022, entre les parties, par la cour d'appel d'Amiens ; Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Douai ; Condamne Mme [M] aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit octobre deux mille vingt-trois. | CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE | Il résulte des articles L. 1152-2, L. 1152-3 et L. 1154-1 du code du travail que, lorsque les faits invoqués dans la lettre de licenciement, qui ne fait pas mention d'une dénonciation d'un harcèlement moral ou sexuel, caractérisent une cause réelle et sérieuse de licenciement, il appartient au salarié de démontrer que la rupture de son contrat de travail constitue une mesure de rétorsion à une plainte pour harcèlement moral ou sexuel. Dans le cas contraire, lorsque le licenciement n'est pas fondé par une cause réelle et sérieuse, il appartient à l'employeur de démontrer l'absence de lien entre la dénonciation par le salarié d'agissements de harcèlement moral ou sexuel et son licenciement |
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JURITEXT000048242169 | JURI | texte/juri/judi/JURI/TEXT/00/00/48/24/21/JURITEXT000048242169.xml | ARRET | Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 18 octobre 2023, 22-19.937, Publié au bulletin | 2023-10-18 00:00:00 | Cour de cassation | 52301064 | Rejet | 22-19937 | oui | CHAMBRE_SOCIALE | 2022-07-26 00:00:00 | Tribunal judiciaire de Paris | M. Sommer | SCP Sevaux et Mathonnet, SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol | ECLI:FR:CCASS:2023:SO01064 | LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant : SOC. / ELECT ZB1 COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 18 octobre 2023 Rejet M. SOMMER, président Arrêt n° 1064 FS-B Pourvoi n° A 22-19.937 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 18 OCTOBRE 2023 1°/ La Confédération nationale des travailleurs - Solidarité ouvrière, dont le siège est [Adresse 8], 2°/ M. [J] [L], domicilié [Adresse 8], chez CNT SO, [Localité 12], ont formé le pourvoi n° A 22-19.937 contre le jugement rendu le 26 juillet 2022 par le tribunal judiciaire de Paris (contentieux des élections professionnelles), dans le litige les opposant : 1°/ à l'Autorité des relations sociales des plateformes d'emploi, dont le siège est [Adresse 14], 2°/ au Ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion, dont le siège est [Adresse 7], 3°/ à la Confédération française des travailleurs chrétiens CFTC, dont le siège est [Adresse 9], 4°/ à la Confédération générale du travail CGT, dont le siège est [Adresse 4], 5°/ au syndicat CGT Force ouvrière CGT FO, dont le siège est [Adresse 1], 6°/ à la Fédération Sud commerces et services, dont le siège est [Adresse 11], 7°/ à l'association Union Indépendants, dont le siège est [Adresse 10], 8°/ à l'Union nationale des syndicats autonomes UNSA, dont le siège est [Adresse 2], 9°/ à la Fédération nationale des transports routiers FNTR, dont le siège est [Adresse 13], 10°/ à l'association VTC de France, dont le siège est [Adresse 3], 11°/ à l'association des Chauffeurs indépendants Lyonnais ACIL, dont le siège est [Adresse 6], 12°/ à la Fédération nationale des auto-entrepreneurs, dont le siège est [Adresse 5], défendeurs à la cassation. Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, deux moyens de cassation. Le dossier a été communiqué au procureur général. Les parties ou leurs mandataires ont produit des mémoires. Sur le rapport de Mme Sommé, conseiller, les observations de la SCP Sevaux et Mathonnet, avocat de la Confédération nationale des travailleurs - Solidarité ouvrière, et de M. [L], de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de l'Autorité des relations sociales des plateformes d'emploi, et l'avis de Mme Laulom, avocat général, après débats en l'audience publique du 20 septembre 2023 où étaient présents M. Sommer, président, Mme Sommé, conseiller rapporteur, M. Rinuy, conseiller le plus ancien faisant fonction de doyen, Mmes Ott, Bouvier, Bérard, conseillers, Mmes Chamley-Coulet, Lanoue, Ollivier, conseillers référendaires, Mme Laulom, avocat général, et Mme Pontonnier, greffier de chambre, la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon le jugement attaqué (tribunal judiciaire de Paris, 26 juillet 2022), par ordonnance n° 2021-484 du 21 avril 2021 ont été définies les modalités de représentation des travailleurs indépendants recourant pour leur activité aux plateformes et aux conditions d'exercice de cette représentation au niveau de deux secteurs d'activité, précisés à l'article L. 7343-1 du code du travail, le secteur des activités de conduite d'une voiture de transport avec chauffeur et le secteur des activités de livraison de marchandises au moyen d'un véhicule à deux ou trois roues, motorisé ou non. 2. Cette ordonnance a créé l'Autorité des relations sociales des plateformes d'emploi (ARPE), établissement public national à caractère administratif, ayant pour mission la régulation des relations sociales entre les plateformes et les travailleurs qui leur sont liés par un contrat commercial, chargée à ce titre de fixer la liste des organisations représentatives des travailleurs en organisant, à cette fin, le scrutin destiné à mesurer l'audience des organisations dans chacun des secteurs d'activité susmentionnés. 3. Pour le premier scrutin, qui s'est déroulé du 9 au 16 mai 2022, l'article 2 de l'ordonnance du 21 avril 2021 a fixé à 5 % des suffrages exprimés le seuil d'audience à atteindre par les organisations syndicales ou associations professionnelles pour obtenir la reconnaissance de leur représentativité. 4. A l'issue de ce scrutin, la Confédération nationale des travailleurs - Solidarité ouvrière (CNT-SO), qui s'est portée candidate uniquement dans le secteur des activités de livraison de marchandises au moyen d'un véhicule à deux ou trois roues, motorisé ou non, a obtenu un score inférieur à 5 %. 5. Par requête déposée le 11 mai 2022, la CNT-SO et M. [L], en qualité de secrétaire général de celle-ci, ont saisi le tribunal judiciaire afin de solliciter l'annulation du scrutin, tant pour le secteur d'activité de la conduite d'une voiture de transport avec chauffeur que pour celui de la livraison de marchandises au moyen d'un véhicule à deux ou trois roues, motorisé ou non. Examen des moyens Sur le second moyen, pris en ses première, quatrième, sixième et septième branches 6. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui sont irrecevables pour les première, quatrième et sixième branches et manifestement pas de nature à entraîner la cassation pour la septième branche du moyen. Sur le premier moyen Enoncé du moyen 7. La CNT-SO et M. [L] font grief au jugement de les déclarer irrecevables à agir en ce que leurs demandes portaient sur l'annulation du scrutin destiné à mesurer l'audience des organisations de travailleurs recourant aux plateformes pour leurs activités dans le secteur d'activité de conduite d'une voiture de transport avec chauffeur, alors « qu'ainsi que le rappelle le jugement attaqué, il résulte de l'article R. 7343-56 du code du travail que "la contestation prévue à l'article L. 7343-10 est formée dans un délai de quinze jours à compter de l'affichage des résultats mentionné à l'article R. 7343-54, par tout électeur ou tout mandataire d'une organisation candidate relevant du secteur d'activité pour laquelle la contestation est formée, à peine d'irrecevabilité" ; qu'en subordonnant la recevabilité du recours à la circonstance que l'organisation syndicale attaquée, en sus de relever du secteur d'activité concerné, ait "spécifiquement déposé sa candidature" dans ce secteur d'activité, le tribunal, qui a ajouté à ce texte une condition qui n'y figure pas, a violé l'article R. 7343-56 du code du travail. » Réponse de la Cour 8. Aux termes de l'article L. 7343-1 du code du travail, dans les conditions et selon les modalités définies au présent chapitre, un dialogue social est organisé entre les plateformes mentionnées à l'article L. 7342-1 et les travailleurs indépendants définis à l'article L. 7341-1 qui y recourent pour leur activité, au niveau de chacun des secteurs d'activité suivants : 1° Activités de conduite d'une voiture de transport avec chauffeur ; 2° Activités de livraison de marchandises au moyen d'un véhicule à deux ou trois roues, motorisé ou non. 9. Selon l'article L. 7343-5 du même code, l'ARPE est chargée d'organiser le scrutin destiné à mesurer l'audience des organisations dans chacun des secteurs mentionnés à l'article L. 7343-1. 10. En application des articles L. 7343-2 et L. 7343-6 du code du travail, peuvent se déclarer candidats au scrutin les syndicats professionnels et leurs unions, lorsque la défense des droits des travailleurs définis à l'article L. 7341-1 recourant pour leur activité aux plateformes mentionnées à l'article L. 7342-1 entre dans leur objet social, et les associations, lorsque la représentation de ces travailleurs et la négociation des conventions et accords qui leur sont applicables entrent dans leur objet social, qui satisfont aux critères mentionnés aux 1° à 4° de l'article L. 7343-3. 11. Selon l'article L. 7343-3, 1° à 4°, du même code, la représentativité des organisations représentant lesdits travailleurs est déterminée d'après les critères cumulatifs suivants, appréciés dans le cadre du secteur considéré : 1° Le respect des valeurs républicaines ; 2° L'indépendance ; 3° La transparence financière. Ce critère est satisfait, notamment, lorsque le syndicat ou l'association s'acquitte des obligations définies aux articles L. 2135-1 à L. 2135-6 ; 4° Une ancienneté minimale d'un an dans le champ professionnel des travailleurs mentionnés au premier alinéa et au niveau national. Cette ancienneté s'apprécie à compter de la date de dépôt légal des statuts conférant à l'organisation concernée une vocation à représenter ces travailleurs. 12. L'article R. 7343-2, alinéa 1, dispose qu'un scrutin est organisé pour chacun des secteurs d'activité mentionnés à l'article L. 7343-1. 13. Aux termes de l'article R. 7343-22, alinéa 1, les candidatures des organisations mentionnées à l'article L. 7343-2 sont transmises par voie électronique. Une organisation qui se porte candidate dans deux secteurs d'activité présente deux candidatures distinctes. 14. L'article R. 7343-8 dispose qu'une liste électorale est établie pour chaque secteur d'activité par le directeur général de l'ARPE. 15. En application des articles L. 7343-10 et R. 7343-56, alinéa 1, les contestations relatives à la liste électorale et à la régularité des opérations électorales sont formées devant le juge judiciaire dans un délai de quinze jours à compter de l'affichage des résultats mentionné à l'article R. 7343-54, par tout électeur ou tout mandataire d'une organisation candidate relevant du secteur d'activité pour laquelle la contestation est formée, à peine d'irrecevabilité. 16. Il en résulte qu'est irrecevable la contestation d'une organisation portant sur la liste électorale ou la régularité des opérations électorales du scrutin relatif au secteur d'activité pour lequel cette organisation n'a pas déposé de candidature. 17. Ayant constaté que la CNT-SO ne s'était pas portée candidate dans le secteur d'activité de la conduite d'une voiture de transport avec chauffeur, le tribunal en a déduit à bon droit que la demande d'annulation du scrutin destiné à mesurer l'audience des organisations dans ce secteur d'activité était irrecevable. 18. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé. Sur le second moyen, pris en ses deuxième, troisième et cinquième branches Enoncé du moyen 19. La CNT-SO et M. [L] font grief au jugement de les débouter de leur demande d'annulation du scrutin ayant pour objet de mesurer l'audience des organisations représentant les travailleurs des plateformes d'emploi pour l'activité de livraison de marchandises au moyen d'un véhicule à deux ou trois roues, motorisé ou non, qui se sont déroulées du 9 au 16 mai 2022, alors : « 2°/ qu'en se bornant pour rejeter la demande d'annulation des opérations électorales à relever le motif inopérant déduit de ce que le fait que ces 154 travailleurs des plateformes avaient de la sorte été empêchés de prendre part au scrutin, n'était pas imputable à l'ARPE mais à la plateforme à laquelle ils étaient liés, sans rechercher, comme il y été invité par les écritures des exposants, si cette irrégularité n'avait pas affecté les résultats du scrutin, et partant l'appréciation de l'audience et de la représentativité des organisation syndicales candidates au scrutin, le tribunal a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 7343-3, L. 7343-7 et L. 7343-9 du code du travail ; 3°/ qu'en relevant, pour écarter le moyen déduit par les exposants de ce qu'ils étaient en droit de prétendre à la communication, qui leur avait été irrégulièrement refusée, des listes électorales par application des règles de droit commun du droit des élections professionnelles comme du droit électoral, applicables à défaut de disposition contraire expresse, que l'article R. 7343-10 du code du travail ne fait obligation à l'ARPE que d'en permettre la consultation sur le site internet dédié et dans ses locaux, quand ces dispositions n'excluent nullement une telle communication, le tribunal a méconnu cette prérogative des organisations syndicales se présentant aux suffrages, ensemble les articles R. 7343-10 du code du travail et L. 37 du code électoral ; 5°/ que les organisations syndicales candidates aux suffrages doivent pouvoir diffuser librement leur propagande électorale par les moyens de leur choix, indépendamment de la diffusion de cette propagande par l'ARPE et les plateformes prévue par les articles R. 7343-35 à R. 7343-36-1 du code du travail et par l'arrêté du 8 février 2022 relatif aux modalités de dépôt et de validation des propagandes électorales pour le scrutin destiné à mesurer l'audience des organisations de travailleurs des plateformes ; qu'il résulte de ce principe général du droit électoral qu'elles doivent pouvoir avoir communication à cet effet de la liste des électeurs, comprenant l'adresse physique ou électronique des électeurs, sans qu'on puisse les renvoyer à des opérations de tractage ou d'affichage aléatoires en l'absence de lieu de travail commun des intéressés ; qu'en estimant que l'ARPE n'était pas tenue de leur communiquer ces éléments, le tribunal a fait une fausse application des textes réglementaires précités, et violé les principes généraux du droit électoral. » Réponse de la Cour 20. En premier lieu, en application des articles L. 7343-1 et L. 7343-7 du code du travail, sont électeurs les travailleurs indépendants utilisant une plateforme de mise en relation par voie électronique mentionnée à l'article L. 7342-1, qui justifient d'une ancienneté de trois mois d'exercice de leur activité dans le secteur économique considéré. 21. Aux termes de l'article L. 7343-8 du même code, pour l'établissement de la liste électorale, les plateformes mentionnées à l'article L. 7342-1 transmettent à l'ARPE les données nécessaires à la constitution de la liste électorale et à la vérification de la condition définie à l'article L. 7343-7, selon des modalités définies par décret en Conseil d'Etat. 22. Aux termes de l'article R. 7343-1, le vote est ouvert aux travailleurs mentionnés à l'article L. 7341-1 et inscrits sur la liste électorale prévue à l'article L. 7343-8. 23. L'article L. 7343-10 dispose que les contestations relatives à la liste électorale et à la régularité des opérations électorales sont de la compétence du juge judiciaire. 24. En application de l'article R. 7343-12, préalablement au recours devant le tribunal judiciaire prévu par l'article L. 7343-10, l'électeur ou un représentant qu'il aura désigné saisit le directeur général de l'ARPE d'un recours relatif à l'inscription sur la liste électorale. Ce recours est formé, à peine d'irrecevabilité, dans un délai de sept jours à compter de la date mentionnée au 1° du II de l'article R. 7343-10, par tout moyen permettant de donner date certaine à sa réception. 25. En l'espèce, le tribunal a constaté que la plateforme Lyceat avait transmis à l'ARPE, le 17 mars 2022, les données relatives aux travailleurs recourant pour leur activité professionnelle à cette plateforme, soit postérieurement à la date de publication de la liste électorale, fixée au 7 mars 2022 par arrêté du 25 février 2022 relatif à la liste électorale pour le scrutin destiné à mesurer l'audience des organisations de travailleurs des plateformes du 9 mai au 16 mai 2022, en sorte que, cette transmission étant tardive, 154 travailleurs n'avaient pu être inscrits sur la liste électorale du secteur d'activité de livraison des marchandises au moyen d'un véhicule à deux ou trois roues, aucun d'entre eux n'ayant formé de recours gracieux devant le directeur de l'ARPE aux fins d'inscription sur la liste électorale. 26. Le tribunal a fait ressortir qu'au regard du seuil de représentativité des organisations fixé à 5 %, du score de 3,86 % des votes exprimés obtenu par la CNT-SO et du taux de participation des travailleurs au scrutin qui s'est élevé à 1,83 % des inscrits, l'irrégularité constatée avait été sans influence sur les résultats du scrutin et dès lors n'avait pas été déterminante de la représentativité de la CNT-SO dans le secteur d'activité considéré. 27. En deuxième lieu, l'article L. 7343-9 du code du travail dispose que le scrutin a lieu par vote électronique. 28. Aux termes de l'article R. 7343-3, I, II et III, du même code : I.-Afin de préparer et de permettre le vote électronique prévu à l'article L. 7343-9, il est créé un traitement automatisé de données à caractère personnel placé sous la responsabilité de l'ARPE. Les catégories de données à caractère personnel traitées sont les suivantes : 1° Pour l'établissement de la liste électorale : les données relatives à l'identité des travailleurs et à leur activité professionnelle mentionnée à l'article L. 7343-1 ; 2° Pour le traitement des candidatures : les données relatives à l'identité du mandataire ; 3° Pour la communication aux électeurs des informations permettant le droit de vote : les données relatives à leur identité ; 4° Pour les opérations électorales : les données nécessaires à la mise en oeuvre du protocole d'authentification prévu au deuxième alinéa de l'article R. 7343-44 et les données relatives à l'identité des membres du bureau de vote et des agents en charge du scrutin. Ce traitement automatisé garantit dans le système de vote la séparation, dans des fichiers distincts, des données relatives aux électeurs, d'une part, et aux votes, d'autre part. II.-Le traitement mentionné au I est constitué sur la base des informations transmises par l'ensemble des plateformes mentionnées à l'article L. 7343-1, par les mandataires des organisations candidates, et par l'ARPE. III.-Les destinataires des données à caractère personnel traitées sont, pour l'ensemble des informations collectées, les agents de l'ARPE, les personnes habilitées par le ou les prestataires en charge de l'élaboration de la liste électorale agissant pour le compte de l'ARPE et les personnes habilitées par le prestataire agissant pour le compte de la même autorité en vue de la mise en place du vote électronique à distance. 29. Selon l'article R. 7343-9, l'ARPE collecte auprès des plateformes mentionnées à l'article L. 7343-1 les données relatives au travailleur prévues au 1°, au 3° et au 4° du I de l'article R. 7343-3, notamment celles permettant d'établir le respect de la condition d'ancienneté mentionnée à l'article L. 7343-7. 30. L'article R. 7343-10, alinéa 1, précise qu'un extrait de la liste électorale établie par l'ARPE peut être consulté sur le site internet dédié aux opérations de vote. Cet extrait, qui mentionne les noms, prénoms, et numéro de SIREN des électeurs, peut également être consulté dans les locaux de l'ARPE. 31. Il résulte d'une part de l'article R. 7343-3 du code du travail que les organisations syndicales et associations de travailleurs ne sont pas destinataires des données à caractère personnel, faisant l'objet d'un traitement automatisé, relatives aux travailleurs des plateformes collectées par l'ARPE pour l'établissement de la liste électorale, d'autre part de l'article R. 7343-10 du même code que seul un extrait, mentionnant les noms, prénoms, et numéro de SIREN des électeurs, de la liste électorale établie par l'ARPE, peut être consulté sur son site internet dédié aux opérations de vote ou dans ses locaux. 32. Dès lors, le tribunal a retenu à bon droit que la CNT-SO ne pouvait prétendre à une communication intégrale de la liste électorale. 33. En troisième lieu, en application de l'article R. 7343-33, 1°, la commission des opérations de vote, créée par l'article R. 7343-31, est chargée de donner un avis sur la conformité des documents de propagande électorale des organisations candidates et de s'assurer de la diffusion des documents nécessaires à la campagne électorale sur le site internet prévu à l'article R. 7343-10. 34. Aux termes de l'article R. 7343-36-1, le directeur général de l'ARPE publie sur le site internet mentionné à l'article R. 7343-10 à une date fixée par arrêté du ministre chargé du travail les documents de propagande électorale ayant fait l'objet d'une décision de validation dans les conditions prévues à l'article R. 7343-35. 35. Selon l'article 4 de l'arrêté du 8 février 2022 relatif aux modalités de dépôt et de validation des propagandes électorales pour le scrutin destiné à mesurer l'audience des organisations de travailleurs des plateformes, les documents de propagande électorale sont mis à disposition de la commission des opérations de vote mentionnée aux articles R. 7343-31 à R. 7343-34 du code du travail, en application de l'article R. 7343-35 du code du travail. Ils sont diffusés aux travailleurs indépendants inscrits sur les listes électorales, par les plateformes d'emploi mentionnées à l'article L. 7342-1 du code du travail, via les interfaces ou applications numériques qu'elles utilisent dans leurs relations commerciales avec les travailleurs indépendants. Ils sont également mis à leur disposition sur les sites internet de vote suivants : - https://arpe-vtc.neovote.com, pour les travailleurs indépendants exerçant une activité de conduite de voiture de transport avec chauffeur telle que prévue au 1° de l'article L. 7343-1 du code du travail ; - https://arpe-livreurs.neovote.com, pour les travailleurs indépendants exerçant une activité de livraison de marchandises au moyen d'un véhicule à deux ou trois roues, motorisé ou non, telle que prévue au 2° de l'article L. 7343-1 du code du travail. 36. L'article 5 de cet arrêté prévoit que les organisations candidates dont les documents de propagande électorale ont été validés en application de l'article R. 7343-35 du code du travail sont libres de les utiliser et de les diffuser dans le cadre de la campagne électorale. 37. Il résulte des articles R. 7343-33 et R. 7343-36-1 du code du travail et de l'arrêté du 8 février 2022 relatif aux modalités de dépôt et de validation des propagandes électorales pour le scrutin destiné à mesurer l'audience des organisations de travailleurs des plateformes, en premier lieu que les documents de propagande électorale sont, après validation par l'ARPE, diffusés aux travailleurs par les plateformes et mis à la disposition de ces derniers sur des sites internet dédiés, en second lieu que les organisations candidates peuvent diffuser librement leurs documents de propagande électorale validés. 38. Par conséquent, les organisations candidates ne peuvent obtenir l'adresse postale ou l'adresse électronique des électeurs pour procéder à la diffusion de leurs documents dans le cadre de la campagne électorale. 39. Le tribunal, qui a constaté que les documents de la propagande électorale de la CNT-SO avaient été diffusés conformément aux modalités prévues par les articles R. 7343-33 et R. 7346-36 du code du travail et 4 de l'arrêté susvisé du 8 février 2022 et relevé que la CNT-SO avait eu la faculté, prévue par l'article 5 dudit arrêté, d'assurer une diffusion de ces documents, notamment par tractage, location d'espaces de diffusion ou affichage dans des lieux tels que la maison des coursiers, a retenu à bon droit que les opérations de propagande électorale n'avaient été entachées d'aucune irrégularité. 40. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit octobre deux mille vingt-trois. | ELECTIONS PROFESSIONNELLES | En application des articles L. 7343-3, L. 7343-10, R. 7343-2, R. 7343-8, R. 7343-22 et R. 7343-56 du code du travail, est irrecevable la contestation d'une organisation portant sur la liste électorale ou la régularité des opérations électorales du scrutin, destiné à mesurer l'audience des organisations de travailleurs indépendants recourant pour leur activité aux plateformes, relatif au secteur d'activité pour lequel cette organisation n'a pas déposé de candidature. Il résulte d'une part de l'article R. 7343-3 du code du travail que les organisations syndicales et associations de travailleurs ne sont pas destinataires des données à caractère personnel, faisant l'objet d'un traitement automatisé, relatives aux travailleurs des plateformes collectées par l'Autorité des relations sociales des plateformes d'emploi (ARPE) pour l'établissement de la liste électorale, d'autre part de l'article R. 7343-10 du même code que seul un extrait, mentionnant les noms, prénoms, et numéro de SIREN des électeurs, de la liste électorale établie par l'ARPE, peut être consulté sur son site internet dédié aux opérations de vote ou dans ses locaux. Dès lors, une organisation candidate ne peut prétendre à une communication intégrale de la liste électorale. Il résulte des articles R. 7343-33 et R. 7343-36-1 du code du travail et de l'arrêté du 8 février 2022 relatif aux modalités de dépôt et de validation des propagandes électorales pour le scrutin destiné à mesurer l'audience des organisations de travailleurs des plateformes, en premier lieu que les documents de propagande électorale sont, après validation par l'ARPE, diffusés aux travailleurs par les plateformes et mis à la disposition de ces derniers sur des sites internet dédiés, en second lieu que les organisations candidates peuvent diffuser librement leurs documents de propagande électorale validés. Par conséquent, les organisations candidates ne peuvent obtenir l'adresse postale ou l'adresse électronique des électeurs pour procéder à la diffusion de leurs documents dans le cadre de la campagne électorale |
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JURITEXT000048242171 | JURI | texte/juri/judi/JURI/TEXT/00/00/48/24/21/JURITEXT000048242171.xml | ARRET | Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 18 octobre 2023, 21-60.159, Publié au bulletin | 2023-10-18 00:00:00 | Cour de cassation | 52301065 | Cassation | 21-60159 | oui | CHAMBRE_SOCIALE | 2021-05-21 00:00:00 | Tribunal judiciaire de Pointe-à-Pitre | M. Sommer | ECLI:FR:CCASS:2023:SO01065 | LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant : SOC. / ELECT CH9 COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 18 octobre 2023 Cassation M. SOMMER, président Arrêt n° 1065 FS-B Pourvoi n° Z 21-60.159 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 18 OCTOBRE 2023 Le syndicat Union générale des travailleurs de la Guadeloupe, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° Z 21-60.159 contre le jugement rendu le 21 mai 2021 par le tribunal judiciaire de Pointe-à-Pitre (contentieux des élections professionnelles), dans le litige l'opposant : 1°/ à la caisse régionale du Crédit agricole mutuel de Guadeloupe, 2°/ au syndicat SUNICAG-SUDCAM, 3°/ au syndicat SNECA-CFE-CGC, 4°/ au syndicat CGTG, ayant tous les quatre leur siège à [Adresse 1], défendeurs à la cassation. Les parties ou leurs mandataires ont produit des mémoires. Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, trois moyens de cassation. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Bouvier, conseiller, et l'avis de Mme Laulom, avocat général, après débats en l'audience publique du 20 septembre 2023 où étaient présents M. Sommer, président, Mme Bouvier, conseiller rapporteur, M. Rinuy, conseiller le plus ancien faisant fonction de doyen, Mmes Ott, Sommé, Bérard, conseillers, Mmes Chamley-Coulet, Lanoue, Ollivier, conseillers référendaires, Mme Laulom, avocat général, et Mme Pontonnier, greffier de chambre, la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon le jugement attaqué (tribunal judiciaire de Pointe-à-Pitre, 21 mai 2021) et les productions, deux syndicats représentatifs ont sollicité de la caisse régionale de Crédit agricole mutuel de Guadeloupe (la caisse) l'organisation d'une consultation du personnel de la caisse afin de valider deux accords collectifs signés le 31 décembre 2020 par des organisations syndicales représentant plus de 30 % des suffrages exprimés aux dernières élections professionnelles et ont informé les autres organisations représentatives, le SUNICAG-SUD-CAM et le syndicat Union générale des travailleurs de la Guadeloupe (UGTG), de cette demande de consultation. 2. Un protocole d'accord relatif à l'organisation de la consultation du personnel a été signé le 1er mars 2021 entre la caisse et les quatre organisations syndicales représentatives. Le vote s'est déroulé du 17 au 19 mars 2021 par voie électronique. 3. Par requête du 1er avril 2021, invoquant l'existence d'irrégularités dans le déroulement du scrutin, le SUNICAG-SUD-CAM a saisi un tribunal judiciaire d'une contestation de cette consultation et les trois autres organisations syndicales sont intervenues à l'instance. 4. A l'audience de renvoi du 18 mai 2021, le SUNICAG-SUD-CAM a déclaré se désister de ses demandes. L'UGTG a soutenu oralement à l'audience, à titre reconventionnel, l'annulation du processus de consultation. Examen des moyens Sur le troisième moyen Enoncé du moyen 5. L'UGTG fait grief au jugement de dire irrecevables la requête introductive et la demande soutenue à l'audience en annulation de la procédure de consultation des salariés, alors « que cette procédure est légalement assimilée à une élection professionnelle et relève de ce fait de la procédure sans représentation non obligatoire ; qu'en conséquence, le tribunal, qui a déclaré irrecevable la requête alors qu'elle l'avait régulièrement saisi de l'affaire, a méconnu les articles R. 211-3-12 à R. 211-3-23 du code de l'organisation judiciaire, R. 2232-5 du code du travail, 761 et 817 du code de procédure civile. » Réponse de la Cour Vu les articles L. 2232-12, R. 2232-5 et R. 2314-24 du code du travail, R. 211-3-15, 1°, R. 211-3-17 du code de l'organisation judiciaire et les articles 761, 2°, et 817 du code de procédure civile : 6. Selon l'article L. 2232-12 du code du travail, la consultation des salariés appelés à se prononcer sur la validation d'un accord d'entreprise non majoritaire, qui peut être organisée par voie électronique, se déroule dans le respect des principes généraux du droit électoral et selon les modalités prévues par un protocole spécifique conclu entre l'employeur et une ou plusieurs organisations syndicales représentatives ayant recueilli plus de 30 % des suffrages exprimés en faveur d'organisations représentatives au premier tour des dernières élections des titulaires au comité social et économique. L'accord est valide s'il est approuvé par les salariés à la majorité des suffrages exprimés. 7. Aux termes de l'article R. 211-3-17 du code de l'organisation judiciaire, le tribunal judiciaire connaît des contestations relatives : 1° Aux modalités d'organisation, à la liste des salariés devant être consultés et à la régularité des procédures de consultation sur les accords d'entreprise prévues par les articles L. 2232-12, L. 2232-23-1, L. 2232-24 et L. 2232-26 du code du travail ; 2° A la liste des salariés devant être consultés et à la régularité des procédures de consultation prévues par les articles L. 2232-21 et L. 2232-23 du code du travail. 8. Selon l'article R. 2232-5 du code du travail, les contestations relatives à la liste des salariés devant être consultés et à la régularité de la consultation sont de la compétence du tribunal judiciaire qui statue en dernier ressort. 9. En application de l'article R. 2314-24 du même code, le tribunal judiciaire est saisi par voie de requête des contestations portant sur l'électorat et la régularité des opérations électorales ainsi que sur la désignation de représentants syndicaux. 10. En vertu de l'article 761, 2°, du code de procédure civile, les parties sont dispensées de constituer avocat dans les cas prévus par la loi ou le règlement et notamment dans les matières énumérées par l'article R. 211-3-15, 1°, du code de l'organisation judiciaire, portant sur les contestations relatives à l'électorat, à l'éligibilité et à la régularité des opérations électorales en ce qui concerne l'élection des membres de la délégation du personnel au comité social et économique. 11. Aux termes de l'article 817 du même code, lorsque les parties sont dispensées de constituer avocat conformément aux dispositions de l'article 761, la procédure est orale, sous réserve des dispositions particulières propres aux matières concernées. 12 Il résulte de l'application combinée de ces textes que les contestations relatives aux consultations des salariés appelés à se prononcer sur la validation d'un accord d'entreprise, qui se déroulent dans le respect des principes généraux du droit électoral, sont formées par voie de requête, les parties étant dispensées de constituer avocat. 13. Pour déclarer irrecevable la requête, le jugement retient que le litige ne relève pas de l'une des hypothèses pour lesquelles les parties sont dispensées de constituer avocat, que la procédure est la procédure écrite avec représentation obligatoire et que, dans ces circonstances, le tribunal ne pouvait être saisi que par voie d'assignation ou de requête conjointe. 14. En statuant ainsi, alors qu'il avait été régulièrement saisi par voie de requête, le tribunal judiciaire a violé les textes susvisés. Portée et conséquences de la cassation 15. En application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation des dispositions du jugement déclarant « irrecevable » la requête saisissant la juridiction entraîne, par voie de conséquence, la cassation des autres chefs de dispositif qui s'y rattachent par un lien de dépendance nécessaire. PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 21 mai 2021, entre les parties, par le tribunal judiciaire de Pointe-à-Pitre ; Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ce jugement et les renvoie devant le tribunal judiciaire de Pointre-à-Pitre autrement composée ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, condamne la caisse régionale du crédit agricole mutuel de Guadeloupe à payer au syndicat Union générale des travailleurs de la Guadeloupe la somme de 1 500 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit octobre deux mille vingt-trois. | STATUT COLLECTIF DU TRAVAIL - Conventions et accords collectifs - Accords collectifs - Accords d'entreprise - Accord d'entreprise non majoritaire - Validation - Consultation des salariés - Régularité - Contestation - Modalités - Détermination - Portée | Il résulte de l'application combinée des articles L. 2232-12, R. 2232-5 et R. 2314-24 du code du travail, R. 211-3-15, 1°, R. 211-3-17 du code de l'organisation judiciaire et des articles 761, 2°, et 817 du code de procédure civile que les contestations relatives aux consultations des salariés appelés à se prononcer sur la validation d'un accord d'entreprise, qui se déroulent dans le respect des principes généraux du droit électoral, sont formées par voie de requête, les parties étant dispensées de constituer avocat. Viole ces textes le jugement qui, pour déclarer irrecevable une requête, retient que la procédure de contestation, prévue par l'article R. 211-3-17 du code de l'organisation judiciaire, est écrite avec représentation obligatoire et que le tribunal judiciaire ne pouvait être saisi que par voie d'assignation ou de requête conjointe |
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JURITEXT000048283804 | JURI | texte/juri/judi/JURI/TEXT/00/00/48/28/38/JURITEXT000048283804.xml | ARRET | Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 25 octobre 2023, 21-18.286, Publié au bulletin | 2023-10-25 00:00:00 | Cour de cassation | 52301069 | Cassation partielle sans renvoi | 21-18286 | oui | CHAMBRE_SOCIALE | 2021-03-11 00:00:00 | Cour d'appel de Lyon | M. Soulard (premier président) | SARL Thouvenin, Coudray et Grévy, SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol | ECLI:FR:CCASS:2023:SO01069 | LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant : SOC. CH9 COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 25 octobre 2023 Cassation partielle sans renvoi M. SOULARD, premier président Arrêt n° 1069 FS-B Pourvoi n° K 21-18.286 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 25 OCTOBRE 2023 1°/ M. [U] [V], 2°/ Mme [Z] [T], épouse [V], tous deux domiciliés [Adresse 2], ont formé le pourvoi n° K 21-18.286 contre l'arrêt rendu le 11 mars 2021 par la cour d'appel de Lyon (chambre sociale C), dans le litige les opposant à la société Distribution Casino France, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation. Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, deux moyens de cassation. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Laplume, conseiller référendaire, les observations de la SARL Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de M. et Mme [V], de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société Distribution Casino France, et l'avis de Mme Wurtz, avocat général, après débats en l'audience publique du 26 septembre 2023 où étaient présents M. Soulard, premier président, Mme Laplume, conseiller référendaire rapporteur, M. Sommer, président, Mme Capitaine, conseiller doyen, Mmes Lacquemant, Nirdé-Dorail, Salomon, conseillers, Mmes Valéry, Pecqueur, MM. Chiron, Leperchey, conseillers référendaires, Mme Wurtz, avocat général, et Mme Jouanneau, greffier de chambre, la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Lyon, 11 mars 2021), M. et Mme [V] ont signé le 8 juin 2006 avec la société Distribution Casino France (la société) un contrat de cogérance d'une succursale de commerce de détail alimentaire. 2. A la suite d'un inventaire réalisé dans leur magasin le 29 avril 2016, la société les a convoqués à un entretien préalable à la rupture du contrat fixé le 17 juin 2016 et leur a notifié le 12 juillet 2016 la rupture du contrat aux motifs de l'importance d'un manquant de marchandises et d'espèces et du solde débiteur de leur compte de dépôt. Examen des moyens Sur le premier moyen 3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Mais sur le second moyen Enoncé du moyen 4. Les cogérants font grief à l'arrêt de dire n'y avoir lieu à indemnité de congés payés afférents à l'indemnité compensatrice de préavis, alors « que les gérants non salariés bénéficient des avantages légaux accordés aux salariés en matière de congés payés ; que le versement d'une indemnité compensatrice de préavis non-effectué à la demande de l'entreprise propriétaire ouvre droit au paiement d'une indemnité de congés payés afférents ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé les articles L. 7322-1 du code du travail et L. 3141-26 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016. » Réponse de la Cour Vu les articles L. 7322-1 et L. 1234-5 du code du travail : 5. Selon le premier de ces textes, les gérants non salariés bénéficient des avantages légaux accordés aux salariés en matière de congés payés. 6. Selon le deuxième, lorsque le salarié n'exécute pas le préavis, il a droit, sauf s'il a commis une faute grave, à une indemnité compensatrice. L'inexécution du préavis, notamment en cas de dispense par l'employeur, n'entraîne aucune diminution des salaires et avantages que le salarié aurait perçus s'il avait accompli son travail jusqu'à l'expiration du préavis, indemnité de congés payés comprise. 7. Pour rejeter la demande des cogérants en paiement d'une indemnité compensatrice de congés payés, l'arrêt retient qu'il n'y a pas lieu d'ajouter cette indemnité aux sommes qui leur ont été versées par la société au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, compte tenu de la nature de la rémunération des cogérants. 8. En statuant ainsi, alors que l'indemnité compensatrice de préavis ouvre droit à congés payés, la cour d'appel a violé les textes susvisés. Portée et conséquences de la cassation 9. Tel que suggéré par les demandeurs au pourvoi, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile. 10. L'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond. 11. L'indemnité compensatrice de préavis ayant été fixée à 3 332 euros bruts s'agissant de Mme [V] et à 1 428 euros bruts s'agissant de M. [V], il convient de condamner la société à payer une indemnité compensatrice de congés payés sur préavis représentant 10 % de ces sommes, soit respectivement 333,20 euros et 142,80 euros. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit n'y avoir lieu à indemnité de congés payés afférents à l'indemnité compensatrice de préavis, l'arrêt rendu le 11 mars 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; DIT n'y avoir lieu à renvoi ; Condamne la société Distribution Casino France à payer : - à Mme [V] la somme de 333,20 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis, - à M. [V] la somme de 142,80 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis ; Condamne la société Distribution Casino France aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Distribution Casino France et la condamne à payer à M. et Mme [V] la somme globale de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le premier président en son audience publique du vingt-cinq octobre deux mille vingt-trois. | Il résulte des articles L. 7322-1 et L. 1234-5 du code du travail que l'indemnité compensatrice de préavis versée au gérant d'une succursale de commerce de détail alimentaire ouvre droit à congés payés |
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JURITEXT000048283805 | JURI | texte/juri/judi/JURI/TEXT/00/00/48/28/38/JURITEXT000048283805.xml | ARRET | Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 25 octobre 2023, 22-12.833, Publié au bulletin | 2023-10-25 00:00:00 | Cour de cassation | 52301070 | Cassation partielle | 22-12833 | oui | CHAMBRE_SOCIALE | 2021-11-19 00:00:00 | Cour d'appel de Toulouse | M. Soulard (premier président) | SCP Capron, SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel | ECLI:FR:CCASS:2023:SO01070 | LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant : SOC. ZB1 COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 25 octobre 2023 Cassation partielle M. SOMMER, président Arrêt n° 1070 FS-B Pourvoi n° D 22-12.833 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 25 OCTOBRE 2023 La société Derichebourg aeronautics services France, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° D 22-12.833 contre l'arrêt rendu le 19 novembre 2021 par la cour d'appel de Toulouse (4e chambre civile, section 1), dans le litige l'opposant : 1°/ à M. [I] [D], domicilié [Adresse 3], 2°/ à Pôle emploi, dont le siège est [Adresse 2], défendeurs à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Chiron, conseiller référendaire, les observations de la SCP Yves et Blaise Capron, avocat de la société Derichebourg aeronautics services France, de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat de M. [D], et l'avis de Mme Wurtz, avocat général, après débats en l'audience publique du 26 septembre 2023 où étaient présents M. Soulard, premier président, M. Chiron, conseiller référendaire rapporteur, M. Sommer, président, Mme Capitaine, conseiller doyen, Mmes Lacquemant, Nirdé-Dorail, Salomon, conseillers, Mmes Valéry, Pecqueur, Laplume, M. Leperchey, conseillers référendaires, Mme Wurtz, avocat général, et Mme Jouanneau, greffier de chambre, la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, de M. Sommer, président, M. Chiron, conseiller référendaire rapporteur, Mme Capitaine, conseiller doyen, Mmes Lacquemant, Nirdé-Dorail, Salomon, conseillers, Mmes Valéry, Pecqueur, Laplume, M. Leperchey, conseillers référendaires, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 19 novembre 2021), M. [D] a été engagé à compter du 11 avril 2005 en qualité de préparateur aéronautique par la société Derichebourg atis aéronautique, aux droits de laquelle vient la société Derichebourg aeronautics services France. 2. Par avenant à effet du 1er mai 2006, les parties sont convenues d'ajouter aux fonctions initiales celles de responsable d'activité préparation A 340. 3. Placé en arrêt de travail à compter du 8 janvier 2018, le salarié a été déclaré inapte au poste de coordinateur le 26 avril 2018, le médecin du travail précisant que l'état de santé du salarié faisait obstacle à tout reclassement dans un emploi, et a été licencié le 29 mai 2018 pour inaptitude et impossibilité de reclassement. 4. Contestant son licenciement, le salarié a saisi la juridiction prud'homale. Examen du moyen Sur le moyen, pris en sa première branche Enoncé du moyen 5. L'employeur fait grief à l'arrêt de dire que le licenciement du salarié était dépourvu de cause réelle et sérieuse, de le condamner à payer au salarié diverses sommes à titre d'indemnité compensatrice de préavis, des congés payés afférents, de complément d'indemnité de licenciement et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, à remettre au salarié un bulletin de salaire du mois de mai 2018 et une attestation Pôle emploi modifiés et d'ordonner le remboursement à l'organisme Pôle emploi concerné des indemnités de chômage éventuellement payées au salarié dans la limite de six mois, alors « qu'en l'absence de recours exercé devant le conseil de prud'hommes, sur le fondement des dispositions de l'article L. 4624-7 du code du travail, contre un avis du médecin du travail, celui-ci s'impose aux parties et au juge saisi de la contestation du bien-fondé du licenciement pour inaptitude prononcé sur le fondement de cet avis du médecin du travail, et ceci même si cette contestation trouve son fondement dans une contestation de l'avis du médecin du travail reposant sur le non-respect par le médecin du travail de la procédure de constat de l'inaptitude du salarié ; qu'en énonçant, par conséquent, pour dire que le licenciement de M. [D] était dépourvu de cause réelle et sérieuse, qu'aux termes de l'article R. 4624-45 du code du travail applicable à la date du litige, la contestation devant le conseil de prud'hommes saisi en la forme des référés porte sur les avis, propositions, conclusions écrites ou indications de nature médicale émis par le médecin du travail", mais que le texte ne précise rien s'agissant d'une contestation portant sur des éléments qui ne sont pas de nature médicale, ce qui était le cas en l'espèce, qu'en effet, M. [D] soulevait que l'avis d'inaptitude du médecin du travail en date du 26 avril 2018 avait été rendu par rapport à un poste de coordinateur qui n'était pas reconnu comme étant celui auquel il était affecté au moment de la déclaration d'inaptitude et que M. [D] pouvait donc contester l'avis d'inaptitude devant le conseil de prud'hommes dans le cadre d'une contestation du licenciement pour inaptitude prononcé, en se fondant sur un non-respect de la procédure de constat d'inaptitude, l'analyse du poste occupé étant déterminante pour ce constat, sans rechercher, ainsi qu'elle y avait été invitée par la société Derichebourg aeronautics services France, si les parties ne s'étaient pas abstenues d'exercer, dans le délai prévu par les dispositions de l'article R. 4624-45 du code du travail, un recours à l'encontre de l'avis d'inaptitude de M. [D] du médecin du travail en date du 26 avril 2018 devant le conseil de prud'hommes sur le fondement des dispositions de l'article L. 4624-7 du code du travail, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions des articles L. 4624-7 et R. 4624-45 du code du travail, dans leur rédaction applicable à la cause. » Réponse de la Cour Vu les articles L. 4624-7 du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi n° 2018-217 du 29 mars 2018, et antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2019-738 du 17 juillet 2019, et R. 4624-45 du même code, dans sa rédaction issue du décret n° 2017-1698 du 15 décembre 2017 : 6. Selon le premier de ces textes, si le salarié ou l'employeur conteste les avis, propositions, conclusions écrites ou indications émis par le médecin du travail reposant sur des éléments de nature médicale en application des articles L. 4624-2, L. 4624-3 et L. 4624-4, il peut saisir le conseil de prud'hommes en la forme des référés qui pourra confier toute mesure d'instruction au médecin inspecteur du travail territorialement compétent pour l'éclairer sur les questions de fait relevant de sa compétence. 7. Selon le second, en cas de contestation portant sur les avis, propositions, conclusions écrites ou indications reposant sur des éléments de nature médicale émis par le médecin du travail mentionnés à l'article L. 4624-7, le conseil de prud'hommes statuant en la forme des référés est saisi dans un délai de quinze jours à compter de leur notification. Les modalités de recours ainsi que ce délai sont mentionnés sur les avis et mesures émis par le médecin du travail. 8. Il en résulte que l'avis émis par le médecin du travail, seul habilité à constater une inaptitude au travail, peut faire l'objet tant de la part de l'employeur que du salarié d'une contestation devant le conseil de prud'hommes saisi en la forme des référés qui peut examiner les éléments de toute nature ayant conduit au prononcé de l'avis. En l'absence d'un tel recours, celui-ci s'impose aux parties et au juge saisi de la contestation du licenciement. 9. Pour dire que le licenciement du salarié est dépourvu de cause réelle et sérieuse et condamner l'employeur à payer au salarié diverses sommes à ce titre, l'arrêt retient que l'article R. 4624-45 du code du travail ne précise rien s'agissant d'une contestation portant sur des éléments qui ne sont pas de nature médicale, et que l'appelant, qui soulève que l'avis d'inaptitude a été rendu par rapport à un poste de coordonnateur qui n'est pas reconnu comme étant celui auquel il était affecté au moment de la déclaration d'inaptitude, peut contester l'avis d'inaptitude devant le conseil de prud'hommes dans le cadre d'une contestation du licenciement pour inaptitude prononcé, en se fondant sur un non-respect de la procédure de constat d'inaptitude, l'analyse du poste occupé étant déterminante pour ce constat, peu important que l'état de santé du salarié fasse finalement obstacle à tout reclassement dans un emploi. 10. En statuant ainsi, alors que le salarié ne pouvait contester devant les juges du fond la légitimité de son licenciement pour inaptitude au motif que le médecin du travail aurait utilisé un terme inexact pour désigner son poste de travail, la cour d'appel a violé les textes susvisés. Portée et conséquences de la cassation 11. Le moyen ne formulant aucune critique contre les motifs de l'arrêt fondant la décision de condamner l'employeur au paiement d'une somme à titre de complément de l'indemnité de licenciement, la cassation ne peut s'étendre à cette disposition de l'arrêt qui n'est pas dans un lien de dépendance avec les dispositions de l'arrêt critiquées par ce moyen. 12. La cassation des chefs de dispositif disant que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse, condamnant l'employeur au paiement de diverses sommes au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, des congés payés afférents et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, lui ordonnant de remettre un bulletin de salaire de mai 2018 et une attestation Pôle emploi modifiés et ordonnant le remboursement par l'employeur à l'organisme Pôle emploi concerné des indemnités de chômage éventuellement payées au salarié dans la limite de six mois n'emporte pas celle des chefs de dispositif de l'arrêt le condamnant aux dépens ainsi qu'au paiement d'une somme en application de l'article 700 du code de procédure civile, justifiés par d'autres condamnations prononcées à l'encontre de celui-ci. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief, la Cour : CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il déboute M. [D] de sa demande de dommages-intérêts pour harcèlement moral et pour déloyauté postérieure à la rupture du contrat de travail, condamne la société Derichebourg aeronautics services France à verser à M. [D] la somme de 1 249,13 euros au titre de complément de l'indemnité de licenciement, aux dépens de première instance et d'appel et à verser à M. [D] une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, et la déboute de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 19 novembre 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Toulouse ; Remet, sauf sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier ; Condamne M. [D] aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq octobre deux mille vingt-trois. | TRAVAIL REGLEMENTATION, SANTE ET SECURITE | Il résulte des articles L. 4624-7 et R. 4624-45 du code du travail, dans leur rédaction applicable au litige, que l'avis émis par le médecin du travail, seul habilité à constater une inaptitude au travail, peut faire l'objet tant de la part de l'employeur que du salarié d'une contestation devant le conseil de prud'hommes saisi en la forme des référés qui peut examiner les éléments de toute nature ayant conduit au prononcé de l'avis. En l'absence d'un tel recours, celui-ci s'impose aux parties et au juge saisi de la contestation du licenciement. Un salarié ne peut donc contester devant les juges du fond la légitimité de son licenciement pour inaptitude au motif que le médecin du travail aurait utilisé un terme inexact pour désigner son poste de travail |
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JURITEXT000048283807 | JURI | texte/juri/judi/JURI/TEXT/00/00/48/28/38/JURITEXT000048283807.xml | ARRET | Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 25 octobre 2023, 22-18.303, Publié au bulletin | 2023-10-25 00:00:00 | Cour de cassation | 52301071 | Cassation | 22-18303 | oui | CHAMBRE_SOCIALE | 2022-04-29 00:00:00 | Cour d'appel de Rennes | M. Soulard (premier président) | SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret | ECLI:FR:CCASS:2023:SO01071 | LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant : SOC. CH9 COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 25 octobre 2023 Cassation M. SOMMER, président Arrêt n° 1071 FS-B Pourvoi n° Z 22-18.303 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 25 OCTOBRE 2023 La société Jemaïa, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° Z 22-18.303 contre l'arrêt rendu le 29 avril 2022 par la cour d'appel de Rennes (8e chambre prud'homale), dans le litige l'opposant à Mme [C] [D], domiciliée [Adresse 1], défenderesse à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Chiron, conseiller référendaire, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société Jemaïa, de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de Mme [D], et l'avis de Mme Wurtz, avocat général, après débats en l'audience publique du 26 septembre 2023 où étaient présents M. Soulard, premier président, M. Chiron, conseiller référendaire rapporteur, M. Sommer, président, Mme Capitaine, conseiller doyen, Mmes Lacquemant, Nirdé-Dorail, Salomon, conseillers, Mmes Valéry, Pecqueur, Laplume, M. Leperchey, conseillers référendaires, Mme Wurtz, avocat général, et Mme Jouanneau, greffier de chambre, la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, de M. Sommer, président, M. Chiron, conseiller référendaire rapporteur, Mme Capitaine, conseiller doyen, Mmes Lacquemant, Nirdé-Dorail, Salomon, conseillers, Mmes Valéry, Pecqueur, Laplume, M. Leperchey, conseillers référendaires, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Rennes, 29 avril 2022), Mme [D] a été engagée en qualité de gommeuse-masseuse le 1er janvier 2007 par la société Zein, devenue Jemaïa. 2. La salariée a été affectée à la suite d'un avenant du 4 février 2020 à un emploi de responsable hygiène des locaux et coordinatrice « qualité des soins ». 3. Après un examen médical le 2 juin 2021 et une étude de poste réalisée le 11 juin 2021, la salariée a été déclarée inapte au poste de gommeuse le 1er juillet suivant, le médecin du travail précisant, aux termes de l'avis : « l'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi ». 4. Contestant cet avis, la salariée a saisi la juridiction prud'homale selon la procédure accélérée au fond le 16 juillet 2021. 5. Elle a été licenciée pour inaptitude le 31 août 2021. Examen du moyen Sur le moyen relevé d'office 6. Après avis donné aux parties conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application de l'article 620, alinéa 2, du même code. Vu les articles L. 4624-7 du code du travail, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2019-738 du 17 juillet 2019, et R. 4624-42 du même code, dans sa rédaction issue du décret n° 2016-1908 du 27 décembre 2016 : 7. Selon le premier de ces textes, si le salarié ou l'employeur conteste les avis, propositions, conclusions écrites ou indications émis par le médecin du travail reposant sur des éléments de nature médicale en application des articles L. 4624-2, L. 4624-3 et L. 4624-4, il peut saisir le conseil de prud'hommes selon la procédure accélérée au fond qui pourra confier toute mesure d'instruction au médecin inspecteur du travail territorialement compétent pour l'éclairer sur les questions de fait relevant de sa compétence. La décision du conseil de prud'hommes se substitue aux avis, propositions, conclusions écrites ou indications contestés. 8. Selon le second, le médecin du travail ne peut constater l'inaptitude médicale du travailleur à son poste de travail que s'il a réalisé au moins un examen médical de l'intéressé, accompagné, le cas échéant, des examens complémentaires, permettant un échange sur les mesures d'aménagement, d'adaptation ou de mutation de poste ou la nécessité de proposer un changement de poste, s'il a réalisé ou fait réaliser une étude de ce poste et une étude des conditions de travail dans l'établissement et indiqué la date à laquelle la fiche d'entreprise a été actualisée et enfin s'il a procédé à un échange, par tout moyen, avec l'employeur. 9. Il en résulte que le juge saisi d'une contestation de l'avis d'inaptitude peut examiner les éléments de toute nature sur lesquels le médecin du travail s'est fondé pour rendre son avis. Il substitue à cet avis sa propre décision après avoir, le cas échéant, ordonné une mesure d'instruction. 10. Pour annuler l'avis du médecin du travail du 1er juillet 2021 déclarant la salariée inapte au poste de gommeuse, l'arrêt retient que compte tenu de la référence erronée au poste occupé portée par le médecin du travail sur son avis d'inaptitude et de l'absence d'élément pertinent dans la réponse qu'il apporte aux interrogations de la salariée en éludant toute référence à la nature de l'emploi occupé ayant fait l'objet de l'étude de poste, l'avis d'inaptitude litigieux est manifestement irrégulier. 11. En statuant ainsi, alors qu'il lui appartenait de substituer à cet avis sa propre décision après avoir, le cas échéant, ordonné une mesure d'instruction, la cour d'appel, qui a méconnu l'étendue de ses pouvoirs, a violé les textes susvisés. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le moyen du pourvoi, la Cour : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 29 avril 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Rennes autrement composée ; Condamne Mme [D] aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq octobre deux mille vingt-trois. | TRAVAIL REGLEMENTATION, SANTE ET SECURITE - Services de santé au travail - Examens médicaux - Conclusion du médecin du travail - Avis sur l'aptitude - Contestation - Office du juge - Etendue - Détermination - Portée | Il résulte des articles L. 4624-7 et R. 4624-42 du code du travail, dans leur rédaction applicable au litige, que le juge saisi d'une contestation de l'avis d'inaptitude peut examiner les éléments de toute nature sur lesquels le médecin du travail s'est fondé pour rendre son avis. Il substitue à cet avis sa propre décision après avoir, le cas échéant, ordonné une mesure d'instruction. Méconnaît l'étendue de ses pouvoirs la cour d'appel qui annule l'avis du médecin du travail déclarant le salarié inapte à son poste, alors qu'il lui appartenait de substituer à cet avis sa propre décision après avoir, le cas échéant, ordonné une mesure d'instruction |
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JURITEXT000048283810 | JURI | texte/juri/judi/JURI/TEXT/00/00/48/28/38/JURITEXT000048283810.xml | ARRET | Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 25 octobre 2023, 21-21.946, Publié au bulletin | 2023-10-25 00:00:00 | Cour de cassation | 52301093 | Cassation partielle | 21-21946 | oui | CHAMBRE_SOCIALE | 2020-10-23 00:00:00 | Cour d'appel de Douai | M. Sommer | SCP Doumic-Seiller | ECLI:FR:CCASS:2023:SO01093 | LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant : SOC. CH9 COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 25 octobre 2023 Cassation partielle M. SOMMER, président Arrêt n° 1093 FS-B Pourvoi n° P 21-21.946 Aide juridictionnelle totale en demande au profit de M. [K]. Admission du bureau d'aide juridictionnelle près la Cour de cassation en date du 17 juin 2021. R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 25 OCTOBRE 2023 M. [L] [K], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° P 21-21.946 contre l'arrêt rendu le 23 octobre 2020 par la cour d'appel de Douai (chambre sociale), dans le litige l'opposant à la société W.R.A, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 2], prise en la personne de M. [G] [S], en qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire de la société Eupec Pipecoatings France, défenderesse à la cassation. Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, trois moyens de cassation. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Flores, conseiller, les observations de la SCP Doumic-Seiller, avocat de M. [K], et l'avis de M. Halem, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 27 septembre 2023 où étaient présents M. Sommer, président, M. Flores, conseiller rapporteur, Mme Monge, conseiller doyen, Mme Cavrois, MM. Sornay, Rouchayrole, Mme Deltort, conseillers, Mmes Ala, Thomas-Davost, Techer, conseillers référendaires, M. Halem, avocat général référendaire, et Mme Piquot, greffier de chambre, la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Douai, 23 octobre 2020), M. [K], ouvrier qualifié, a été mis à disposition de la société Eupec Pipecoatings France, spécialisée dans les gazoducs, par plusieurs entreprises de travail temporaire, entre janvier 2002 et décembre 2015. 2. Le 11 mars 2016, le salarié a saisi la juridiction prud'homale d'une demande en paiement de diverses sommes au titre de l'exécution et de la rupture du contrat de travail. 3. Par jugement d'un tribunal de commerce du 3 mai 2022, une procédure de liquidation judiciaire a été ouverte à l'égard de la société Eupec Pipecoatings France, la société W.R.A étant désignée en qualité de liquidatrice. Cette dernière a été appelée en cause par mémoire déposé le 24 avril 2023 et signifié le 5 mai 2023. Examen des moyens Sur les premier et deuxième moyens 4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Mais sur le troisième moyen Enoncé du moyen 5. Le salarié fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande en paiement de dommages-intérêts pour violation des durées maximales de travail, alors « que la preuve du respect des seuils et plafonds prévus par le droit de l'Union européenne et des durées maximales de travail fixées par le droit interne incombe à l'employeur ; qu'en retenant qu'aucune des pièces produites par le salarié ne permettait de retenir la violation par l'entreprise utilisatrice de la durée maximale du travail, la cour d'appel, qui a fait peser la charge de la preuve sur le salarié, a violé l'article 1315 du code civil, devenu 1353 du même code. » Réponse de la Cour Vu les articles L. 1251-21 du code du travail et 1315, devenu 1353, du code civil : 6. Selon le premier de ces textes, pendant la durée de la mission, l'entreprise utilisatrice est responsable des conditions d'exécution du travail, telles qu'elles sont déterminées par les dispositions légales et conventionnelles applicables au lieu de travail, notamment pour ce qui a trait à la durée du travail. 7. Selon le second, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation. 8. Il en résulte que la preuve du respect des seuils et plafonds prévus par le droit de l'Union européenne et des durées maximales de travail fixées par le droit interne incombe à l'entreprise utilisatrice. 9. Pour débouter le salarié de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour violation des durées maximales quotidiennes de travail, l'arrêt retient que le salarié, qui ne précise pas les dates ni même les périodes des dépassements et laisse le soin à la cour de se reporter sans autre précision aux pièces du dossier, produit aux débats des attestations de collègues de travail. Il relève qu'aucune de ces pièces ne permet de retenir la violation par l'entreprise utilisatrice des durées maximales de travail. Il souligne que la plupart des attestants procèdent par voie d'affirmations générales en indiquant que l'intéressé travaillait dix heures par jour "voire plus" mais ces attestations sont douteuses comme rédigées en des termes similaires sans aucun élément permettant de les corroborer. L'arrêt précise que l'étude des quelques bulletins de paie produits aux débats, comportant fréquemment des heures supplémentaires, ne révèle aucun dépassement des durées maximales de travail. 10. L'arrêt ajoute qu'en ce qui concerne la durée des pauses, la société utilisatrice évoque la forte rémunération allouée au salarié pour compenser les sujétions rencontrées lors des chantiers, mais admet être dans l'impossibilité de justifier du respect de ses obligations en matière de pauses. L'arrêt en conclut que la société ne justifie pas avoir respecté les obligations lui incombant en sa qualité d'entreprise utilisatrice. 11. L'arrêt retient encore que le salarié qui se borne, sans autre explication, à réclamer une somme n'explicite pas sa demande, alors qu'en vertu de l'article 9 du code de procédure civile il incombe aux parties d'alléguer les faits utiles au soutien de leur demande et de les prouver et que s'en tenant à des considérations générales, il ne démontre ni l'étendue ni même l'existence de son préjudice. 12. En statuant ainsi, sans constater que l'entreprise utilisatrice justifiait avoir respecté les durées maximales de travail prévues par le droit interne, la cour d'appel a violé les textes susvisés. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. [K] de sa demande en paiement de dommages-intérêts au titre de la violation des durées maximales de travail, de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile et le condamne aux dépens, l'arrêt rendu le 23 octobre 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ; Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Douai autrement composée ; Condamne la société W.R.A, prise en la personne de M. [G] [S], en sa qualité de liquidatrice judiciaire de la société Eupec Pipecoatings France, aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société W.R.A, prise en la personne de M. [G] [S] ès qualités, à payer à la SCP Doumic-Seiller la somme de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq octobre deux mille vingt-trois. | TRAVAIL REGLEMENTATION, DUREE DU TRAVAIL - Durée maximale - Seuils et plafonds prévus par le droit de l'Union européenne - Preuve - Charge - Détermination - Cas - Contrat de travail temporaire - Entreprise utilisatrice - Portée | TRAVAIL REGLEMENTATION, DUREE DU TRAVAIL - Durée maximale - Durées maximales fixées par le droit interne - Respect - Preuve - Charge - Détermination - Cas - Contrat de travail temporaire - Entreprise utilisatrice - Portée TRAVAIL TEMPORAIRE - Entreprise utilisatrice - Obligations - Protection de la sécurité et de la santé du salarié - Durées maximales de travail - Respect - Preuve - Charge - Détermination - Portée | La preuve du respect des seuils et plafonds prévus par le droit de l'Union européenne et des durées maximales de travail fixées par le droit interne incombe à l'entreprise utilisatrice |
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JURITEXT000048283837 | JURI | texte/juri/judi/JURI/TEXT/00/00/48/28/38/JURITEXT000048283837.xml | ARRET | Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 25 octobre 2023, 21-24.161, Publié au bulletin | 2023-10-25 00:00:00 | Cour de cassation | 52301094 | Cassation | 21-24161 | oui | CHAMBRE_SOCIALE | 2021-10-13 00:00:00 | Conseil de prud'hommes de Paris | M. Sommer | SARL Thouvenin, Coudray et Grévy, SCP Boutet et Hourdeaux | ECLI:FR:CCASS:2023:SO01094 | LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant : SOC. CH9 COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 25 octobre 2023 Cassation M. SOMMER, président Arrêt n° 1094 FS-B Pourvoi n° W 21-24.161 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 25 OCTOBRE 2023 Le Syndicat CFTC intérim, dont le siège est [Adresse 2], agissant en faveur de Mme [U] [Y], domiciliée [Adresse 3], a formé le pourvoi n° W 21-24.161 contre le jugement rendu le 13 octobre 2021 par le conseil de prud'hommes de Paris (activités diverses, chambre 3), dans le litige l'opposant à la société FED finance, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation. Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Flores, conseiller, les observations de la SARL Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat du syndicat CFTC intérim, agissant en faveur de Mme [U], de la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat de la société FED finance, et l'avis de Mme Molina, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 27 septembre 2023 où étaient présents M. Sommer, président, M. Flores, conseiller rapporteur, Mme Monge, conseiller doyen, Mme Cavrois, MM. Sornay, Rouchayrole, Mme Deltort, conseillers, Mmes Ala, Thomas-Davost, Techer, conseillers référendaires, Mme Molina, avocat général référendaire, et Mme Piquot, greffier de chambre, la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon le jugement attaqué (conseil de prud'hommes de Paris, 13 octobre 2021), rendu en dernier ressort, Mme [U], salariée intérimaire de l'entreprise de travail temporaire FED finance, a exécuté des missions d'intérim d'avril à décembre 2018 auprès de la société Allianz vie. 2. L'entreprise utilisatrice a décidé de mettre en place au profit de ses salariés, en application de l'article 1er de la loi n° 2018-1213 du 24 décembre 2018, une prime exceptionnelle de pouvoir d'achat. 3. Le syndicat CFTC intérim, agissant en faveur de la salariée temporaire en application de l'article L. 1251-59 du code du travail, a saisi la juridiction prud'homale d'une demande en paiement par l'entreprise de travail temporaire d'une somme au titre de la prime exceptionnelle pour le pouvoir d'achat et de dommages-intérêts. Examen du moyen Sur le moyen, pris en sa seconde branche Enoncé du moyen 4. Le syndicat fait grief au jugement de le débouter de sa demande en paiement à la salariée temporaire de la prime exceptionnelle de pouvoir d'achat et de sa demande en paiement de dommages-intérêts, alors « qu'en application du principe d'égalité de traitement entre les salariés permanents et les salariés intérimaires, la rémunération perçue par le salarié temporaire ne peut être inférieure à celle que percevrait dans l'entreprise utilisatrice un salarié de qualification équivalente occupant des fonctions similaires ; que la prime de pouvoir d'achat instituée pour l'année 2019 par la loi du 24 décembre 2018 constitue un élément de rémunération relevant du principe d'égalité de traitement ; qu'il s'ensuit que les salariés intérimaires bénéficient de la prime exceptionnelle versée par l'entreprise de travail temporaire dans les mêmes conditions que les salariés permanents de l'entreprise de travail temporaire ; que l'entreprise utilisatrice ne peut pas exclure du bénéfice de cette prime les salariés intérimaires si elle a gratifié ses propres salariés ; qu'une telle décision, discriminatoire, est inopposable aux salariés de l'entreprise de travail temporaire ; qu'en jugeant néanmoins que la salariée intérimaire n'était pas éligible à la prime exceptionnelle de pouvoir d'achat, au motif que la société Allianz vie avait exclu par décision unilatérale les collaborateurs en contrat d'intérim du bénéfice de la prime, le conseil de prud'hommes a statué par des motifs tout aussi erronés qu'inopérants, en violation du principe d'égalité de traitement, ensemble les articles L. 1251-18 et L. 1251-43 du code du travail et l'article 1er de la loi du 24 décembre 2018. » Réponse de la Cour Vu les articles L. 1251-18, alinéa 1er, L. 1251-43 et L. 3221-3 du code du travail et l'article 1er de la loi n° 2018-1213 du 24 décembre 2018 : 5. Selon les deux premiers de ces textes, la rémunération, au sens de l'article L. 3221-3 du code du travail, perçue par le salarié intérimaire, ne peut être inférieure à celle prévue au contrat de mise à disposition, telle que définie au 6° de l'article L. 1251-43 du même code, que percevrait dans l'entreprise utilisatrice, après période d'essai, un salarié de qualification professionnelle équivalente occupant le même poste de travail. 6. Selon le troisième de ces textes, constitue une rémunération le salaire ou traitement ordinaire de base ou minimum et tous les autres avantages et accessoires payés, directement ou indirectement, en espèces ou en nature, par l'employeur au travailleur en raison de l'emploi de ce dernier. 7. Selon le dernier de ces textes, une prime exceptionnelle de pouvoir d'achat, exonérée d'impôt sur le revenu, de toutes les cotisations et contributions sociales d'origine légale ou conventionnelle ainsi que des participations, taxes et contributions prévues aux articles 235 bis, 1599 ter A et 1609 quinvicies du code général des impôts ainsi qu'aux articles L. 6131-1, L. 6331-2, L. 6331-9 et L. 6322-37 du code du travail dans leur rédaction en vigueur à la date de son versement, peut être attribuée par l'employeur à l'ensemble des salariés ou à ceux dont la rémunération est inférieure à un plafond. Cette prime bénéficie aux salariés liés par un contrat de travail au 31 décembre 2018 ou à la date de versement, si celle-ci est antérieure. 8. La prime exceptionnelle de pouvoir d'achat, qui constitue un accessoire payé par l'employeur, entre dans la rémunération du salarié. 9. Pour débouter le syndicat de la demande en paiement de la prime exceptionnelle de pouvoir d'achat et de dommages-intérêts, le jugement retient que la décision unilatérale signée le 23 janvier 2019, énonce que les collaborateurs en contrat d'intérim au 31 décembre 2018 ne sont pas concernés par la mesure et que l'entreprise utilisatrice ne souhaitant pas donner cette prime exceptionnelle de pouvoir d'achat à ses intérimaires l'a stipulé clairement dans sa décision unilatérale. 10. En statuant ainsi, alors que l'article 1er de la loi n° 2018-1213 du 24 décembre 2018 ne déroge pas à l'article L. 1251-18 du code du travail, le conseil de prud'hommes a violé les textes susvisés. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief, la Cour : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 13 octobre 2021, entre les parties, par le conseil de prud'hommes de Paris ; Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ce jugement et les renvoie devant le conseil de prud'hommes de Paris autrement composé ; Condamne la société FED finance aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société FED finance et la condamne à payer au syndicat CFTC intérim la somme de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq octobre deux mille vingt-trois. | TRAVAIL REGLEMENTATION, REMUNERATION | Le salarié temporaire peut prétendre, en application de l'article L. 1251-18 du code du travail, au paiement de la prime exceptionnelle de pouvoir d'achat mise en place dans l'entreprise utilisatrice en application de l'article 1 de la loi n° 2018-2013 du 24 décembre 2018 |
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JURITEXT000048283839 | JURI | texte/juri/judi/JURI/TEXT/00/00/48/28/38/JURITEXT000048283839.xml | ARRET | Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 25 octobre 2023, 22-21.845 22-21.846 22-21.847 22-21.848 22-21.849 22-21.850, Publié au bulletin | 2023-10-25 00:00:00 | Cour de cassation | 52301096 | Cassation | 22-21845 | oui | CHAMBRE_SOCIALE | 2022-09-09 00:00:00 | Conseil de prud'hommes de Lyon | M. Sommer | SARL Thouvenin, Coudray et Grévy, SCP Célice, Texidor, Périer | ECLI:FR:CCASS:2023:SO01096 | LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant : SOC. ZB1 COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 25 octobre 2023 Cassation M. SOMMER, président Arrêt n° 1096 FS-B Pourvois n° Z 22-21.845 A 22-21.846 B 22-21.847 C 22-21.848 D 22-21.849 E 22-21.850 JONCTION R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 25 OCTOBRE 2023 1°/ Mme [D] [E], domiciliée [Adresse 6], 2°/ Mme [A] [M], domiciliée [Adresse 5], 3°/ M. [B] [K], domicilié [Adresse 7], 4°/ M. [I] [P], domicilié [Adresse 4], 5°/ M. [G] [U], domicilié [Adresse 3], 6°/ Mme [N] [H], domiciliée [Adresse 1], ont formé respectivement les pourvois n° Z 22-21.845, A 22-21.846, B 22-21.847, C 22-21.848, D 22-21.849 et E 22-21.850 contre six jugements rendus le 9 septembre 2022 par le conseil de prud'hommes de Lyon (section activités diverses), dans les litiges les opposant à la société Adecco France, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation. Les demandeurs aux pourvois n° Z 22-21.845, A 22-21.846, B 22-21.847, C 22-21.848, D 22-21.849 et E 22-21.850 invoquent, à l'appui de leur recours, un moyen commun de cassation. Les dossiers ont été communiqués au procureur général. Sur le rapport de M. Flores, conseiller, les observations de la SARL Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de Mmes [E], [M], [H] et MM. [K], [P] et [U], de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Adecco France, et l'avis de Mme Molina, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 27 septembre 2023 où étaient présents M. Sommer, président, M. Flores, conseiller rapporteur, Mme Monge, conseiller doyen, Mme Cavrois, MM. Sornay, Rouchayrole, Mme Deltort, conseillers, Mmes Ala, Thomas-Davost, Techer, conseillers référendaires, Mme Molina, avocat général référendaire, et Mme Piquot, greffier de chambre, la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Jonction 1. En raison de leur connexité, les pourvois n° Z 22-21.845 à E 22-21.850 sont joints. Faits et procédure 2. Selon les jugements attaqués (conseil de prud'hommes de Lyon, 9 septembre 2022), rendus en dernier ressort, Mme [E] et cinq autres salariés intérimaires de l'entreprise de travail temporaire Adecco France ont exécuté des missions d'intérim auprès de la société Electricité de France. 3. L'entreprise de travail temporaire a, par décision unilatérale du 28 décembre 2018, mis en place au profit de ses salariés permanents et temporaires, une prime exceptionnelle de pouvoir d'achat en application de l'article 1er de la loi n° 2018-1213 du 24 décembre 2018. 4. L'entreprise utilisatrice a, par décision unilatérale du 29 janvier 2019, décidé de mettre en place cette prime au profit de ses salariés. Cette décision précisait que les salariés éligibles étaient ceux liés à la société par un contrat de travail au 31 décembre 2018. 5. Les salariés ont saisi la juridiction prud'homale de demandes tendant notamment au paiement par l'entreprise de travail temporaire de la prime exceptionnelle de pouvoir d'achat mise en place par l'entreprise utilisatrice. Examen du moyen Enoncé du moyen 6. Les salariés font grief aux jugements de les débouter de leurs demandes au titre de la prime PEPA et à titre de dommages-intérêts pour préjudice de retard, exécution déloyale du contrat de travail et discrimination, alors : « 1° / qu'en application du principe d'égalité de traitement entre les salariés permanents et les salariés intérimaires, la rémunération perçue par le salarié temporaire ne peut être inférieure à celle que percevrait dans l'entreprise utilisatrice un salarié de qualification équivalente occupant des fonctions similaires ; que la prime de pouvoir d'achat instituée pour l'année 2019 par la loi du 24 décembre 2018 constitue un élément de rémunération relevant du principe d'égalité de traitement ; qu'il s'ensuit que les salariés intérimaires bénéficient de la prime exceptionnelle versée par l'entreprise utilisatrice dans les mêmes conditions que les salariés permanents de l'entreprise utilisatrice ; que le conseil de prud'hommes a constaté que la société EDF avait mis en place la prime exceptionnelle de pouvoir d'achat par décision unilatérale du 29 janvier 2019 ; qu'en disant les exposants inéligibles au versement de cette prime PEPA au motif que la société EDF "a exclu le personnel intérimaire de [son bénéfice", quand une telle exclusion, contraire au principe d'égalité de traitement, ne pouvait être opposée aux salariées intérimaires, le conseil de prud'hommes a violé ledit principe, ensemble les articles L. 1251-18 et L. 1251-43 du code du travail et l'article 1er de la loi du 24 décembre 2018 ; 2°/ qu'en application du principe d'égalité de traitement entre les salariés permanents et les salariés intérimaires, la rémunération perçue par le salarié temporaire ne peut être inférieure à celle que percevrait dans l'entreprise utilisatrice un salarié de qualification équivalente occupant des fonctions similaires ; que la prime de pouvoir d'achat instituée pour l'année 2019 par la loi du 24 décembre 2018 constitue un élément de rémunération relevant du principe d'égalité de traitement ; qu'il s'ensuit que les salariés intérimaires bénéficient de la prime exceptionnelle versée par l'entreprise utilisatrice dans les mêmes conditions que les salariés permanents de l'entreprise utilisatrice, nonobstant la circonstance que l'entreprise de travail temporaire ait également octroyé cette prime à ses salariés intérimaires ; qu'en disant les exposants inéligibles au versement de la prime PEPA dans l'entreprise utilisatrice au motif inopérant qu'elles avaient bénéficié du versement d'une prime PEPA au sein du groupe Adecco, leur employeur, le conseil de prud'hommes a violé le principe d'égalité de traitement, ensemble les articles L. 1251-18 et L. 1251-43 du code du travail et l'article 1er de la loi du 24 décembre 2018. » Réponse de la Cour Vu les articles L. 1251-18, alinéa 1er, L. 1251-43 et L. 3221-3 du code du travail et l'article 1er de la loi n° 2018-1213 du 24 décembre 2018 : 7. Selon les deux premiers de ces textes, la rémunération, au sens de l'article L. 3221-3 du code du travail, perçue par le salarié intérimaire, ne peut être inférieure à celle prévue au contrat de mise à disposition, telle que définie au 6° de l'article L. 1251-43 du même code, que percevrait dans l'entreprise utilisatrice, après période d'essai, un salarié de qualification professionnelle équivalente occupant le même poste de travail. 8. Selon le troisième de ces textes, constitue une rémunération, le salaire ou traitement ordinaire de base ou minimum et tous les autres avantages et accessoires payés, directement ou indirectement, en espèces ou en nature, par l'employeur au travailleur en raison de l'emploi de ce dernier. 9. Selon le dernier de ces textes, une prime exceptionnelle de pouvoir d'achat, exonérée d'impôt sur le revenu, de toutes les cotisations et contributions sociales d'origine légale ou conventionnelle ainsi que des participations, taxes et contributions prévues aux articles 235 bis, 1599 ter A et 1609 quinviciès du code général des impôts ainsi qu'aux articles L. 6131-1, L. 6331-2, L. 6331-9 et L. 6322-37 du code du travail dans leur rédaction en vigueur à la date de son versement, peut être attribuée par l'employeur à l'ensemble des salariés ou à ceux dont la rémunération est inférieure à un plafond. Cette prime bénéficie aux salariés liés par un contrat de travail au 31 décembre 2018 ou à la date de versement, si celle-ci est antérieure. Elle ne peut se substituer à des augmentations de rémunération ni à des primes prévues par un accord salarial, le contrat de travail ou les usages en vigueur dans l'entreprise. Elle ne peut non plus se substituer à aucun des éléments de rémunération, au sens de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale, versés par l'employeur ou qui deviennent obligatoires en vertu de règles légales, contractuelles ou d'usage. 10. La prime exceptionnelle de pouvoir d'achat, qui constitue un accessoire payé par l'employeur, entre dans la rémunération du salarié. 11. Pour débouter les salariés de leur demande en paiement de la prime exceptionnelle de pouvoir d'achat versée par l'entreprise utilisatrice, les jugements retiennent que les salariés temporaires n'étaient pas éligibles à la prime mise en place au sein de l'entreprise utilisatrice et qu'ils ont perçu cette prime exceptionnelle de pouvoir d'achat telle qu'elle a été instituée dans l'entreprise de travail temporaire. 12. En statuant ainsi, alors que l'article 1er de la loi n° 2018-1213 du 24 décembre 2018 ne déroge pas à l'article L. 1251-18 du code du travail et que le règlement de la prime exceptionnelle de pouvoir d'achat en exécution de son engagement unilatéral ne dispensait pas l'entreprise de travail temporaire du paiement de celle instituée au sein de l'entreprise utilisatrice au profit des salariés permanents de cette dernière, à laquelle elle ne pouvait se substituer, le conseil de prud'hommes a violé les textes susvisés. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE ET ANNULE, en toutes leurs dispositions, les jugements rendus le 9 septembre 2022, entre les parties, par le conseil de prud'hommes de Lyon ; Remet les affaires et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ces jugements et les renvoie devant le conseil de prud'hommes de Lyon autrement composé ; Condamne la société Adecco France aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Adecco France et la condamne à payer à Mmes [E], [M], [H] et MM. [K], [P] et [U] la somme globale de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite des jugements cassés ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq octobre deux mille vingt-trois. | TRAVAIL REGLEMENTATION, REMUNERATION | Le salarié temporaire peut prétendre, en application de l'article L. 1251-18 du code du travail, au paiement de la prime exceptionnelle de pouvoir d'achat mise en place dans l'entreprise utilisatrice en application de l'article 1 de la loi n° 2018-2013 du 24 décembre 2018. Le règlement de la prime exceptionnelle de pouvoir d'achat versée en exécution de son engagement unilatéral au profit de ses salariés permanents et temporaires, ne dispense pas l'entreprise de travail temporaire du paiement, en application de l'article L. 1251-18 du code du travail, de celle instituée au sein de l'entreprise utilisatrice au profit des salariés permanents de cette dernière, à laquelle elle ne pouvait se substituer |
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JURITEXT000048283841 | JURI | texte/juri/judi/JURI/TEXT/00/00/48/28/38/JURITEXT000048283841.xml | ARRET | Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 25 octobre 2023, 21-25.320, Publié au bulletin | 2023-10-25 00:00:00 | Cour de cassation | 52301099 | Cassation | 21-25320 | oui | CHAMBRE_SOCIALE | 2020-10-29 00:00:00 | Cour d'appel de Montpellier | M. Sommer | SARL Corlay | ECLI:FR:CCASS:2023:SO01099 | LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant : SOC. ZB1 COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 25 octobre 2023 Cassation M. SOMMER, président Arrêt n° 1099 FS-B Pourvoi n° F 21-25.320 Aide juridictionnelle totale en demande au profit de Mme [W]. Admission du bureau d'aide juridictionnelle près la Cour de cassation en date du 16 septembre 2021. R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 25 OCTOBRE 2023 Mme [S] [W], domiciliée [Adresse 1], a formé le pourvoi n° F 21-25.320 contre l'arrêt rendu le 29 octobre 2020 par la cour d'appel de Montpellier (2e chambre civile), dans le litige l'opposant à la société Kegane, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Flores, conseiller, les observations de la SARL Corlay, avocat de Mme [W], et l'avis de Mme Molina, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 27 septembre 2023 où étaient présents M. Sommer, président, M. Flores, conseiller rapporteur, Mme Monge, conseiller doyen, Mme Cavrois, MM. Sornay, Rouchayrole, Mme Deltort, conseillers, Mmes Ala, Thomas-Davost, Techer, conseillers référendaires, Mme Molina, avocat général référendaire, et Mme Piquot, greffier de chambre, la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 29 octobre 2020), par jugement du 27 août 2018, le conseil de prud'hommes de Narbonne a notamment ordonné la requalification du contrat de travail à durée déterminée à temps partiel conclu entre Mme [W] et la société Kegane en contrat de travail à durée indéterminée à temps complet et condamné l'employeur au paiement de diverses sommes à titre d'indemnité de requalification, de rappel de salaire à temps complet, de congés payés afférents et de dommages-intérêts. 2. L'employeur a interjeté appel de cette décision. 3. Par acte du 8 février 2019, la salariée a fait délivrer à l'employeur un commandement d'avoir à payer la somme de 14 958,59 euros. 4. La société a saisi un juge de l'exécution pour contester ce commandement de payer. Examen du moyen Sur le moyen, pris en sa première branche Enoncé du moyen 5. La salariée fait grief à l'arrêt de prononcer l'annulation du commandement aux fins de saisie-vente, alors « que lorsqu'un conseil de prud'hommes est saisi d'une demande de requalification d'un contrat de travail à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, en application de l'article L. 1245-2, sa décision est exécutoire de droit à titre provisoire ; que c'est l'ensemble des chefs de la décision relatifs à la requalification du contrat de travail qui se trouvent bénéficier de l'exécution provisoire de droit ; qu'en considérant, pour calculer les salaires bénéficiant de l'exécution provisoire, à la suite de la requalification du contrat de travail à durée déterminée à temps partiel de Madame [W] en contrat à durée indéterminée à temps complet, que s'agissant de l'exécution forcée du jugement du conseil de prud'hommes de Narbonne du 27 août 2018 ayant statué sur la requalification du contrat de travail et condamné la société Kegane au paiement de diverses sommes en conséquence de cette requalification "l'exécution provisoire de droit ne s'exerce que dans la limite maximum de neuf mois de salaire (?) pour le paiement des sommes visées au 2° de l'article R. 1454-14", la cour d'appel a violé l'article R. 1245-1 du code du travail ensemble l'article R. 1454-28, alinéa 2, du code du travail par fausse application. » Réponse de la Cour Vu l'article 514 du code de procédure civile, dans sa rédaction antérieure au décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019, et l'article R. 1245-1 du code du travail : 6. Selon le premier de ces textes, l'exécution provisoire ne peut pas être poursuivie sans avoir été ordonnée si ce n'est pour les décisions qui en bénéficient de plein droit. 7. Aux termes du second, lorsqu'un conseil de prud'hommes est saisi d'une demande de requalification d'un contrat de travail à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, en application de l'article L. 1245-2 du code du travail, sa décision est exécutoire de droit à titre provisoire. 8. Il en résulte que le jugement d'un conseil de prud'hommes qui ordonne la requalification d'un contrat de travail à durée déterminée en contrat à durée indéterminée bénéficie de plein droit de l'exécution provisoire dans toutes ses dispositions. 9. Pour prononcer l'annulation du commandement aux fins de saisie-vente, l'arrêt retient que si la décision qui prononce la requalification d'un contrat de travail à durée déterminée en contrat à durée indéterminée est exécutoire de plein droit, en revanche l'exécution provisoire de droit ne s'exerce que dans la limite maximum de neuf mois de salaire calculés sur la moyenne des trois derniers mois de salaire pour le paiement des sommes visées au 2° de l'article R. 1454-14 du code du travail. 10. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief, la Cour : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 29 octobre 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse ; Condamne la société Kegane aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Kegane à payer à la SARL Corlay la somme de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq octobre deux mille vingt-trois. | CONTRAT DE TRAVAIL, DUREE DETERMINEE - Qualification donnée au contrat - Demande de requalification - Requalification par le juge - Effets - Exécution provisoire de la décision dans toutes ses dispositions - Portée | Le jugement d'un conseil de prud'hommes qui ordonne la requalification d'un contrat de travail à durée déterminée en contrat à durée indéterminée bénéficie de plein droit de l'exécution provisoire dans toutes ses dispositions |
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JURITEXT000048283846 | JURI | texte/juri/judi/JURI/TEXT/00/00/48/28/38/JURITEXT000048283846.xml | ARRET | Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 25 octobre 2023, 20-22.800, Publié au bulletin | 2023-10-25 00:00:00 | Cour de cassation | 52302001 | Rejet | 20-22800 | oui | CHAMBRE_SOCIALE | 2020-10-14 00:00:00 | Cour d'appel de Paris | M. Sommer | SARL Thouvenin, Coudray et Grévy, SCP Bouzidi et Bouhanna | ECLI:FR:CCASS:2023:SO02001 | LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant : SOC. HP COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 25 octobre 2023 Rejet M. SOMMER, président Arrêt n° 2001 FS-B Pourvoi n° W 20-22.800 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 25 OCTOBRE 2023 M. [F] [W], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° W 20-22.800 contre l'arrêt rendu le 14 octobre 2020 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 6), dans le litige l'opposant à la société Auxiliaire de contrôle "Auxicontrol", société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation. Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Techer, conseiller référendaire, les observations de la SARL Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de M. [W], de la SCP Bouzidi et Bouhanna, avocat de la société Auxiliaire de contrôle "Auxicontrol", et l'avis de Mme Molina, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 27 septembre 2023 où étaient présents M. Sommer, président, Mme Techer, conseiller référendaire rapporteur, Mme Monge conseiller doyen, Mme Cavrois, MM. Sornay, Rouchayrole, Flores, Mme Deltort, conseillers, Mmes Ala, Thomas-Davost, conseillers référendaires, Mme Molina, avocat général référendaire, et Mme Piquot, greffier de chambre, la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 14 octobre 2020), M. [W] a été engagé en qualité d'assistant de délégation, emploi ultérieurement intitulé inspecteur régional, à compter du 20 septembre 1999, par la société Auxiga. Le 25 avril 2001, les parties ont conclu une convention de forfait en jours. Le contrat de travail a été transféré à la société Auxiliaire de contrôle à compter du 1er janvier 2009. 2. Le salarié a saisi la juridiction prud'homale le 1er août 2017 à l'effet d'obtenir l'annulation de sa convention de forfait en jours et le paiement de diverses sommes au titre de l'exécution de son contrat de travail. Examen des moyens Sur le premier moyen Enoncé du moyen 3. Le salarié fait grief à l'arrêt de fixer à une certaine somme son salaire moyen mensuel pour l'année 2019, de limiter à une certaine somme celle allouée au titre des heures supplémentaires, congés payés afférents compris, et de confirmer le jugement en ce qu'il l'a débouté de ses demandes en paiement de rappel de salaire au titre de la contrepartie obligatoire en repos et de dommages-intérêts au titre de l'entrave à la vie privée et d'un manquement à l'obligation de sécurité, alors : « 1°/ que le temps de trajet pour se rendre d'un lieu de travail à un autre lieu de travail constitue un temps de travail effectif ; que pour limiter le rappel de salaire pour heures supplémentaires et rejeter les demandes subséquentes, après avoir rappelé que le salarié faisait valoir que le volume des heures de travail administratives accomplies à domicile avait une incidence sur la qualification des premiers et derniers trajets en travail effectif, en ce que ce volume conférait à son domicile un usage de bureau, transformant dès lors en trajet d'un lieu de travail vers un autre, le trajet depuis ce lieu ou vers celui-ci, la cour d'appel a retenu que pour autant, le salarié ne caractérisait nullement l'importance effective des tâches administratives accomplies à domicile, en alléguant dans ses dernières écritures qu'elles seraient de dix heures par semaine, alors même qu'il les évaluait à deux heures trente en moyenne dans ses pièces et que cette activité, en sa qualité de travailleur itinérant, ne conférait pas la qualité de lieu de travail à son domicile, quand bien même son usage ponctuel justifiait que l'employeur lui allouait une indemnité mensuelle à ce titre ; qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ces constatations que les parties étaient convenues que le salarié effectuerait, aux frais de l'employeur, un travail administratif à son domicile, ce dont elle devait déduire que le temps de trajet entre le domicile du salarié, lieu où ce dernier devait exercer une partie de ses fonctions, et les locaux des clients de l'employeur constituait un temps de travail effectif et devait être rémunéré comme tel, la cour d'appel a violé l'article L. 3121-1 du code du travail dans sa rédaction alors applicable ; 2°/ que les juges sont tenus de ne pas dénaturer les conclusions qui les saisissent ; que pour dire que le salarié ne caractérisait nullement l'importance effective des tâches administratives accomplies à domicile, l'arrêt a retenu que le salarié alléguait dans ses dernières écritures que les tâches administratives accomplies à domicile seraient de "dix heures par semaine", alors même qu'il les évaluait à deux heures trente en moyenne dans ses pièces ; qu'en statuant ainsi, alors que dans ses écritures, corroborées par ses pièces, le salarié soutenait que toutes les tâches administratives effectuées au domicile, avant de partir ou en rentrant, représentaient plus de "dix heures de travail par mois", la cour d'appel, qui a dénaturé les termes clairs et précis des conclusions du salarié, a violé l'article 4 du code de procédure civile ; 3°/ que la durée du travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles ; qu'après avoir relevé que le véhicule de service du salarié disposait d'un dispositif de géolocalisation, que le salarié recevait un planning mensuel, qu'il devait impérativement soumettre à l'accord de son supérieur la réalisation d'heures supplémentaires, tout décalage, anticipation ou annulation d'un contrôle, qu'il recevait également un planning hebdomadaire indiquant les contrôles à effectuer et les dates des contrôles et que si l'employeur soutenait que le salarié jouissait d'une liberté d'organisation de ses journées dès lors qu'il déterminait le choix de son itinéraire, l'ordre et l'heure de ses interventions, cette liberté était en réalité limitée puisque l'employeur pouvait pointer des anomalies, la cour d'appel a retenu que pour autant, ce contrôle quant au respect des plannings, à l'optimisation des temps de trajets et au respect de la note de service relative aux soirées étapes ne suffisaient pas à établir que le salarié se tenait à la disposition de l'employeur durant ses premiers et derniers trajets de la journée, dès lors qu'il prenait l'initiative de son circuit quotidien, les contrôles de l'employeur n'étant que rétrospectifs et se justifiant pleinement dès lors que ce dernier avait mis en place un dispositif d'indemnisation des trajets anormaux ouvrant droit à indemnisation au delà de quarante-cinq minutes, qu'en outre, en tant que travailleur itinérant le salarié restait libre de vaquer à ses obligations personnelles avant son premier rendez-vous et après le dernier et il ne saurait davantage arguer de l'existence de soirées étapes imposées par l'employeur au delà d'une certaine distance, dès lors qu'il pouvait les choisir et que cette prescription n'avait nullement pour objet ni pour conséquence de le maintenir à disposition de l'employeur mais d'éviter de trop longs trajets et qu'enfin, un interrupteur "vie privée" sur le véhicule de service lui permettait de désactiver la géolocalisation ; qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait relevé que le salarié devait utiliser, pour faire le trajet entre les locaux des clients de son employeur et son domicile, un véhicule de service doté d'un dispositif de géolocalisation, ce dont elle devait déduire que le temps de trajet pour se rendre aux locaux des clients constituait un temps effectif devant être rémunéré comme tel, la cour d'appel a violé l'article L. 3121-1 du code du travail dans sa rédaction alors applicable, interprété à la lumière de l'article 2 de la directive n° 2003/88/CE du 4 novembre 2003. » Réponse de la Cour 4. Il résulte des articles L. 3121-1 et L. 3121-4, ce dernier dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, interprétés à la lumière de la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail, que lorsque les temps de déplacements accomplis par un salarié itinérant entre son domicile et les sites des premier et dernier clients répondent à la définition du temps de travail effectif telle qu'elle est fixée par l'article L. 3121-1 du code du travail, ces temps ne relèvent pas du champ d'application de l'article L. 3121-4 du même code. 5. En premier lieu, après avoir relevé que le nombre des heures supplémentaires que le salarié estimait avoir accomplies résultait de la prise en considération dans son temps de travail effectif des temps de trajet entre le domicile et les sites des premier et dernier clients, la cour d'appel a d'abord constaté que le véhicule de service utilisé par l'intéressé disposait d'un dispositif de géolocalisation, qu'il recevait un planning mensuel, qu'il devait impérativement soumettre à l'accord de son supérieur la réalisation d'heures supplémentaires, tout décalage, anticipation ou annulation d'un contrôle, et qu'il recevait également un planning hebdomadaire indiquant les contrôles à effectuer et les dates de ces derniers. 6. Elle a retenu ensuite que le contrôle quant au respect des plannings, à l'optimisation des temps de trajets et au respect de la note de service relative aux soirées étapes ne suffisait pas à établir que le salarié se tenait à la disposition de l'employeur durant ses premiers et derniers trajets de la journée, dès lors qu'il prenait l'initiative de son circuit quotidien, les contrôles de l'employeur n'étant que rétrospectifs et se justifiant pleinement dès lors que l'employeur avait mis en place un dispositif d'indemnisation des trajets anormaux ouvrant droit à indemnisation au-delà de quarante-cinq minutes. 7. Elle a ajouté qu'en tant que travailleur itinérant, le salarié restait libre de vaquer à des occupations personnelles avant son premier rendez-vous et après le dernier et qu'il ne saurait davantage arguer de l'existence de soirées étapes imposées par l'employeur au-delà d'une certaine distance, dès lors qu'il pouvait les choisir et que cette prescription n'avait nullement pour objet ni pour conséquence de le maintenir à disposition de l'employeur mais d'éviter de trop longs trajets. 8. Elle a en outre relevé qu'un interrupteur « vie privée » sur le véhicule de service lui permettait de désactiver la géolocalisation. 9. En second lieu, ayant souverainement retenu que le salarié ne caractérisait pas l'importance effective des tâches administratives accomplies à domicile, elle a pu en déduire que l'accomplissement de ces tâches ne conférait pas audit domicile la qualité de lieu de travail, quand bien même son usage ponctuel justifiait que l'employeur lui allouât une indemnité mensuelle. 10. De ces constatations et énonciations, la cour d'appel a déduit à bon droit que les temps de trajet entre le domicile du salarié et les sites des premier et dernier clients ne constituaient pas du temps de travail effectif. 11. Le moyen, qui, pris en sa deuxième branche, est inopérant, n'est donc pas fondé. Sur le second moyen Enoncé du moyen 12. Le salarié fait grief à l'arrêt de confirmer le jugement en ce qu'il l'a débouté de sa demande en paiement d'un complément d'indemnité au titre des temps de trajets anormaux, alors « qu'il résulte des articles L. 3121-4, L. 3121-7 et L. 3121-8 du code du travail, dans leur rédaction résultant de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, que le temps de trajet pour se rendre du domicile au lieu de travail n'est pas un temps de travail effectif ; que lorsqu'il excède le temps nécessaire à un travailleur pour se rendre de son domicile à son lieu de travail habituel, il doit faire l'objet d'une contrepartie soit sous forme de repos, soit sous forme financière ; qu'à défaut d'accord collectif, la contrepartie est déterminée par l'employeur après consultation du comité d'entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel, s'ils existent ; que pour débouter le salarié de sa demande d'un complément d'indemnité au titre des temps de trajets anormaux, la cour d'appel a retenu que si le salarié était fondé à revendiquer un seuil d'anormalité de ses trajets au delà de trente minutes et, partant, une contrepartie pour quatre cent trente-et-une heures de temps anormal de trajet accomplies entre 2016 et 2019, en revanche il n'était pas fondé à se référer à la compensation fixée par l'employeur dans sa note de service 001-16 du 7 janvier 2016, soit un taux horaire normal, pour évaluer le montant de sa compensation et que le juge ne pouvait, sans violer les dispositions de l'article L. 3121-4 du code du travail, fixer de compensation à un niveau équivalent à une rémunération normale dès lors que "le temps de trajet pour se rendre du domicile au lieu de travail n'est pas un temps de travail effectif" ; qu'en statuant ainsi, après avoir relevé que l'employeur avait décidé le 7 janvier 2016, par voie d'engagement unilatéral, d'appliquer au temps anormal de trajet la rémunération du temps de travail effectif, la cour d'appel a violé les articles susvisés, ensemble l'article 1134 ancien, devenu 1104 du code civil et les règles relatives à la dénonciation des engagements unilatéraux. » Réponse de la Cour 13. Lorsque le temps de déplacement professionnel pour se rendre sur le lieu d'exécution du contrat de travail dépasse le temps normal de trajet entre le domicile et le lieu habituel de travail, il appartient au juge, en l'absence d'accord collectif ou d'engagement unilatéral pris conformément aux textes qui le prévoient, de déterminer la contrepartie due au salarié. Il ne peut pour ce faire assimiler le temps de trajet entre le domicile et le lieu de travail à un temps de travail effectif. 14. Après avoir retenu, par une appréciation souveraine des éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, que l'engagement unilatéral de l'employeur en date du 7 janvier 2016 n'avait pas été pris après consultation des délégués du personnel et qu'il n'était dès lors pas conforme aux prescriptions légales le prévoyant, la cour d'appel a, à bon droit, déterminé la contrepartie due au salarié sans assimiler le taux horaire à celui du temps de travail effectif. 15. Le moyen, qui est inopérant pour la période antérieure au 7 janvier 2016, n'est donc pas fondé. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne M. [W] aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq octobre deux mille vingt-trois. | TRAVAIL REGLEMENTATION, DUREE DU TRAVAIL - Travail effectif - Temps assimilé à du travail effectif - Exclusion - Cas - Travailleur n'ayant pas de lieu de travail fixe ou habituel - Déplacements entre le domicile et les sites du premier et du dernier clients - Conditions - Temps de déplacement ne répondant pas à la définition du temps de travail effectif - Office du juge - Détermination - Portée | TRAVAIL REGLEMENTATION, DUREE DU TRAVAIL - Travail effectif - Temps assimilé à du travail effectif - Cas - Travailleur n'ayant pas de lieu de travail fixe ou habituel - Déplacements entre le domicile et les sites des premier et dernier clients - Conditions - Temps de déplacement répondant à la définition du temps de travail effectif - Office du juge - Détermination - Portée | Il résulte des articles L. 3121-1 et L. 3121-4 du code du travail, ce dernier dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, interprétés à la lumière de la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail, que lorsque les temps de déplacements accomplis par un salarié itinérant entre son domicile et les sites des premier et dernier clients répondent à la définition du temps de travail effectif telle qu'elle est fixée par l'article L. 3121-1 du code du travail, ces temps ne relèvent pas du champ d'application de l'article L. 3121-4 du même code. Doit être approuvée la cour d'appel qui, ayant retenu, en premier lieu, que le contrôle de l'employeur quant au respect des plannings, à l'optimisation des temps de trajets et au respect de la note de service relative aux soirées étapes ne suffisait pas à établir que le salarié se tenait à la disposition de l'employeur durant ses premiers et derniers trajets de la journée, dès lors qu'il prenait l'initiative de son circuit quotidien, les contrôles de l'employeur n'étant que rétrospectifs et se justifiant par la mise en place d'un dispositif d'indemnisation des trajets anormaux, que le salarié pouvait choisir les soirées étapes au-delà d'une certaine distance et que cette prescription n'avait pas pour objet ni pour conséquence de le maintenir à disposition de l'employeur mais d'éviter de trop longs trajets, et qu'un interrupteur « vie privée » sur le véhicule de service lui permettait de désactiver la géolocalisation, en second lieu, que le salarié ne caractérisait pas l'importance effective des tâches administratives accomplies à domicile, ce dont elle a pu en déduire que l'accomplissement de ces tâches ne conférait pas audit domicile la qualité de lieu de travail, quand bien même son usage ponctuel justifiait que l'employeur lui allouât une indemnité mensuelle, en a déduit que les temps de trajet entre le domicile du salarié et les sites des premier et dernier clients ne constituaient pas du temps de travail effectif |
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JURITEXT000048283851 | JURI | texte/juri/judi/JURI/TEXT/00/00/48/28/38/JURITEXT000048283851.xml | ARRET | Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 25 octobre 2023, 23-14.147, Publié au bulletin | 2023-10-25 00:00:00 | Cour de cassation | 52302090 | QPC - Renvoi au Conseil constitutionnel | 23-14147 | oui | CHAMBRE_SOCIALE | 2022-10-20 00:00:00 | Cour d'appel de Versailles | M. Sommer | SARL Cabinet Briard, SCP Célice, Texidor, Périer | ECLI:FR:CCASS:2023:SO02090 | LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant : SOC. COUR DE CASSATION CH9 ______________________ QUESTION PRIORITAIRE de CONSTITUTIONNALITÉ ______________________ Audience publique du 25 octobre 2023 RENVOI M. SOMMER, président Arrêt n° 2090 FS-B Pourvoi n° C 23-14.147 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 25 OCTOBRE 2023 Par mémoire spécial présenté le 31 juillet 2023, 1°/ le comité social et économique Procter & Gamble [Localité 6], dont le siège est [Adresse 2], venant aux droits de la délégation du personnel du comité d'entreprise de la société Procter & Gamble, 2°/ le syndicat Force ouvrière P&G [Localité 6], 3°/ le syndicat CGT P&G [Localité 6], ayant tous deux leur siège [Adresse 1]. ont formulé une question prioritaire de constitutionnalité à l'occasion du pourvoi n° C 23-14.147 qu'ils ont formé contre l'arrêt rendu le 20 octobre 2022 par la cour d'appel de Versailles (6e chambre), dans une instance les opposant : 1°/ au syndicat CFDT chimie énergie Picardie, dont le siège est [Adresse 4], 2°/ à la société Ondal France, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 3], 3°/ au CSE Procter & Gamble Holding France, venant aux droits de la délégation du personnel du comité d'entreprise de la société Procter & Gamble Holding France, 4°/ au CSE Procter & Gamble France, venant aux droits de la délégation du personnel du comité d'entreprise de la société Procter & Gamble France, 5°/ au CSE Procter & Gamble Pharmaceuticals France, venant aux droits de la délégation du personnel du comité d'entreprise de la société Procter & Gamble Pharmaceuticals France, 6°/ au CSE Procter & Gamble [Localité 7], venant aux droits de la délégation du personnel du comité d'entreprise de la société Procter & Gamble [Localité 7], 7°/ à la société Procter & Gamble Holding France, société par actions simplifiée, 8°/ à la société Procter & Gamble France, société par actions simplifiée unipersonnelle, 9°/ à la société Procter & Gamble [Localité 6], société par actions simplifiée unipersonnelle, 10°/ à la société Procter & Gamble [Localité 7], société par actions simplifiée, ayant tous les huit leur siège [Adresse 2], 11°/ à la société Procter & Gamble International Operations, société de droit étranger dont le siège est [Adresse 5], Suisse, 12°/ à la société P&G Health France, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 2], venant aux droits et obligations de la société Procter & Gamble Pharmaceuticals France. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Sommé, conseiller, les observations de la SARL Cabinet Briard, avocat du CSE Procter & Gamble [Localité 6], du syndicat Force ouvrière P&G [Localité 6], du syndicat CGT P&G [Localité 6], de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Ondal France, ainsi que des sociétés Procter & Gamble Holding France, Procter & Gamble France, Procter & Gamble [Localité 6], Procter & Gamble [Localité 7], Procter & Gamble International Operations, et P&G Health France, et l'avis de Mme Roques, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 18 octobre 2023 où étaient présents M. Sommer, président, Mme Sommé, conseiller rapporteur, M. Huglo, conseiller doyen, M. Rinuy, Mmes Ott, Bouvier, Bérard, conseillers, Mmes Chamley-Coulet, Lanoue, Ollivier, Arsac, conseillers référendaires, Mme Roques, avocat général référendaire, et Mme Dumont, greffier de chambre, la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Le 29 décembre 2014, les sociétés Procter & Gamble (P&G) [Localité 6], Procter & Gamble (P&G) [Localité 7], Ondal France, Procter & Gamble (P&G) France, Procter & Gamble (P&G) Pharmaceuticals France et Procter & Gamble (P&G) Holding France ont conclu un accord de participation de groupe régissant la participation des salariés aux résultats de l'entreprise. 2. Soutenant que les clauses de rémunération des contrats de façonnage et de commissionnaire conclus par ces sociétés avec la société de droit suisse Procter & Gamble International Operations (P&G IO) permettaient à cette dernière de fixer de manière arbitraire les bénéfices revenant aux sociétés de façonnage et de distribution et que ces clauses, qui prédéterminaient le bénéfice de ces sociétés, avaient pour conséquence de réduire l'assiette de la participation des salariés aux résultats de l'entreprise, la délégation du personnel du comité d'entreprise de la société P&G [Localité 6], le syndicat CFDT Chimie énergie Picardie (le syndicat CFDT), le syndicat FO P&G [Localité 6] (le syndicat FO) et le syndicat CGT P&G [Localité 6] (le syndicat CGT) ont, par actes des 28 novembre 2017 et 10 octobre 2018, fait assigner les sociétés P&G Holding France, P&G France, P&G Pharmaceuticals France, P&G [Localité 6], P&G [Localité 7], P&G IO et Ondal France devant le tribunal judiciaire, aux fins notamment de constater que les attestations du commissaire aux comptes établies en vue du calcul de la réserve spéciale de participation devaient être frappées de nullité ou, en toute hypothèse, ne présentaient pas le caractère de sincérité nécessaire à leur validité en application de l'article L. 3326-1 du code du travail, déclarer nulles et de nul effet les clauses de rémunération des contrats conclus entre la société P&G IO et les sociétés françaises, à titre subsidiaire, dire que ces clauses étaient inopposables aux salariés dans le cadre du calcul de la participation et désigner un expert afin de déterminer le montant de la participation due aux salariés pour les exercices clos à compter du 1er juillet 2012. Enoncé de la question prioritaire de constitutionnalité 3. A l'occasion du pourvoi qu'ils ont formé contre l'arrêt rendu le 20 octobre 2022 par la cour d'appel de Versailles, ayant déclaré irrecevable leur action sur le fondement de l'article L. 3326-1 du code du travail, le comité social et économique P&G [Localité 6] venant aux droits du comité d'entreprise, le syndicat FO et le syndicat CGT ont, par mémoire distinct et motivé, demandé de renvoyer au Conseil constitutionnel une question prioritaire de constitutionnalité ainsi rédigée : « L'article L. 3326-1 du code du travail méconnaît-il les droits et libertés que la Constitution garantit, notamment les articles 4 et 16 de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen de 1789 et les articles 6 et 8 du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, en ce qu'il interdit de remettre en cause le bénéfice net d'une entreprise après l'attestation du commissaire aux comptes ou de l'inspecteur des impôts, même en cas de fraude, et qu'il prive ainsi les salariés ou leurs représentants de toute voie de recours permettant de contester utilement le calcul de la réserve de participation et qu'il conduit au surplus à neutraliser les accords passés au sein de l'entreprise dans le cadre de la détermination de la réserve de participation ? » Examen de la question prioritaire de constitutionnalité 4. La disposition contestée, telle qu'interprétée par la jurisprudence constante de la Cour de cassation (Soc., 11 mars 2009, pourvoi n° 08-41.140, Bull. 2009, V, n° 80 ; Soc., 8 décembre 2010, pourvoi n° 09-65.810, Bull. 2010, V, n° 288 ; Soc., 10 janvier 2017, pourvoi n° 14-23.888, Bull. 2017, V, n° 4), qui juge que, selon l'article L. 3326-1 du code du travail, d'ordre public absolu, le montant du bénéfice net et celui des capitaux propres de l'entreprise sont établis par une attestation de l'inspecteur des impôts ou du commissaire aux comptes et ne peuvent être remis en cause à l'occasion des litiges relatifs à la participation aux résultats de l'entreprise, ce dont il résulte que le montant du bénéfice net qui a été certifié par une attestation du commissaire aux comptes de la société, dont les syndicats ne contestent pas la sincérité, ne peut être remis en cause dans un litige relatif à la participation, quand bien même l'action des syndicats est fondée sur la fraude ou l'abus de droit invoqués à l'encontre des actes de gestion de la société (Soc., 28 février 2018, pourvoi n° 16-50.015, Bull. 2018, V, n° 36 ; Soc., 6 juin 2018, pourvoi n° 16-24.566, 16-25.749), qui sert de fondement à la décision contestée, est applicable au litige. 5. Elle n'a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel. 6. La question posée présente un caractère sérieux. 7. En effet, dès lors que, selon la jurisprudence du Conseil d'Etat (CE, 5 décembre 1984, n° 36337, publié au recueil Lebon) et du Tribunal des conflits (TC, 11 décembre 2017, pourvoi n° 17-04.104, Bull. 2017, TC n° 11), l'attestation délivrée en application de l'article L. 442-13, alinéa 1er, devenu L. 3326-1, alinéa 1er, du code du travail a pour seul objet de garantir la concordance entre le montant du bénéfice net et des capitaux propres déclarés à l'administration et celui utilisé par l'entreprise pour le calcul de la réserve spéciale de participation des salariés aux résultats de l'entreprise, en sorte que l'inspecteur des impôts ou le commissaire aux comptes qui établit cette attestation n'exerce pas, dans le cadre de cette mission, un pouvoir de contrôle de la situation de l'entreprise, l'article L. 3326-1 du code du travail, tel qu'interprété par la Cour de cassation, en ce qu'il interdit toute remise en cause, dans un litige relatif à la participation, des montants établis par ladite attestation, dont la sincérité n'est pas contestée, quand bien même sont invoqués la fraude ou l'abus de droit à l'encontre des actes de gestion de l'entreprise, pourrait être considéré comme portant une atteinte substantielle au droit à un recours juridictionnel effectif. 8. En conséquence, il y a lieu de la renvoyer au Conseil constitutionnel. PAR CES MOTIFS, la Cour : RENVOIE au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité. Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq octobre deux mille vingt-trois. | QUESTION PRIORITAIRE DE CONSTITUTIONNALITE - Travail réglementation, rémunération - Salaire - Participation aux résultats de l'entreprise - Réserve spéciale de participation - Montant - Calcul - Base de calcul - Bénéfice net et capitaux propres - Evaluation - Attestation de l'inspecteur des impôts ou du commissaire aux comptes - Contestation - Participation à la détermination collective des conditions de travail - Droit au recours juridictionnel effectif - Article L. 3326-1 du code du travail - Caractère sérieux - Renvoi au Conseil constitutionnel | ||||||||||
JURITEXT000048389676 | JURI | texte/juri/judi/JURI/TEXT/00/00/48/38/96/JURITEXT000048389676.xml | ARRET | Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 8 novembre 2023, 21-25.654, Publié au bulletin | 2023-11-08 00:00:00 | Cour de cassation | 52302009 | Rejet | 21-25654 | oui | CHAMBRE_SOCIALE | 2021-10-20 00:00:00 | Cour d'appel de Paris | Mme Mariette (conseiller doyen faisant fonction de président) | SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, SCP Célice, Texidor, Périer | ECLI:FR:CCASS:2023:SO02009 | LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant : SOC. ZB1 COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 8 novembre 2023 Rejet Mme MARIETTE, conseiller doyen faisant fonction de président Arrêt n° 2009 F-B Pourvoi n° U 21-25.654 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 8 NOVEMBRE 2023 Mme [E] [N], domiciliée [Adresse 1], a formé le pourvoi n° U 21-25.654 contre l'arrêt rendu le 20 octobre 2021 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 9), dans le litige l'opposant à la Régie autonome des transports parisiens (RATP), établissement à caractère industriel et commercial, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Carillon, conseiller référendaire, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de Mme [N], de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la Régie autonome des transports parisiens, après débats en l'audience publique du 3 octobre 2023 où étaient présents Mme Mariette, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Carillon, conseiller référendaire rapporteur, M. Pietton, conseiller, et Mme Dumont, greffier de chambre, la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 20 octobre 2021), Mme [N] a été engagée en qualité de machiniste receveur le 7 avril 2008 par l'établissement public industriel et commercial Régie autonome des transports parisiens (la RATP), la relation contractuelle de travail étant régie par le statut du personnel. 2. Après avoir été convoquée, le 23 novembre 2017, à un entretien préalable à une mesure disciplinaire "pouvant aller jusqu'à la révocation", qui s'était tenu le 6 décembre 2017, elle s'est vue notifier le 28 décembre 2017 une mise en disponibilité d'office d'un jour avec sursis. 3. Elle a saisi la juridiction prud'homale afin d'obtenir l'annulation de la sanction et la condamnation de la RATP au paiement d'une indemnité pour exécution déloyale du contrat de travail. Examen du moyen Sur le moyen, pris en ses deuxième à sixième branches 4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne son manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Sur le moyen, pris en sa première branche Enoncé du moyen 5. La salariée fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande en dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail par l'employeur et de sa demande d'annulation de la sanction du 28 décembre 2017, alors « que le juge doit apprécier la régularité de la procédure disciplinaire suivie par l'employeur au regard de la sanction envisagée et non au regard de celle finalement prononcée ; qu'en l'espèce, la salariée avait été convoquée par lettre du 23 novembre 2017 à un entretien préalable fixé au 6 décembre 2017 évoquant une sanction pouvant aller jusqu'à la révocation, dont il n'était pas contesté qu'elle nécessitait la saisine du conseil de discipline, et qu'elle s'était finalement vue notifier une mise en disponibilité d'office d'un jour avec sursis, ne nécessitant pas une telle saisine ; qu'en appréciant la régularité de la procédure disciplinaire suivie par l'employeur, qui n'avait pas saisi le conseil de discipline, au regard de la sanction finalement prononcée, la cour d'appel a violé les articles L. 1332-1 et L. 1332-2 du code du travail, ensemble les articles 149 à 152 du statut du personnel de la RATP. » Réponse de la Cour 6. Selon l'article 150 du statut du personnel de la RATP, les mesures disciplinaires du premier degré sont prononcées, sans consultation du conseil de discipline, par un responsable hiérarchique de l'agent d'un niveau au moins égal à la maîtrise pour l'observation, les cadres pour le rappel à l'ordre et l'avertissement, les chefs de division pour la mise en disponibilité d'office avec sursis jusqu'à un jour, le personnel de direction pour la mise en disponibilité d'office jusqu'à cinq jours et pour le déplacement d'office. 7. Aux termes de l'article 152 du même statut, les mesures disciplinaires du deuxième degré sont prononcées, après avis du conseil de discipline, par le directeur général. 8. Il en résulte que l'obligation de saisir le conseil de discipline dépend de la sanction "prononcée" et non de la sanction "envisagée" par l'employeur. 9. Ayant constaté que l'employeur avait prononcé à l'encontre de la salariée, après l'entretien préalable, une sanction disciplinaire qui relevait du premier degré, la cour d'appel en a exactement déduit que l'employeur n'avait pas à saisir le conseil de discipline. 10. Le moyen n'est donc pas fondé. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne Mme [N] aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du huit novembre deux mille vingt-trois. | CONTRAT DE TRAVAIL, EXECUTION | Selon l'article 150 du statut du personnel de la RATP, les mesures disciplinaires du premier degré sont prononcées sans consultation du conseil de discipline , par un supérieur hiérarchique de l'agent et, selon l'article 152 du même statut, les mesures disciplinaires du deuxième degré sont prononcées, après avis du conseil de discipline, par le directeur général. Il en résulte que l'obligation de saisir le conseil de discipline dépend de la sanction "prononcée" et non de la sanction "envisagée" par l'employeur. Doit en conséquence être approuvé l'arrêt qui, ayant constaté que l'employeur avait prononcé à l'encontre de la salariée, après l'entretien préalable, une sanction disciplinaire qui relevait du premier degré, en déduit que l'employeur n'avait pas à saisir le conseil de discipline |
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JURITEXT000048389678 | JURI | texte/juri/judi/JURI/TEXT/00/00/48/38/96/JURITEXT000048389678.xml | ARRET | Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 8 novembre 2023, 22-18.784, Publié au bulletin | 2023-11-08 00:00:00 | Cour de cassation | 52302020 | Cassation | 22-18784 | oui | CHAMBRE_SOCIALE | 2022-05-11 00:00:00 | Cour d'appel de Bordeaux | Mme Mariette (conseiller doyen faisant fonction de président) | SCP Zribi et Texier, SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret | ECLI:FR:CCASS:2023:SO02020 | LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant : SOC. CH9 COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 8 novembre 2023 Cassation Mme MARIETTE, conseiller doyen faisant fonction de président Arrêt n° 2020 F-B Pourvoi n° X 22-18.784 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 8 NOVEMBRE 2023 M. [P] [E], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° X 22-18.784 contre l'arrêt rendu le 11 mai 2022 par la cour d'appel de Bordeaux (chambre sociale, section A), dans le litige l'opposant à la société Brel distribution, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation. Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Maitral, conseiller référendaire, les observations de la SCP Zribi et Texier, avocat de M. [E], de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société Brel distribution, après débats en l'audience publique du 3 octobre 2023 où étaient présents Mme Mariette, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Maitral, conseiller référendaire rapporteur, M. Barincou, conseiller, et Mme Aubac, greffier de chambre, la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 11 mai 2022) et les productions, M. [E] a été engagé en qualité de responsable de magasin le 1er avril 1991 par la société Brel. Son contrat de travail a été transféré le 16 novembre 2013 à la société Brel distribution. Il exerçait en dernier lieu les fonctions de magasinier vendeur. 2. Licencié pour motif économique le 29 janvier 2018, le salarié a saisi la juridiction prud'homale en contestation de son licenciement. Examen des moyens Sur le premier moyen, pris en sa quatrième branche Enoncé du moyen 3. Le salarié fait grief à l'arrêt de dire que son licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse et de le débouter de ses demandes indemnitaires, alors « que le périmètre à prendre en considération pour l'exécution de l'obligation de reclassement se comprend de l'ensemble des entreprises du groupe dont les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation leur permettent d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel, peu important qu'elles appartiennent ou non à un même secteur d'activité ; qu'en jugeant que dès lors qu'il avait été retenu, dans le cadre de la recherche portant sur la réalité des difficultés économiques invoquées par l'employeur, que les différentes sociétés auprès desquelles la société Brel distribution avait effectué une recherche de reclassement n'avaient pas le même secteur d'activité que cette dernière, la permutabilité ne pouvait être retenue, sans rechercher si les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation de ces différentes sociétés ne leur permettaient pas d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel, [la cour d'appel] a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1233-4 du code du travail. » Réponse de la Cour Vu l'article L. 1233-4, alinéa 1, du code du travail, dans sa rédaction modifiée par l'ordonnance n° 2017-1718 du 20 décembre 2017 : 4. Aux termes de ce texte, le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré sur les emplois disponibles, situés sur le territoire national dans l'entreprise ou les autres entreprises du groupe dont l'entreprise fait partie et dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel. 5. Le périmètre à prendre en considération pour l'exécution de l'obligation de reclassement se comprend de l'ensemble des entreprises du groupe dont les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation leur permettent d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel, peu important qu'elles appartiennent ou non à un même secteur d'activité. 6. Pour dire que le licenciement du salarié repose sur une cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient que les sociétés Etablissement Brel, Sols et peintures brivistes et Plastic décors, qui ont pour objet la réalisation de travaux, n'ont pas le même secteur d'activité que la société Brel distribution, qui a pour objet le négoce. Il en déduit que la permutabilité entre les membres du personnel de ces sociétés n'est pas établie, que le périmètre de la recherche d'un poste de reclassement ne comprenait donc pas ces sociétés. 7. En se déterminant ainsi, par des motifs insuffisants à caractériser que les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation des différents entreprises du groupe auquel la société appartient ne leur permettaient pas d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 11 mai 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ; Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Agen ; Condamne la société Brel distribution aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Brel distribution et la condamne à payer à M. [E] la somme de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du huit novembre deux mille vingt-trois. | CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE | Aux termes de l'article L. 1233-4, alinéa 1, du code du travail, dans sa rédaction modifiée par l'ordonnance n° 2017-1718 du 20 décembre 2017, le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré sur les emplois disponibles, situés sur le territoire national dans l'entreprise ou les autres entreprises du groupe dont l'entreprise fait partie et dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel. Le périmètre à prendre en considération pour l'exécution de l'obligation de reclassement se comprend de l'ensemble des entreprises du groupe dont les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation leur permettent d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel, peu important qu'elles appartiennent ou non à un même secteur d'activité |
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JURITEXT000048389680 | JURI | texte/juri/judi/JURI/TEXT/00/00/48/38/96/JURITEXT000048389680.xml | ARRET | Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 8 novembre 2023, 22-22.524, Publié au bulletin | 2023-11-08 00:00:00 | Cour de cassation | 52302025 | Rejet | 22-22524 | oui | CHAMBRE_SOCIALE | 2022-10-18 00:00:00 | Tribunal judiciaire de Cherbourg | M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président) | SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol | ECLI:FR:CCASS:2023:SO02025 | LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant : SOC. / ELECT ZB1 COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 8 novembre 2023 Rejet M. HUGLO, conseiller doyen faisant fonction de président Arrêt n° 2025 F-B Pourvoi n° N 22-22.524 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 8 NOVEMBRE 2023 La société Orano recyclage, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], ayant un établissement situé site de [Adresse 12], a formé le pourvoi n° N 22-22.524 contre le jugement rendu le 18 octobre 2022 par le tribunal judiciaire de Cherbourg (contentieux des élections professionnelles), dans le litige l'opposant : 1°/ à la direction régionale de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités (DREETS) de Normandie, dont le siège est [Adresse 10], ayant un établissement dont le siège est [Adresse 9], 2°/ au syndicat national du nucléaire de la métallurgie CFDT, Orano recyclage [Localité 11], dont le siège est [Adresse 3], 3°/ au syndicat national du nucléaire et des activités connexes CFE-CGC, dont le siège est [Adresse 4], 4°/ au syndicat CGT Orano recyclage [Localité 11], dont le siège est [Adresse 5], 5°/ au syndicat Force Ouvrière Orano recyclage [Localité 11], dont le siège est [Adresse 6], 6°/ au syndicat SUD Orano recyclage [Localité 11], dont le siège est [Adresse 7], 7°/ au syndicat UNSA/SPAEN Orano recyclage [Localité 11], dont le siège est [Adresse 8], 8°/ au syndicat CFTC Union départementale de La Manche, dont le siège est [Adresse 2], défendeurs à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Sommé, conseiller, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société Orano recyclage, après débats en l'audience publique du 4 octobre 2023 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Sommé, conseiller rapporteur, M. Rinuy, conseiller, et Mme Jouanneau, greffier de chambre, la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon le jugement attaqué (tribunal judiciaire de Cherbourg, 18 octobre 2022), les 16 et 18 mai 2022, la société Orano recyclage (la société) a engagé, pour son établissement de La Hague, un processus de négociation préélectorale en vue des élections des membres du comité social et économique, devant se dérouler les 4 et 19 octobre 2022. 2. Parmi les sept organisations syndicales invitées à la négociation, seules deux d'entre elles ont signé, le 12 juillet 2022, le protocole d'accord préélectoral. 3. Le 13 juillet 2022, la société a saisi le directeur régional de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités (DREETS) de Normandie afin qu'il fixe la répartition du personnel et des sièges entre les collèges électoraux pour les élections du comité social et économique de l'établissement de [Localité 11]. 4. Cette demande a été rejetée par décision du 15 septembre 2022, aux motifs essentiellement de l'absence de la part de l'employeur d'une tentative loyale de négociation d'un protocole d'accord préélectoral. 5. Par requête déposée le 3 octobre 2022, la société a saisi le tribunal judiciaire aux fins d'annuler la décision de l'autorité administrative du 15 septembre 2022 et de fixer la répartition des salariés et des sièges entre les collèges électoraux. Examen du moyen Enoncé du moyen 6. La société fait grief au jugement de constater la prorogation des mandats des élus du comité social et économique de l'établissement de [Localité 11] arrivant à expiration le 19 octobre 2022, jusqu'à la proclamation des résultats du scrutin, alors : « 1°/ que le tribunal judiciaire statuant sur le recours contre la décision de l'autorité administrative saisie en vue de la répartition des sièges et du personnel entre les collèges électoraux n'a pas le pouvoir de statuer sur la prorogation des mandats en cours ; qu'en l'espèce, le tribunal judiciaire, saisi par l'employeur d'un recours contre la décision de la DREETS ayant refusé de statuer sur la répartition du personnel et des sièges entre les collèges électoraux, a "constaté" la prorogation des mandats des élus du comité social et économique de l'établissement de La Hague de la société Orano recyclage arrivant à expiration le 19 octobre 2022, jusqu'à la proclamation des résultats du scrutin ; qu'en statuant de la sorte, il a violé l'article L. 2314-13 du code du travail ; 2°/ que le mécanisme de prorogation des mandats prévu par l'article L. 2314-13, alinéa 4, du code du travail n'est pas applicable lorsque l'autorité administrative a refusé de trancher la question de la répartition du personnel et des sièges entre les collèges électoraux ; qu'en pareil cas, la prorogation des mandats ne peut intervenir qu'en présence d'un accord unanime ; qu'en l'espèce, il résulte du jugement que la DREETS a, par décision du 15 septembre 2022, refusé de statuer sur la répartition du personnel et des sièges entre les collèges électoraux ; qu'en jugeant cependant que compte tenu des dispositions non sujettes à interprétation de l'article L. 2314-13 du code du travail, la saisine de la DREETS avait entraîné la prorogation des mandats des élus en cours jusqu'à la proclamation des résultats du scrutin malgré l'absence d'accord de prorogation unanimement ratifié, le tribunal judiciaire a violé le texte susvisé ; 3°/ que le tribunal judiciaire ne peut constater la prorogation des mandats en cours en l'absence de convocation à l'audience des élus concernés ; qu'en constatant la prorogation des mandats des élus du comité social et économique de l'établissement de La Hague de la société Orano recyclage arrivant à expiration le 19 octobre 2022, sans avoir convoqué ces élus, le tribunal judiciaire a violé l'article 14 du code de procédure civile et l'article R. 2314-25 du code du travail. » Réponse de la Cour 7. Aux termes de l'article L. 2314-13 du code du travail, la répartition des sièges entre les différentes catégories de personnel et la répartition du personnel dans les collèges électoraux font l'objet d'un accord entre l'employeur et les organisations syndicales conclu selon les conditions de l'article L. 2314-6. Cet accord mentionne la proportion de femmes et d'hommes composant chaque collège électoral. Lorsque au moins une organisation syndicale a répondu à l'invitation à négocier de l'employeur et que l'accord mentionné au premier alinéa du présent article ne peut être obtenu, l'autorité administrative décide de cette répartition entre les collèges électoraux. Pour ce faire, elle se conforme soit aux modalités de répartition prévues par l'accord mentionné à l'article L. 2314-12, soit, à défaut d'accord, à celles prévues à l'article L. 2314-11. La saisine de l'autorité administrative suspend le processus électoral jusqu'à la décision administrative et entraîne la prorogation des mandats des élus en cours jusqu'à la proclamation des résultats du scrutin. La décision de l'autorité administrative peut faire l'objet d'un recours devant le juge judiciaire, à l'exclusion de tout autre recours administratif ou contentieux. 8. Il en résulte que lorsque l'autorité administrative a été saisie pour fixer la répartition du personnel et des sièges dans les collèges électoraux, les mandats des élus en cours sont prorogés de plein droit jusqu'à la proclamation des résultats du scrutin. 9. En l'espèce, le tribunal a relevé que les mandats des élus, venant à expiration le 19 octobre 2022, étaient en cours lors de la saisine par l'employeur, le 13 juillet 2022, de l'autorité administrative aux fins de déterminer la répartition du personnel et des sièges dans les collèges électoraux en vue des élections des membres du comité social et économique de l'établissement de La Hague. 10. C'est par conséquent sans encourir les critiques du moyen qu'il a constaté que la saisine de l'autorité administrative avait entraîné la prorogation des mandats des élus en cours jusqu'à la proclamation des résultats. 11. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du huit novembre deux mille vingt-trois. | REPRESENTATION DES SALARIES | Il résulte de l'article L. 2314-13 du code du travail que lorsque l'autorité administrative a été saisie pour fixer la répartition du personnel et des sièges dans les collèges électoraux, les mandats des élus en cours sont prorogés de plein droit jusqu'à la proclamation des résultats du scrutin |
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JURITEXT000048389682 | JURI | texte/juri/judi/JURI/TEXT/00/00/48/38/96/JURITEXT000048389682.xml | ARRET | Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 8 novembre 2023, 22-17.919, Publié au bulletin | 2023-11-08 00:00:00 | Cour de cassation | 52302036 | Rejet | 22-17919 | oui | CHAMBRE_SOCIALE | 2022-04-20 00:00:00 | Cour d'appel de Versailles | M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président) | SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet | ECLI:FR:CCASS:2023:SO02036 | LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant : SOC. ZB1 COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 8 novembre 2023 Rejet M. HUGLO, conseiller doyen faisant fonction de président Arrêt n° 2036 F-B Pourvoi n° H 22-17.919 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 8 NOVEMBRE 2023 La Société nationale industrielle et minière (SNIM), dont le siège est [Localité 1], (Mauritanie), ayant un bureau de représentation en France situé [Adresse 4], a formé le pourvoi n° H 22-17.919 contre l'arrêt rendu le 20 avril 2022 par la cour d'appel de Versailles (19e chambre), dans le litige l'opposant : 1°/ à Mme [G] [S], domiciliée [Adresse 2], 2°/ à l'union locale des syndicats CGT du 2e arrondissement de [Localité 5], dont le siège est [Adresse 3], défenderesses à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Ollivier, conseiller référendaire, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la Société nationale industrielle et minière, de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de Mme [S] et l'union locale des syndicats CGT du 2e arrondissement de [Localité 5], après débats en l'audience publique du 4 octobre 2023 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Ollivier, conseiller référendaire rapporteur, Mme Ott, conseiller, Mme Laulom, avocat général, et Mme Piquot, greffier de chambre, la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 20 avril 2022), statuant sur renvoi après cassation (Soc., 17 mars 2021, pourvoi n° 19-19.446), Mme [S] a été engagée en qualité de secrétaire de direction par la Société nationale industrielle et minière (la SNIM) le 13 novembre 1995. Elle a exercé des mandats de représentant du personnel et de représentant syndical à compter de l'année 2000. Elle est conseiller prud'homme depuis l'année 2002 et son mandat a été renouvelé en 2018. 2. Le 3 septembre 2010, invoquant une inégalité de traitement et une discrimination syndicale, la salariée et l'union locale des syndicats CGT du 2e arrondissement de [Localité 5] (le syndicat) ont saisi la juridiction prud'homale aux fins de condamnation de l'employeur au paiement de diverses sommes. 3. La salariée a été licenciée pour motif économique le 22 septembre 2014, après autorisation ministérielle du 20 août 2014, annulée par jugement du tribunal administratif de Paris du 21 octobre 2015, devenu définitif. 4. Par arrêt du 9 mai 2017, la cour d'appel de Versailles, statuant en référé, a ordonné la réintégration de la salariée. 5. Celle-ci, invoquant son absence de réintégration, a complété ses demandes en sollicitant la résiliation de son contrat de travail aux torts de l'employeur. 6. Par arrêt du 17 mai 2019, la cour d'appel de Versailles a notamment prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail et a dit que cette résiliation produisait les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, a condamné l'employeur à payer à la salariée une certaine somme à titre de dommages-intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et a débouté la salariée de sa demande présentée au titre de la violation du statut protecteur. 7. Par arrêt du 17 mars 2021, la chambre sociale de la Cour de cassation a cassé et annulé, mais seulement en ce qu'il dit que la résiliation du contrat de travail produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et déboute la salariée de sa demande au titre de la violation du statut protecteur, l'arrêt rendu le 17 mai 2019. Examen des moyens Sur le premier moyen, pris en sa deuxième branche 8. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui qui est irrecevable. Sur le premier moyen, pris en ses première et troisième branches Enoncé du moyen 9. L'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à payer à la salariée la somme de 234 831 euros à titre d'indemnité pour violation du statut protecteur, alors : « 1°/ que le salarié protégé dont le licenciement est nul en raison de l'annulation de l'autorisation administrative doit être réintégré dans son emploi ou un emploi équivalent ; que faute pour l'employeur de satisfaire à cette obligation, sans justifier d'une impossibilité de réintégration, la résiliation judiciaire prononcée aux torts de l'employeur pour ce motif produit les effets d'un licenciement nul pour violation du statut protecteur ; que cependant le salarié ne peut pas prétendre, dans cette hypothèse particulière, à une indemnité pour violation du statut protecteur égale à la rémunération qu'il aurait perçue depuis la date de son éviction jusqu'à la fin de la période de protection, dans la limite de trente mois, mais seulement à une indemnité qui est fonction du préjudice subi ; qu'en jugeant cependant que "le montant de la rémunération qu'elle aurait dû percevoir entre son éviction, soit la date de résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur, le 17 mai 2019, et l'expiration de la période de protection dans la limite de la durée de protection, accordée aux représentants du personnel, soit une durée de vingt-quatre mois augmentée de six mois", la cour d'appel a violé L. 2411-22 du code du travail et l'article 1184, devenu 1227, du code civil ; 3°/ que le salarié protégé dont le licenciement est nul en raison de l'annulation de l'autorisation administrative doit être réintégré dans son emploi ou dans un emploi équivalent ; qu'un salarié protégé, dont la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail du fait de l'inexécution par l'employeur de son obligation de procéder à la réintégration dans son poste ou un poste équivalent est accueillie, a droit, au titre de méconnaissance de son statut protecteur, au paiement d'une indemnité égale à la rémunération qu'il aurait perçue depuis la date de son éviction jusqu'à la fin de la période de protection, dans la limite de trente mois ; que la date de son éviction est celle du licenciement annulé, le salarié n'ayant pas été réintégré à sa suite ; qu'en l'espèce, le licenciement de Mme [S] ayant été prononcé le 22 septembre 2014, l'indemnité pour violation du statut protecteur ne pouvait correspondre qu'aux salaires dus entre le 22 septembre 2014 et le 22 mars 2016 ; que cependant la cour d'appel a accordé à la salariée au titre de la violation du statut protecteur "le montant de la rémunération qu'elle aurait dû percevoir entre son éviction, soit la date de résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur, le 17 mai 2019, et l'expiration de la période de protection dans la limite de la durée de protection, accordée aux représentants du personnel, soit une durée de vingt-quatre mois augmentée de six mois" sur la base d'un salaire de référence fixé par l'arrêt du 16 ou 17 mai 2019 en incluant les augmentations générales de salaire appliquées depuis 2015 ; qu'en accordant une telle indemnité, en sus du rappel de salaire octroyé par le même arrêt du 16 ou 17 mai 2019 pour la période courant du 27 décembre 2014 au 31 décembre 2018, la cour d'appel a violé L. 2411-22 du code du travail et l'article 1184, devenu 1227, du code civil. » Réponse de la Cour 10. Le salarié protégé dont le licenciement est nul en raison de l'annulation de l'autorisation administrative doit être réintégré dans son emploi ou un emploi équivalent. Il en résulte que lorsque l'employeur n'a pas satisfait à cette obligation, sans justifier d'une impossibilité de réintégration, la résiliation judiciaire prononcée aux torts de l'employeur pour ce motif produit les effets d'un licenciement nul pour violation du statut protecteur dès lors que le salarié est protégé au jour de sa demande en résiliation et que le salarié peut prétendre à une indemnité à ce titre égale à la rémunération qu'il aurait perçue depuis la date de prise d'effet de la résiliation judiciaire jusqu'à la fin de la période de protection en cours au jour de sa demande en résiliation, dans la limite de trente mois. 11. Ayant constaté qu'à la date de la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail, formée le 9 janvier 2019, la salariée bénéficiait du statut de salariée protégée pour avoir été réélue en qualité de conseiller prud'homme en 2018, la cour d'appel en a exactement déduit que la salariée était en droit d'obtenir, au titre de la méconnaissance du statut protecteur, le montant de la rémunération qu'elle aurait dû percevoir entre son éviction, fixée à la date de résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur le 17 mai 2019, et l'expiration de la période de protection dans la limite de la durée de protection, soit une durée de vingt-quatre mois augmentée de six mois. 12. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé. Sur le second moyen Enoncé du moyen 13. L'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à payer à la salariée la somme de 46 966,38 euros à titre d'indemnité pour licenciement nul, alors : « 1°/ que la résiliation judiciaire ne peut pas produire à la fois les effets d'un licenciement nul et sans cause réelle et sérieuse ; qu'en condamnant l'employeur à payer la somme de 46 966,38 euros à titre d'indemnité pour licenciement nul en plus de la somme de 115 000 euros déjà allouée par arrêt du 16 ou 17 mai 2019 à titre de dommages-intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a violé le principe susvisé ; 2°/ que le principe de la réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime interdit de réparer deux fois, même partiellement, le même préjudice ; qu'en condamnant l'employeur à payer la somme de 46 966,38 euros à titre d'indemnité pour licenciement nul en plus de la somme de 115 000 euros déjà allouée par arrêt du 16 ou 17 mai 2019 à titre de dommages-intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, la cour d'appel, qui a débouté l'employeur de sa demande de compensation, et ainsi accordé à la salariée deux indemnisations ayant le même objet, a violé le principe de la réparation intégrale. » Réponse de la Cour 14. Par arrêt du 17 mars 2021, la Cour de cassation a jugé que le chef de dispositif de l'arrêt de la cour d'appel du 17 mai 2019 condamnant l'employeur à payer à la salariée une certaine somme à titre de dommages-intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse était relatif au licenciement prononcé le 22 septembre 2014 après autorisation ultérieurement annulée, en sorte que c'est à bon droit que la cour d'appel, par arrêt du 20 avril 2022, a condamné l'employeur à payer à la salariée une certaine somme à titre d'indemnité pour licenciement nul réparant le préjudice causé par la résiliation du contrat de travail. 15. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne la Société nationale industrielle et minière aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la Société nationale industrielle et minière et la condamne à payer à Mme [S] et à l'union locale des syndicats CGT du 2e arrondissement de [Localité 5] la somme globale de 3 000 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du huit novembre deux mille vingt-trois. | CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE | Le salarié protégé dont le licenciement est nul en raison de l'annulation de l'autorisation administrative doit être réintégré dans son emploi ou un emploi équivalent. Il en résulte que lorsque l'employeur n'a pas satisfait à cette obligation, sans justifier d'une impossibilité de réintégration, la résiliation judiciaire prononcée aux torts de l'employeur pour ce motif produit les effets d'un licenciement nul pour violation du statut protecteur dès lors que le salarié est protégé au jour de sa demande en résiliation et que le salarié peut prétendre à une indemnité à ce titre égale à la rémunération qu'il aurait perçue depuis la date de prise d'effet de la résiliation judiciaire jusqu'à la fin de la période de protection en cours au jour de sa demande en résiliation, dans la limite de trente mois |